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2 Implication dans l’internalisation des récepteurs

Afin de réguler l’activité des RCPGs, les β-arrestines peuvent non seulement faire cesser la signalisation via les protéines G mais aussi entraîner la désensibilisation de ces récepteurs en participant à leur internalisation. Ce rôle primordial des β-arrestines n’a été mis en évidence par l’équipe du Dr. Marc Caron qu’en 1996, six ans après la découverte de ces protéines (Ferguson et al., 1996). La surexpression de β-arrestines est en effet capable de sauver le phénotype de défaut d’internalisation présenté par des mutants du récepteur β2AR non phosphorylables ou tronqués. De plus, l’internalisation du récepteur β2AR sauvage est fortement inhibée par l’expression de mutants de β-arrestine (βArr1 V53D et βArr2 V54D) (Ferguson et al., 1996). Il a alors été supposé que les β-arrestines étaient des protéines adaptatrices pour des composants classiques de l’internalisation. Depuis, de nombreux récepteurs couplés aux protéines G ont été répertoriés comme impliquant les β-arrestines lors de leur internalisation, qu’il s’agisse classiquement de récepteurs hormonaux, tels que le récepteur β2AR (Ferguson et al., 1996) et le récepteur de la FSH (Follicle-Stimulating Hormone) (Piketty et al., 2006), de récepteurs de l’inflammation, comme le C5aR (Braun et al., 2003), ou encore plus récemment de récepteurs olfactifs (Mashukova et al., 2006).

III-2-1 Interaction des β-arrestines avec des composants majeurs de la machinerie d’endocytose

Dans un premier temps, il a été montré que les β-arrestines recombinantes (mais pas l’arrestine visuelle) co-sédimentent in vitro avec des cages préformées de clathrine et qu’elles colocalisent in vivo avec le récepteur β2AR activé, la clathrine et le complexe adaptateur AP2 (Goodman et al., 1996).

Figure 21 : Structure de la β-arrestine 2 présentant quelques uns de ses sites d’interaction (d’après Lefkowitz et Shenoy, 2005)

La β-arrestine 2 présente des sites de fixation pour AP2 et la clathrine (cf. § pécédents), pour la tyrosine kinase c-Src (Luttrell et al., 1999) et pour les MAPK (Miller et al., 2001).

Le site principal d’interaction des β-arrestines avec la clathrine se situe en C-terminal de la protéine (Goodman et al., 1996), il s’agit du motif LIEF en position 373-376 de la β- arrestine 2 (LIEL pour la β-arrestine 1)(Krupnick et al., 1997a et Figure 21). Ce motif LIEF comprend des résidus hydrophobes et acides qui interagissent avec les résidus hydrophobes lysines 96 et 98 et avec la glutamine 89 du domaine globulaire de la chaîne lourde de la clathrine (Goodman et al., 1997). Le mutant βArr2LIEF→AAEA montre une capacité réduite à interagir avec la clathrine mais pas avec le récepteur. Il en résulte pour le récepteur β2AR, selon les auteurs, soit une inhibition partielle de l’internalisation (Krupnick et al., 1997a), soit une internalisation non modifiée (Laporte et al., 1999). Le fragment 319-418 de la β-arrestine 1 est un dominant négatif de l’internalisation des RCPGs, car celui-ci comprend le site de liaison à la clathrine et se lie donc effectivement à la clathrine mais aucunement au récepteur (Krupnick et al., 1997b). Il a été suggéré que les β-arrestines présenteraient un autre site de liaison à la clathrine que ce domaine LIEF (Orsini et Benovic, 1998), mais cette hypothèse a été infirmée par des analyses en double hybride (Laporte et al., 1999).

Ces mêmes expériences de double hybride en levure ont mis en évidence une autre interaction des β-arrestines avec un autre composant des vésicules mantelées de clathrine : le complexe adaptateur AP2 et même exclusivement sa sous-unité β, l’adaptine β2. Ces conclusions ont été précisées in vivo par co-immunoprécipitation de la triade βArr/β2AR activé/β2-adaptine avec un maximum après deux minutes d’activation qui témoigne d’un recrutement de AP2 par le complexe déjà formé entre le récepteur activé et les β-arrestines.

Le site d’interaction avec AP2 a été identifié en C-terminal de la β-arrestine 2 et comprend les résidus arginines 394 et 396 (393, 395 pour la β-arrestine 1) (Laporte et al., 2000; Laporte et al., 1999). Le site d’interaction correspondant situé sur la β2-adaptine comporteles glutamates 849 et 902, situés en C-terminal de l’adaptine, c'est-à-dire sur l’oreille, un petit corps globulaire relié au corps principal de l’adaptine par une charnière flexible (Laporte et al., 2002 et, pour plus de détails sur la structure de l’adaptine, cf. § D/III-4 des Résultats et Discussions).

Parmi les interactions des β-arrestines avec la machinerie d’endocytose, c’est l’interaction avec AP2 et non avec la clathrine qui est primordiale pour le ciblage initial du complexe β-arrestine / récepteur activé dans les puits mantelés de clathrine préformés (Laporte et al., 2000; Scott et al., 2002a). Par ailleurs, il a également été rapporté que les β- arrestines interagissent avec des protéines non constituantes des puits mantelés de clathrine mais néanmoins nécessaires à l’internalisation. Il s’agit de la protéine G ARF6 (ADP- Ribosylation Factor 6), avec laquelle la β-arrestine 2 interagit suite à la stimulation du récepteur β2AR, et sa protéine GEF associée ARNO (ARF Nucleotide binding site Opener), avec laquelle la β-arrestine 2 interagit de façon constitutive (Claing et al., 2001). Ainsi la β- arrestine 2 participe au recrutement au niveau du récepteur activé et à l’activation d’une protéine G nécessaire à l’endocytose.

Un autre type de molécule semble primordial pour l’adressage du complexe β-arrestine / récepteur vers les puits mantelés de clathrine, il s’agit des phosphoinositides dont le site de liaison sur la β-arrestine 2 se situe au niveau des lysines 233 et 251 et de l’arginine 237 (conservées dans l’isoforme 1). Outre une inhibition très forte de l’interaction β-arrestines / phosphoinositides, la mutation de ces résidus (KRK→Q) entraîne une absence quasi-totale d’internalisation du récepteur β2AR et même d’adressage vers les puits mantelés de clathrine alors que les β-arrestines sont toujours capables de se lier à la clathrine et au récepteur (Gaidarov et al., 1999). Les phosphoinositides constitueraient un point d’attachement multiple des β-arrestines à la membrane plasmique qui favoriserait l’adressage vers les puits mantelés de clathrine.

Figure 22 : Schématisation des interactions protéiques impliquant la β-arrestine et des composants de la machinerie d’endocytose

III-2-2 Les β-arrestines participent à l’internalisation d’autres types de récepteurs que les RCPGs

L’idée a émergé en 2003 que les β-arrestines ne participaient pas uniquement à l’internalisation des RCPGs mais également à celle de récepteurs d’autres types. Elles sont par exemple recrutées par un récepteur à sept domaines transmembranaires non couplé aux protéines G, Frizzled 4, un récepteur impliqué dans les processus développementaux qui s’associerait à la β-arrestine 2 par l’intermédiaire de la protéine cytosolique Dishevelled 2 pour induire l’internalisation (Chen et al., 2003b). Les β-arrestines sont par ailleurs impliquées dans l’internalisation de récepteurs des facteurs de croissance à activité tyrosine ou sérine/thréonine kinase à un seul domaine transmembranaire, tels que le récepteur à l’IGF- 1 (insulin-like growth factor 1) (Lin et al., 1998) ou le récepteur au TGF-β (transforming growth factor type III) (Chen et al., 2003a). Elles induisent également l’internalisation de molécules d’adhésion comme la néphrine (Quack et al., 2006) ou la VE-cadhérine (Gavard et Gutkind, 2006).

La β-arrestine 1 pourrait également participer indirectement à l’endocytose d’un tout autre type de matériel biologique que les récepteurs, à savoir les bactéries. Il a en effet été récemment montré que la pénétration de la bactérie Streptococcus pneumoniae dans les

cellules se ferait par l’intermédiaire de l’endocytose du récepteur PAF et requièrerait la participation de la β-arrestine 1 (Radin et al., 2005). Toutefois, cette étude demande confirmation par d’autres équipes.

Parallèlement à la multitude de récepteurs dont l’endocytose semble dépendre des β- arrestines, il existe certains récepteurs couplés aux protéines G qui internaliseraient indépendamment des β-arrestines. C’est le cas, entre autres, du récepteur metabotropique au glutamate, des récepteurs de la sécrétine, de la sérotonine 5-HT2A, du PAR (Protease- Activated Receptor), du récepteur au leukotriène B4 (pour revue : van Koppen et Jakobs, 2004) et du FPR (cf. § B/II-5-2-2). Les déterminants moléculaires entraînant les récepteurs vers une voie d’endocytose dépendante ou non des β-arrestines sont encore inconnus.