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2. LA SOCIALISATION POLITIQUE

2.3 La socialisation politique par différents agents

2.3.2 L’école

L’école est un agent qui intervient sur la socialisation politique des élèves (Dostie-Goulet, 2009; Percheron, 1993; Réseau Éducation-Médias, 2011). Toutefois, le rapport que l’école entretient avec la politique revêt un caractère sensible, autant pour les parents que pour les enseignantes ou enseignants. Dans les sociétés occidentales, plusieurs ne sont pas à l’aise avec l’expression partisane à l’école (Percheron, 1993). Le partage de ce qui relève de l’école et de la famille quant au domaine politique semble être un des éléments à la source de cet inconfort (Percheron, 1993). Ainsi, les contenus abordés à l’école avec les élèves se limitent souvent aux règles et aux mécanismes de l’État et des institutions démocratiques (Ibid.). Malgré les visées de neutralité de la part des enseignantes et enseignants, Percheron et al. (1978) soutiennent que « même quand cet enseignement se veut objectif, il n’est jamais neutre » (p.41).

À l’école, la socialisation politique est principalement véhiculée par l’entremise de l’éducation à la démocratie. Bîrzéa (2000) définit l’éducation à la démocratie comme : « l'ensemble des pratiques et des activités destinées à rendre les jeunes et les adultes aptes à participer activement à la vie démocratique en assumant et en exerçant leurs droits et responsabilités au sein de la société » (p.36). L’éducation à la démocratie constitue une finalité éducative qui s’échelonne tout au long de la vie (Ibid., Conseil de l’Europe, 2010), elle ne relève donc pas uniquement de l’école. Le Conseil de l’Europe a particulièrement développé le concept d’éducation à la démocratie, notamment en élaborant la Charte sur l’éducation à la citoyenneté démocratique et l’éducation aux droits de l’homme (Conseil de l’Europe, 2010). Cette charte stipule que l’éducation à la démocratie vise non seulement l’acquisition de

connaissances en lien avec la démocratie, mais aussi le développement de la capacité d’agir des apprenants (Ibid.). Le Conseil de l’Europe (2010) relève également l’importance d’intégrer l’éducation à la démocratie dans les programmes d’étude, dès le préscolaire.

L’école peut ainsi agir au niveau de trois sources d’intervention pour éduquer les élèves à la démocratie, soit le contenu de l’enseignement, l’initiation à des formes de participation et l’apprentissage de relations sociales (Percheron, 1993). En plus des savoirs qui y sont enseignés, l’école offre plusieurs possibilités de vivre des expériences de participation des élèves à la vie scolaire, notamment par la participation à diverses activités complémentaires ou par des activités réalisées en classes. L’école québécoise intègre dans son programme de formation à la fois des notions de démocratie, principalement par l’entremise du domaine disciplinaire de l’univers social, et des expériences concrètes de la démocratie, par le domaine général de formation Vivre-ensemble et citoyenneté. Le Conseil de l’Europe précise que l’éducation à la démocratie vise à promouvoir « l’apprentissage d’un comportement démocratique à travers diverses expériences et pratiques sociales » (Bîrzéa, 2000, p.36). L’éducation à la démocratie est parfois réalisée de façon plus explicite que d’autres, principalement lorsque des notions théoriques sont enseignées. Perrenoud (1993) énonce alors qu’il s’agit du curriculum formel. Toutefois, les apprentissages implicites ne sont pas à négliger, car l’éducation à la démocratie, rappelons-le, se réalise aussi par le curriculum caché (Yüksel, 2005 ; Schimmel, 2003).

Dostie-Goulet (2009) soutient que les notions abordées dans les cours d’histoire permettent de développer l’intérêt pour la politique. Cependant, bien que les cours puissent améliorer les connaissances politiques des élèves, il n’est pas certain qu’elles seront retenues jusqu’à l’âge adulte et qu’elles auront un impact sur les compétences civiques (Milner, 2004). Pour leur part, les expériences vécues à l’école quant à l’exercice du droit de vote et au bénévolat pourraient avoir une influence sur le comportement politique à l’âge adulte (Dostie-Goulet, 2009). Ainsi,

des activités offrant aux élèves « un rôle plus actif dans leur apprentissage, ainsi que des chances d’exercer leur point de vue critique et leurs compétences pour s’engager directement » cadrent davantage avec la vision qu’ont les jeunes de la citoyenneté (Réseau Éducation-Médias, 2011, p.18).

L’éducation à la démocratie s’inscrit ainsi dans le processus plus vaste de socialisation politique. Il faut retenir que l’école est un lieu où les élèves pourront être initiés à la démocratie, que ce soit par l’entremise des savoirs transmis que des expériences vécues.

À l’école, les élèves interagissent également avec plusieurs personnes, dont les enseignantes et les enseignants. Ceux-ci représentent des agents de la socialisation politique des élèves. En partageant leurs expériences et leur culture, les enseignantes et enseignants détiennent une influence leur permettant d’agir comme agent socialisateur auprès des jeunes (Darmon, 2007). Cependant, les enseignantes et enseignants opèrent dans l’école et celle-ci est contrainte à des lois sociales limitant leurs actions (Ibid.).

Une neutralité politique est généralement attendue de leur part et ils ont bien intériorisé cet aspect (Percheron et al., 1978, Percheron, 1993). Par contre, même si les enseignantes et enseignants exprimaient leurs idéologies, elles auraient un impact sur leurs élèves seulement si elles allaient dans le même sens que celles des parents (Darmon, 2007). Par ailleurs, les enseignantes et enseignants ne peuvent pas créer chez les enfants des dispositions qu’ils n’ont pas eux-mêmes et qui n’ont pas été acquises au cours de leur propre éducation (Ibid.).

Enfin, les enseignantes et enseignants ont une portée limitée sur les élèves puisqu’ils seront en contact avec eux seulement pour une courte durée. Il faut aussi noter que les enseignantes et enseignants ne détiennent pas un discours unique et, pour ajouter à cette complexité, les élèves fréquenteront de nombreux enseignantes et

enseignants qui présenteront des attitudes éducatives différentes les uns des autres (Ibid.). En ce qui concerne l’influence des enseignantes et enseignants pour accroître l’intérêt politique des jeunes, elle sera moindre que celle des parents et des amis (Dostie-Goulet, 2009). L’impact des parents est toujours plus fort que celui des enseignantes et enseignants sur les jeunes, ayant même le pouvoir de renforcer ou d’annuler l’influence des enseignantes et enseignants. Pour leur part, les enseignantes et enseignants n’ont pas cette possibilité (Ibid.).