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INSTRUMENTS E T MOYENS INSTITUTIONNELS DE L ’INTEGRATION

PRISE DE DECISION

H. DIFFICULTES A SURMONTER POUR INTEGRER LE SOUCI DE L ’ENVIRONNEME NT DANS

IV. INSTRUMENTS E T MOYENS INSTITUTIONNELS DE L ’INTEGRATION

46. Les structures administratives et politiques et les mécanismes

et instruments permettant d’intégrer le souci de l ’environnement dans la prise de décision sont multiples. Ils dépendent fortement de l ’organisation, de la tradition et les pratiques des différents pays. Ils sont également fonction du niveau auquel les décisions sont prises, national, régional ou local. En théorie, plus la décision est impor­ tante, plus le niveau de décision est élevé, mais ceci n’est pas néces­ sairement vrai en ce qui concerne l ’effet de la décision sur l ’environ­ nement : à titre d’exemple, la construction d’une maison à proximité d ’un monument de qualité exceptionnelle, peut détruire le site. Bien que la décision soit locale, l ’autorité chargée de protéger le site pourra être d’essence nationale. Donc s’il y a évidemment intérêt à ce que les soucis de l ’environnement soient portés au même niveau

que celui de l ’autorité qui décide, il peut être nécessaire qu’ils le soient aussi à un niveau supérieur.

Les mécanismes et instruments

47. Ils peuvent être de divers ordres, législatifs, réglementaires,

économiques :

- Les lois et mécanismes réglementaires

Parmi les lois récentes qui ont été adoptées dans un certain nombre de pays Membres de l ’ OCDE, celles qui visent à étendre le contrôle des produits chimiques avant leur commercialisation et leur utilisation sont typiquement des législations à caractère anticipatif.

Un effet d’anticipation considérable est obtenu si les lois et règlements sont clairs, publics et rigoureusement appliqués.

- Les mécanismes économiques (incitations et pénalisations fiscales, subventions publiques de l ’Etat, accès à des financements privilégiés, aides financières des collectivités locales). L ’expérience montre que les incitations même d’un montant faible et respectant le principe pollueur-payeur peuvent orienter les décisions dans un sens très favorable pour l ’environnement.

48. Quatre mécanismes spécifiques à la protection de l ’environne­

ment présentent une importance particulière : - les plans d’occupation des sols, - les redevances,

- l ’étude d’impact sur l ’environnement, - les objectifs de qualité.

Les plans d’occupation des sols

49. La planification des sols est apparue en France il y a une tren­

taine d’années. Son objectif est d’utiliser au mieux ce patrimoine collectif limité pour réduire les dépenses collectives directes et indi­ rectes d’équipement et de fonctionnement, am éliorer le cadre de vie (paysage, organisations de la vie, etc. ), permettre un développe­ ment cohérent et harmonieux des constructions, protéger certaines activités (agriculture), etc. Les documents fixant l ’usage des sols sont fixés après accord entre l ’administration et les élus, après consultation du public.

50. L ’expérience acquise depuis cette époque permet de mettre en

- l ’affectation des sols leur donne des valeurs potentielles différentes et crée des rentes de situation pour les proprié­ taires. Le terrain "à bâtir" vaut en effet plus cher que le terrain non constructible. Il est très difficile d’établir des compromis équitables entre les propriétaires ;

- les plans d’affectation des sols ne peuvent pas être intan­ gibles et doivent évoluer avec le développement. Le compromis entre cette souplesse nécessaire et la perma­ nence qui doit garantir l ’efficacité du plan, est difficile ; - enfin l ’accord entre les intérêts divergents de l ’adminis­

tration de l ’Etat (réduction des dépenses publiques, protec­ tion des sites), des élus locaux (développement des cités) et des propriétaires de terrain, est malaisé à obtenir.

51. Ce mécanisme se révèle extrêmement efficace pour l ’utilisation

des sols, donc pour le cadre de vie, mais ne permet guère de pro­ téger les milieux naturels (on n’y fixe pas d’autorisation ou de normes d ’usage). Néanmoins certains pays (UK) vont plus loin dans ces plans, jusqu’à y fixer l ’usage des milieux naturels.

52. On peut penser à diverses améliorations :

- plus de participation du public : par exemple en publiant ces documents sous forme de petits livres de grande diffu­ sion ;

- une procédure plus légère dans certains cas (petites communes) ;

- des directives nationales imposant des contraintes régle­ mentaires générales dans certaines zones (littoral, montagne) ;

- dans les pays où l ’organisation administrative le permet, développer les plans d’usage des sols et des milieux naturels.

Les redevances

53. En France existe depuis dix ans un mécanisme d ’internalisation

des coûts : celui des Agences de bassin. Ces organismes perçoivent des redevances sur les consommateurs ou les pollueurs de l ’eau, proportionnellement au prélèvement, à la consommation ou à la pollu­ tion. Le produit de ces redevances est utilisé pour subventionner les ouvrages d ’amélioration des eaux en quantité ou en qualité.

54. L ’expérience a montré que les redevances incitent à réduire

les pollutions et les consommations et ce faisant incitent au bon fonc­ tionnement des installations, à l ’équipement anti-pollution, au choix de techniques moins polluantes ou moins consommatrices, à la

meilleure localisation des installations. Cependant une action régle­ mentaire conjointe est apparue indispensable pour inciter à 1Tépuration, ou à l ’économie, en particulier dans les cas où le montant des rede­ vances s ’avère modeste.

55. Des mécanismes analogues existent notamment aux Pays-Bas

pour l ’usage de l ’eau, au Japon pour la pollution atmosphérique. Ils y montrent leur efficacité, mais aussi que l ’action réglementaire reste indispensable.

L ’étude d’impact sur l ’environnement

56. Sous des formes diverses ce mécanisme existe dans différents

pays et notamment en France depuis le 1er janvier 1978, aux Etats- Unis et au Canada depuis 1970. Il s ’applique essentiellement aux décisions d’investissement, publiques ou privées nécessitant une autorisation publique. Ce sera le processus essentiel ’’d ’audit envi­ ronnement” pour les investissements. Il commence à montrer son efficacité dans les décisions. Il paraît être un des plus prometteurs.

57. En France, les projets qui y sont soumis étaient déjà prêts avant

que cette procédure ne devienne applicable. Ses effets sont donc encore limités dans la prise de décision, ils conduisent principalement à modifier certains aspects du projet sans en m odifier le principe même. Mais l ’on sent que pour les nouveaux projets qui s ’élaborent mainte­ nant, l ’étude d’impact influe sur la conception même du projet. Ceci a également été observé aux Etats-Unis et au Canada où des projets importants, même commencés ont été abandonnés.

58. Cette procédure peut présenter l ’inconvénient lors de sa mise

en place de retarder la prise de décision. Ceci provient de deux causes :

- la procédure s ’applique à des projets déjà prêts. Mais dans l ’avenir, s ’intégrant ” à l ’amont” de la prise de déci­ sion, elle ne devrait pas introduire de retard ;

- la méthodologie n’est pas encore fixée. On ne sait pas encore les points principaux que l ’étude d’impact doit faire apparaître selon les types de projets et leur localisation. L ’expérience des Etats-Unis et du Canada montre que ces défauts disparaissent avec le temps.

59. Cette procédure présente l ’avantage, si elle est appliquée le

plus tôt possible dans la prise de décision, dTécarter à leurs débuts des projets défectueux, alors qu’ils n’en sont qu’au stade des études préliminaires. Cet avantage est certain, encore qu’il ne soit pas

possible de fournir des statistiques, puisque la décision de rejet est prise par les concepteurs mêmes du projet avant tout examen public.

60. Le coût des études dTimpact a été critiqué. Aux USA ce coût

est très variable (entre 0,05 % et 1 à 2 % du prix du projet) mais reste acceptable. Les quelques statistiques françaises sont du même ordre de grandeur.

61. Les améliorations à apporter semblent les suivantes :

- préparer l Tétude dTimpact au début des décisions, en exa­ minant de manière de plus en plus précise les éléments adéquats au fur et à mesure de l ’élaboration du projet ; - disposer de données techniques et économiques fiables, ce

qui montre encore l ’ importance de la recherche ;

- dégager, selon le type de projets et leur localisation, les éléments qui doivent être étudiés et ceux qui sont secon­ daires ;

- permettre les alternatives réelles : ceci implique que pour les projets faisant partie dTun ensemble (projets de lignes électriques haute tension, de centrales, de routes et auto­ routes), l ’ensemble soit étudié avant chaque partie ; - adapter les méthodes de consultation du public selon le

projet.

62. On peut se demander qui doit réaliser l ’étude d’impact : est-ce

l ’auteur du projet, l ’administration qui le contrôle ou l ’administration chargée de la protection de l ’environnement ? Cette question paraît un peu secondaire, chaque pays pouvant trouver une réponse conforme à sa tradition. En France, c ’est l ’auteur du projet. L ’essentiel est que l ’étude soit publique, et que le public connaisse les suites données à ses observations.

Les objectifs de qualité

63. Ce mécanisme organise l ’usage d’un bien naturel dans une

communauté géographique cohérente : par exemple l ’usage de l ’eau dans un bassin ou rivière. Compte tenu des utilisations actuelles et prévisibles, du niveau de pollution de la ressource, de ses capacités, des coûts d’investissements et de fonctionnement entraînés par la lutte contre la pollution ou par l ’accroissement des ressources, l ’administration prépare plusieurs schémas d’utilisation des cours d’eau qui en fixent les qualités et les débits, et auxquels correspon­ dent les projets d’ouvrages nécessaires. L ’ensemble des utilisateurs, consultés publiquement, retient un de ces schémas. Les autorisations de prélèvement et de rejet sont ultérieurement délivrées conformément à ce schéma. Les difficultés sont analogues à celles que rencontre le

plan dutilisation des sols. Ce mécanisme dTobjectifs de qualité s ’avère très efficace pour anticiper sur les décisions dans des bassins fragiles ou très utilisés.

Les moyens institutionnels

64. On se contentera d’énoncer quelques-unes des structures mises

en place dans différents pays.

Mission interministérielle au niveau national

65. Cette structure est adaptée à deux types de cas :

- quand le problème traité est encore neuf,

- et/ou quand le problème traité est complexe et qu’il met en jeu plusieurs départements ministériels.

66. Cette structure d’animation présente l ’avantage de réunir les

responsables des administrations au niveau adapté pour préparer une politique nationale d’ensemble mais a l ’inconvénient de ne pas avoir de pouvoir politique et de ne pouvoir travailler qu’à l ’unanimité.

Ministre et administration

67. Les compétences du Ministre peuvent être de deux types selon

qu’il est chargé exclusivement de l ’environnement, ou simultanément de l ’environnement et d’autres domaines. La structure m inistérielle à compétence unique est préférable quand le problème traité relève entièrement du Ministre et quand celui-ci dispose d’une administration exclusivement ou principalement chargée d’exécuter ses décisions. En revanche quand le Ministre a d’autres compétences le risque existe que l ’autre domaine de compétence soit privilégié par rapport à l ’envi­ ronnement ou bien que l ’environnement s ’applique préférentiellement à cet autre domaine de compétence et moins aux autres départements ministériels ; par contre, deux avantages considérables apparaissent : l ’autorité publique du Ministre est accrue et par ailleurs la protection de l ’environnement dans son propre domaine de compétence est mieux assurée.

68. Il est important qu’il y ait une administration dont la mission

soit la protection de l ’environnement. Cela ne veut pas dire que toutes les fonctions du gouvernement en la matière doivent être concentrées sur une seule administration, mais qu’il doit y avoir un point focal, clairement identifié dans l ’administration, pour la protection de l ’envi­ ronnement, disposant, si possible du pouvoir réglementaire et des fonds publics.

Les organismes de planification

69. Les organismes (commissions) chargés de préparer les plans

sont précieux pour anticiper sur les décisions : c ’est d’ailleurs leur rôle essentiel.

70. Ils ne disposent généralement pas de pouvoir politique ou de

décision directe, et leur travail est le fait d’un compromis entre leurs membres. Mais ce travail se place dans un cadre cohérent où les facteurs principaux sont pris en compte, ce qui est un précieux avan­ tage.

Etablissements publics nationaux

71. Divers exemples existent en France : les Agences de bassin,

le Conseil Supérieur de la Pêche, l ’Office National de la Chasse, l ’Agence Nationale pour la Récupération et l ’Elimination des Déchets.

72. Ce sont les prolongements de la Puissance Publique, chargée

d’am éliorer l ’environnement dans un secteur limité (eau, faune, déchets solides, etc. ) ; ces organismes tirent leurs ressources de l ’efficacité de leur action : c ’est donc une incitation puissante à leur efficacité. En outre, les membres de leurs Conseils d’Administration deviennent d’ardents défenseurs de leur cause. Ils constituent des moyens extrêmement efficaces d’orientation des décisions.

Les associations

73. Comme ce point relève d’un autre document soumis au Conseil

de l ’ OCDE, il ne sera pas développé ici. Il suffit de rappeler qu’elles constituent un moyen d’anticipation fondamental et que leur rôle ne peut que se développer dans l ’avenir.

V

LA PARTICIPATION DU PUBLIC ET LES