• Aucun résultat trouvé

B. Quels facteurs influencent l’engagement bénévole ?

B.5 Influence de la pratique organisationnelle

34 La majorité des études sur le bénévolat se concentre sur l’individu et ses motivations et ne considère pas les aspects organisationnels de l’activité bénévole. En réponse à ce courant dominant focalisé sur les facteurs individuels, plusieurs recherches soulignent depuis une dizaine d’années le rôle important de l’organisation dans la promotion et le maintien de l’engagement et la nécessité de se pencher sur l’impact des facteurs organisationnels (Stangherlin, 2006 ; Hong et al., 2009 ; Castonguay, Vézina et Sévigny, 2014 ; et d’autres).

Hong et ses collaborateurs (2009) observent que les organismes se distinguent entre eux par leur capacité à favoriser l’engagement bénévole. Selon eux, plusieurs dimensions permettent de mesurer la capacité de l’organisme : la définition de la tâche bénévole ; la diffusion de l’information ; la flexibilité et l’adaptabilité ; le développement des habiletés ; l’intégration ; la reconnaissance et l’offre d’une compensation financière. Ces chercheurs trouvent qu’une adaptation permanente est nécessaire entre l’organisme et le bénévole, et que la capacité d’ajustement au changement de l’organisation est gage de succès pour une action bénévole durable.

Nous allons donc présenter plus en détails quelques facteurs organisationnels qui reviennent dans différentes études comme ayant un impact important sur l’engagement des bénévoles et sur lesquels nous reviendrons lors de notre analyse afin de voir quelle influence ils ont eu sur les participants du projet BIG. Tout d’abord, nous allons voir l’impact du type d’activité proposée et de la définition de la tâche bénévole, puis le rôle de l’encadrement, de la reconnaissance et de l’intégration des bénévoles. Enfin, nous évoquerons l’impact des valeurs de l’organisme sur l’engagement.

Le type d’activité proposée et la définition de la tâche bénévole

« L’activité bénévole, en soi, est en grande partie responsable de la poursuite de l’engagement bénévole. (…) Elle doit répondre aux besoins et aux intérêts du bénévole. Les caractéristiques de l’activité – durée et fréquence de l’activité, moment où elle a lieu, durée de l’accompagnement, etc. – doivent convenir au bénévole » (Castonguay, Vézina et Sévigny, 2014, p.20). Ainsi, de manière logique, le type d’activité va favoriser ou non l’engagement des bénévoles en fonction de leurs goûts et intérêts.

Comme nous l’avons dit, les bénévoles actuels valorisent davantage les actions directes, concrètes et de proximité, dont ils perçoivent immédiatement les effets. Ainsi, « la relation interpersonnelle immédiate et directe est (…) privilégiée par rapport aux formes de solidarité globales, plus lointaines et anonymes. » (Demoustier, 2002, p.106). Comme le souligne Lyet,

35 la démarche bénévole doit s’ancrer dans le pragmatisme pour les jeunes : « la plupart semblent tellement marqués par le pragmatisme ambiant et la fin des utopies qu’ils développent une forme inédite de contestation sociale marquée non par la volonté de transformer le monde mais de construire un “ ordre local et temporaire ” » (1998, p.116). Il observe un rejet chez les jeunes bénévoles de l’action politique collective perçue comme brutale et un positionnement dans une action plus informelle qui « fait référence à une forme idéalisée des relations qui se développent dans la proximité née du côtoiement quotidien » (1998, p.116).

En plus du type d’activité, une définition précise du rôle du bénévole, notamment par une charte, et/ou un « cahier des charges » clair permet de favoriser le recrutement comme le montre Bovay, Tabin et Campiche (1994).

La relation avec le bénévole : un équilibre à trouver entre présence et liberté

Il apparaît que le fait d’offrir un encadrement « adéquat » de l’activité bénévole garantissant à la fois l’offre d’un soutien personnalisé aux bénévoles et leur sentiment de liberté est très important (Castonguay, Vézina et Sévigny, 2014, pp.21-22). Le fait d’adapter l’encadrement et le soutien offert aux disponibilités des bénévoles, tout en l’offrant de façon continue va favoriser l’engagement. D’autre part, ces autrices montrent, dans leur étude sur des bénévoles actifs auprès de personnes âgées à domicile, qu’il est indispensable de respecter leur disponibilité et d’accepter leur éventuel désengagement. Ceci peut paradoxalement aider à la fidélisation de l’engagement car le bénévole sait que sa liberté est garantie. La volonté de préserver son autonomie, sa souveraineté individuelle et sa capacité d’agir est une tendance majeure observée chez les bénévoles actuels (Vermeersch, 2004, p.689). Un des fondements de l’engagement bénévole et de son maintien tient donc dans l’absence de sentiment de contrainte, ce qui va de pair avec le plaisir à mener l’activité, qui est comme nous l’avons dit un facteur majeur.

Reconnaissance et intégration des bénévoles

Les actes de reconnaissances de l’engagement des bénévoles par les organisations se révèlent être également d’importants facteurs. Ils peuvent prendre la forme de certificats, de carte d’anniversaire, de compensations financières, comme des cadeaux, repas ou excursions offerts, ou encore de défraiements liés aux frais de transports, l’offre d’assurances, etc. (Bovay, Tabin et Campiche,1994). Toutefois, plus encore que par ces actes matérialisés, la reconnaissance passe par la bonne relation entre le bénévole et les membres de l’organisation, ainsi que par la considération de la parole et de l’avis des bénévoles. Ont-ils la possibilité de s’exprimer sur le

36 projet ? De participer aux décisions et à la définition de l’activité bénévole ? Castonguay, Vézina et Sévigny (2014, pp.19-20) montrent que le fait de se sentir valorisé, écouté, respecté et apprécié est fondamental pour que le bénévole se sente bien intégré, et que ce sentiment d’appartenance peut contribuer au maintien de l’engagement.

Impact de la culture et des valeurs de l’organisation

Les valeurs défendues par l’organisation de l’activité bénévole jouent également un rôle sur l’engagement. En effet, Gateau (2006) démontre « l’impact des valeurs véhiculées par une association sur la motivation des bénévoles à y venir et à y rester » (cité dans Dubost, 2007, p.6). Il met en exergue que l’entité qui reçoit les aspirations des individus renforce ou non l’envie de faire du bénévolat, selon sa « culture » et les signaux qu’elle envoie.

Un courant de recherche montre aussi que les cadres de références des bénévoles sont influencés par un engagement relativement durable dans une association. Les auteurs de ce courant « ont surtout mis en évidence l’influence des pratiques organisationnelles sur le développement des formes identitaires (Gamson/Mogliani, 1989 ; Hassenteufel, 1991 ; Mathieu, 2002 ; Siméant, 1998). L’organisation est conçue comme un lieu de sociabilité et la manière dont est organisée l’association (…) traduit et produit une certaine culture et une certaine identité. Plus fondamentalement, cette approche montre que c’est l’organisation et la participation à ses activités qui suscitent des raisons légitimes d’engagement. » (Stangherlin, 2006, p.150).

Nous chercherons donc à voir dans notre étude si les valeurs et la culture de Caritas ont joué un rôle sur la décision des participants, pourquoi ce projet spécifiquement les a poussés à s’engager, si le projet BIG répond au besoin d’encadrement des participants tout en respectant leur liberté, si les participants se sentent suffisamment reconnus et intégrés et quels autres aspects organisationnels non évoqués ici ont pu encourager ou freiner leur participation.