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Synthèses, traitements et caractérisations physico chimiques des poudres réactives

2. Comportement des poudres réactives au broyage et au co broyage

2.1.1. Le broyage et l’agglomération

Le procédé de broyage permet la réduction de solides particulaires en fragments plus petits par l’application de contraintes mécaniques.

Les différents types de broyeurs sont classés en fonction des tailles des particules entrantes et sortantes ; on distingue le broyage grossier (particules de l’ordre du mm) du broyage fin (1000 à 10 µm) et du broyage ultrafin (moins de 10 µm).

Étant donné les granulométries des poudres réactives utilisées dans cette étude, c’est ce dernier qui nous intéresse plus particulièrement. Il peut être réalisé avec des broyeurs à rotor ou à stator, des broyeurs à corps broyants libres et des broyeurs à jets d’air (broyage pneumatique). Les forces mécaniques mises en œuvre dans ces broyeurs sont des forces d’impact, de compression et de cisaillement (figure II-11). Ces forces peuvent avoir lieu entre une particule et un corps broyant, une particule et la paroi de la chambre de broyage ou deux particules entre elles.

a). impact b). compression c). cisaillement

Figure II-11 : Représentation schématique des différentes forces s’exerçant sur une particule au cours du procédé de broyage.

Ces forces extérieures entraînent des déformations élastiques et inélastiques des corps broyés ; ces déformations, ajoutées à la présence de discontinuités intra- et inter- granulaires induisent

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l’initiation et la propagation des fissures ; la série de fragmentations qui s’ensuit crée de nouvelles surfaces. On peut distinguer trois classes de fragmentation (figure II-12) :

- l’abrasion ou attrition des particules produit une érosion de surface qui crée des particules fines ; elle peut par exemple être due aux frottements.

- l’écaillage dû aux contraintes exercées sur les particules conduit à des fragments de mêmes dimensions ou parfois de plus grandes tailles que ceux produits par abrasion. - l’éclatement ou désintégration se produit lorsque l’énergie mécanique est intense pour

la particule et résulte en des fragments de petites tailles.

a). abrasion b). écaillage c). éclatement

Figure II-12 : Représentation schématique des différents types de fragmentations d’une particule au cours du broyage.

La série de fragmentations mise en œuvre durant le procédé de broyage a des conséquences à la fois sur la taille et sur la morphologie du solide broyé. Dans la suite de l’étude, la forme du corps broyé ne pourra donc pas être considérée indépendamment de sa taille.

Lorsque les forces de surface inter-particulaires deviennent élevées, les particules s’attirent les unes-les-autres, jusqu’au contact permanent où deux particules n’en deviennent qu’une seule : c’est le phénomène d’agglomération.

Ainsi tout solide est réduit jusqu’à une taille minimale, en fonction de sa nature et des conditions du broyage. Une fois cette taille atteinte, les mécanismes d’agglomération prennent le pas sur la fragmentation. On observe alors sur la distribution granulométrique une diminution du nombre des particules de petites tailles au profit des plus grosses.

2.1.2. Le co-broyage

Le co-broyage est une technique qui a été découverte accidentellement en 1968 par l’International Nickel Company pour la production d’alliages métalliques [Benjamin, 1970].

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Elle consiste à introduire deux matériaux différents (notés A et B) dans la chambre de broyage et à les broyer ensemble, d’où le terme co-broyage.

Depuis, ce procédé a notamment été utilisé comme alternative à la synthèse chimique ou à l’extrusion pour former des matériaux composites (par exemple l’addition d’une charge au sein d’une matrice polymère [Zapata-Massot, 2004 ; Seyni, 2008]). Il constitue surtout une voie très intéressante de formulation de mélanges car il favorise l’homogénéité des dispersions. Par ailleurs, la réduction de taille des matériaux et le mélange intime des constituants forcés par l’action des corps broyants réduisent les risques de ségrégation A / B et améliorent la surface de contact entre les deux matériaux ; dans le cas où une réaction a lieu entre les deux constituants, sa reproductibilité est augmentée et la réactivité du mélange est accrue [Zapata-Massot et LeBolay, 2007].

Les mécanismes de co-broyage peuvent être décomposés en plusieurs étapes [Zapata-Massot, 2004] :

- la première concerne la fragmentation des particules des matériaux A et B jusqu’à une taille limite. Les deux matériaux étant de nature différente, l’un des deux se fragmente plus rapidement (c’est le cas du matériau B dans la figure II-13).

fragmentation

+ +

A A B B

Figure II-13 : Représentation schématique du phénomène de fragmentation lors du co-broyage de deux solides particulaires A et B.

- Du fait des forces de surface inter-particulaires, les particules les plus petites ont tendance à se coller sur les plus grosses. Ce phénomène s’amplifie au-fur-et-à-mesure du co-broyage. On peut trouver différents stades d’agglomération entre les matériaux A et B : la simple soudure entre deux particules, l’enrobage des particules, et enfin l’agglomération des particules enrobées (figure II-14).

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soudure enrobage agglomération

B

A

+

Figure II-14 : Représentation schématique des différentes étapes d’agglomération au cours du co-broyage : soudure, enrobage et agglomération.

Notons que de manière générale, l’attraction entre les particules favorise la création de liaisons A-B, évitant ainsi la ségrégation des produits. Les liaisons créées peuvent être de type covalentes, hydrogène, de Van der Waals ou une combinaison des trois.

Zapata-Massot [2004] a étudié les mécanismes de fragmentation et d’agglomération mis en jeu lors du co-broyage du carbonate de calcium sous forme de calcite comme charge d’une matrice polymère constituée de poly-(acétate de vinyle). Elle a notamment montré l’importance de l’observation microscopique pour compléter les mesures de distribution de taille utilisées habituellement pour modéliser la cinétique de broyage. En effet, les deux matériaux A et B peuvent générer des fragments de même granulométrie : la microscopie est nécessaire pour identifier les différentes populations de particules (taille et morphologie) et ne pas se limiter à une étude globale.

Les phénomènes observés lors du co-broyage et la rapidité avec laquelle ils se déroulent dépendent entre autres de la nature des deux matériaux, de leur affinité et des conditions de broyage, qu’il faut donc choisir soigneusement.