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Partie I – Archives sédimentaires dans le bassin Levantin : biogéochimie et historique de

8. Étude des contaminants organiques : les HAP

8.1.3. Identification des sources de HAP

Les processus de formation des HAP sont tels qu’ils permettent aisément de reconnaître la prédominance de composés d’origine pyrogénique ou pétrogénique dans un milieu donné mais il est plus difficile de distinguer les sources de combustion entre elles. Malgré cela, les différentes sources de HAP (combustibles associés à des conditions de combustion bien définies) émettent des assemblages assez différents de composés qui permettent de les identifier. Le Tableau 16 montre la prédominance de certains composés par rapport aux autres selon la source d’émission, formant des signatures distinctes. De ce principe sont nées les

Étude des contaminants organiques : les HAP

Plusieurs méthodes sont citées dans la littérature scientifique dont l’appréciation des contributions relatives des composés individuels notamment sous forme d’empreintes moléculaires mais surtout l’utilisation de ratios « diagnostiques » (Benner et al. 1995; Budzinski et al. 1997; Yunker et al. 2002; Lima et al. 2005).

8.1.3.1. Pétrogénique vs pyrogénique

L’un des objectifs premiers de ces approches est de distinguer les HAP d’origine pétrolière des HAP issus de la combustion. Le pétrole brut est particulièrement riche en homologues alkylés et en composés légers tels que le phénanthrène, l’anthracène et le fluoranthène. Ces derniers y sont présents à des concentrations supérieures à 10 mg kg-1 alors que les autres composés s’y trouvent généralement en concentrations inférieures à 1 mg kg-1 (IPCS 1998). Le pétrole raffiné contient en plus les HAP issus du processus de « cracking ». Ces HAP diffèrent selon la température à laquelle le distillat est obtenu. Plus la température est haute, plus les HAP rajoutés sont lourds. L’on obtient par ordre croissant de température les essences légères > les diesels > les essences lourdes, enrichis en composés à 2 > 3 – 4 > 5 – 6 cycles aromatiques respectivement (Neff 2002).

La combustion incomplète génère majoritairement des composés parents, non substitués, formés d’au moins 3 cycles aromatiques. Plus la température de combustion est élevée, plus la proportion des composés alkylés est faible, et plus les composés parents de haut poids moléculaire sont importants (Laflamme et Hites 1978; Sporstol et al. 1983; Neff 2002). Ces HAP de haut poids moléculaire sont souvent associés à des particules de suie qui les protègent contre la photodégradation pendant le transport. Par exemple, dans les mêmes conditions expérimentales, le pyrène est photodégradé à 90 % lorsqu’il est en solution, et seulement à 13 % lorsqu’il est associé à des particules de suie (Lima et al. 2005). Il en va de même pour d’autres composés. L’adsorption sur la phase particulaire protège également les HAP contre la dégradation microbienne et chimique (McGroddy et al. 1996).

Ainsi, dans un mélange, il est possible de distinguer les HAP d’origine pétrolière de ceux issus de la combustion en comparant la proportion des HAP alkylés sur les HAP parents. Typiquement, une prédominance de ces derniers suggère que la combustion constitue la source majoritaire de HAP (Laflamme et Hites 1978; Sporstol et al. 1983). Il faut cependant garder en mémoire que l’association préférentielle des HAP parents aux particules de suie les protège et fait en sorte qu’ils se trouvent généralement en grande proportion tandis que les composés d’origine pétrolière peuvent être plus disponibles à la dégradation.

8.1.3.2. Distinction des sources de combustion

Bien que ces méthodes soient très utiles notamment pour identifier les contributions de HAP pétrogéniques versus pyrogéniques, deux paramètres incitent à être très prudents lors de l’interprétation concernant différentes sources de combustion. Les HAP émis dépendent du combustible utilisé mais plusieurs combustibles peuvent également émettre un assemblage commun de HAP dans certaines conditions de combustion (Lima et al. 2005). Les conditions

de combustions telles que la température et l’oxygénation sont variables et chaque combinaison donne un assemblage de HAP différent (Benner et al. 1995; Lima et al. 2005). En effet, la quantité d’oxygène affecte la formation de suie et la prédominance de composés parents ou substitués est déterminée selon la température de combustion (Laflamme et Hites 1978; Prado 1982). Ensuite, le même type de combustible tel que le bois peut produire une composition de HAP distinctes selon l’espèce d’arbre (ex. eucalyptus et pin ; Lima et al. 2005). De plus, les molécules de HAP subissent des transformations lors de leur transport, notamment dans l’atmosphère (Budzinski et al. 1997; Lima et al. 2005). Tous les HAP n’étant pas de stabilités égales, la composition finale dans les matrices environnementales peut être très différente de celle de la source initiale. Plusieurs études ont démontré que le B[a]Py et le B[a]Ant et l’Ant, les homologues alkylés du Phe, Fl et Py se dégradent sous l’action des rayons U.V beaucoup plus rapidement que les autres composés (Yunker et al. 2002; Lima et al. 2005). En revanche, le B[e]P et le Chr sont parmi les plus photostables (Simo et al. 1997). Le choix de composés ayant des vitesses de dégradation comparables tels que les couples Fl/Py et IPy/BPer pour les études de ratios peut pallier à cela. Enfin, des milieux tels que les sédiments marins contiennent des mélanges très complexes de HAP provenant de sources proches et éloignées tellement diverses qu’il est encore très difficile de cerner complètement cet aspect.

Tableau 16 – HAP prédominants dans diverses sources d’émissions anthropiques (adapté d’après Masclet et al. 1984)

Flu Phe Ant Fl Py BaAn Chr BbF BePy BaPy DBA Per IPy Cor Chauffage Véhicules essence Véhicules diesel Usine d’engrais Raffinerie de pétrole CE à charbon Usine d’incinération Fonderie CE : centrale électrique

Du point de vue quantitatif, différents facteurs d’émission ont également été attribués aux différentes sources de combustion. Un recueil de données de la littérature sur les facteurs d’émission de HAP est présenté dans le Tableau 17. Il en ressort clairement que le charbon ainsi que les vieilles chaudières à bois sont responsables du plus grand facteur d’émission de HAP par rapport au reste des sources. On en retient également que les technologies de combustion plus « propres » ont une part significative dans l’abattement des taux d’émissions

Étude des contaminants organiques : les HAP

Cependant, des différences notables entre les facteurs d’émission d’un même combustible dépendent également de paramètres techniques. Par exemple, le facteur d’émission de la production de coke peut différer d’un ordre de grandeur entre pays développés et pays non développés (Zhang et Tao 2009).

Tableau 17 – Facteurs d’émission de la somme de 8 HAP (Phe, Ant, Fl, Py, Chr/Triph, B[a]Ant, B[b+k]F, B[a]Py) de divers types de combustibles et de procédés de combustion (adapté d’après Elmquist et al. 2007)

Procédé de combustion Type de combustible Σ HAP8

(mg kg-1)

Référence

Chauffage industriel Diesel 1,1 USEPA 1993

Fioul n.2 0,046 Rogge 1993

Charbon bitumineux 0,0019 EPA 1998

Véhicules à moteur Essence (avec pot catalytique) 3,2 Rogge 1997

Essence (sans pot catalytique) 0,24 Rogge 1997 Diesel (camions) 0,35 – 1,7 Rogge 1997

Chauffage domestique Mazout 32 Johansson 2004

Bois (dur, tendre/ cheminée, four a bois)

14 – 31 McDonald 2000; Oanh 2002; Johansson 2004 Chaudière a bois ancienne 121 Johansson 2004 Chaudière a bois moderne 6,4 Johansson 2004 Charbon (types divers) 57,8 – 111 Chen et al. 2005; Lee

2005

Combustion en plein air Pétrole brut 21 Lemieux 2004

Bois (pin, sapin) 5,7 – 8,6 Jenkins 1996 Céréales (riz, mais) 3 – 4,5 Jenkins 1996