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Partie I – Archives sédimentaires dans le bassin Levantin : biogéochimie et historique de

8. Étude des contaminants organiques : les HAP

8.1.5. Aperçu des données sur les HAP en Méditerranée

Du fait de leur ampleur globale et de leurs propriétés toxique, mutagène et carcinogène connues (IARC), les HAP constituent toujours une source de préoccupation pour la communauté internationale. Depuis les années 80, les sources, les modes de transports, le devenir et l’inventaire de ces composés dans la Méditerranée ont fait l’objet d’un nombre d’études mais celles-ci étaient plutôt axées sur la partie occidentale. Nous présentons dans ce paragraphe quelques unes de ces études qui constitueront un appui pour les interprétations et un outil de comparaison pour nos résultats.

8.1.5.1. Les flux atmosphériques en Méditerranée

Les flux atmosphériques en HAP ont été évalués par des séries temporelles plus ou moins longues utilisant des pièges à sédiments, particulièrement sur le site DYFAMED (Dynamics of Atmospheric Fluxes in the Mediterranean) (Lipiatou et al. 1993; Deyme et al. 2011). Ce site de plus de 2000 m de profondeur dans la mer Ligurienne a été très exploité en Méditerranée occidentale du fait de la bonne connaissance de ses caractéristiques physiques, hydrologiques, biologiques. En effet, la station DYFAMED fait partie des sites de recherche continus en mer profonde choisis dans le programme collaboratif « Eurosites » (Eurosites ). De plus, cette station est généralement considérée comme étant coupée de la pollution côtière par le courant ligurien, ce qui la rend propice à l’étude des apports atmosphériques. Un tel point de référence n’a pas encore été désigné dans la Méditerranée de l’Est.

Des travaux similaires sur les flux verticaux de HAP ont été rapportés en mer ouverte dans la partie occidentale (Bouloubassi et al. 2006) et orientale (Tsapakis et al. 2006). L’originalité des investigations de Tsapakis et al. 2006 tient du fait qu’ils ont traité les dépôts humides et secs mais qu’ils ont également fait la lumière sur l’ampleur des processus d’échange gazeux en Méditerranée orientale. Leur stratégie d’analyse comportait outre l’étude des HAP sur des pièges à sédiments, des analyses sur des échantillons d’aérosols, d’eau de pluie et des investigations sur les échanges gazeux air/eau. Cette étude a permis :i) d’obtenir des mesures de dépôts secs et humides réels (flux annuels moyens de la somme de 35 HAP de 58, 166 µg m-2 a-1 pour les dépôts secs et humides respectivement), ii) de démontrer l’importance des apports en composés semi-volatils (échanges air-eau de la somme de 8 HAP = 706 µg m-2 a-1) dans la Méditerranée orientale en accord avec les résultats trouvés dans les Grands lacs américains et d’autres zones marines, iii) de conclure qu’en Méditerranée orientale la majorité des HAP d’origine atmosphérique étaient piégés dans la zone euphotique et que moins de 1% parvenaient à 250 m de profondeur.

8.1.5.2. Distribution des HAP dans les sédiments de surface

La majorité des résultats obtenus dans les sédiments marins en Méditerranée du Nord-Ouest (Albaiges 1982; Burns et Villeneuve 1983; Grimalt et al. 1984; Lipiatou et Saliot 1991a; Bouloubassi et Saliot 1993b; Raoux 1993; Tolosa 1993) dans le cadre du programme EROS a été présentée par Lipiatou et al. 1997. La zone couverte s’étendait de la mer Ligurienne à la

mer des Baléares et délimitée par les îles de Majorque, la Sardaigne et la Corse. Il apparaît qu’en mer ouverte et dans les zones côtières non polluées, les concentrations de HAP varient entre 100 – 1000 µg kg-1 tandis que les zones soumises à l’influence du Rhône et de l’Èbre peuvent dépasser les 3000 – 5000 µg kg-1.

La même année Bouloubassi et al. 1997 publient des travaux sur la même zone d’étude mais dans lesquels l’approche est différente. Ils ont utilisé les HAP d’origine naturelle (rétène et pérylène) ainsi que d’autres marqueurs tels que les alcanes, les acides gras et les stérols pour estimer les flux de matière organique continentale en Méditerranée occidentale. Il apparaît que les aires deltaïques du Rhône et de l’Èbre sont des réservoirs majeurs pour les apports terrigènes de carbone organique mais que l’advection latérale permet de disperser ces apports jusqu’à la pente continentale. Une différence du type de couverture végétale des bassins du Rhône et de l’Èbre a également pu être mise en évidence.

Une contribution en Méditerranée orientale (mer de Crète) a été produite par Gogou et al. 2000. Des sédiments de surface ont été analysés pour leur contenu en hydrocarbures aliphatiques et aromatiques. Des concentrations très modérées de HAP ont été observées (15 – 159 µg kg-1). Là aussi, la combinaison des différents paramètres analysés a permis de tracer les apports continentaux. Une concentration particulièrement élevée en rétène a été associée aux feux de forêt et non à des processus diagénétiques.

Une étude détaillée a été menée dans la mer Égée (Gonul et Kucuksezgin 2012) couvrant la zone côtière Turque qui est soumise à des décharges riveraines, municipales et industrielles diverses. Les concentrations de la somme de HAP trouvées étaient inférieures à 1000 µg kg-1 excepté pour le site se situant près de la métropole d’Izmir, à forte densité de population. L’ensemble de ces sites montre une contribution principale des HAP issus de la combustion (19 – 85%) puis des processus diagénétiques (pérylène) pour certains sites bien que l’activité touristique et le transport maritime soient importants dans la région.

Tsapakis et al. 2003 ont également effectué des analyses sur les côtes de la Grèce et de la Turquie mais aussi en mer ouverte. Les concentrations en mer ouverte sont beaucoup plus faibles que celles des sédiments côtiers. Il s’avère que l’intensité des flux de HAP particulaires provenant de la combustion sur le continent soit affaiblie en mer ouverte où les apports gazeux, quasi constants sur l’ensemble des sites deviennent prédominants.

8.1.5.3. Reconstitution de l’historique de la contamination par les HAP en Méditerranée

Un nombre plus restreint d’études a été consacré à l’historique de la contamination en HAP via l’analyse de carottes sédimentaires. Ce genre d’études est plus couramment mené sur les métaux lourds. Nous pouvons citer les travaux de Tolosa et al. 1996 dans lesquels une investigation complète est effectuée sur des sédiments de surface et sur deux carottes sédimentaires couvrant les aires marines sous l’influence du Rhône et de l’Èbre s’étendant

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Rhône est supérieure d’un ordre de grandeur à celle apportée par l’Èbre. Par ailleurs, l’importance de l’enlèvement en zone côtière et celle des apports atmosphériques en mer ouverte ont été mis en évidence. Enfin, les carottes sédimentaires datées prélevées sur les plateaux continentaux de l’Èbre et du Rhône ont permis de déterminer les tendances temporelles pour toutes les espèces de composés étudiés. Les flux maximaux de HAP ont été détectés pour les périodes 1920 – 1940 et 1975 – 1990. La période pré-1920 considérée comme préindustrielle a permis d’apprécier l’enrichissement dans les couches suivantes.

Plus récemment, Di Leonardo et al. 2009 et Mzoughi et Chouba 2011 ont publié des profils de HAP dans les carottes sédimentaires obtenues dans le golfe de Palerme et entre la côte Tunisienne et le canal de Sicile. Bien que ces études soient très riches en paramètres analysés, l’absence de datation n’a pas permis de déterminer l’historique de la contamination ni le calcul des flux. Mzoughi et Chouba 2011 ont identifié le pétrole comme source prédominante dans le canal de Sicile, seul lien pour le trafic maritime entre les deux bassins de la Méditerranée. Enfin, des études ont également été entreprises récemment dans des lagunes de la méditerranée telles que l’Étang de Thau en France et le lac Maryout en Égypte (Léaute 2008; Barakat et al. 2011b).

8.1.5.4. Tendance des émissions et des concentrations de HAP en Europe: 1980-2000

Sur le continent Européen, les résultats des réductions d’émissions de HAP sont montrés sur la Figure 45. Des données telles que celles fournies par L’EMEP n’existent pas pour les pays Méditerranéens du Moyen-Orient et d’Afrique du Nord.

Figure 45 – Émissions atmosphériques de B[a]Py (µg m-2 a-1) en Europe en 1980, 1990, 2000 (de gauche à

droite) (source: Shatalov et al. 2004)

Les sources d’émission totale de B[a]P et les concentrations atmosphériques de B[b]F ont connu un abattement important en Europe entre 1980 et 2000 (Figure 45 et Figure 46). Cependant les tendances diffèrent dans certains pays d’Europe de l’Est où les avancées technologiques et les législations environnementales n’ont pas commencé avant les années 1990 (Pacyna et al. 2003).

Figure 46 – Concentrations dans l’air de B[b]Fl (ng m-3) en Europe en 1980, 1990, 2000 (de gauche à droite) (source : Shatalov et al. 2004)

La Figure 46 montre bien la réduction des concentrations atmosphériques résultant des restrictions d’émissions, mais ces diminutions concernent surtout les pays du Nord et de l’Ouest (excepté l’Espagne). Alors que les émissions de B[b]F en Europe ont diminué de moitié entre 1980 et 2000, les concentrations dans l’air et dans l’eau ont apparemment suivi la même tendance mais l’abattement dans les sols ne serait que de 30 % (Shatalov et al. 2004). De ce fait, il apparaît que la réponse à des réductions d’émissions est plus lente à se faire révéler dans les sols et probablement dans les sédiments lacustres et marins. Il est donc délicat de faire la comparaison directe entre les données d’émissions ou de concentrations atmosphériques et les variations dans les sédiments.

8.1.5.5. Augmentation des feux de forêts sur le continent européen

Les feux de forêts sont la cause naturelle la plus importante de ravage des zones boisées dans le bassin méditerranéen. Les feux de forêts ont certes toujours existé dans le bassin Méditerranéen même avant le Quaternaire à cause du climat méditerranéen dans cette zone (Figure 47). Cependant, une augmentation dramatique en nombre et en étendue a été notée en Europe méditerranéenne au cours du dernier demi-siècle (Shakesby 2011). Les facteurs naturels tels que le réchauffement global et le manque de précipitations y ont joué un grand rôle. Des facteurs socio-économiques tels que l’exode rural, l’expansion urbaine et la repopulation des forêts par des espèces inflammables ont également pu causer de telles répercussions sur les forêts européennes. De plus, le bassin méditerranéen est caractérisé par un nombre important de feux volontaires ou accidentels induits par l’homme (95 – 99 % de tous les feux) (Alexandrian et al. 1998).

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Figure 47 – Étendue du climat méditerranéen autour du bassin de la Méditerranée selon la classification de koppen-greiger (adapté Kottek et al. 2006 dans Shakesby 2011)

La moyenne cumulée de la superficie de forêts brûlées dans les pays méditerranéens est actuellement de près de 600 000 ha, soit le double que dans les années 1970. L’aggravation de la situation est surtout notée pour la Grèce (12 000 à 39 000 ha), l’Italie (43 000 à 118 000 ha), l’Espagne (50 000 à 208 000 ha) (Alexandrian et al. 1998). Par ailleurs, aucune amélioration n’est notée sur l’ensemble des 23 pays du bassin inclus dans l’étude malgré les efforts qui ont été déployés.

8.2. Les HAP dans le bassin Levantin : cas de la carotte

sédimentaire C1

8.2.1. Profils sédimentaires des concentrations de HAP

Les profils des concentrations (en µg kg-1 de poids sec) représentant la somme des composés parents (ΣHAP16) et de leurs homologues alkylés (ΣC-HAP) sont présentés dans Figure 48. Le groupe des HAP parents comprend 16 composés non substitués de trois à sept noyaux aromatiques à l’exception du rétène et du pérylène (Phe, Ant, F, Py, B[a]An, Chr/Triph, B[e]Py, B[a]Py, IPy, DBA, Bper, B[bj]Fl- somme de B[b]Fl et B[j]Fl -, B[k]Fl et Cor). Les homologues alkylés comprennent les (Σmono-, di- et tri-)alkyl-phénanthrène/anthracène, les (Σmono-, di-) alkyl- fluoranthène/Pyrène, les (Σ mono-, di-, tri-) alkyl-Chrysène/Triphenylène et les alkyl-benzofluoranthène (C-Phe/Anth, C-F/Py, C-Chr/Triph, C-BFl).

Les profils des HAP non substitués (ΣHAP16) et de leurs homologues alkylés (ΣC-HAP) dans C1 montrent des aspects complets et relativement riches. Les deux profils des composés parents et alkylés présentent une bonne similitude et sont également comparables aux profils présentés précédemment pour le mercure et le plomb. Les concentrations en HAP (ΣHAP16 + ΣC-HAP) ont augmenté entre le fond de la carotte 16,1 ± 4,3 µg kg-1 (moyenne pour n = 23 en dessous de 20 cm) et la surface de la carotte 97,6 µg kg-1.

Figure 48 – Profils en fonction de la profondeur des HAP parents ΣHAP16 (Phe, Ant, Fl, Py, B[a]An, Chr/Triph, B[e]Py, B[a]Py, IPy, DBA, Bper, B[bj]F, B[k]F et Cor ) représentés par les cercles ouverts et des HAP alkylés ΣC-HAP (C1-Phe/Anth, Phe/Ant, C3-Phe/Anth, C1-F/Py, C2-F/Py, C1-Chr/Triph, C2-Chr/Triph, C3-Chr/Triph, C-BFl) représentés par les cercles fermés exprimés en µg kg-1 p.s.

Dans les couches profondes (entre 20 et 58 cm), les concentrations varient peu et sont représentatives des niveaux préindustriels. Une augmentation notablement régulière en HAP parents et alkylés est observée entre les horizons 20 et 9 cm et une variation importante des concentrations est observée dans toutes les couches de surface entre 9 et 0,9 cm (X̅= 74,9 ± 2,8 µg kg-1, n = 23). Cette archive sédimentaire pour les HAP en Méditerranée orientale montre ainsi que, comme pour le Pb et le Hg, l’accroissement des niveaux de HAP par rapport au fond débute vers 1850 et est sans doute lié à la combustion du charbon en tant que source principale d’énergie au début de la première révolution industrielle. Par contre, les concentrations variables, sans tendance claire, commencent à se manifester déjà vers 1934. L’aspect de cette dernière partie du profil est quelque peu singulier.

L’influence historique de la contamination de l’environnement par les HAP due à l’utilisation du charbon est en général bien documentée (Simcik et al. 1996; Fernandez et al. 2000; Schneider et al. 2001; Lima et al. 2003; Van Metre et Mahler 2004; Wakeham et al. 2004; Gallon et al. 2005; Usenko et al. 2007). Ces nombreuses études ont présenté l’historique et les tendances de la contamination par des HAP des sédiments marins et lacustres surtout en Europe et en Amérique du Nord. Toutefois, peu d’études fournissent des données avec une résolution suffisante pour comprendre l’évolution récente des HAP dans l’environnement marin sédimentaire. Dans la carotte sédimentaire datée de l’estuaire Pettaquamscutt (Atlantique

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régulière entre 1850 et 1934. Cette tendance concorde donc parfaitement avec nos résultats en Méditerranée orientale. Cependant, après le premier pic des années 1930, une forte augmentation en HAP a été également révélée dans les sédiments de l’estuaire Pettaquamscutt (Lima et al. 2003). En effet, le maximum de la contamination par les HAP des sédiments lacustres et marins se situe généralement entre 1940 et 1960 et il coïncide avec le maximum de l’utilisation du charbon en Europe et Amérique du Nord (Fernandez et al. 2000; Schneider et al. 2001; Lima et al. 2003; Gallon et al. 2005; Léaute 2008). Notre carotte sédimentaire C1 ne révèle ni un maximum dans les années 1950, ni une tendance à la diminution des niveaux en HAP sédimentaires après la réduction de l’utilisation du charbon. Il est possible qu’un tel pic soit masqué dans C1, par les apports locaux. Ceci est probablement dû au fait que les niveaux de HAP dans ces sédiments sont très faibles.

Nous avons noté plus haut l’allure générale similaire des profils des HAP parents et alkylés. L’examen détaillé de ces deux groupes de composés fournit en fait d’autres renseignements sur l’évolution de la contamination par les HAP de sédiments marins en Méditerranée orientale. On note d’abord que sur l’ensemble des couches analysées, les sommes de concentrations de HAP parents et alkylés montrent une bonne corrélation (Figure 49 ; r2=91%, p < 0,05). On note également une prédominance des composés parents le long de la carotte sédimentaire (55 – 73% ; Figure 50). Il convient ici de noter que les HAP parents sont préférentiellement associés aux particules fines de suie et sont, par suite, mieux préservés contre la dégradation par les rayons U.V et les microorganismes que leurs homologues alkylés (Lima et al. 2005). Donc, à moins qu’un déversement important de pétrole ne se produise dans le système marin, l’on rapporte communément une prédominance de HAP parents (Gogou et al. 2000). L’utilisation d’une approche à ratios multiples, présentée ultérieurement permettra d’éviter la confusion découlant de la dégradation de composés avant ou après le dépôt.

Figure 49 – Relation entre les HAP parents et alkylés représentée par une droite de régression linéaire avec un intervalle de confiance de 95%

Malgré la bonne corrélation entre les composés parents et alkylés, les proportions relatives des deux groupes varient le long de la carotte C1 et montrent des caractéristiques distinctes. En effet, le ratio ΣHAP16/(ΣC-HAP+ΣHAP16) décroît dans les horizons supérieurs de la carotte (entre environ 7 cm et la surface ; Figure 50). Il est également plus faible au fond de la carotte (trois dernières couches ; Figure 50). Toutefois, ce ratio reste relativement constant entre 20 et 10 cm (0,69 ± 0,01) dans la carotte C1, et cela malgré une forte augmentation des niveaux en HAP, pendant cette longue période (~ 80 ans) de dépôt sédimentaire.

Figure 50 – Profils du ratio ΣHAP16/ (ΣC-HAP+ΣHAP16) (panneau gauche) et de l’écart entre les composés

parents et alkylés en µg kg-1 (ΣHAP16 – ΣC-HAP) (panneau droit)

D’autre part, l’écart entre les composés parents et alkylés (ΣHAP16 – ΣC-HAP) montre une évolution présentant des phases distinctes dans la carotte C1 (Figure 50). Cet écart reste relativement constant dans les couches avant 1852 (sauf pour les trois derniers niveaux où il est le plus faible sur toute la longueur de la carotte), il croît ensuite fortement entre 1852 et 1934 pour atteindre la valeur maximale (en 1934). Après, il diminue jusqu’à la surface de la carotte. Cet examen dégage des tendances claires et permet ainsi de distinguer quatre périodes d’évolution des HAP parents et alkylés dans la carotte C1: avant 1615 (date incertaine car elle dépasse largement les limites de la datation au 210Pb), entre 1615 et 1852, entre 1852 et 1934, et à partir de 1934. Dans le Tableau 18 sont présentés les paramètres des droites de régressions entre composés parents et alkylés estimées dans les horizons des sédiments correspondant aux différentes époques du dépôt sédimentaire. Presque les mêmes périodes sont mises en évidence par ces droites de régressions entre ΣHAP16 et Σ C-HAP (Tableau 18) et les profils de la Figure 50. L’ensemble de ces résultats montre le changement d’apports en HAP issus de la combustion (principalement bois, charbon et pétrole) et probablement de la contamination

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Tableau 18 – Régressions linéaires entre HAP parents et homologues alkylés dans les différents horizons de la carotte C1

Niveau (cm)Période estimée

Pente régression linéaire Ordonnée à l’origine r2 N 0,9 – 10,5 1999 – 1928 0,66 -3,89 0,41 14 11,1 – 19,5 1923 – 1852 0,48 -0,66 0,95 15 20,7 – 44,0 1842 – 1615 0,66 -1,45 0,84 20 48,2 – 57,8 1588 – 1510 0,87 -0,45 0,99 3

En effet, une prédominance des composés parents caractérise principalement les assemblages de HAP formés à haute température lors de la combustion (Laflamme et Hites 1978; Sporstol et al. 1983; Gogou et al. 2000). À l’inverse, une prédominance des composés alkylés indique une origine pétrolière (Bouloubassi et Saliot 1993a; Tronczynski et al. 2004; Deyme et al. 2011). Les paramètres utilisés dans cette analyse de résultats (ratio, écart et pentes de régressions) montrent l’évolution des contributions relatives des différentes sources de HAP dans la carotte C1. Au fond de la carotte, la plus forte proportion des composés alkylés est probablement liée aux apports dus à la combustion de bois, unique source énergétique de l’époque considérée.

Par la suite, ce sont des mélanges plus complexes de sources diverses de HAP qui sont impliqués. La période suivante semble en effet indiquer des apports principalement liés à la combustion du charbon et se caractérise par la plus forte présence des composés parents. Enfin, l’accroissement récent des HAP alkylés est lié aux apports croissants des composés d’origine pétrolière. Néanmoins, dans cette dernière période, les HAP parents sont tout de même légèrement dominants, ce qui contraste avec l’empreinte clairement pétrogénique liée au trafic maritime et au déballastage des navires rapportés au large de la Méditerranée du Nord Ouest (Deyme et al. 2011). Par contre, dans les carottes sédimentaires prélevées dans les plateaux continentaux de l’Èbre et du Rhône, les pourcentages de HAP parents (72 – 87 %) sont largement supérieurs à ceux de C1 et cela à cause de leur proximité aux grandes villes Européennes (Tolosa et al. 1996). L’influence des activités urbaines et industrielles utilisant des combustibles fossiles semble largement prédominante en comparaison avec les apports liés au transport maritime en zone côtière. Dans le cas des côtes du bassin Levantin, il est clair que l’influence continentale sur l’assemblage des HAP ne s’exerce pas avec la même ampleur qu’en Méditerranée du Nord Ouest. Les niveaux de HAP dans C1 montrent également cette disparité entre les bassins Est et Ouest. Cette analyse reste toutefois très générale et sera davantage nuancée dans les paragraphes suivants lors de l’examen des sources de la contamination où l’on a également recours aux divers indices géochimiques. Une telle approche doit également prendre en compte une évolution possible des indices due à la dégradation spécifique des composés individuels.