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L'importance du mécanisme des arrhes en présence des différentes fonctions

Dans le document Les arrhes : étude franco-chinoise (Page 154-161)

171. En droit chinois, le mécanisme passe avant la fonction juridique : la même

technique assume les différentes fonctions, et le mécanisme a le monopole pour la fonction comminatoire (§1). Les choses sont totalement différentes en droit français, où la fonction juridique passe avant la technique employée : la convention d'arrhes n'est qu'une variante concevable pour la faculté de dédit (§2).

§1 Le mécanisme des arrhes, monopole pour la fonction comminatoire

172. En droit chinois, le mécanisme est un élément central pour la qualification

d'arrhes, peu importe que les parties aient (A) ou n'aient pas (B) employé ce terme.

A Les cas où les parties ont employé le terme ' arrhes '

173. Le mot 'arrhes' pose une présomption simple en faveur de cette qualification L'emploi du terme 'arrhes' constitue un fort indice en faveur de cette

qualification761. La jurisprudence admet d'ailleurs que cette désignation peut résulter

761Tribunal intermédiaire de Shaoxing, Zhejiang, 13 novembre 2011, référence : CLI.C.1763521 ; Tribunal de base de Songjiang, Shanghai, 19 août 2013, référence : CLI.C.1956787 ; Deuxième Tribunal de Shanghai, 16 juillet 2013, référence : CLI.C.1973822 ; Tribunal intermédiaire de Luohe, Henan, 17 mai 2013, référence : CLI.C.1962864 ; Tribunal de base de Yangpu, Shanghai, 19 avril 2013, référence : CLI.C.1986607 ; Premier Tribunal intermédiaire de Shanghai, 20 avril 2012, référence : CLI.C.990779 ; Tribunal intermédiaire de Zhoushan, Zhejiang, 12 février 2012, référence : CLI.C.350289 ; Premier Tribunal intermédiaire de Shanghai, 13 décembre 2010, référence : CLI.C.1359599 ; Tribunal de base de Gongyi, 6 avril 2010, référence : CLI.C.753180 ; Tribunal intermédiaire de Baise, Guangxi, 6 mai 2013, référence : CLI.C.1855289 ; Tribunal intermédiaire de Shenzhen , 17 janvier 2014, référence : CLI.C.2548860;

d'un autre document que le contrat principal762. Il est difficile de renverser la

présomption763, notamment dans les contrats entre professionnels764.

Or, si la description des « arrhes » correspond à celle de l'acompte765, la qualification

donnée par les parties sera le plus souvent écartée par le juge766. La solution n'est pourtant

pas systématique. Parfois, les tribunaux vont retenir la qualification d'arrhes tout en

effaçant les prévisions incompatibles767. Ceci constitue une autre illustration du

pragmatisme des juges chinois : tout dépend de savoir si l'on veut faire jouer le jeu des arrhes768.

B Les cas où les parties n'ont pas employé le terme 'arrhes'

174. La qualification d'arrhes s'impose si la fonction de la somme correspond au mécanisme des arrhes Il arrive fréquemment que les parties emploient un autre

terme pour désigner la somme d'argent versée d'avance. Ces diverses appellations sont issues du langage courant, dépourvues de sens juridique précis. Conscient de

cette situation, la CPS a posé une règle de principe769 qui écarte a priori le jeu des

762 C'est notamment le cas pour la facture attestant la remise effective de la somme d'argent. V. Tribunal de base de Jinshui, Henan, 16 octobre 2012, référence : CLI.C.1145290, Tribunal de base de Qingpu, 25 novembre 2010, référence : CLI.C.602633.

763 Une illustration exceptionnelle : Premier Tribunal intermédiaire de Shanghai, 16 janvier 2012, référence : CLI.C.997041. Le tribunal a considéré que les parties n'étaient pas d'accord sur le sens exacte du mot « arrhes » inséré dans leur contrat. 764 Tribunal intermédiaire de Baise, Guangxi, 6 mai 2013, référence : CLI.C.1975790.

765 Les parties ne sont pas tenues de préciser dans leur contrat le régime juridique applicable pour la somme d'argent. Premier Tribunal intermédiaire de Shanghai, 27 avril 2010, référence : CLI.C.303594. Contra. Deuxième Tribunal intermédiaire de Pékin, 11 février 2010, référence : CLI.C.214057. La qualification d'arrhes a été écartée au motif que les parties n’avaient pas précisé dans leur contrat le régime juridique de celles-ci.

766 Ainsi, le fait d'insérer mention « arrhes » dans une rubrique intitulée « Le mode de paiement et son échéance » a conduit le juge à favoriser la qualification d'acompte. Tribunal de base de Xiang'an, Fujian, 12 avril 2013, référence : CLI.C.1756825. V. dans le même sens, Tribunal de base de Yiwu, 16 avril 2010, référence : CLI.C.348644. Tout en utilisant le mot « arrhes », le contrat précise que l'inexécution du contrat par le vendeur ne donnera lieu qu'à une restitution. Tribunal intermédiaire de Yichang, Hubei, 21 août 2012, référence : CLI.C.1338439 ; Tribunal intermédiaire de Wenzhou, Zhejiang, 23 septembre 2009, référence : CLI.C.282906. ; Tribunal intermédiaire de Qingdao, Shandong, 28 avril 2014, référence : CLI.C.2694379.

767 Deuxième Tribunal intermédiaire de Pékin, 20 septembre 2010, référence : CLI.C.413027. La précision selon laquelle les arrhes versées ne donnent lieu en aucun cas à une restitution était jugée non-écrite, sans que la convention d'arrhes soit mise en cause.

768 Pour une belle illustration, on prend les « arrhes » unilatérales, qui ne jouent qu'à l'encontre d'une des parties. Lorsque la mise en œuvre du jeu est jugé infondée, le juge disqualifie la clause : Tribunal intermédiaire de Nanning, Guangxi, 4 juillet 2012, référence : CLI.C.1185236 ; Tribunal intermédiaire de Nanning, Guangxi, 21 mars 2012, référence : CLI.C.842708 ; Premier Tribunal de Shanghai, 8 juin 2012, référence : CLI.C.986108; Tribunal intermédiaire de Guangzhou, Guangdong, 16 avril 2014, référence : CLI.C.2643768. Lorsque le juge veutx appliquer le jeu des arrhes, il va bilatéraliser cette clause : Tribunal intermédiaire de Jiaozuo, Henan, 23 juillet 2013, référence : CLI.C.1985141. Tribunal de base de Xinpu, Jiangsu, 17 janvier 2013, référence : CLI.C.2037095.

arrhes en présence de ces vocabulaires. La jurisprudence est constante en la

matière770. En l'absence d'une référence explicite au mot « arrhes », les parties

doivent prouver qu'une telle qualification correspond bien à leur commune intention.

À défaut de quoi, c'est celle de l'acompte qui sera retenue771. Cette même règle est

d'ailleurs étendue dans des contrats internationaux dont la rédaction se fait en anglais772.

Le mécanisme constitue ainsi le critère déterminant pour la qualification des arrhes en droit chinois.

§2 Le mécanisme des arrhes, simple modalité pour la fonction libératoire

175. En droit français, l'article 1590 revêt un caractère supplétif773. Les arrhes-

dédit ne sont qu'une des variétés concevables pour assurer la faculté de repentir. La fonction juridique passe avant le mécanisme employé, et la volonté des parties joue 770 Tribunal de base de Yuhuan, Zhejiang, 16 avril 2008, référence : CLI.C.1674456 ; Tribunal de base de Yangzhong, Jiangsu, 8 novembre 2011, référence : CLI.C.81515 ; CPS, référence : CLI.C.330364 ; Tribunal de base de Gulou, Jiangsu, 18 septembre 2013, référence : CLI.C.1795904 ; Tribunal de base de Muyang, Jiangsu, 18 juillet 2013, référence : CLI.C.2029857 ; Tribunal de base de Sucheng, Jiangsu, 9 juillet 2013, référenc : CLI.C.2030677 ; Tribunal de base de Huangpu, Shanghai, 7 juin 2013, référence : CLI .C.1995529 ; Tribunal de base de Erqi, Henan, 28 mai 2013, référence : CLI.C.1946738 ; Tribunal de base de Jiandu, Zhejiang, 12 mars 2013, référence : CLI.C.1451174 ; Tribunal intermédiaire de Nanning, Guangxi, 10 décembre 2012, référence : CLI.C.1169855 ; Tribunal de base de Qingxiu, Guangxi, 5 février 2012, référence : CLI.C.1856407 ; Tribunal intermédiaire de Nanning, Guangxi, 26 novembre 2012, référence : CLI.C.1857331 ; Tribunal supérieur de Ah'hui, 23 octobre 2012, référence : CLI.C.1499621 ; Tribunal de base de Guancheng, Henan, 16 octobre 2012, référence : CLI.C.1145810 ; Tribunal intermédiaire de Ningbo, Zhejiang, 10 septembre 2012, référence : CLI.C.1171750 ; Tribunal de base de Suiyang, Henan, 10 septembre 2012, référence : CLI.C.1137676 ; Tribunal de base de Yuecheng, Zhejiang, 21 août 2012, référence : CLI.C.1814388 ; Tribunal de base de Jingshi, Hunan, 6 juillet 2012, référence : CLI.C.1237560 ; Tribunal de base de Napo, Guangxi, 31 mars 2012, référence : CLI.C.1193085 ; Premier Tribunal intermédiaire de Pékin, 5 janvier 2011, référence : CLI.C.1334578 ; Tribunal de base de Minhang, Shanghai, 10 décembre 2010, référence : CLI.C.614153 ; Deuxième Tribunal de Shanghai, 16 août 2010, référence : CLI.C.327774 ; Tribunal de base de Beilun, Zhejiang, 7 février 2012, référence : CLI.C.1837626.

771 Tribunal de base de Quangang, Fujian, 30 septembre 2013, référence : CLI.C.2126579 ; Tribunal intermédiaire de Xinyang, Henan, 6 septembre 2013, référence : CLI.C.1942253 ; Premier Tribunal intermédiaire de Shanghai, 18 septembre 2012, référence : CLI.C.1376628 ; Tribunal de base de Wuxuan, Guangxi, 16 août 2012, référence : CLI.C.1196216 ; Tribunal de base de Pudong, Shanghai, 6 juillet 2012, référence : CLI.C.978296 ; Tribunal de base de Zhongyuan, Henan, 19 avril 2012, référence : CLI.C.1012785 ; Premier Tribunal intermédiaire de Shanghai, 30 mars 2012, référence : CLI.C.991102 ; Premier Tribunal intermédiaire de Pékin, 27 juin 2013, référence : CLI.C.1758371. ; Tribunal intermédiaire de Nujiang, Yunnan, 22 octobre 2014, référence : CLI.C.3454574; Tribunal intermédiaire de Jinhua, Zhejiang, 28 février 2014, référence : CLI.C.2618194; Tribunal intermédiaire de Tieling, Liaoning, 14 janvier 2014, référence : CLI.C.2603100; Cinquième tribunal intermédiaire de Chongqing, 14 mars 2013, référence : CLI.C.1447753; Tribunal intermédiaire de Jiyuan, Henan, 12 décembre 2012, référence : CLI.C. 1459777; Tribunal intermédiaire de Fuzhou, Fujian, 30 novembre 2013, référence : CLI.C.2232213; Tribunal intermédiaire de Chuzhou, Anhui, 6 août 2014, référence : CLI.C.3263201; Tribunal intermédiaire de Chongzuo, Guangxi, 29 avril 2014, référence : CLI.C.2793034.

772 Tribunal de base de Pudong, Shanghai, 25 décembre 2012, référence : CLI.C.2002672.

773 Cass. 1re civ., 16 juillet 1956 : Bull.civ.1956, I, n°254 ; Cass. Soc., 20 octobre 1960 : Bull.civ.1960, V, n°901 ; Cass. 1re civ., 8 juin 1966 : Bull.civ.1966, I, n°353 ; Grenoble, 25 juin 1996, préc. ; Cass. 3e civ., 12 décembre 1968, préc. Orléans, 26 octobre 1967 : D. 1968. 210.

un rôle primordial dans la qualification d'arrhes774 (A). Il faut néanmoins se

demander si en cas de doute, une présomption en faveur de dédit peut être admise (B).

A Le rôle primordial de la volonté des parties

176. La primauté de la volonté pour la qualification La primauté de la

volonté signifie tout d'abord que le juge doit respecter soigneusement le sens donné

par les parties si celui-ci est exempte d'ambiguïté775. Cela exige ensuite qu'en absence

de la volonté explicite, il appartient aux juges du fond776 de rechercher l'intention

commune des parties777. Dans ce dernier cas, les juges ne sont pas liés par le terme

employé par les parties, dont le sens est souvent ambigu778. Ainsi, Il arrive que la

qualification donnée par les parties soit écartée par les tribunaux, que ce soit pour le

mot « arrhes »779 ou pour celle d'« acompte »780.

178. Les indices prises en comptes par le juge L'examen de la jurisprudence

nous permet de dégager quelques indices pris en compte par les juges dans leur

recherche de l'intention commune des parties781.

Le juge vérifie d'abord si le contrat présente un caractère ferme et définitif, et dans

l'affirmative, la qualification d'acompte sera retenue782. Le caractère définitif de l'accord

774 La doctrine française parle le plus souvent de l'interprétation des arrhes. À partir du moment où on a exclu la fonction d'acompte et la fonction probatoire des arrhes, il serait plus juste de parler d'une qualification.

775 V. Par exemple, Poitiers, 23 septembre 1997, Juris-Data : n°056127. « ... il s'agit bien d'une faculté de dédit qui est

offerte à l'acquéreur, dans la mesure où en effet l'usage du verbe "se dédire" est dépourvu d'ambiguité et n'ouvre pas la possibilité au juge de se livrer à une interprétation, quand bien même cette clause ne se réfère pas expressément à l'article 1590 du Code Civil et ne prévoit aucune réciprocité pour le cas où ce serait le vendeur qui poursuivrait la résiliation du contrat ». Pour une illustration où les parties expriment clairement leur intention d'écarter l'article 1590 du Code civil,

Cass.Civ., 12 septembre 2012, n°11-87.291.

776 L'appréciation souveraine des juges du fond en la matière est ainsi consacrée par la Cour de cassation ( Cass. 1re civ., 16 juillet 1956, D. 1956, 609 ; Cass. Com, 3 mai 1965 : Bull.civ. 1965, IV, n°280 ; Cass. Com., 16 novembre 1965 :

Bull.civ.1965, IV, n°576 ; Cass. 3e civ., 12 décembre 1968 : Bull.civ.1968, III, n°547. )

777 C'est la différence avec le droit de la consommation. Dans ce domaine, le législateur pose une présomption simple en faveur des arrhes.

778 À titre d'illustration, on cite des expressions confuses comme « l'acompte en fixant les arrhes » ( Cass. 3e civ., 15 décembre 1976, n°75-12.518 ), ou « à titre d'acompte au sens de l'article 1590 du Code civil » ( Cass. Com., 26 avril 1976, n° 74-12580 ). C'est sans doute parce qu'il existe un décalage entre le sens technique du mot « arrhes » et son acception courante dans la vie quotidienne, ce qui résulte expressément de l'attendu d'une décision de la Cour de cassation : Cass. 3e civ., 3 avril 1973, n°71-14.562.

779 Toulouse, 11 juin 1992, Juris-Data : n°043494 ; Cass. Com., 20 novembre 1973, n°72-11029 ; Cass. 3e civ., 3 avril 1973, n°7114562 ; Cass. 1re civ., 8 mars 1961 : Bull.civ.1961, n°152 ; Nîmes, 10 janvier 2008, Juris-Data : n°365006. ; Cass. 1re civ., 8 mars 1961 : Bull.civ.1961, I, n°152.

780 Cass. 3e civ., 15 février 2006, n°04-17.595 ; Poitiers, 23 septembre 1997, préc. ; Cass. 1re civ., 27 décembre 1963,

Bull.civ. 1963, I, n°574.

781 Sur cette question, v. Y. Dagorne-Labbe, Contribution à l'étude de la faculté de dédit, Thèse Paris, 1984, n°8 et s. 782 C'est notamment le cas si les parties ont convenu que les sommes constituent une partie du prix (V. Par exemple, Nouméa, 7 octobre 2004, préc. (Les parties ont prévu que les sommes sont à valoir sur le « prix ») ; Grenoble, 25 juin 1996, Juris-

peut être déduit, entre autres éléments, de la dénomination du « contrat » au lieu de « promesse »783. En outre, la nature de certains contrats exclut a priori l'existence du

dédit784.

En revanche, la qualification d'arrhes l'emportera si les parties ont voulu réserver un

droit de repentir785. La référence à l'article 1590 constitue un indice en faveur du dédit786.

Mais cette référence n'est pas obligatoire787.

L'usage joue aussi un rôle important en la matière788, et les juges vérifient souvent si

dans un milieu déterminé les arrhes-dédit constituent une pratique courante789, ou au

contraire si c'est la fonction de l'acompte qui est normalement privilégiée790. Là encore, la

force des usages n'est que relative et les parties sont libres à y déroger791.

B De la présomption posée par l'article 1590 du Code civil

français

179. La notion de la règle supplétive L'article 1590 du Code civil constitue,

comme nous le savons, une règle supplétive. Encore faut-il préciser davantage ce que nous devons entendre par cette expression. L'important travail de C. Pérès-Dourdou nous montre la valeur relative de la distinction traditionnelle entre « règle

Data : n°043202 ; Cass. req., 23 nov. 1942 : JCP G 1943, II, 2175 ; Reims, 21 décembre 1984, Juris-Data : n°043730 ( La

somme versée est indiquée dans la rubrique « paiement du prix » ) ; Cass. 3e civ., 12 décembre 1968, préc. ); D'autres cas de figure : Cass. 1re civ., 6 juillet 1964 : Bull.civ.1964, I, n°369. (une clause d'indemnité pour retard est prévue pour le second versement du prix ) ; Reims, 21 décembre 1984, préc. ( Le bon de commande prévoit un délai très court de livraison qui ne permet pas l'exercice d'un dédit ).

783 Paris, 9 avril 1991, Juris-Data : n°021163 ; Paris, 4 juillet 1989, Juris-Data : n°022965. Selon la Cour, Il y a commande ferme et non promesse de vente avec versement d'arrhes si le bon de commande ne fait pas mention du mot promesse. Certains arrêts sont allés plus loin, considérant que l'article 1590 n'est applicable qu'en présence d'une promesse.

784 Nîmes, 18 Janvier 2008, Juris-Data: 365006 ; il s'agit de la location des locaux pour le mariage. La Cour a décidé que « Compte tenu de la nature de l'événement, les futurs époux ne pouvaient s'engager que de manière irrévocable au près d'un

professionnel spécialisé dans ce type d'accueil ; que celui-ci ne saurait, dès lors, se prévaloir d'une faculté de dédit nonobstant l'emploi du terme d'"arrhes" dans le contrat ».

785 Cass. 3e civ., 15 février 2006, n°04-17.595. (La stipulation contractuelle précise qu'en cas de renonciation la somme versée reste acquise entre les mains de l'autre partie). Poitiers, 23 septembre 1997, préc. Le caractère provisoire de l'accord proviendrait aussi du fait que le contrat ne produit pas ses effets dans l'immédiat ( Paris, 7 novembre 1989, Juris-Data : n°027124. Dans cet arrêt, les parties ont préve que le transfert de la propriété était reporté. )

786 Cass. 3e civ., 3 avril 2002, n°01-01120. Les juges ont soulevé « que les trois promesses comportaient une mention

identique selon laquelle tout désistement sera réglé conformément aux dispositions de l'article 1590 du Code civil ».

787 Poitiers, 23 septembre 1997, préc.

788 V. Pau, 29 février 1960, Gaz-Pal. 1960, 1, 317 : « Attendu que les usages, dont la force obligatoire sont consacrés par

l'article 1135 C.Civ., et qui jouent un rôle important en matière commerciale, peuvent faire écarter la règle supplétive de l'article 1590 et le sens de dédit que l'article a attaché au mot d'arrhes pour les faire considérer comme des acomptes à valoir sur la somme due en exécution du contrat ».

789 Paris, 7 Novembre 1989, préc. (chez les antiquaires).

790 Pau, 29 février 1960, préc., confirmé par Cass. Com., 3 mai 1965 : Bull.civ.1965, n°280. (en matière d'hôtellerie) ; Aix- en-Provance, 25 mai 2011, Juris-Data : n°011299. (Les juges du fond avaient considéré que les arrhes étaient peu pratiquée dans les transactions commerciales telles que la réalisation d’oriflammes) ;

supplétive » et « règle impérative »792. Les deux corps de règles ont tous un caractère

obligatoire793, et surtout, la règle impérative ne supprime pas totalement la liberté des

parties794. Selon l'auteur, ses études « encouragent, sinon à abandonner, du moins à

nuancer sensiblement ce jugement manichéen qui, par faveur pour la liberté individuelle, donne systématiquement à voir les règles impératives comme les instruments d'une négation de cette liberté »795. Nous ne pouvons qu'approuver cette

observation pertinente. Il faut même aller plus loin, car le même constat s'impose au

sein des règles supplétives. Même si elle ne l'a pas formulé de manière explicite796,

Pérès-Dourdou montre bien que la marge de manœuvre laissée à la liberté

contractuelle varie selon les règles supplétives en présence797. Ces différences

s'expliquent par la faveur que le législateur accorde à chacune de ces règles. Si la plupart des règles représentent « les valeurs et les vues idéales de l'ordre juridique »798, jouissant ainsi « la préférence de principe »799 reconnue par le

législateur, d'autres n'en font pourtant pas partie800.

180. La particularité de l'article 1590 au sein de la catégorie des règles supplétives Si nous revenons à l'article 1590 du Code civil, force est alors de

constater que celui-ci présente une particularité au sein des règles supplétives. La fonction de dédit n'est ni encouragée comme constituant un modèle idéal, ni conçue comme une règle « répulsive » qui invite les parties à adopter une stipulation au sens

contraire801. Bref, l'article 1590 aurait sans doute un caractère « neutre »802, un simple

héritage historique.

792 C. Pérès-Dourdou, La règle supplétive, Thèse, LGDJ, 2004. 793 Ibid., n°146 et s.

794 Ibid., n° 188 et s. 795 Ibid., n°331, p. 299.

796 Ibid., n°398 et s. dans lequel l'auteur traite la question de recherche de volonté sans faire de distinctions.

797 V. Par exemple, ibid., n°517 et s. Pour un résumé éclairant, n°517, p.497 : « Dans certaines hypothèses, la préférence de

principe dont jouit la règle supplétive se trouve renforcée par l'effet d'exigences particulières. En effet, l'ordre juridique se montre parfois plus exigeant à l'égard des prévisions contraires des sujets de droit, soit qu'il réglemente la forme qu'elles doivent emprunter pour leur validité, soit qu'il fixe le moment de leur expression, soit même qu'il limite l'étendue des choix contraires accessibles à l'imagination individuelle dans le respect de l'esprit général de la règle supplétive correspondante. Ces conditions peuvent, le cas échéant, se cumuler et soulignent, en contrepoint, la faveur avec laquelle l'ordre juridique considère l'application de ses dispositions supplétives : non seulement l'expression de la volonté contraire est rendue plus

difficile mais encore la règle supplétive se trouve réintégrée à l'encontre de la volonté exprimée lorsqu'elle ne satisfait pas aux conditions imposées ».

798 Ibid., n°492, p.467. 799 Ibid., n°494 et s.

800 V. par exemple, les règles supplétive « répulsive », ibid., n°588, p.571 : « il est certaines règles supplétives dont on

perçoit qu'elles n'ont pas essentiellement pour mission d'incarner les valeurs idéales de l'ordre juridique qui les édicte. A rebours, et non sans un certain paradoxe, la règle supplétive peut en effet être conçue et utilisée par l'ordre juridique comme un instrument destiné à inciter les sujets de droit à exercer la liberté de principe dont ils disposent et à sanctionner leur silence là où l'expression de leur volonté aurait être souhaitable ».

801 Le meilleur exemple c'est la solution prétorienne qui refuse la révision pour l'imprévision en droit civil. 802 L'expression est employée par Doyen Cornu dans sa note sous Cass. 1re civ., 23 mars 1966, RTD civ. 1967, 183.

La présomption de l'article 1590 se trouve régulièrement renversée803. Mais le

caractère neutre de ce texte a conduit une partie de la doctrine à lui refuser toute

aptitude à créer une quelconque présomption en faveur des arrhes-dédit804. Certains

sont allés plus loin, en proposant une présomption d'acompte en cas de doute805,

s'appuyant sur certaines décisions jurisprudentielles806.

Outre qu'elle ne fait pas l'unanimité en doctrine807 et est démentie par la Cour de

cassation808, cette vision des choses est sans doute excessive. Sauf à vider l'article

1590 toute sa portée normative, il faut admettre qu'une présomption de dédit est établie en l'absence de la volonté contraire. Simplement, la force d'une telle présomption est très limitée, et il faut pousser plus loin la recherche de cette commune intention, ce que les juges du fond font toujours.

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181. Conclusion du chapitre I Le mécanisme d'arrhes ne joue pas le même rôle

en présence des différentes fonctions.

Les arrhes participent à réaliser la fonction comminatoire. Le caractère bilatéral,

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