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Étude de l’influence du broyage et du co-broyage sur les propriétés d’usage du ciment

1. Revue bibliographique

1.2. Influence du procédé de broyage sur la composition et les propriétés des ciments

1.2.1. Influence du procédé de broyage sur les propriétés de la pâte

Une fois un ciment hydraulique gâché, il forme une pâte malléable qui évolue au cours du temps vers une céramique dure. Les principales propriétés de cette pâte, abordées dans le paragraphe suivant, sont sa facilité à être injectée et la vitesse avec laquelle elle se transforme, c’est-à-dire la cinétique et le temps de prise.

Chapitre III Étude de l’influence du broyage et du co-broyage sur les propriétés d’usage du ciment

1.2.1.1. Injectabilité de la pâte

Peu d’études systématiques ont été menées sur l’influence de la taille moyenne et de la morphologie des particules de la phase solide sur l’injectabilité d’un ciment. De plus, à notre connaissance, aucune étude appliquée aux ciments biomédicaux n’a été réalisée à ce jour sur l’apport du co-broyage de la phase solide sur les propriétés d’injectabilité.

Nous nous intéresserons dans ce paragraphe à l’influence des caractéristiques de la phase solide sur l’injectabilité du ciment de manière générale, puis plus particulièrement sur le phénomène de séparation de phase qui peut avoir lieu lors de l’injection et qui, en bloquant le passage de la pâte, diminue son injectabilité.

La relation entre la taille moyenne des particules de la phase solide et l’injectabilité de la pâte est loin d’être simple car il faut également tenir compte de la variation continue de la distribution de taille des particules d’un ciment lors de la réaction de prise [Bohner et Baroud, 2005-a], phénomène qui peut de plus être accentué par les procédés de broyage ou de co- broyage, connus pour accroître la réactivité des poudres.

Par conséquent, si broyer les constituants d’un ciment pourrait augmenter l’injectabilité, cette augmentation ne sera que temporaire puisque la prise du ciment est plus rapide [Bohner et Baroud, 2005-a].

Influence de la taille moyenne des particules de la phase solide sur l’injectabilité de la pâte

Les études montrent que, lorsque la taille moyenne des particules de la phase solide diminue, la viscosité de la pâte augmente [Ginebra et coll., 2004 ; Baroud et coll., 2005 ; Liu et coll., 2006-a].

Ginebra et coll. [2004] précisent également qu’ils obtiennent « comme prévu » une pâte plus épaisse car la surface spécifique des particules de la phase solide augmentant, une quantité plus importante d’eau peut être adsorbée à leur surface. Par conséquent, la pâte obtenue est moins injectable.

Delgado et coll. [2005] observent également une diminution de l’injectabilité lorsque des particules plus fines sont utilisées. Ils expliquent ce phénomène par l’augmentation des interactions entre les particules et les phénomènes de floculation qui en résultent. En effet,

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s’ils ajoutent un additif qui réduit les interactions inter-particulaires, alors l’injectabilité augmente avec la finesse de la poudre.

Influence de la distribution de taille des particules de la phase solide sur l’injectabilité de la pâte

Gbureck et coll. [2005] ont étudié l’influence de la distribution de taille des particules de la phase solide d’un ciment : pour leur étude, ils ont ajouté dans leur phase solide initiale, de distribution monomodale, de 13 à 33 % en masse d’additifs (TiO2, CaCO3, DCPA) de

granulométrie fine afin d’obtenir une distribution de taille bimodale. Le but est d’augmenter la fraction de volume solide : les petites particules se logent dans les interstices entre les particules de taille supérieure, sans modifier leur empilement. La différence de taille entre les fines et les particules initiales déterminerait ainsi l’empilement des particules au sein de la pâte et donc les propriétés rhéologiques de celle-ci.

Dans ces conditions, les auteurs observent :

- une diminution de la quantité minimale de liquide qui doit être ajoutée à la poudre pour former une pâte plastique,

- une diminution de la viscosité du ciment,

- et, par conséquent, une nette augmentation de l’injectabilité de la pâte.

La diminution de viscosité et l’augmentation de l’injectabilité de la pâte pourraient être expliquées par la réduction de l’espace inter-particulaire qui augmenterait l’effet de répulsion électrostatique entre deux particules.

Cependant, la quantité d’additifs doit être optimisée : il existerait un pourcentage massique de particules fines pour lequel l’injectabilité serait maximale.

Notons que la distribution de taille des particules influence également l’injectabilité des ciments acryliques : il est nécessaire d’optimiser la distribution de la taille des particules pour obtenir des propriétés rhéologiques maximales [Hernández et coll., 2006].

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Influence de l’état d’agglomération des particules de la phase solide sur l’injectabilité de la pâte

De manière générale, les auteurs observent une augmentation de l’injectabilité lorsque les particules de la phase solide sont désagglomérées :

- une dispersion efficace des agglomérats de particules grâce à l’utilisation d’un additif (répulsion électrostatique) engendre un effet « liquéfiant » des pâtes à base de phosphates de calcium : leur injectabilité est augmentée [Delgado et coll., 2005 ; Gbureck et coll., 2005].

- l’ajout d’un agent floculant augmente la viscosité de la pâte alors que l’ajout d’un agent qui disperse les agrégats la diminue [Baroud et coll., 2005]. Notons cependant que ces deux agents augmentent l’injectabilité.

Influence de ces paramètres sur le phénomène de séparation de phase ou « filter-pressing », approche théorique

Pour avoir une approche théorique du phénomène de séparation de phases, Bohner et Baroud [2005-a] ont choisi comme modèle une pâte qui, à l’inverse d’un ciment, n’évolue pas au cours du temps (aucune réaction de prise). Une suspension de phosphate de calcium tricalcique (β-TCP) dans l’eau est utilisée expérimentalement pour appuyer leur modèle théorique.

Ce modèle permet de tirer deux conclusions principales : l’injectabilité d’une pâte peut être augmentée en diminuant la taille des particules ou en diminuant la limite de plasticité (LP) des poudres réactives. Cette dernière est définie comme la quantité minimale de liquide qui doit être ajoutée à la poudre pour former une pâte plastique. En deçà de cette limite, la pâte est friable ; au-dessus, on obtient une pâte cohésive et malléable.

En effet, selon le modèle proposé par Bohner et Baroud [2005-a], l’épaisseur du gâteau qui bloque la progression de la pâte vers l’extrémité de la seringue est :

- proportionnelle au diamètre des particules, - inversement proportionnelle à (L/S - LP),

Pour augmenter l’injectabilité en gardant L/S constant, il faut diminuer l’épaisseur du gâteau et donc diminuer LP. Les auteurs proposent plusieurs stratégies pour ce faire :

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- contrôler la taille des particules en la diminuant,

- contrôler la distribution de taille des particules en favorisant des distributions granulométriques multimodales,

- contrôler la morphologie des particules en utilisant des particules sphériques plutôt que de formes irrégulières,

- contrôler l’état d’agglomération des poudres réactives et les interactions inter- particulaires en utilisant des poudres complètement désagglomérées.

Toutes ces caractéristiques de la phase solide peuvent être modifiées par le procédé de broyage, comme vérifié par les auteurs : LP diminue. Ceci pourrait, selon eux, être expliqué soit par un élargissement de la distribution de taille des particules, soit par la désagglomération des particules.

Conclusions

Parmi tous les facteurs susceptibles d’influencer l’injectabilité d’un ciment, certains sont plus aisés à contrôler. Il est possible de proposer plusieurs axes pour augmenter l’injectabilité d’un ciment :

- diminuer la taille moyenne des particules (approche physique), - augmenter le rapport L/S,

- utiliser des particules de forme rondes plutôt qu’allongées,

- utiliser des particules désagglomérées ou diminuer les interactions inter-particulaires, - utiliser une distribution de particules large,

- augmenter la viscosité de la phase liquide.

1.2.1.2. Temps de prise du ciment

Les études montrent que, lorsque la taille moyenne des particules d’une phase solide diminue, le temps de prise du ciment diminue car la réaction d’hydratation des particules est accélérée [Baroud et coll., 2005 ; Bohner et coll., 2005-b ; Delgado et coll., 2005 ; Liu et coll., 2006-a ; Brunner et coll., 2007].

Ginebra et coll. [2004] se sont intéressés à l’influence de la taille des particules de la poudre réactive sur le temps de prise de leur ciment mono-composant. Ce dernier prend par une

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réaction d’hydratation puis dissolution-reprécipitation d’un sel de phosphate de calcium (α- TCP). Ils ont étudié deux poudres de distributions granulométriques bimodales et de diamètres moyens différents (respectivement 10,88 et 2,22 µm). Ils obtiennent une diminution du temps de prise final d’un facteur 5 avec la poudre la plus fine.

Liu et coll. [2003] ont étudié un ciment à deux composants (TTCP + DCPA). Ils ont broyés séparément leurs deux produits (à 3 tailles de particules différentes pour chaque produit) et ont réalisé des mélanges avec toutes les combinaisons possibles de tailles et de compositions. La taille des particules est ici aussi un des facteurs déterminants pour la vitesse d’hydratation et le temps de prise. En revanche, la phase solide qui leur permet d’atteindre la plus grande vitesse d’hydratation et le temps de prise le plus court ne correspond pas au mélange des particules les plus petites pour les deux types de composés. Les auteurs en déduisent que le rapport de taille entre les deux types de composants est également important : il serait donc nécessaire d’optimiser les tailles des particules afin d’obtenir une combinaison optimisée.

Tofighi et Palazzolo [2006] quant à eux, ont étudié le co-broyage de la phase solide de leur ciment, composée de brushite et de phosphate de calcium amorphe. Ils remarquent que la cinétique de durcissement est là aussi très significativement accélérée grâce au co-broyage.

1.2.2. Influence du procédé de broyage sur la composition et les propriétés du