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1.4 Transit des spermatozoïdes dans le tractus reproducteur femelle

1.4.4 Interactions entre les gamètes

Le complexe cumulus-ovocyte (CCO) est composé de l’ovocyte secondaire (arrêté en métaphase II) et est entouré par la zone pellucide et les cellules du cumulus, formant le cumulus oophorus (Figure 1-9) (Huang et Wells, 2010).

Figure 1-9 Les composantes du complexe cumulus-ovocyte (CCO). Le CCO est composé de l’ovocyte, la zone pellucide, l’espace périvitellin et les cellules du cumulus, formant le cumulus oophorus.

1.4.4.1 Interaction spermatozoïde-cumulus oophorus

Les cellules du cumulus représentent une sous-population des cellules de la granulosa produites vers la fin de la folliculogenèse (Zhuo et Kimata, 2001). La communication entre les cellules du cumulus et l’ovocyte se fait par l’intermédiaire de projections cellulaires qui traversent la zone pellucide et qui forment des jonctions lacunaires avec l’ovocyte (Albertini et al., 2001). Avant l’ovulation, il y a une hausse de gonadotropines qui stimulent la production d’acide hyaluronique (HA) par les cellules du cumulus. Ceci contribue à la formation de la matrice extracellulaire entre les cellules du cumulus et résulte en l’expansion du cumulus oophorus (Salustri et al., 1989; Huang et Wells, 2010). La matrice

est composée de protéoglycanes, formés par des protéines et des glycoaminoglycanes (GAG). Le GAG majoritaire du cumulus oophorus est l’acide hyaluronique, composé de disaccharides d’acide D-glucuronique et de N-acétyl-D-glucosamine (Russell et Salustri, 2006). Par contre, l’acide hyaluronique est le seul GAG qui n’est pas associé à une protéine centrale (Stern, 2003).

Afin de féconder l’ovocyte, la première couche du CCO que le spermatozoïde doit franchir est le cumulus oophorus. Une expérience par Hong et al. (2004) a démontré que le pourcentage de spermatozoïdes ayant une morphologie, une capacitation et un acrosome réacté normaux était plus élevé après passage dans le cumulus oophorus qu’après le passage dans un milieu contrôle. Ceci suggère que le cumulus oophorus pourrait avoir un rôle dans la sélection de spermatozoïdes de meilleures qualités (Rijsdijk et Franken, 2007; Hong et al., 2009). Deux mécanismes de pénétration du cumulus oophorus par les spermatozoïdes sont proposés. La première est la force mécanique générée par l’état hyperactivé du spermatozoïde (Suarez et al., 1991). Les mouvements du spermatozoïde sont plus vigoureux lors de l’hyperactivation et pourraient permettre le déplacement de la matrice extracellulaire du cumulus oophorus ainsi forgeant un trajet pour le spermatozoïde. La deuxième est la dispersion du cumulus par l’activité enzymatique hyaluronidase retrouvée chez le spermatozoïde (Lin et al., 1994). La protéine PH-20, ou SPAM1, possède une activité hyaluronidase et est capable d’hydrolyser l’acide hyaluronique dans la matrice extracellulaire du cumulus oophorus. Par contre, des expériences utilisant des souris avec une invalidation du gène Ph-20/Spam1 ont démontré que ces souris étaient toujours fertiles et que leurs spermatozoïdes pouvaient toujours pénétrer le cumulus oophorus, mais avec un certain délai par rapport aux spermatozoïdes contrôles (Baba et al., 2002). D’autres hyaluronidases ont été trouvées chez le spermatozoïde, exposant une redondance de ces protéines, ce qui pourrait expliquer pourquoi les spermatozoïdes sans PH-20/SPAM1 maintiennent leur pouvoir fécondant (Miller et al., 2006; Kimura et al., 2009). Il y a d’autres protéines qui possèdent une activité de digestion du cumulus, tel que l’arylsulfatase A (Dudkiewicz, 1984; Wu et al., 2007). Il est probable que les spermatozoïdes utilisent la force mécanique et la digestion, où plus d’un type protéique réaliserait la digestion, pour pénétrer le cumulus oophorus, plutôt qu’un seul mécanisme.

1.4.4.2 Interaction spermatozoïde-zone pellucide

La prochaine interaction entre le spermatozoïde et le gamète femelle est la liaison et la pénétration de la zone pellucide (ZP). La zone pellucide est une matrice acellulaire, composée de glycoprotéines sulfatées et d’acide hyaluronique, qui est synthétisée par l’ovocyte pendant le développement du follicule (Bleil et Wassarman, 1980a; Dandekar et Talbot, 1992). Selon l’espèce animale, la matrice extracellulaire est composée de trois à quatre glycoprotéines nommées ZP1, ZP2, ZP3 et ZP4. Chez l’espèce murine on retrouve ZP1, ZP2 et ZP3 (Bleil et Wassarman, 1980a) et chez l’espèce bovine on retrouve ZP2, ZP3 et ZP4, où Zp1 n’est qu’un pseudogène (Noguchi et al., 1994; Goudet et al., 2008).

Des études ont démontrés que la glycoprotéine ZP3 peut induire la réaction de l’acrosome suite à sa liaison par les spermatozoïdes (Bleil et Wassarman, 1980b). Ceci était central au dogme disant que les spermatozoïdes ayant un acrosome intact se liaient à ZP3, induisant la réaction de l’acrosome, ce qui permettait une liaison secondaire avec ZP2 pour ensuite mener à la pénétration (Bleil et al., 1988). Cependant, une expérience récente a contesté ce modèle. Il a été démontré que la réaction de l’acrosome chez la plupart des spermatozoïdes de la souris survient dans le cumulus oophorus, avant la liaison à la ZP (Jin et al., 2011). Cette découverte met en question le modèle courant où il y a une liaison primaire faible entre le spermatozoïde et la ZP. Le contact avec ZP3 de la ZP déclenche la réaction acrosomale menant à une liaison secondaire forte entre la membrane interne de l’acrosome du spermatozoïde réacté et la glycoprotéine ZP2 de la ZP (Gupta et al., 2012). Cette liaison secondaire impliquerait des protéines telles que SPAM1 (Hunnicutt et al., 1996). Il y a donc encore des clarifications à faire concernant l’ordre des différents évènements précédant la fécondation.

Plusieurs modèles de la pénétration de la zone pellucide ont été proposés. La force mécanique générée par le battement du flagelle du spermatozoïde a été présentée, mais a été rejetée puisque la force est insuffisante pour la pénétration (Green, 1988). Le deuxième modèle suggéré comme moyen de passage des spermatozoïdes est la lyse de la matrice formée par les glycoprotéines de la ZP. Plusieurs candidats pour la digestion de la ZP existent. Un des candidats est l’acrosine, une protéase présente dans l’acrosome et sur la

membrane interne de l’acrosome (Ohmura et al., 1999; Ferrer et al., 2012). Cependant, des invalidations du gène encodant cette protéine ont démontré que les spermatozoïdes murins étaient tout de même capables de pénétrer la zone pellucide (Yamagata et al., 1998). Le prochain candidat est MMP2, qui fait partie de la famille des protéinases pouvant dégrader les composantes de la matrice extracellulaire chez les cellules somatiques (Werb, 1997). Cette métallo-protéase de la matrice, qui est produit sous une forme inactive pro-MMP2, est aussi connue sous le nom de gélatinase A et se situe sur la IAM. Ferrer et al. (2012) ont démontré que l’acrosine et MMP2 co-localisaient et pouvaient ensemble jouer un rôle dans la pénétration de la zone pellucide. Le troisième candidat est le protéasome 26S du spermatozoïde. Il a été démontré que ce protéasome était capable de reconnaître et dégrader les protéines ubiquitinilées de la ZP chez la souris (Zimmerman et al., 2011) et des protéines recombinantes ubiquitinilées de la ZP chez l’humain (Saldívar-Hernández et al., 2015). Il se peut aussi, comme le passage au travers du cumulus oophorus, que les spermatozoïdes utilisent une combinaison de mécanismes pour pénétrer la zone pellucide.

1.4.4.3 Interaction spermatozoïde-ovocyte

Une fois la ZP traversée, le spermatozoïde se retrouve dans l’espace périvitellin (Figure 1-9). La dernière étape que franchit le spermatozoïde est la pénétration de l’ovocyte. Ceci se fait en deux étapes : la liaison et la fusion avec la membrane de l’œuf. L’œuf possède une membrane plasmique ayant une région plutôt lisse, où sont situés les chromosomes en métaphase et le premier globule polaire, et une région riche en microvillosités. Les spermatozoïdes se lient et fusionnent aux régions ayant les microvillosités (Primakoff et Myles, 2007). Bien que la réaction de l’acrosome expose la membrane interne de l’acrosome, ce n’est pas cette membrane qui interagit avec la membrane plasmique de l’œuf. Ce sont le segment équatorial et la région post-acrosomale de la tête du spermatozoïde qui fusionnent avec la membrane de l’œuf (Florman et Ducibella, 2006). Plusieurs types de protéines sont proposés comme médiateurs des interactions entre les gamètes. Sur le spermatozoïde, il y a les protéines de la famille CRISP (Cysteine-rich secretory protein), originalement nommés DE (Cameo et Blaquier, 1976). Ces protéines épididymaires agissent via des interactions avec des sites complémentaires sur l’ovocyte pour la fusion spermatozoïde-ovocyte (Cohen et al., 2011). Une deuxième

famille de protéines aurait un rôle dans les interactions spermatozoïde-ovocyte, nommée ADAM (A disintegrin and metalloprotease) (Evans, 2002). Les ADAMs sont des protéines transmembranaires ayant des domaines métalloprotéase et disintégrine, suggérant qu’elles ont des activités protéolytiques et d’adhésion cellulaire (Primakoff et Myles, 2000). Récemment, une protéine spermatique essentielle pour la fusion spermatozoïde-ovocyte chez la souris et l’humain a été trouvée. La protéine IZUMO, faisant partie de la superfamille d’immunoglobulines, est localisée sur la membrane interne de l’acrosome. L’invalidation de ce gène rend les souris stériles. Bien que les spermatozoïdes Izumo−/− puissent se lier à la membrane plasmique de l’ovocyte, ils sont incapables de fusionner avec cette dernière (Inoue et al., 2005). Le partenaire d’IZUMO retrouvé chez le gamète femelle est JUNO, une protéine avec une ancre GPI, anciennement nommée Folate receptor 4 (Folr4). Les souris femelles avec une invalidation de ce gène sont infertiles. De plus, il est suggéré que la disparition de JUNO après la fusion est impliquée dans le blocage de la polyspermie (Bianchi et al., 2014). Une fois que la fusion spermatozoïde-ovocyte est terminée, le matériel génétique mâle et femelle peut se réunir pour former le zygote et déclencher le développement d’un nouvel être.

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