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5.2 La revue de littérature centrée sur la problématique du mémoire

5.2.4 Les impacts des initiatives marketing sur la chaîne d’approvisionnement d’une

Dans leur étude, basée sur l’historique des ventes d’une entreprise, Lummus, Duclos et Vokurka (2003) illustrent, à la figure 5.4, les changements requis au niveau de la production, des stocks et des livraisons dans une usine manufacturière en réaction à une initiative marketing. En se référant à cette figure, chaque sommet de la production ( ) représente une campagne de publicité ou une activité promotionnelle réalisée par le département marketing. Il est possible de constater que la production est jusqu’à cinq fois plus élevée que la demande régulière lors d’une activité marketing, que le niveau des stocks ( ) est aussi influencé par celle-ci et que la livraison ( ) l’est également malgré ses fluctuations moins significatives. De plus, la promotion-réseau encourage les détaillants de la chaîne d’approvisionnement à acheter davantage pour les besoins futurs des clients (« forward buying »). Ce phénomène a également été observé par Abraham et Lodish (1990). Ainsi, pendant ce temps, l’augmentation soudaine de la demande presse la chaîne d’approvisionnement et augmente les coûts de cette dernière.

Figure 5.4: Distorsion de la demande chez une entreprise de produits de consommation (Lummus, Duclos et Vokurka, 2003).

Comme le suggère également Vokurka et Lummus (1998), les activités marketing comme le marketing de masse, les promotions-réseau et les promotions axées sur le consommateur peuvent avoir un impact direct sur la chaîne d’approvisionnement. Cet impact peut être relié à deux causes majeures qui sont également liées à l’effet coup de fouet (situation dans laquelle de légères fluctuations de la demande, dans la chaîne logistique, déclenchent des fluctuations beaucoup plus importantes pour le grossiste, le distributeur et le fabricant, en raison du manque d'échanges d'information entre les intervenants – mieux connu sous le nom de « bullwhip effect ») :

• la demande augmente radicalement à cause d’une promotion; cela a pour effet de mettre la chaîne d’approvisionnement sous tension pour acquérir, acheminer et stocker la nouvelle demande;

• les prévisions de vente ne sont pas justes.

Dans ces deux cas, il y a une création de coûts additionnels. En effet, la figure 5.5 illustre l’équilibre entre la demande des consommateurs et la capacité de la chaîne d’approvisionnement à y répondre. Par contre, quand il y a une promotion (figure 5.6), la demande augmente radicalement et la chaîne d’approvisionnement se retrouve sous pression ce qui fait augmenter les coûts. C’est alors que l’entreprise s’expose à plusieurs risques comme une diminution des marges bénéficiaires, une diminution du niveau de service, une augmentation des coûts généraux, une augmentation des niveaux des stocks, etc.

Fournisseurs & Manufacturiers

Figure 5.5: Chaîne d’approvisionnement balancée (Vokurka et Lummus, 1998).

Demande accrue Programmes marketing

Coûts accrus Heures supplémentaires Frais d'expédition et de transport rapide Augmentation des stocks

Figure 5.6: Chaîne d’approvisionnement tendue/forcée (Vokurka et Lummus, 1998).

Le tableau 5.4 résume les différentes caractéristiques d’une chaîne d’approvisionnement sous tension en comparaison avec une chaîne d’approvisionnement balancée. De plus, un lien évident peut être fait avec une activité marketing comme une promotion.

Tableau 5.4: Caractéristiques de la chaîne d’approvisionnement tendue/forcée et balancée, adapté de Vokurka et Lummus (1998)

Chaîne d’approvisionnement tendue/forcée

Chaîne d’approvisionnement balancée

• Production pour les prévisions (poussé)

• Profil de la demande très variable

• Faible fiabilité globale

• Pas de coopération formelle avec le fournisseur

• Peu d’intégration avec les clients

• Changements fréquents dans le programme de fabrication

• Programmes de fabrication différents pour les usines et les fournisseurs

• Silos fonctionnels à l’intérieur de la chaîne d’approvisionnement

• Production pour la demande (tiré)

• Production de la plupart des produits de façon journalière (réduction des temps de cycles)

• Systèmes fiables

• Coopération quotidienne avec le fournisseur

• Rétroaction continue des stocks chez les clients

• Demande et approvisionnement synchronisés

• Même programme de fabrication tout au long de la chaîne

• Processus de la chaîne

d’approvisionnement par ligne de produits

Voici quelques exemples de coûts supplémentaires engendrés par la chaîne d’approvisionnement lors d’une promotion (Vokurka et Lummus, 1998) :

• Les demandes d’approvisionnement auprès du fournisseur ou du fabricant sont plus courtes que les délais standards.

• Le manque de capacité d’entreposage chez le fournisseur et/ou le fabricant et/ou le distributeur.

• Les modes de transport à faible coût ne sont pas disponibles ou ne répondent pas aux exigences désirées.

• Des changements au niveau du design du produit demandent des manipulations supplémentaires.

• La capacité non disponible : heures supplémentaires, méthode de production ou de manutention non standard, etc.

• Les produits endommagés ou les produits désuets.

• La quantité désirée dépasse la capacité du fournisseur et/ou du fabricant (un second fournisseur ou fabricant est nécessaire).

• La promotion requiert des méthodes non standards chez le distributeur : étiquetage spécial, emballage spécifique, etc.

• Etc.

La figure 5.7 illustre la relation qui existe entre l’augmentation de la demande et les coûts non standards engendrés par la chaîne d’approvisionnement (coûts causés par la promotion, mais souvent cachés dans les budgets d’achat ou les frais de fonctionnement comme une quantité supplémentaire de matériaux, une hausse des rejets, des heures supplémentaires, des frais de transport rapides, etc.). En effet, quand la demande pour un produit augmente à cause d’une promotion, l’ensemble des coûts de la chaîne d’approvisionnement augmentent aussi.

Figure 5.7: Relation entre l’augmentation de la demande et les coûts non standards de la chaîne d’approvisionnement (Vokurka et Lummus, 1998).

En conclusion, en matière d’initiative marketing, quand la demande augmente et exige un niveau de stock plus élevé, l’écart se reflète tout au long de la chaîne d’approvisionnement.

Nous sommes donc en présence de l’effet coup de fouet. Ainsi, les coûts augmentent pour l’ensemble des partenaires de cette même chaîne parce qu’ils sont obligés de réagir à un nouveau volume de commande pour répondre aux exigences à court terme de l’initiative (souvent de type promotionnel) : un lieu d’entreposage plus grand, des coûts de transport à la hausse, des coûts de manutention plus élevés, etc. (Lummus, Duclos et Vokurka, 2003).

Les entreprises devraient donc analyser les programmes marketing afin de déterminer ceux qui ajoutent véritablement de la valeur à l’entreprise. Bien entendu, cette évaluation doit se faire en tenant compte des effets sur l’ensemble de la chaîne d’approvisionnement. Ainsi, les coûts causés par la promotion tout au long de celle-ci doivent être pris en considération, car la variabilité des commandes chez les fournisseurs augmente également ses coûts (Lummus, Duclos et Vokurka, 2003). Pour sa part, Schultz (1990) constate que les gestionnaires ont considéré toutes sortes d’approches afin de planifier et d’implanter des promotions. En effet, il semble plus facile et rapide, en plus de demander moins d’effort, de faire un nombre élevé de promotions et d’espérer que l’une d’entre elles fonctionne en jetant un regard aveugle sur les pertes en terme d’effort, de temps et de ressources. Il ne serait pas plus facile de concentrer ses efforts sur celles qui fonctionnent vraiment? Ainsi, y aurait-il un problème d’évaluation des initiatives marketing?