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B. Le métabolisme énergétique est profondément modifié lorsque les astrocytes sont activés par

2. Quels sont les intérêts potentiels à l’utilisation des corps cétoniques ?

a. Une voie de production d’énergie alternative

La possibilité d’utiliser les CC pour produire de l’énergie, indépendamment du glucose a l’avantage de fournir une ‘voie de secours’, si l’apport de glucose devient insuffisant ou si la demande énergétique est très importante. Dans nos conditions, le striatum devient donc moins dépendant du glucose, pour peu que les CC soient disponibles en quantité suffisante. Ainsi, une partie du fonctionnement basal du cerveau peut être alimenté par les CC, ce qui laisse un potentiel plus important de réponse en conditions de forte demande énergétique. Dans ces conditions, la production d’énergie à partir de glucose pourra être plus importante avant de saturer l’héxokinase ou le transporteur GLUT1 puisque le niveau de consommation de glucose est plus bas (Barros et al., 2005). Lors de l’hyperactivation induite par le QA la consommation de glucose augmente plus fortement dans le groupe lenti-CNTF. Le mécanisme sous-jacent sera discuté au § 2-b, mais cette observation montre que l’accroissement de l’utilisation de glucose peut effectivement être plus important dans le groupe lenti-CNTF. Dans ces conditions d’hyperactivation, il est possible que la consommation de CC soit aussi augmentée et participe à la production énergétique. Il serait donc intéressant d’étudier comment la consommation des CC évolue après une injection de QA.

Si ce sont les astrocytes réactifs qui métabolisent les CC (car ce sont eux qui présentent la forte activité BDH), comment les neurones profitent-ils de cette voie métabolique alternative ? Les neurones pourraient être alimentés par des métabolites dérivés de la cétolyse astrocytaire, comme l’α-cétoglutarate et le citrate, des intermédiaires du cycle de Krebs dont la concentration augmente avec une cétolyse active (Sato et al., 1995) et qui sont échangés entre les deux types cellulaires (Shank et Campbell, 1984; Schousboe et al., 1997).

b. Une voie de production d’énergie efficace

La voie des CC peut être considérée comme une voie plus performante de production d’énergie que la voie classique de la glycolyse. La dégradation des CC est rapide, il ne faut que trois réactions pour former de l’acétyl-CoA, contre 10 par la glycolyse. La cétolyse est mitochondriale, ainsi une fois le BHB entré dans la mitochondrie, il peut subir sans interruption l’ensemble des réactions d’oxydation qui fournissent du NADH,H+ pour alimenter la chaîne de transport d’électron. Il n’y a pas de ségrégation spatiale entre les étapes de la voie, contrairement à la glycolyse qui a lieu dans le cytoplasme alors que le cycle de Krebs a lieu dans la mitochondrie, ce qui impose l’import mitochondrial des produits de la glycolyse

(pyruvate, lactate et NADH, H+). Enfin, la cétolyse ne nécessite pas d’investissement en ATP comme pour la première et la troisième étape de la glycolyse, ce qui constitue un avantage non négligeable en conditions de déficit métabolique.

La production d’énergie semble être plus efficace à partir des CC qu’à partir de glucose. Des expériences réalisées avec un cœur entier perfusé ont montré que pour une consommation égale d’O2, l’énergie mécanique développée était plus importante à partir de CC que de glucose (Sato et al., 1995). Selon les auteurs, cette amélioration aurait plusieurs origines : la baisse du potentiel de membrane mitochondrial, ce qui diminue la fuite des protons hors de la mitochondrie, l’amélioration de l’efficacité de transfert d’électrons entre le complexe I et le coenzyme Q et l’augmentation du ∆G’ de l’ATP, c’est-à-dire de l’énergie libre produite par l’hydrolyse de l’ATP (pour plus de détails sur les mécanismes impliqués voir, Veech et al., 2001).

Ainsi, en plus de représenter une voie de production d’énergie alternative, la cétolyse représente une voie métabolique performante, ce qui peut être bénéfique au fonctionnement et à la survie des neurones qui sont très dépendants de l’apport énergétique.

c. Une voie de production d’énergie à potentiel neuroprotecteur

Les CC ont des effets neuroprotecteurs dans des conditions pathologiques variées, dont évidemment les situations d’atteinte métabolique.

Ainsi, le BHB rallonge le temps de survie de neurones d’hippocampe en culture soumis à une hypoxie (Masuda et al., 2005) et maintient le fonctionnement électrique de neurones d’hippocampe en condition d’hypoglycémie, mais seulement si les tranches proviennent de rats âgés de moins de 30 jours (Izumi et al., 1998). Enfin, le traitement avec du BHB diminue les conséquences délétères d’une hypoxie et d’une anoxie chez la souris, même en étant administré après leur déclenchement : il réduit l’augmentation du taux de lactate extracellulaire à l’origine de l’acidose, empêche l’accumulation de sodium et d’eau dans les cellules et maintient un taux d’ATP élevé (Suzuki et al., 2001). Le 1,3-butanediol, qui est métabolisé par le foie en CC, a aussi des effets neuroprotecteurs in vivo contre l’ischémie (Marie et al., 1987).

Dans toutes ces conditions, l’effet neuroprotecteur des CC est lié au fait qu’ils offrent une voie alternative de production d’énergie qui permet de contourner le déficit métabolique primaire, qui peut se situer à toutes les étapes entre l’entrée de glucose et la formation d’acétyl-CoA. Le régime cétogénique est d’ailleurs utilisé pour le traitement des déficiences chroniques du transporteur au glucose GLUT1 et de la pyruvate déshydrogénase (syndrome de Leigh) (Morris, 2005). Ce contournement peut aussi se faire plus en aval dans la chaîne de production d’énergie. L’équipe de Tieu a montré que l’infusion chronique sous cutanée de BHB chez la souris protégeait les neurones nigraux vis-à-vis du MPTP en restaurant la

phosphorylation oxydative inhibée au niveau du complexe I (Tieu et al., 2003). Cette restauration n’était pas due à l’augmentation de NADH, H+ mais passait par un accroissement du taux de succinate, qui permettait de contourner le blocage du complexe I en alimentant le complexe II.

Les CC ont aussi des effets neuroprotecteurs dans des modèles qui n’impliquent pas directement des déficits métaboliques. Le BHB protège les neurones d’hippocampe in vitro vis-à-vis de la toxicité du peptide Aβ1-42 (Kashiwaya et al., 2000). Les CC ont un effet antioxydant car ils diminuent la quantité de coenzyme Q réduit qui participe à la formation de l’ion superoxyde (Veech et al., 2001).

Enfin, il faut noter qu’historiquement, les CC ont été utilisés pour le traitement des formes graves et résistantes d’épilepsie chez l’enfant. La cétogenèse permanente obtenue par un régime alimentaire adapté, induit une réduction majeure voire une disparition des crises d’épilepsies (Vining, 1999). Les mécanismes impliqués sont encore mal compris, ils pourraient s’agir d’effets anticonvulsivants directs, d’une baisse d’excitabilité des neurones par l’augmentation de la synthèse du GABA (Daikhin et Yudkoff, 1998), ou des effets indirects du régime (pH cérébral, niveau d’hydratation., Morris, 2005). Il ne s’agit pas là d’effet neuroprotecteurs à proprement parler mais ces observations suggèrent que l’utilisation des CC peut induire des changements profonds dans le fonctionnement cérébral.

Ainsi, le fait que les astrocytes activés par le CNTF soient capables d’utiliser les CC apparaît comme une modification globalement bénéfique. Le métabolisme énergétique n’est cependant pas la seule fonction profondément modifiée dans les astrocytes activés : il en de même pour une autre grande fonction cérébrale : l’homéostasie glutamatergique.

C. Le système de régulation du glutamate est plus performant avec