• Aucun résultat trouvé

Intérêt des représentations dans l’approche géographique

CHAPITRE I Le rôle des représentations dans l’aménagement des zones humides Notions

A- Intérêt des représentations dans l’approche géographique

Dès l’Antiquité, la géographie a pour objet la mesure et la description de la terre. Au cours des siècles, cette conception évolue vers une plus grande prise en compte des rapports de l’homme avec son milieu. L’évolution se fait par à coups, influencée par des courants tantôt venus d’Europe continentale, tantôt de Russie, tantôt des pays anglo-saxons.

1- De l’anthropogeographie à l’étude des « genres de vies »

• L’évolution de la géographie occidentale est partie d’une approche philosophique interrogeant les hommes et les milieux. Au 18e siècle, la conception du philosophe J. Herder, qui

reprend les travaux d’E. Kant, met en avant l’historicité des sociétés et des cultures et souligne ce qu’elles doivent aux milieux où elles sont façonnées (Claval, 1998). C’est une nouvelle façon d’aborder la discipline géographique qui se contentait jusqu’alors d’un travail descriptif, où les dimensions historique et culturelle étaient absentes. Au 19e siècle, Ratzel fait évoluer ce courant disciplinaire vers ce qu’il pense être le principe d’explication qui manquait dans la théorie darwinienne : « Les hommes ne sont-ils pas triés par le cadre où se déroule leur existence ? L’environnement n’est-il pas le grand responsable de ce qu’ils sont et de ce qu’ils peuvent faire ? » (Ratzel, 1899). Ce mouvement de la géographie allemande prend de l’essor et Ratzel le qualifie alors d ’ A n t h r o p o g e o g r a p h i e (Claval, 1995) ; il se base sur un parti pris déterministe et

« environnementaliste ». La discipline est passée progressivement du statut de philosophie naturelle à celui de science de la nature.

• Ce n’est que vers la fin du 19e siècle que la géographie française prend connaissance des théories de Herder et de Ratzel. Les géographes français (Reclus, Vidal de la Blache, Guyot) proposent, à leur tour, une autre conception de la géographie. Vidal de la Blache substitue le possibilisme à l’environnementalisme : il considère que la nature impose des contraintes et que l’homme en dispose. Il refuse donc de s’en tenir au déterminisme allemand mais conserve la forte empreinte « naturaliste ». Cette évolution de la géographie en France correspond à une époque où le scientisme s’affirme : seules les sciences exactes sont considérées comme donnant accès à la connaissance. La géographie française, pour garder sa crédibilité se sent dans l’obligation de trancher et choisit la voie des sciences naturelles, en calquant ses méthodes sur celles des géologues et des botanistes : relevés et campagnes de recherche sur le terrain. (Claval, 1998). Ce parti pris est important à noter pour mieux comprendre l’évolution plus récente de la géographie, notamment la difficulté que certains ont actuellement à admettre que la géographie ait recours à des notions telles que les représentations. Ce statut de « science exacte » conféré pendant des décennies à la géographie est encore dans les esprits de nos jours.

• La géographie que l’on nomme « classique » qui s’instaure en France entre les années 1870 et les années 1950 est avant tout basée sur la notion d’analyse régionale et favorise l’étude des rapports de l’homme et du milieu. E. Reclus innove dans sa « Nouvelle géographie Universelle » en parlant « d’individualité géographique » à propos de contrées spécifiques au sein d’espaces nationaux (Nonn, 1998). C’est dans ce cadre que P. Vidal de La Blache, à la suite de E. Levasseur, se distingue particulièrement en proposant une géographie régionale fondée sur des bases naturalistes, il parle alors de « régions naturelles » (Nonn, 1998). Vidal emprunte à Guyot la notion de « genre de vie », ce qui lui permet alors de « cerner à la fois les fondements écologiques et les fondements sociaux des faits de répartition ». (Claval, 1998). Il écrit à ce propos : « A l’aide de matériaux et d’éléments pris dans la nature ambiante, l’homme a réussi, non d’un seul coup, mais par une transmission héréditaire de procédés d’inventions, à constituer quelque chose de méthodique qui assure son existence, et qui lui fait un milieu à son image » (Vidal de La Blache, 1922). Notons que Vidal de La Blache fait déjà un premier pas vers ce qui va devenir la « nouvelle géographie », une discipline pour laquelle la tradition explicative passe d’une vision « naturaliste » à une approche « sociale ». La notion de genre de vie porte « un regard synthétique sur les techniques, les outillages et les façons d’habiter des différentes civilisations » (Claval, 1995) et permet de montrer les liens existants entre les habitudes des hommes, leurs manières de procéder et les paysages. L’analyse des genres de vie permet donc de montrer que l’élaboration des paysages reflète l’organisation sociale du travail. Pour autant la géographie reste pour Vidal de La Blache la « science des lieux et non des hommes » (Claval, 1995). C’est pour cette raison que l’aspect social ou culturel de la géographie classique française reste toujours très descriptif.

Mise en application de l’étude des genres de vie

• Jean Brunhes est un des premiers élèves de Vidal de La Blache. Tout en se réclamant de son maître, il s’en distingue par la géographie qu’il développe. Il est très sensible à l’argument des exigences scientifiques et privilégie le paysage, pensant pouvoir l’analyser de façon positiviste. Il accorde autant d’attention aux éléments fonctionnels qu’il observe qu’aux éléments symboliques de la mise en valeur de l’environnement (Claval, 1995). Il projette donc sur les paysages des représentations qui lui sont propres. Sa thèse sur l’irrigation dans les pays méditerranéens (Bruhnes, 1934) présente une grande sensibilité à l’approche culturelle en géographie. Il participe, en outre, à la codification des genres de vie en s’arrêtant notamment sur les formes d’habitat : les matériaux et les techniques de construction, l’ornementation, les petits détails (Claval, 1995). Cette approche, qui emprunte à

l’ethnographie, il la nomme « géographie de l’histoire » et la développe au cours de sa carrière universitaire en se consacrant de plus en plus aux aspects ethniques et aux problèmes culturels.

• Pierre Deffontaines travaille avec J. Brunhes et devient un spécialiste de ces questions « culturelles » (Claval, 1995). Sa thèse, qui porte sur Les hommes et leurs travaux dans les pays de la Moyenne Garonne (1932), reprend la notion de genre de vie. Il est également inspiré par les ethnographes et les folkloristes. Lorsqu’il se voit offrir la direction d’une collection de « géographie humaine », il choisit des thèmes variés tels que la géographie des villes, la géographie des frontières ou des chemins de fer, mais met aussi en place des volumes dont l’objet est très franchement les genres de vie : L’homme et la forêt, L’homme et la montagne, L’homme et la côte. A partir des années 1930, l’engouement pour l’étude des genres de vie retombe, notamment sous l’influence de l’historien M. Bloch qui propose de reconstituer l’histoire des paysages agraires depuis le Moyen-Age (Claval, 1995). Il est suivi dans ce sens par R. Dion par exemple. La géographie humaine classique française et européenne se détourne alors de ses inspirations ethnologiques et sociales jusqu’aux années 1950.

2- Les premiers sursauts d’une approche sociale et culturelle

• P. Gourou est un des pionniers de la prise en compte des aspects sociaux dans l’étude des systèmes agraires. Dès les années 1930, il applique la notion des genres de vie à l’étude du delta du fleuve Rouge au Tonkin (Gourou, 1936). Il met en évidence le fait que l’adaptation des systèmes agraires ne se fait pas seulement par rapport au milieu mais aussi grâce aux organisations familiales et communautaires (Claval, 1995). C’est alors en Afrique que ce nouveau courant géographique trouve tout d’abord son essor. P. Gourou montre les différences culturelles qui expliquent les différentes adaptations à des milieux identiques (Claval, 1995).

• J. Gallais met en place la même logique dans son étude du delta inférieur du Niger (1967), où les types d’adaptation et d’exploitation de micro-milieux très différents dépendent tout autant des ethnies, des rapports de forces, des capacités organisatrices de chaque groupe que de contraintes purement physiques (Claval, 1995). Il montre, que selon l'ethnie considérée, les rapports à l'espace varient radicalement, dans un environnement qu'on aurait pensé homogène. Il opère une sorte de remise en question de la notion de région en démontrant finalement qu'une région «naturelle» (un delta) est vécue très différemment en fonction des cultures, des religions et qu'elle s'avère en réalité être une mosaïque d'entités qui sont, chacune à leur manière, ancrées dans leur territoire (Gallais, 1967). Nous verrons que son travail marque véritablement une étape dans l’évolution de la géographie. La discipline échappe à partir de ce moment à l’exigence positiviste qui la caractérisait depuis le milieu du 19e siècle.

• Les changements ne se font cependant que très lentement. En effet, la lecture géographique proposée avant la Seconde Guerre Mondiale et basée principalement sur l’analyse des genres de vie se trouve rapidement caduque, du fait de grandes évolutions structurelles. D’une part, on assiste à une certaine uniformisation du monde, et en particulier des moyens de production agricoles. D’autre part, le développement des villes et des activités industrielles rend obsolète la distinction des emplois du temps, des tâches professionnelles et des rythmes saisonniers qui distinguaient les espaces ruraux. P. George fait alors partie de ceux qui soulignent les conséquences de ces changements, sans y trouver d’alternatives (George, 1945).

Les influences contrastées que subit la géographie humaine entre les années 1950 et 1970

période dite « classique », la géographie prend conscience que les liens horizontaux entre les hommes sont aussi importants que les liens verticaux entre les hommes et leur milieu (Claval, 1998). C’est dans les années 1950 et d’abord aux Etats-Unis que se dessinent ces avancées. E. Ullman en est le grand défenseur, il définit la géographie comme une science des interactions sociales. Il fait véritablement de la discipline une science sociale. Ses principales inspirations sont l’économie spatiale et les mathématiques modernes (plus particulièrement les statistiques). C’est à la fin des années 1950 que se structure le mouvement, notamment à l’université de Seattle. Il s’appuie sur les effets de la distance sur l’ordre spatial. Ce n’est qu’au début des années 1960 que le nom de « nouvelle géographie » apparaît pour qualifier une approche avant tout quantitative (Claval, 1998) et qui se veut (à nouveau) « objective ». Cette approche sera, elle aussi, bientôt remise en cause pour plusieurs raisons.

L’une des raisons est l’image caricaturale que les économistes donnent de l’homme. Certains géographes remettent en question les logiques marchandes comme étant les seules explications du comportement des hommes (Claval, 1998). Ils font appel à des modèles sociaux, empruntés aux sociologues ou aux politologues - comme les notions de prestige et de pouvoir - pour expliquer les comportements.

L’autre raison est invoquée par des géographes qui refusent de justifier des situations réelles mais injustes. Ils s’interrogent sur l’émanation des disparités spatiales, les dénoncent et refusent de les cautionner par une explication « objective ». Notons en particulier les travaux de W. Bunge et D. Harvey sur les inégalités des quartiers défavorisés urbains, qui fondent un mouvement qualifié de géographie « radicale » (De Koninck, 1998). Il faut noter que dans le courant des années 1960, l’influence du marxisme commence à se faire sentir dans les courants sociaux de la géographie.

• Les théories et concepts de Marx et Engels auraient pu influencer les géographes dès le milieu du 19e siècle. E. Reclus et P. George, même s’ils ne s’en réclament pas délibérément, subissent

leur influence (de Koninck, 1998). Pourtant, l’évolution de la géographie ne prend en compte les idées marxiennes (terme qui renvoie aux concepts de Marx et non pas à sa doctrine ; de Koninck, 1998) qu’à la fin des années 1960. Deux grands thèmes ont été particulièrement féconds dans le courant marxien : celui de la ville et celui de l’échelle mondiale. Pour la ville, il s’agit d’étudier le fonctionnement du « mode de production capitaliste » dont les exigences d’accumulation concernent particulièrement les agglomérations (Harvey, 1973). Pour l’échelle planétaire, il est question de la notion « d’impérialisme » des capitaux, qui distinguent les centres des périphéries à l’échelle mondiale. Notons que cette influence, dont les accents « sociaux » sont marqués, porte principalement sur les formes urbaines et le développement des pays dits du Tiers Monde (Lacoste, 1989), sans porter d’intérêt aux questions dites environnementales.

• À partir des années 1970, la géographie humaine passe à « l’ère du qualitatif, influencée par l’esprit du temps, par sa préoccupation de la qualité de vie notamment et par le freinage des progrès de la géographie quantitative » (Raffestin, Lévy, 1998). Dans les « nouvelles » approches géographiques, et ce jusqu’aux années 1970, la dimension psychologique n’était généralement pas prise en compte. Par souci d’objectivité notamment, les géographes refusaient de considérer l’impact spatial des sentiments, des représentations et de la dimension culturelle de l’homme. La géographie va connaître une autre évolution en changeant de point de vue sur l’objectivité.

• Dès les années 1960, quelques précurseurs nord-américains s’inspirent de la « géographie du comportement » (behavioural en anglais) et traitent des déplacements des citadins, de leurs repères dans l’espace urbain (K. Lynch: The image of the city, 1959). Ils sont inspirés par la psychologie cognitive et aussi par l’éthologie, qui consiste notamment à étudier les processus de mémorisation d’itinéraires par des animaux lâchés dans des labyrinthes (Debarbieux, 1998). Progressivement, cette conception évolue vers une géographie dite de la « perception » qui, tout en restant attachée à la psychologie, se détache de la dimension purement comportementale. Les cartes mentales sont l’outil privilégié par R. Downs et D. Stea qui y voient « un construit » individuel et

social, relatif à la nature de l’environnement (Mentals maps, 1974). P. Gould et R. White contribuent à populariser leur usage en localisant les préférences résidentielles des habitants.

• En France, le mouvement est plus long à se mettre en place. Les travaux de Brunhes et de Gourou que nous avons évoqués, restent attachés à l’expression concrète des particularités culturelles, dans la tradition de l’école de Berkeley (approche culturelle par des enquêtes minutieuses et une cartographie de détail des paysages vernaculaires, Sauer, The morphology of landscape, 1925). Les productions immatérielles, croyances, langages, sont rarement évoquées ou ne constituent pas le but des études de l’école française. Ce sont finalement les travaux de J. Gallais (1967) qui éclairent la notion de région en fonction de traits à la fois matériels mais aussi idéels (appartenance ethniques, mythes, croyances). Le sociologue H. Lefebvre, parle, quant à lui, de la région géographique comme d’un espace où le sentiment joue un rôle. Il affirme en effet que l’espace organisé est le produit des représentations mentales partagées par les acteurs sociaux : ceux-ci cherchent par tous les moyens à transformer leurs rêves en réalité (Lefebvre, 1974). Enfin, A. Frémont prend conscience du revirement épistémologique qui se produit quand il refuse de se contenter de parler « d’espace de vie » et qu’il préfère évoquer « l’espace vécu ». S’inspirant des travaux de Gallais, il est celui qui théorise ce changement. C’est le début d’un mouvement important dans la géographie occidentale : plusieurs tendances se dessinent alors : géographie sociale (Frémont, Di Méo), géographie culturelle (Claval, Collignon), géographie humaniste (Bailly).

3- La structuration d’une géographie « proche des hommes » et « utile à la

société »

D’après P. Claval, c’est E. Reclus qui, le premier, emploie le terme de géographie sociale. Il est longtemps synonyme de géographie humaine, notamment dans les pays anglo-saxons (Claval, 1998b). De nos jours, l’appellation de géographie humaine n’est pas aussi large qu’on veut parfois le croire. Il importe de rappeler ses fondements avant de détailler les différents courants qui la composent.

a- La géographie humaine : l’homme au centre des préoccupations

Ce que Ratzel nommait Anthropogeographie a été traduit en français par « géographie humaine » (Claval, 1995). De nos jours, elle est souvent opposée à la géographie physique, la distinction n’est pourtant pas toujours évidente. Bailly, dans la définition qu’il en donne, souligne cette opposition traditionnelle. « La géographie humaine, même si elle intègre des préoccupations environnementales, pose avant tout des questions privilégiant l’homme, ses représentations et ses pratiques » (Bailly, 1998). Notre approche s’inscrit dans cette conception de la géographie.

La géographie humaine repose, selon A. Bailly, sur cinq grands principes. Ils sont à la base de notre réflexion et nous semblent intéressants à citer à ce titre. Le premier est le principe existentiel qui pose que le géographe appartient aux sociétés qu’il étudie et qu’il doit donc expliquer les idéologies auxquelles il fait référence. Les quatre principes suivants nous intéressent plus particulièrement. Premièrement, le principe de représentation se base sur le fait que « l’espace en soi n’est pas l’objet d’étude, puisque le réel objectif n’existe que grâce à nos construits. » La géographie consiste donc à étudier la représentation de phénomènes à partir de concepts. Deuxièmement, il existe un principe imaginaire selon lequel la géographie propose des images, des modèles simplifiés du monde. Le troisième principe s’appuie sur l’idée de création. La représentation constitue une création d’un schéma pertinent, mais partial du réel, qui nous renvoie à nos idéologies. Enfin, le principe de rétroaction affirme que « les représentations se nourrissent des pratiques et inversement. » La société

ne crée pas seulement son milieu de vie grâce à ses productions mais aussi au travers de ses représentations (Bailly, 1998).

Ces principes, presque « simplistes », nous paraissent fondamentaux dans notre approche. Ils donnent naissance à d’autres approches plus spécifiques telles que la géographie sociale et la géographie culturelle. Ces courants inspirent également notre travail sur de nombreux points.

b- La géographie sociale : influence marxienne et sociologique

La géographie sociale « s’efforce de retracer les itinéraires, les cheminements au fil desquels chacun de nous invente son quotidien, à la fois social et spatial, sous les effets conjoints de sa position dans la société, des modèles culturels que nourrit la mémoire collective, de l’imaginaire que sécrète notre conscience socialisée. (…) A ce titre, elle se distingue d’une géographie humaine et d’une géographie culturelle qui n’accordent que peu de poids aux positions sociales dans l’espace. » (Di Méo, 1998). Cette définition rappelle la double inspiration de la géographie sociale : psychologie/sociologie et marxisme. Frémont, quand il théorise la géographie sociale, dit avoir conscience de passer à côté d’une partie de l’élaboration des territoires en ne prenant pas en compte l’univers égocentré de l’homme (Frémont, Chevalier, Hérin, Renard, 1984). En outre, la géographie sociale décrit et explique les aspects de la vie sociétale qui contribuent à la différenciation spatiale du monde (Di Méo, 2001). Elle considère donc les classes sociales comme les collectivités principalement engagées dans l’organisation de l’espace. En affirmant que « c’est l’expression spatiale des rapports sociaux de production qui doit retenir l’attention du géographe » (Di Méo, 2001), la géographie sociale se place dans une lecture marxienne de nos sociétés.

Pour parvenir à ce but, c’est le poids des représentations sociales dans notre perception et dans notre analyse des phénomènes géographiques qui est mis en avant et retenu comme outil méthodologique de la géographie (Frémont, 1984). Frémont reprend, à ce titre, la notion que les anglo-saxons considéraient depuis plus longtemps, « l’espace vécu », qui varie en fonction des individus et de leurs conditions objectives d’existence. La thèse de H. Gumuchian illustre ce parti pris en utilisant les cartes mentales comme méthode de différenciation spatiale (1982).

Tableau 1 : Quelques repères de la filiation de la géographie sociale française

Géographie SOCIALE

1900/1930 : Vidal de la Blache (les genres de vie)

Avant 1945 : Lynch et école anglo-saxonne (espace vécu, étude des villes, cartes mentales)

Après 1945 : Pierre George (la composition sociale des régions)

Années 1960 : école d’écologie sociale de Chicago (Burgess) (la ségrégation dans les aires métropolitaines)

1970/1980 Frémont, Chevalier, Hérin, Di Méo, Gumuchian « Position sociale de l’homme dans l’espace »

c- La géographie culturelle : la dimension historique et anthropologique

La géographie culturelle pose « qu’il n’est pas de compréhension possible des formes d’organisation de l’espace contemporain et des tensions qui les affectent sans prise en compte des dynamismes culturels » (Claval, 1995). Elle s’inscrit dans la géographie humaine où « le géographe se penche sur les liens que les individus tissent entre eux, sur la manière dont ils instituent la société, l’organisent et l’identifient au territoire dans lequel ils vivent ou dont ils rêvent » (Claval, 1995). P. Claval considère