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Chapitre I : Revue bibliographique

3. Les biomatériaux pour reconstruction osseuse

3.2. Historique des biomatériaux pour reconstruction osseuse

3.2.1. Les différents types de greffes

On distingue trois types de techniques de greffe osseuse :

- l’autogreffe (l’os est prélevé sur le patient lui-même, sur un autre site), - l’allogreffe (l’os est prélevé sur un autre individu de la même espèce), - l’hétérogreffe ou xénogreffe (l’os provient d’une autre espèce).

Par extension, on parle de « greffes » alloplastiques lorsque des matériaux synthétiques sont utilisés en tant que substituts osseux.

L’autogreffe reste la référence ou « gold standard » dans le domaine des substituts osseux car elle permet de s’affranchir de tout problème de compatibilité, ainsi que de transmissions

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virales. En revanche, elle présente aussi de nombreux inconvénients voire d’éventuelles complications : la nécessité de prélever de l’os sur un autre site que celui à traiter impose au patient une opération et un traumatisme supplémentaires. De plus, on ne peut prélever qu’une quantité limitée d’os.

L’allogreffe quant à elle, en plus d’être coûteuse, présente des risques de transmission d’infections et/ou de réactions antigéniques, malgré le traitement de stérilisation par voie thermique, chimique ou par irradiation  appliqué au matériau osseux avant son implantation. De plus ces traitements sont réalisés lors de procédés complexes, qui limitent la prédictibilité des résultats [Legeros et coll., 2008].

L’hétérogreffe pose également plusieurs problèmes : l’approvisionnement limité pour certaines espèces, la biodiversité (variabilité biologique), le risque de rejets dû aux résidus organiques après traitements, les risques de contamination virale et bactérienne.

Toutes ces limitations ont conduit au développement considérable de la recherche sur les matériaux synthétiques, qui permettent d’obtenir des substituts de manière reproductible, en quantité quasiment illimitée, sans risque de transmissions, et avec un coût contrôlé. En outre, il est possible de choisir la forme (blocs denses, granulés poreux, poudres, gels, ciments) et le type de matériaux constitutifs (métaux, alliages, polymères, céramiques).

3.2.2. Emploi des phosphates de calcium en tant que biomatériaux

Les composés phosphocalciques ont été étudiés en tant que substituts osseux depuis plus de 80 ans [Bohner, 2000]. Ils sont biocompatibles et utilisés pour des xénogreffes (par exemple sous forme de Bio-Oss®, qui sont des hydroxyapatites d’origine bovine) ou pour des greffes alloplastiques. On en trouve sous formes de céramiques denses ou poreuses, de granulés, de ciments, ou encore de revêtements de prothèses métalliques.

La première utilisation in-vivo des phosphates de calcium (sous forme de TCP) a été réalisée par Albee et Morrison en 1920. En 1951, Ray a implanté de l’hydroxyapatite chez des rats. Malgré ces tests précoces, les propriétés mécaniques médiocres des phosphates de calcium ne

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permettent pas d’envisager leur utilisation dans des zones soumises à de fortes contraintes mécaniques.

Depuis plusieurs années, les chercheurs considèrent davantage la bioactivité des matériaux, c’est-à-dire leur capacité à réagir de façon positive avec l’organisme en accélérant les processus de réparation tissulaire. Les composés phosphocalciques possèdent notamment la propriété de former une véritable liaison chimique avec l’os défectueux, et l’établissement d’un contact entre l’implant et les tissus osseux environnants va assurer la biointégration du matériau [Hench et coll., 1971]. En raison de l’ensemble de ces propriétés, les phosphates de calcium entrent dans la composition de nombreux substituts osseux, pour leur conférer une bioactivité tout au moins de surface, dans le cas des revêtements.

Deux composés sont plus particulièrement utilisés pour ce type d’applications : l’hydroxyapatite qui, comme nous l’avons vu précédemment, constitue un modèle de choix, et le phosphate tricalcique (β-TCP). Celui-ci est utilisé car il est plus rapidement dégradé que l’HA dans l’organisme. Des céramiques biphasiques HA-βTCP ont également été mises au point : le contrôle du rapport des phases HA/ β-TCP permet d’ajuster le processus et la vitesse de résorption à l’application visée [Daculsi et coll., 1990].

3.2.3. Emploi des carbonates de calcium en tant que biomatériaux

Depuis plus de 30 ans, les carbonates de calcium naturels, principalement les coraux et la nacre, ont été très étudiés sous forme de poudres, de céramiques ou de granulés poreux et de gels pour des applications de reconstruction osseuse [Chiroff et coll., 1975 ; Souyris et coll., 1985 ; Begley et coll., 1995 ; Piatelli et coll., 1997 ; Demers et coll., 2002 ; Berland et coll., 2005]. Ils sont biocompatibles, bioactifs et résorbables. De plus, de nombreuses études in-vivo démontrent la capacité de ces matériaux à base de CaCO3 naturel à favoriser la croissance

osseuse au-fur-et-à-mesure de leur résorption, qu’ils soient ou non associés à des molécules biologiquement actives ou des cellules [Roudier et coll., 1995 ; Fricain et coll., 1996 ; Arnaud et coll., 1999 ; Petite et coll., 2000].

Plusieurs variétés de coraux, majoritairement constitués d’aragonite, peuvent être utilisées pour ce type d’applications. Grâce à leur porosité naturelle (46 à 48 % du volume total pour

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les coraux de porites et de favites [Oudadesse, 1989]), ils servent de support pour la recolonisation du tissu osseux [Guillemin et coll. 1989].

Dès les années 1970, l’utilisation du corail en tant que biomatériau a été étudiée et les premiers tests in-vivo chez l’homme ont eu lieu en 1981 [Chatainier, 2007]. Les greffons coralliens ont été utilisés dans de nombreuses chirurgies (ORL, maxillo-faciale, orthopédique, comblement d’alvéoles). Les travaux de H. Oudadesse [1989] ont montré que le carbonate de calcium implanté est dissout et qu’il se forme une couche d’apatite carbonatée qui se lie à l’os environnant. Les ions calcium libérés pourraient être utilisables par les ostéoblastes pour conduire à un os nouvellement formé [Legeros et coll., 2008].

La nacre, constituée principalement d’aragonite et de calcite, présente aussi des propriétés ostéoconductrices (capacité à engendrer la formation osseuse lorsqu’elle est mise au contact de l’os), également dues à la formation d’une couche riche en phosphate à sa surface, qui permet d’établir la liaison nacre-os [Kim et coll., 2002].

Aujourd’hui encore, des matériaux à base de carbonate de calcium naturel sont utilisés sous forme de poudre, de céramique poreuse ou de gel [Chatainier, 2007]. Afin de s’affranchir des problèmes d’approvisionnement ou encore de contamination, des matériaux à base de CaCO3

synthétique ont également été étudiés et développés, qu’ils soient uniquement constitués de carbonate de calcium [Lucas et coll., 2001 ; Ueno et coll., 2005 ; Combes et coll., 2006-a] ou associés avec des sels de phosphate de calcium [Mirtchi et coll., 1990 ; Constantz et coll., 1995 ; Khairoun et coll., 1997 ; Chung-King, 2003 ; Combes et coll., 2006-b].