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Introduction générale

La lutte contre le cancer est un problème majeur de santé publique : c’est la première cause de mortalité dans les pays en voie de développement et la deuxième après les maladies cardio-vasculaires dans les pays développés (Jemal et al., 2011 ; GLOBOCAN, 2008). Près de 12,7 millions de cas de cancer et 7,6 millions de décès dus au cancer ont été recensés dans le monde en 2008, soit 13 % de la mortalité mondiale. En 2030, le nombre de décès dus au cancer pourrait avoisiner les 13,1 millions (OMS). En France, un homme sur deux et une femme sur trois se verra diagnostiqué un cancer avant 85 ans. Le cancer est la première cause de décès chez l’homme et la deuxième chez la femme : 33 % des décès masculins et 24 % des décès féminins ont été provoqués par le cancer en 2004-2008 en France (Ligue contre le cancer).

Le cancer est une maladie particulièrement complexe, due à une instabilité génétique et à la succession de modifications moléculaires multiples. Les procédés biologiques se faisant à l’échelle nanométrique, il semble essentiel de travailler à cette même échelle pour combattre les cellules cancéreuses. Selon la « National Nanotechnology Initiative » américaine, l’univers des nanotechnologies concerne la compréhension et le contrôle de la matière à des dimensions comprises entre 1 et 100 nm approximativement, où des phénomènes uniques permettent des applications nouvelles, non réalisables avec de simples molécules à l’état brut ou des matériaux de base (NNI). Les avancées dans le domaine des nanotechnologies permettent de manipuler la matière à l’échelle moléculaire pour créer des particules avec de nouvelles propriétés chimiques, physiques et biologiques. Il est alors raisonnable d’imaginer que des tests capables de passer au crible des millions de molécules dans une goutte de sang seront mis en place dans un futur proche, afin de détecter une protéine révélatrice de la présence d’un type de cancer. Il est également possible d’envisager la conception de particules transporteuses de médicaments relargant leur contenu toxique uniquement après qu’elles ont pénétré la tumeur, ou encore, la commercialisation d’agents capables de contrôler l’efficacité du traitement administré au patient atteint d’un cancer. La nanomédecine s’inscrit dans une démarche thérapeutique novatrice car elle offre l’opportunité d’une médecine personnalisée. Encapsulés dans des véhicules de taille nanométrique, les agents d’imagerie et/ou de thérapie seraient capables de cibler uniquement les cellules cancéreuses. Ces nanotechnologies intelligentes à pouvoir ultra-ciblé ouvrent une nouvelle ère de la lutte contre le cancer. L’industrie pharmaceutique s’intéresse de plus en plus à ces véhicules de taille nanométrique car ils sont moins toxiques et plus spécifiques des tumeurs que les agents thérapeutiques conventionnels.

L’utilisation de nanotechnologies est désormais répandue dans le domaine des applications en oncologie et ne cesse de susciter de l’intérêt dans le milieu de la recherche, notamment en termes d’imagerie et de thérapie. Les nanoparticules dédiées à des applications en oncologie sont sources d’espoirs et de perspectives prometteuses pour un diagnostic précoce et précis du cancer ainsi que pour un traitement efficace tout en limitant les effets indésirables.

Les propriétés inhérentes aux nanoparticules leur confèrent d’indéniables avantages sur les agents moléculaires et reposent sur un concept majeur : leur rapport surface sur volume étant élevé, la proportion d’atomes de surface par unité de volume est augmentée, générant une surface

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spécifique optimale (très grande réactivité des atomes de surface). Les nanoparticules sont des « véhicules » auxquels il est possible d’incorporer des agents d’imagerie et/ou de thérapie (Doane et

al., 2012 ; Mahmood et al., 2012). Ces nano-objets sont composés de quelques centaines ou milliers

d’atomes et, par conséquent, apportent sur leur site d’action un plus grand nombre d’éléments actifs (imagerie, thérapie, ciblage) par objet que la plupart des espèces moléculaires. De plus, de par leur taille, les nanoparticules circulent dans le sang plus longtemps que les agents d’imagerie ou de thérapie conventionnels car elles évitent l’élimination par voie rénale et s’affranchissent des problèmes de diffusion systémique observés pour les agents moléculaires ; elles sont néanmoins suffisament petites pour pénétrer la vascularisation tumorale. Leur abilité à atteindre sélectivement leur cible permet aux physiciens de travailler avec des doses plus faibles donc moins toxiques. Le ciblage des tumeurs permet de diminuer le taux de « piégeage » des agents d’imagerie ou de thérapie dans les tissus sains et d’augmenter leurs taux d’accumulation et de rétention dans les tumeurs. Ce phénomène améliore l’efficacité de ces agents et, dans le cas des agents thérapeutiques, réduit les effets indésirables sur le patient (Blanco et al., 2011 ; Cabral et al., 2011). La fonctionnalisation des nanoparticules avec des entités de ciblage capables d’identifier et de se lier à des récepteurs surexprimés par les tumeurs ou par l’endothélium qui leur est associé permet de maximiser la localisation et la rétention des nanoparticules dans les tumeurs (Blanco et al., 2011).

Bien que les nanoparticules ciblantes aient mis du temps à entrer en phase clinique, leur potentiel en tant que nouvelle génération d’agents d’imagerie et/ou de thérapie reste immense. L’injection par intraveineuse de tels agents doit composer avec les obstacles suivants : les interactions avec les composants du sang, la captation par le système réticuloendothélial, l’élimination rénale, la toxicité et l’aptitude à cibler les cellules d’intérêt (Guo et al., 2012). En effet, les propriétés physicochimiques des nanoparticules comme la taille, la géométrie, la forme, la chimie et la charge de surface, l’hydrophobie, la rigidité et la composition interne sont autant de paramètres qui ont une influence directe sur leur accumulation dans les organes, les tissus ou les cellules et sont donc à optimiser pour la conception de nanoparticules efficaces (Kamaly et al., 2012 ; Wang et al., 2011).

Les recherches dans le domaine des nanomédecines ciblantes sont nombreuses et ces efforts doivent être perpétués dans l’idée de les transposer du laboratoire au lit du patient (Kamaly et

al., 2012). L’équipe FENNEC (Formation et Elaboration de NaNomatériaux et Cristaux) de l’ILM

(Institut Lumière Matière) est spécialisée depuis plusieurs années dans la conception de nanoparticules hybrides à base de gadolinium à visée thérapeutique.

Les propriétés physicochimiques des SRPs (Small Rigid Particles) synthétisées par l’équipe FENNEC, et plus particulièrement leur taille (< 5 nm), répondent aux exigences pré-requises des agents théranostiques, à savoir : (i) une longue circulation dans le sang pour une accumulation optimale au sein de la tumeur par effet EPR (Enhanced Permeability and Retention) et (ii) une évacuation par voie rénale pour un meilleur contraste (différence de concentration) entre tissus sains et tissus tumoraux (Lux et al., 2011).

Les SRPs sont des plateformes multifonctionnelles, prometteuses pour des applications en imagerie médicale et en thérapie : elles s’inscrivent dans une optique dite « théranostique ». En effet, les SRPs ont récemment démontré leur capacité à être détectées par 3 techniques d’imagerie

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médicale différentes, à savoir, l’IRM (Imagerie par Résonance Magnétique), la TEMP (Tomographie d’Emission MonoPhotonique) et l’imagerie optique et s’avèrent prometteuses pour des applications en radiothérapie (Lux et al., 2011 ; Le Duc et al., 2011 ; Mowat et al., 2011). Pour résumer, elles associent différentes modalités d’imagerie de manière à aboutir à un diagnostic plus précoce et plus précis, elles sont susceptibles de rendre le traitement par radiothérapie plus efficace et elles permettraient de suivre l’évolution du traitement par ces mêmes modalités d’imagerie.

L’optimisation de ces nanoparticules en tant qu’agents théranostiques passe par leur vectorisation dans le but d’obtenir un ciblage actif. En effet, pour que l’efficacité de l’agent théranostique soit maximale, la quantité de SRPs dans la tumeur et le rapport en élément théranostique entre les tissus tumoraux et les tissus sains doivent être maximums (Le Duc et al., 2011). La fonctionnalisation des SRPs par des entités de ciblage permettrait de maximiser leur accumulation et leur rétention au sein des tumeurs.

L’objectif de ces travaux de thèse a consisté à améliorer le ciblage des SRPs pour une meilleure efficacité de ces nanoparticules en tant qu’agents d’imagerie multimodale et agents de thérapie.

Dans une première partie, nous développerons (i) les généralités et enjeux du cancer, (ii) les atouts et faiblesses des différentes modalités d’imagerie, (iii) le principe général du traitement par radiothérapie et ses perspectives, (iv) les diverses possibilités d’optimisation des propriétés physicochimiques des agents d’imagerie et/ou de thérapie, puis (v) la conception des nanoparticules hybrides à base de gadolinium combinant imagerie et thérapie.

La seconde partie sera ensuite consacrée à une étude de pré-vectorisation des nanoparticules, c'est-à-dire à la description des stratégies de greffage mises en place pour coupler les entités ciblantes de manière covalente aux SRPs, puis à l’estimation du nombre de sites de greffage disponibles et accessibles en surface des SRPs.

Les trois chapitres suivants présenteront le greffage covalent de trois molécules ciblantes différentes aux SRPs, la caractérisation de ce greffage et les résultats de ciblage obtenus pour les nanoparticules vectorisées. Le troisième chapitre sera consacré à la vectorisation des SRPs par un pentapeptide cyclique ciblant l’intégrine ĮȞȕ3 – récepteur de cellule endothéliale pour les protéines de la matrice extracellulaire, le quatrième à la vectorisation par une molécule ciblant la mélanine – surexprimée par le mélanome (cancer de la peau), et le dernier à la vectorisation par une molécule ciblant les protéoglycanes – surexprimés par le chondrosarcome (cancer du cartilage). Les SRPs vectorisées par chacune des entités de ciblage font l’objet d’articles publiés ou en cours de publication. Les troisième, quatrième et cinquième chapitres seront alors présentés sous forme d’articles.

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