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institutionnel et de mobilisation d’acteurs dans la mise en place des plans communaux de sauvegarde

en matière d’élaboration des P.C.S. doivent être poursui- vis à un rythme soutenu. La couverture nationale reste néanmoins partielle et les taux de réalisation demeurent variables, avec des écarts allant de 2 % (Manche) à 83 % (Pas-de-Calais) (D.D.S.C., 2008 ; Jacob-Juano et al., 2010). De prime abord, l’exposition à des risques majeurs pour- rait expliquer une plus forte prise en compte. Toutefois, à titre d’exemple, 60 % des communes fortement touchées lors des inondations du Gard en 1999 n’ont toujours pas de P.C.S. à la fin de l’année 20101. L’apparente contradiction

entre territoire(s) à risques et absence de P.C.S., une fois le délai donné par le décret écoulé pour toutes les com- munes soumises à obligation, n’est pas nouvelle (Gianno- caro, 2011). Gralepois (2008a), dans son enquête intitulée « Le plan communal de sauvegarde : une approche territoriale

de la sécurité civile », rappelle que 30 à 40 % des communes

ayant un P.P.R. ou un P.P.I. n’ont toujours pas de P.C.S. Si l’exposition aux risques majeurs et l’existence d’une obli- gation légale sont des facteurs insuffisants pour stimuler la réalisation des P.C.S., l’étude actuelle s’intéresse aux lenteurs institutionnelles et aux blocages dans la mobili- sation des acteurs publics locaux, plus spécifiquement des municipalités et des services déconcentrés de l’État. Le sys- tème politico-administratif français est organisé selon un double processus : une déconcentration de l’État dans les territoires et une décentralisation vers le pouvoir politique local. Ce double système est régulièrement réorganisé, depuis les années 1980, comme récemment avec la mise en œuvre de la réforme générale des politiques publiques depuis 20072 et la réforme des collectivités territoriales de

décembre 2010.

Dans ce cadre, les missions de sécurité civile et de pré- vention des risques majeurs existent également à plu- sieurs niveaux. Le ministère de l’Intérieur — à travers la Direction à la défense et la Sécurité civile (D.D.S.C.) — coordonne la planification opérationnelle de gestion de crise sur le territoire national. Le ministère de l’Éco- logie et du Développement durable, à travers la Direc- tion générale à la prévention des risques, fournit une expertise sur le diagnostic des risques, les questions d’information ou la maîtrise de l’urbanisme. À l’échelle des départements, le service interministériel régional des Affaires civiles et économiques de défense et de pro- tection civiles (SIRACED-PC) met en œuvre la politique du ministère de l’Intérieur. La direction départementale des territoires (D.D.T.) applique, elle, les consignes du ministère de l’Écologie. La préfecture est également cen- sée représenter la politique du gouvernement et relaie, à ce titre, l’ensemble des politiques d’État. Le rôle du préfet est primordial car il a pour obligation de porter à connaissance les dangers existants aux communes. Lors d’un accident, en cas de dépassement des limites ou des capacités des communes, le préfet remplace le maire dans la direction des opérations de secours3. Pour

1. Observatoire des risques d’inondation sur le Gard : www.orig.fr

2. La Réforme générale des politiques publiques (R.G.P.P.) n’est pas seule- ment, depuis 2007, une énième modification des organigrammes des ser- vices de l’État. La priorité aux choix budgétaires, le resserrement des moyens humains, le recours à l’expertise privée externe, la concentration du pouvoir de décision dans les mains des préfets sont autant de mots d’ordre qui, mis en œuvre depuis janvier 2010, déstabilisent le fonctionnement quotidiens des services déconcentrés d’État (Bezès, 2009).

3. Article 17-18 de la loi de modernisation de sécurité civile de 2004 : « En cas d’accident, sinistre ou catastrophe dont les conséquences peuvent dépas-

les administrations décentralisées, la commune a un rôle pilier. Le maire est le premier représentant de sa com- mune : il exerce un pouvoir de police administrative et municipale (Douvinet et Denolle, 2010).

Autour des deux niveaux d’autorité locale (déconcentrée et décentralisée), la nature des coopérations évolue constamment. La question est alors de savoir si les conditions de répartition des missions et des moyens de sécurité entre les différents niveaux d’action publique (déconcentrée et décentralisée) ne sont pas un facteur de blocage dans la mise en place des P.C.S.

Le travail a pour objectif de proposer des pistes de réflexion en vue d’une recherche-action basée sur une approche socio-géographique, en considérant que les dynamiques des territoires sont le reflet de la construction des représentations et des usages des acteurs sociaux4.

Cette analyse est l’occasion de proposer des explications possibles qui viseraient à faciliter la mise en place des plans communaux de sauvegarde. Le travail se base sur plusieurs résultats. La première série de données est tirée du rapport sur les conditions de réalisation des P.C.S. (Gralepois5, 2008a) réalisé pour le Conseil national de la

Protection civile. Elle permet d’apporter des premières réponses sur les facteurs de blocage observés à l’échelle nationale. Une analyse menée à une échelle plus fine6 sur

le Vaucluse est ensuite abordée à l’aune des arguments avancés dans les parties précédentes. L’année 2010 a été une année charnière pour ce département puisque le SIRACED-PC a créé un « P.C.S.-type » afin d’aider les communes de moins de 3 000  habitants, faisant passer le nombre de P.C.S. approuvés à 42 à la fin 2011, voire même à 94  P.C.S. si on retient les documents en cours d’élaboration. Le travail est ensuite complété par les réponses à des entretiens menés auprès de plusieurs services administratifs déconcentrés de l’État –notamment les SIRACED-PC– et des services de sécurité civile de plusieurs villes7.

ser les limites ou les capacités d’une commune, le représentant de l’État dans le département mobilise les moyens de secours relevant de l’État, des col- lectivités territoriales et des établissements publics. En tant que debesoin, il mobilise ou réquisitionne les moyens privés nécessaires aux secours. Il assure la direction des opérations de secours. Il déclenche, s’il y a lieu, le plan Orsec départemental. »

4. La notion de territoire est « à la fois juridique, politique, économique, sociale et culturelle, voire même affective. En parlant de territoire, il s’agit non seulement d’une entité juridique et politique, mais également d’une entité habitée, appropriée et vécue par les habitants. On peut également dire que le territoire « est une “projection” sur un espace donné de structures spécifiques d’un groupe humain, qui incluent le mode de découpage et de gestion de l’espace, l’aménagement de cet espace » V. November (2002),

Les territoires du risque : le risque comme objet de réflexion géographique, Peter

Lang, Berne, p. 17.

5. L’échantillon d’enquête a été réalisé entre septembre 2006 et février 2007. Il comprend 73 réponses, soit 33 intercommunalités et 40 communes, soit environ 21 % de taux de réponse.

6. Cette étude (finalisée en juin 2011) avait pour objectif de faire un état des lieux sur le contenu, les divergences et les similitudes dans les P.C.S. approuvés et en cours d’élaboration.

7. Les entretiens réalisés dans les communes du Havre, Lyon et Nantes sont issus du doctorat « Les risques collectifs dans les agglomérations françaises à

travers le parcours des agents administratifs locaux » (Gralepois, 2008b). Les

entretiens menés à Tours ont été réalisé lors de la recherche « Connaissance des vulnérabilités des activités humaines et des milieux du bassin de la Loire par rapport aux effets du changement climatique sur les régimes d’inondation et de sècheresse » rendu à l’Établissement public Loire en 2011.

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Mathilde Gralepois & Johnny Douvinet

4.1 Une diffusion inégale du P.C.S., témoin