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n connaît l’humour juif, l’humour anglais, voire la ravageuse comédie à l’italienne ; mais l’hu-mour français ? Est-ce réellement un trait natio-nal ? Certains en doutent. Les pochades d’un Louis de Funès laissent en général les étrangers imperméables. La satire, la caricature, le rire engagé, oui, bien sûr, sans hésiter, c’est français. Le mot qui blesse. Encore mieux. Typiquement franchouillard. Mais l’humour ? Le second degré, l’autodérision ? Le mot « humour » est-il même hexagonal ? Avant la révolution de 1789, il était quasiment inconnu dans le royaume des Bourbons. Les Fran-çais évoquent les mots « esprit », « farce », « bouffonnerie », parfois

« humeur ». Mais pas d’« humour ». C’est que cette forme d’esprit, reposant essentiellement sur l’autodérision, semble un trait plutôt anglais. Voltaire écrit que les Britanniques sont les seuls à avoir un mot pour décrire cet état d’esprit qui se joue des règles au point de rire de

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soi-même. Probablement la lettre du grand auteur de Candide a-t-elle inspiré cette scène célèbre du film Ridicule, de Patrice Leconte, où un courtisan relate son séjour outre-Manche et dit à propos des Anglais :

« Ils ont une forme de conversation appelée humour, qui fait beau-coup rire tout le monde.

– Humour… Est-ce comme l’esprit ? – Non, pas vraiment.

– Mais alors comment le traduisez-vous ?

– Eh bien, je ne peux pas. Nous n’avons pas de mot pour cela en France. »

Il faut attendre 1878 pour que l’Académie introduise l’adjec-tif « humoristique » dans la langue française et c’est un an plus tard qu’Edmond de Goncourt utilise le mot dans son roman Les Frères Zemganno. Et, en 1932, les académiciens finissent par consacrer

« humour » comme un nom commun.

A-t-il pour autant conquis les esprits ? À relire Milan Kundera, ce génie littéraire qui devrait en ce domaine être notre guide, notre pays a commencé à briller dans l’Europe littéraire avec le créateur de Panurge qui, après les satires médiévales, incarne au mieux l’esprit comique qui serait le propre de la modernité : « Pour Rabelais, la gaieté et le comique ne faisaient encore qu’un. Au XVIIIe siècle, l’humour de Sterne et de Diderot est un souvenir tendre et nostalgique de la gaieté rabelaisienne. (1) »

Que s’est-il passé entre la Renaissance et l’époque de Diderot ? On peut avancer une hypothèse. L’esprit

fran-çais a été profondément marqué par le ton fier et suffisant de la cour de Louis XIV, tout empreint de cette gloire, de cet honneur du Grand Siècle, de cette raillerie aussi. Le ton d’une des plus oppressantes cours d’Europe,

celle que le Roi-Soleil a constituée à Versailles pour venir à bout d’une noblesse frondeuse, n’autorise aucun aveu de faiblesse, aucune autodé-rision. Le ridicule tue. Tout le monde doit se montrer sous son meil-leur jour. Le premier qui fait preuve d’un peu de distance critique sur lui-même court au suicide social ; les autres courtisans sont déjà

Jacques de Saint Victor, historien du droit et des idées politiques, est professeur des universités (Paris-XIII Cnam). Derniers livres parus : Histoire de la république en France (avec Thomas Branthôme, Economica, 2018) et Casa Bianca (Équateurs, 2019).

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l’humour français à l’époque des nouveaux « agelastes »

suffisamment formés pour persifler sur son sort sans qu’il soit néces-saire d’aggraver son cas. La cour en France a donné le ton à tout un peuple. Le Français ne se démarque pas alors en Europe pour son humour. Le ton de Rabelais est perdu. La Révolution n’a pas amélioré les choses. La cour n’est plus mais le jacobin ne rit pas pour autant car, comme le sans-culotte, sa tâche est trop lourde. Celui qui se lève tous les matins en songeant à sauver la patrie et à créer un citoyen vertueux n’a guère de temps à consacrer à des amusements futiles. Si la République n’a pas besoin de savant, elle ne semble pas avoir non plus besoin d’humoriste.

C’était le cas en 1793. Cela semble à nouveau le cas en 2019.

La France a pourtant longtemps aimé à se penser comme une nation où l’humour dominait, ainsi que la gaieté, le pays de Figaro, se moquant des dogmes et des puissants. N’a-t-elle pas été la première monarchie d’Europe à avoir aboli en 1791 le délit de blasphème ? Le jésuite Joseph-Antoine Cerutti affirmait dans une Lettre sur les avan-tages et l’origine de la gaieté française (1761) que cette gaieté était le propre du génie français. En France, prétendait Beaumarchais, tout ne finit-il pas « par des chansons » ? On a vu en 1793-1794, sous la Ter-reur, qu’il en allait un peu différemment. On ne peut pas tout avoir.

Germaine de Staël, dans De la littérature (1800), nous rappelait que l’humour était le propre d’une société aristocratique. L’esprit répu-blicain impose plus de sérieux : « L’âge de la plaisanterie perpétuelle est passé ! Figaro deviendra grave. » Pas totalement, heureusement ! La République, en s’affirmant à partir de 1879, a su s’approprier un rire gaulois, celui des caricaturistes et des chansonniers, en sortant de

« l’ordre moral ». On ne peut quand même pas limiter l’esprit français à la fausseté curiale et à la parodie républicaine des vertus spartiates.

À l’origine, l’esprit français, c’était aussi l’esprit de Villon, de Rabelais et de La Bruyère ou de Molière, qui ne se limite pas aux fourberies de Scapin ni au fameux « rire hideux » de Voltaire dénoncé par Musset.

Les impertinences de Panurge et de Gavroche, puis, plus tard, le rire gras de L’Assiette au beurre et les calembours de Raymond Devos ou les traits géniaux de Pierre Desproges offrent une palette de situations difficiles à cerner.

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Henri Bergson, dans son célèbre essai sur le rire, a voulu en faire le propre d’une nation qui aime à persifler. Depuis, chacun s’était mis à chercher, comme le philosophe, « quelle est l’intention de la société quand elle rit ». Et de distinguer entre le rire des anges et celui du diable. Car l’humour ne serait jamais neutre, selon Bergson, « c’est une anesthésie momentanée du cœur, pendant laquelle l’émotion ou l’affection est mise de côté ; il s’adresse à l’intelligence pure », ce qu’affectionne particulièrement la nation de Descartes. Baudelaire n’hésitait pas à en faire même quelque chose flirtant avec le diable :

« Le rire est satanique ; il est donc profondément humain. » Kun-dera renchérit en rappelant que le comique est plus dérangeant que le tragique. Le second, en nous donnant une belle illustration de la grandeur humaine, nous offre une certaine consolation. « Le comique est plus cruel : il nous révèle brutalement l’insignifiance de tout. (2) » Peut-être est-ce justement ce que notre postmodernité de plus en plus vide de sens supporte le moins dans l’humour, une sorte de miroir oppressant de sa vanité ?

L’esprit de sérieux fait des pas de géant

Le nouveau ton dogmatique et « moraliste » d’une certaine élite

« progressiste », politique, universitaire et journalistique semble pas à pas se rapprocher du puritanisme venu d’Amérique, où l’humour n’a jamais été le trait le plus frappant de cette nation de « boutiquiers » (Stendhal). On commence en France à pourchasser tout « déra-page » au nom d’une lutte nouvelle contre tout ce qui « offense », contre tout ce qui « blesse ». Comme l’a décrété en 2002 le recteur de la Grande Mosquée de Paris, la liberté d’expression doit s’arrêter

« là où elle fait mal » (3)…

Si c’est le cas, alors oui, il faut se faire du souci pour la liberté de l’esprit et pour l’humour. L’esprit de sérieux fait des pas de géant et de terribles ravages. Quelques exemples récents ? Un rapport du Haut Conseil à l’égalité (HCE) entre les femmes et les hommes ren-dait le jeudi 17 janvier 2019 le « premier état des lieux du sexisme en

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France » (conformément à la loi relative à l’égalité et à la citoyenneté du 27 janvier 2017). Les rédacteurs de ce rapport avaient choisi de s’intéresser plus particulièrement à « deux manifestations du sexisme du quotidien » : les injures mais aussi l’humour, qui pourrait perpé-tuer des clichés sexistes. Les recommandations du HCE sont intéres-santes à noter : il conviendrait, selon le rapport, d’approfondir et de systématiser les études pour traquer dans les sketchs les marques de sexisme. Les chaînes de télévision devraient rendre compte de la pro-portion d’humoristes de chaque sexe. Il faudrait encourager au signa-lement de tout contenu « relevant de préjugés sexistes »… Tout est fait pour multiplier les initiatives de délation (la fameuse « dénonciation civique » du comité de Salut public et de sûreté générale de 1793) afin de préserver la susceptibilité de tel ou tel groupe social, de telle ou telle

« minorité ». L’humour est évidemment la principale victime de cette politique, a fortiori s’il cultive le graveleux. À l’occasion de la Coupe du monde féminine de football, en ce printemps 2019, un dessin de Charlie Hebdo représentait un sexe de femme avec un petit ballon en guise de clitoris. La légende affirmait, non sans une certaine grossiè-reté : « On va en bouffer pendant un mois. » Ce furent aussitôt une levée de boucliers de la part de tout un agrégat de bonnes consciences féministes dont une petite partie, en janvier 2015, soit à peine quatre ans plus tôt, manifestait dans la rue en criant à la face du monde : « Je suis Charlie », tandis qu’une autre partie renouait avec ces attaques antérieures à 2015 (4).

Aujourd’hui, c’est notre tolérance à l’égard du rire qui a petit à petit changé. Jadis, on prétendait qu’on pouvait rire de tout en France, cela dépendait seulement avec qui. Aujourd’hui, cette tolérance est passée.

Le « politiquement correct » a tellement gagné les esprits que certains finissent même, en dehors des milieux islamistes – où l’humour est le plus souvent regardé (c’est le propre des religieux, seul saint François d’Assise riait) comme un trait du Malin –, par s’interroger sur la per-tinence de publier les caricatures de Mahomet. Au pays du chevalier de La Barre ! À propos des caricatures de Charlie Hebdo, des anthro-pologues américaines, fêtées par toute la presse de gauche en France, ont proposé une « conception critique » de la liberté d’expression,

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précisant avoir été « impressionné(es) par la peine personnellement ressentie et exprimée par de nombreux musulmans pratiquants » (5). Ce constat d’une « blessure » justifierait, selon ces puissantes pythies académiques, de sanctionner le blasphème et d’affirmer que « le blas-phème à l’encontre de l’image de Mahomet est une offense à l’encontre du statut de personne au sein de l’islam », associant ainsi la caricature à l’égard d’une religion au racisme (6). On se croirait revenu en 1881 quand Mgr Freppel, à la tête de la droite catholique radicale, dénonçait la « blessure » au Divin faite par la loi sur la liberté de la presse !

Le sacre de la « démocratie des minorités »

Le discours de la blessure se remet à confondre l’offense et la souf-france individuelle qui peut être causée soit par des caricatures, soit par des traits d’humour, et le préjudice qui en découle, à savoir « l’in-tentionnalité » supposée qu’il y aurait, derrière ces caricatures ou ces blagues, de marginaliser certaines catégories de personnes. En agis-sant ainsi, nos nouveaux censeurs refusent de prendre en compte, par exemple, tout discours critique à l’égard des religions en général, ou les intentions de pouvoir qui peuvent se cacher derrière tel ou tel mouve-ment associatif se prétendant « offensé ». Leur propos devient dès lors aussi intimidant qu’au XIXe siècle pour limiter la liberté d’expression ; l’audience médiatique faite à ce type d’argument – ces anthropologues ont eu les honneurs de nombreux entretiens dans de grands journaux, bien plus que ceux qui défendaient la liberté de blasphémer – semble s’expliquer par le contexte en ce qui concerne notamment la question du blasphème.

Ce sont ces démissions devant la liberté d’expression et de cari-cature qui révèlent l’impasse dramatique dans laquelle notre pays s’est engagé, souvent sans s’en rendre compte. En France triomphent désormais ceux que Rabelais qualifiait d’« agelastes », c’est-à-dire ceux qui ne rient jamais et qui haïssent le rire. Ces derniers auraient surtout prospéré avec l’instauration du monothéisme. Avait-on jamais vu Jésus s’esclaffer de rire ? « Le Verbe incarné n’a jamais ri », nous dit

Baude-l’humour français à l’époque des nouveaux « agelastes »

laire. Comme le rappelle indirectement Le Nom de la rose, l’hypothé-tique livre d’Aristote sur le rire est l’objet de tous les tourments dans le roman d’Umberto Eco : puisque le Christ ne riait pas, l’homme ne devait pas se laisser aller à ce travers. Au fond, la grande leçon de Kun-dera est de nous rappeler la profonde rupture de la modernité incarnée par Rabelais : tout à la fois celle du roman et du rire. Rabelais craignait ces agelastes. « Il en avait peur, écrit Kundera. Il se plaignait que les agelastes fussent si “atroces contre lui” qu’il avait failli cesser d’écrire, et pour toujours. (7) » Et ces derniers ont continué, à la faveur de nos régimes autoritaires – surtout les deux Empires –, à s’en donner à cœur joie. Il a fallu attendre en France la loi de 1881 pour mettre les rieurs du bon côté.

Après un siècle de triomphe de la liberté d’expression, et donc de l’humour, en gros de la loi sur la presse de 1881 jusqu’aux premières limites à cette loi, au début des années soixante-dix, notre monde a commencé à voir petit à petit s’effriter un principe fondamental, propre à notre nation, une manière singulière de s’entretenir des choses de la cité et de concevoir les relations entre les individus.

Mais il existait encore des Pierre Desproges ou des Thierry Le Luron pour se moquer de nos importants et de nos éternels dévots. Le triomphe des nouveaux agelastes est plus récent et il a partie liée avec le sacre de la « démocratie des minorités », où l’arme judiciaire est tantôt légitime, quand il s’agit de réparer un véritable abus, tantôt oppressante lorsqu’elle se transforme en visée symbolique.

Dans ses Contes drolatiques, Balzac classait d’ailleurs les agelastes dans la même catégorie que d’autres fléaux de la démocratie athé-nienne, notamment les sycophantes, ces « chiens du peuple », disait Démosthène, délateurs professionnels, lançant des accusations dans le seul but de nuire à quelqu’un ou de s’enrichir. Revêtant souvent les habits de social justice warrior, dirigeants d’associations prében-dées et s’occupant des droits des victimes, des droits de l’homme, de l’égalité, de la dignité, de la blessure, etc., toujours prêts à pous-ser des cris d’orfraie, souvent bardés d’avocats, les nouveaux justi-ciers sont passés maîtres, au nom des meilleurs sentiments, dans la poursuite de leur prochain, lançant sans précaution les assignations,

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confondant allègrement les vrais prédateurs, qui doivent en effet tomber sous le coup de la loi, avec tous ces maladroits qui osent un mot vulgaire, un pas de côté, voire un éclair d’obscénité. Au moment de l’émergence du mouvement #Balancetonporc, Isabelle Adjani faisait remarquer, il est vrai, que certains hommes glissent facilement de la galanterie à la grivoiserie puis à la goujaterie, les

« trois G » français, ajoutait-elle. Et, ensuite, certains pouvaient même aller « jusqu’à la violence en prétextant le jeu de la séduction, [c’] est une des armes de défense des prédateurs et des harceleurs ».

Personne ne peut le nier. Mais on ne peut pas non plus instituer cette « pente glissante » en règle absolue sans tomber dans les erre-ments qu’Albert Hirschman dénonçait dans Deux siècles de rhéto-rique réactionnaire. La goujaterie ne mène pas nécessairement à la violence, il faut le réaffirmer. Peut-être n’est-il pas très judicieux de réclamer le droit à son petit quart d’heure de trivialité, comme on a eu droit à son quart d’heure de célébrité. Mais faut-il criminaliser toute « drague lourde » ? Je pense à ce pauvre type ayant lancé à la fondatrice de #Balancetonporc qu’il allait la « faire jouir toute la nuit ». Propos grossier et même grotesque dont l’auteur a reconnu le caractère « déplacé ». Une bonne mise au point aurait pu mettre un terme à ce moment vulgaire. La sanction sociale qui s’est ensui-vie donne le vertige au pays du Vert-Galant. Le nom du dragueur a été diffusé par sa victime sur les réseaux sociaux, ainsi que sa fonc-tion ; il a été cloué au pilori sans pouvoir se défendre et il a tout perdu, son emploi, sa femme, son honneur, etc., depuis que sa des-tinatrice a décidé d’en faire avec éclat une nouvelle croisade contre la phallocratie. La faute est-elle à la hauteur de cette mise au pilori symbolique ? On confond le prédateur sexuel et le maladroit, le violeur et le « dragueur lourd », la bête et l’imbécile. Nos nouveaux agelastes traquent avec la rigueur de Fouquier-Tinville tout com-portement suspect et ne voient partout que des ennemis. La même suspicion vaut pour des questions sérieuses comme le blasphème ou des questions futiles, comme l’écriture inclusive. Toujours, ces fous du « correct » croient détenir la vérité, que ce soit celle de Dieu, de la nation, d’une Église, d’une secte ou de tout autre chose.

l’humour français à l’époque des nouveaux « agelastes »

Ils ont trouvé en France tout un arsenal législatif qui ne cesse de se durcir, même si la jurisprudence tente de maintenir tant qu’elle peut la spécificité de l’humour. Ce dernier est particulièrement dans le collimateur de nos nouveaux inquisiteurs. Est-ce parce qu’il a juste-ment une fonction de « révélation », c’est une sorte « d’éclair divin » qui permet de « découvrir le monde dans son ambiguïté morale et l’homme dans sa profonde incompétence à juger les autres [...] le plai-sir étrange issu de la certitude qu’il n’y a pas de certitude » (8). Or c’est bien tout ce que détestent les consciences du « camp du Bien » qui passent leur temps à « juger les autres », possédant ce fameux « désir, inné et indomptable, de juger avant de comprendre » (9). L’humour, rappelait Octavio Paz, n’est pas là depuis toujours. C’est une inven-tion des modernes. Peut-être ne survivra-t-il pas au triomphe de la postmodernité. Faut-il rappeler en boucle ce terrible avertissement de Kundera : « Le cœur serré, je pense au temps où Panurge ne fera plus rire » ? Ce temps semble être arrivé en France.

Bientôt, il deviendra, comme dans les anciennes dictatures com-munistes, un bien précieux que quelques individus choisis pratique-ront sous le manteau pour ne pas tomber sous la coupe de la censure officielle. Milan Kundera rappelait avoir « appris la valeur de l’hu-mour sous la dictature stalinienne [...]. Je savais toujours reconnaître quelqu’un qui n’était pas stalinien, quelqu’un dont je n’avais rien à craindre, à sa façon de sourire. Le sens de l’humour est un signe de reconnaissance auquel on peut se fier. Et, depuis, je suis terrifié par un monde qui perd son humour » (10).

De ce point de vue, le regard de l’auteur de La Plaisanterie devient crucial pour nous avertir sur les dangers qui nous guettent. Ce ne sont plus seulement les dictatures staliniennes, où « seule la joie était proclamée mais nous ne pouvions nous permettre aucune facétie », qui sont touchées. Nos «  post-démocraties  » (Colin Crouch) han-tées par le « politiquement correct » sont à leur tour dans le viseur de

De ce point de vue, le regard de l’auteur de La Plaisanterie devient crucial pour nous avertir sur les dangers qui nous guettent. Ce ne sont plus seulement les dictatures staliniennes, où « seule la joie était proclamée mais nous ne pouvions nous permettre aucune facétie », qui sont touchées. Nos «  post-démocraties  » (Colin Crouch) han-tées par le « politiquement correct » sont à leur tour dans le viseur de