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Partie I – Archives sédimentaires dans le bassin Levantin : biogéochimie et historique de

9. Étude des contaminants organiques : le DDT

9.1.3. Aperçu des données sur le DDT en Méditerranée

Dans la Méditerranée, suite à la convention de Barcelone et à la mise en place du programme de monitoring MED POL (UNEP/PAM - la composante d'évaluation et de maîtrise de la pollution marine du Plan d’Action pour la Méditerranée), les investigations sur le DDT se sont multipliées, notamment sur les sédiments. Étant donné l’hydrophobicité du DDT, les sédiments, qui constituent le réceptacle final, sont une bonne matrice pour le monitoring de ce composé (Karickhoff et al. 1979, Tolosa et al. 1995). Une compilation et une appréciation des données de plus de 100 sources ainsi que des données officielles nationales dans les sédiments marins entre 1971 et 2005 ont été effectuées par Gomez-Gutierrez et al. 2007. Ces données proviennent essentiellement de zones côtières puisqu’elles sont au cœur des inquiétudes mais aussi parce qu’elles sont accessibles pour des prélèvements réguliers. Les concentrations de DDT sont couramment exprimées comme la somme de p,p’-DDE, p,p’-DDD et p,p’-DDT. La majeure contribution (69 %) des données utilisées dans l’étude précitée concerne la Méditerranée du Nord Ouest et la mer Adriatique. Des lacunes importantes ont été rapportées dans le bassin Est, particulièrement dans le bassin Levantin à l’exception de l’Égypte. Les principales conclusions de l’étude de Gomez-Gutierrez et al. 2007 ainsi que celles d’autres travaux sont exposées ci-après.

Gomez-Gutierrez et al. 2007 montrent que les apports de DDT en Méditerranée sont principalement locaux (effluents urbains/industriels/riverains) et non diffus. Un gradient décroissant des concentrations de DDT est généralement observé avec la distance à la côte, la distance aux sources ponctuelles et la profondeur de l’eau. La Méditerranée est un bassin semi-fermé où les échanges d’eau sont faibles d’autant plus que les masses d’eau douces ont été réduites par la construction de barrages tels que le barrage d’Assouan sur le Nil (De Madron et al. 2011). De plus, les marées et les courants côtiers sont trop faibles pour disperser les contaminants au large. Il s’avère que les prodeltas des grandes rivières (Rhône, Èbre, Po, Nil) sont de véritables centres de dépôt de DDT et que les concentrations y sont largement supérieures à celle trouvées à proximité des villes et cela, à cause de l’origine principalement agricole du DDT. Le Tableau 23 regroupe les concentrations dans les divers sites de la Méditerranée selon leur distance à la côte et aux différentes sources de pollution. Les valeurs maximales de DDT ont été trouvées à l’embouchure du Nil (29 – 826 µg kg-1) (Eldib et Badawy 1985; Abdallah et al. 1992). Le Nil et les grands canaux d'irrigation et de drainage ainsi que les lagunes côtières sont les principales sources de contamination des côtes

égyptiennes par les pesticides (Osibanjo 1994). Ensuite vient le Rhône (2 – 643 µg kg-1) (Marchand 1975; Cousteau 1979; RNO 1987; Tolosa et al. 1995) puis l’Èbre (1 – 73 µg kg-1) (Cousteau 1979; Tolosa et al. 1995) et enfin, le Po (0,01 – 4,30 µg kg-1) (Baldi 1991; Galassi et al. 1993).

Tableau 23 – Concentrations de ΣDDTs et de p,p’-DDE (entre parenthèses) exprimées en µg kg-1dans les

sédiments des différents sites du bassin méditerranéen (extrait de Gomez-Gutierrez et al. 2007)

Sites de prélèvement Concentration

moyenne Concentration médiane Intervalle de concentration (µg kg-1)

Ports 7922 (942,6) 37 (26,5) 0,3 – 75600 (0,03 – 21500) Lagunes côtières 41 (4,6) 6 (0,6) 0,1 – 640 (0,05 – 79) Influence urbaine 31 (17,9) 5 (2,0) 0,003 – 1406 (0,001 – 1585) Influence riveraine 60 (33,7) 11 (6,3) 0,01 – 826 (0,05 – 513) Plateaux continentaux 6 (2,3) 2 (0,4) 0,003 – 366 (0,001 – 360) Mer ouverte 2 (0,8) 1 (0,6) 0,08 – 5 (0,02 – 2,9)

Les grandes métropoles européennes et nord-africaines sont également à l’origine des flux de ΣDDTs vers la Méditerranée. Ces principales métropoles sont regroupées dans le Tableau 24 avec les concentrations de ΣDDTs dans les sédiments prélevés à une distance de moins de 10 km des villes. En Méditerranée orientale, les données fournies concernent uniquement la Grèce et l’Égypte. Sur les côtes d’Alexandrie, les hauts niveaux seraient attribués aux déversements d’effluents agricoles et industriels non traités et aux caractéristiques des baies étudiées (Abdallah et Abbas 1994). En ce qui concerne la Grèce, les plus hauts niveaux ont été trouvés près de Piraeus et correspondent aux années 1970 (Hatzianestis et Botsou 2005), l’époque de leur usage intense dans la région. Mais des études récentes montrent également des niveaux contemporains élevés sur les côtes grecques et des ratios de DDT/DDE qui indiquent des rejets récents (Hatzianestis et Botsou 2005). Des niveaux allant jusqu'à 76 µg kg-1 sont actuellement déterminés dans les sédiments du port de Piraeus (Galanopoulou et al. 2005). De plus, une étude sur les mammifères qui métabolisent très lentement le DDT tels que les phoques a démontré que durant la période 1995 – 1999, les individus capturés en Grèce présentaient des concentrations significativement supérieures à celle de leurs semblables capturés en Atlantique, ce qui rend compte des activités agricoles intensives et de l’utilisation du DDT en Grèce (UNEP/MAP 2010). Aucune donnée sur les sédiments de la côte turque n’est fournie. En revanche, des concentrations élevées dans Mytilus Galloprovincialis ont été rapportées dans certains sites turques (UNEP/MAP 2010), soulignant la nécessité de générer des résultats pour ce pays. Les lacunes sont à signaler également au Liban, en Syrie, en Israël dans le bassin Levantin.

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Tableau 24 – Intervalles de concentrations de ΣDDTs (µg kg-1) dans les sédiments à une distance inférieure

à 10 km des centres urbains importants dans le bassin méditerranéen ; données entre 1971 et 2005 (extrait de Gomez-Gutierrez et al. 2007)

Métropole Sous-bassin ΣDDTs (µg kg-1)

Venise (Italie) Adriatique 1 – 43

Naples (Italie) Tyrrhénien 1 – 312

Marseille (France) Nord-Ouest 2 – 225

Barcelone (Espagne) Nord-Ouest 1 – 195

Piraeus (Grèce) Ionien 0,3 – 1406

Thessalonique (Grèce) Ionien 0,3 – 33

Alexandrie (Égypte) Sud Levantin 0,7 – 299

Alger (Algérie) Sud-Ouest 40

Les « points chauds » en Méditerranée pour l’ensemble des organochlorés représentés dans la Figure 60 regroupent les zones à proximité des principales rivières et des grandes métropoles citées précédemment. Il convient de noter que d’autres « points chauds » peuvent exister mais n’ont pas encore été identifiés. Mis à part ces points, les concentrations de ΣDDTs sont, en général, assez faibles. Cependant, à des profondeurs élevées, loin des « points chauds », la dégradation du DDT est plus lente et sa durée de vie plus longue (Gomez-Gutierrez et al. 2007).

Figure 60 – Points chauds identifiés pour les concentrations de composés organochlorés dont le DDT dans les sédiments de surface de la Méditerranée (d’après Gomez-Gutierrez et al. 2007)

Une comparaison entre les différents bassins est illustrée à la Figure 61. Pour cette étude comparative, les seuls échantillons utilisés sont ceux des plateaux continentaux, éloignés de sources directes. Aucune différence significative n’est notée pour les niveaux de DDT sur l’ensemble des sous-bassins de la Méditerranée. Bien que faiblement représenté, le bassin Levantin Nord montre les concentrations les plus élevées associées à une agriculture intensive et un non-respect de la réglementation du DDT. Par ailleurs les résultats présentés

(UNEP/WHO, 1999, 2003). Obviously, the number of hot spots identified depends on the availability of data, which does not imply that others may not exist.

The impact of large cities is demonstrated by the high concentrations of pollutants found in their offshore sediments (e.g. Barcelona, Marseille, Geneva, Naples, Athens,

Alexan-dria, Alger and Oran) (Table 4). Other hot spot areas

identi-fied by UNEP and also in this study are for example the surroundings of Toulon in France, Thessalonica in Greece and Port Said in Egypt. Elevated concentrations found in sed-iments at the mouth of the main Mediterranean rivers (e.g. Ebro, Nile, Po and Rhone) highlight the necessity of also considering these zones as contamination hot spots for the target contaminants.

Samples from coastal lagoons also contained elevated con-centrations of these compounds, above all, in the area of the

Venice Lagoon in Italy (Fattore et al., 1997; Pavoni et al.,

1998; Bonamin et al., 1999; Marcomini et al., 1999; Moret et al., 1999; Frignani et al., 2001) and Manzala Lake in Egypt (Badawy and Wahaab, 1997; Yamashita et al., 1997, 2000). Other coastal lagoons showing high levels of POPs were iden-tified along the French shoreline (Canet, Berre, Thau and

Vac-cares lagoons) (Arnoux et al., 1981a; RNO, 1998) and in Italy

(Piallassa Baiona) (Matteucci et al., 2001).

3.5. Levels of contamination in the different Mediterranean sub-basins

A comparison of the levels of PCBs and DDTs found in the

under the influence of rivers and cities (Section3.2) were

ex-cluded. In the comparison, only areas in the continental shelf not directly or explicitly impacted by sources of contamination were considered. Although the number of samples cannot be representative in some areas and the lithology of the continen-tal shelf may influence the accumulation of these pollutants, it is interesting to note that the Northwestern, the Adriatic and the Tyrrhenian sub-basins are those exhibiting the highest levels of PCBs. This trend was also observed in a previous

as-sessment conducted by UNEP (UNEP/FAO/WHO/IAEA,

1990) and noted when considering other environmental

matri-ces (Fowler, 1986), and is consistent with the higher industrial

development of the riparian countries. On the other hand, when analysing the levels of DDTs in the different sub-basins, the differences were not observed, and it was the Central and North and South Levantine sub-basins which exhibited a rela-tively higher increase, probably related to the agricultural activities taking place in these areas as well as a later ban or lower restriction in the use of this product.

3.6. Background levels of contamination

The establishment of background concentrations for the target compounds in Mediterranean sediments is necessary in order to have reference values for comparison with experi-mental data.

When dealing with synthetic compounds the theoretical background concentration should correspond to the zero value. However, POPs are ubiquitous in the environment and can be

Fig. 4. Identified hot spots for the concentrations of PCBs, DDTs and HCB in the Mediterranean surficial sediments.

403 A. Go´mez-Gutie´rrez et al. / Environmental Pollution 148 (2007) 396e408

précédemment montrent que certains « points chauds » de la Méditerranée Est montrent des concentrations supérieures à celles de la Méditerranée de l’Ouest (ex. le delta du Nil).

La reconstitution de l’historique de la contamination par les composés chlorés a été très peu effectuée en Méditerranée. On retient les travaux de Tolosa et al. 1995 dans les plateaux continentaux du Rhône et de l’Èbre où les périodes de flux maximum de DDT sont 1960 – 1975 et 1975 – 1990, respectivement. En effet, l’interdiction de l’utilisation du DDT s’est fait à 10 ans d’écart entre la France (1976) et l’Espagne (1986), ce qui pourrait expliquer cette disparité. Des études similaires rapportées en Grèce (Hatzianestis et Botsou 2005) et dans le lac Manzala en Égypte (Yamashita et al. 2000) montrent des maxima dans les années 1970 et 1980 respectivement. La période de l’introduction du DDT dans l’environnement est commune pour toutes les régions, mais les périodes enregistrant des maxima indiquant le début de l’interdiction du DDT varient d’une région de plus d’une décennie. Les apports de DDT locaux affectent donc considérablement les archives sédimentaires. Les conditions physico-chimiques de la zone étudiée sont aussi des facteurs à considérer lors de l’investigation des colonnes sédimentaires.

Figure 61 – Intervalles, moyennes et médianes des concentrations de ΣDDTs en ng g-1 représentés pour

chacun des sous-bassins de la Méditerranée ( d’après Gomez-Gutierrez et al. 2007) Légende de haut en bas : médiane, moyenne et nombre d’échantillons. Les sous-bassins de la Méditerranée sont désignés comme suit : ADR, mer Adriatique ; AEG, mer Égée ; ALB, mer d’Albore ; CEN, Méditerranée Centrale ; ION, mer Ionienne ; NLE, mer Levantine du Nord ; NWE, Méditerranée de Nord-Ouest ; SLE, mer Levantine du Sud ; SWE, Méditerranée du Sud-Ouest ; TYR, mer Tyrrhénienne

Étude des contaminants organiques : le DDT

9.2. Le DDT/DDE dans le bassin Levantin : cas de la carotte