2.7 Tests
3.1.2 Hypothèses sur les interactions cellulaires
Les expériences biologiques réalisées dans les années 60 sur les mouvements
auto-induits de certaines cellules ont donné lieu à de nombreuses théories explicatives. Bien
que ces théories soient fondées sur diérents concepts d'adhésion cellulaire, elles se
concentrent sur les forces mises en jeu au niveau des surfaces de contact entre les
cel-lules. Il est assez usuel de classer ces hypothèses en 4 grandes classes [Brodland, 2002] :
l'hypothèse DAH, l'hypothèse DSCH, l'hypothèse specic-CAMs et l'hypothèse DITH.
DAH : Dierential Adhesion Hypothesis
Cette hypothèse, issue d'un parallèle entre un tissu et un uide, a été formulée par
Steinberg à la suite de ses fameuses expériences [Steinberg, 1970]. L'hypothèse DAH
suppose que
1. les cellules adhèrent les unes aux autres,
3. Un agrégat de cellules va avoir tendance à se positionner dans une conguration
qui minimise l'énergie du système.
L'hypothèse DAH est aujourd'hui la plus reconnue biologiquement et c'est en partie sur
cette hypothèse que nous allons fonder notre étude.
DSCH : Dierential Surface Contraction Hypothesis
Harris a eectué un travail parallèle sur le comportement des uides et celui des tissus
[Harris, 1976]. Il a ainsi pu mettre en évidence un certain nombre de diérences qui l'ont
amené à énoncer des hypothèses sur les interactions cellule-cellule. En particulier Harris, a
formulé l'hypothèse de la contraction de surface diérentielle. L'hypothèse DSCH suppose
que
1. les cellules présentent des contractions de surface,
2. la force de contraction est
élevée lorsque la cellule est en contact avec le milieu extracellulaire,
faible lorsque la cellule est en contact avec une cellule d'un autre type
histolo-gique,
la plus faible lorsque la cellule est en contact avec une cellule du même type
histologique.
3. les cellules de diérents types exercent diérents degrés de contraction de surface
lorsqu'elles sont en contact avec le domaine extracellulaire.
Cette hypothèse a permis d'élaborer des modèles d'interactions hétérotypiques
exhi-bant essentiellement des congurations en damier.
Specic CAM-based hypothesis
Dans les années 80, les recherches se sont concentrées sur les phénomènes chimiques
liés à l'adhésion cellulaire. Ces recherches ont notamment permis de découvrir de
nou-velles molécules dédiées spéciquement à l'adhésion cellulaire appelées CAMs (Cell
Adhe-sion Molecules). Friedlander et ses collaborateurs ont mis en avant que les CAMs, et plus
particulièrement les cadhérines (section 3.2), inuencent l'organisation spatiale des
cel-lules [Friedlander et al., 1989]. L'hypothèse Specic CAM-based s'est développée en
99 3.1. Adhésion cellulaire
parallèle de ces recherches et prétend que l'organisation cellulaire d'un tissu dépend de
la nature et de la concentration des structures moléculaires à la surface des cellules.
Il s'avère que cette hypothèse est complémentaire de l'hypothèse DAH proposée par
Steinberg. En eet, elle permet de dénir la force d'adhésion entre deux cellules voisines
qualitativement en décrivant les molécules exprimées au sein des deux cellules considérées,
et quantitativement en mesurant la quantité de ces protéines exprimées par les deux
cellules.
DITH : Dierential Interfacial Tension Hypothesis
Au début des années 2000, certaines expérimentations biologiques ont montré
l'inco-hérence de l'hypothèse DAH [Brodland et Chen, 2000]. Par ailleurs, le concept de
ten-sion de surface diérentielle, qui a débouché sur l'hypothèse DITH, s'est montré
cohé-rent avec ces expérimentations biologiques. L'hypothèse DITH, proposée par Brodland
[Brodland, 2002], suppose que
1. la tension de surface agit le long des frontières entre deux cellules et entre une
cellule et le domaine extracellulaire,
2. la valeur de cette tension dépend des types respectifs des cellules ou du domaine
extracellulaire formant l'interface,
3. cette tension induit des mouvements locaux au niveau des jonctions entre cellules
qui mènent à des congurations spéciques de réarrangement cellulaire comme le
damier.
L'hypothèse DITH ore une alternative intéressante aux autres hypothèses. Son
utilisa-tion pratique reste pour l'instant dicile [Brodland, 2002].
Les diérentes hypothèses proposées sur le fonctionnement de l'adhésion cellulaire
ont été, et sont encore de nos jours, la source de controverses. Malgré les progrès
tech-nologiques dans de nombreux domaines tels que la biologie moléculaire, la biochimie ou
l'imagerie, il semblerait qu'aucune hypothèse générale sur l'adhésion cellulaire ne puisse
être conrmée. Cependant, l'hypothèse biologique la plus couramment admise reste
l'hy-pothèse d'adhésion diérentielle (DAH) proposée par Steinberg. Dans la suite de ce
cha-pitre nous nous placerons sous l'hypothèse DAH qui, dans sa forme originelle, est trop
conceptuelle pour pouvoir être utilisée directement dans un modèle. Ainsi, nous
essaie-rons de coupler l'hypothèse DAH et les connaissances récentes obtenues sur les molécules
d'adhésion cellulaires (CAMs).
Le rôle précis des CAMs (Cellular Adhesion Molecules) a été particulièrement étudié
au cours de années 90. Geiger et Ayalon ont montré que, parmi les CAMs, les
cadhé-rines et les caténines tiennent un rôle prépondérant chez les vertébrés, du fait de leurs
implications dans les jonctions adhérentes [Geiger et Ayalon, 1992]. Ces molécules sont
responsables de l'adhésion et de la force de cette adhésion entre deux cellules voisines,
par la formation d'un complexe appelé complexe Cadhérine-Caténine.
An de mieux comprendre les mécanismes d'adhésion induits par les complexes
Cadhérine-Caténine, il est nécessaire de faire un bilan des connaissances sur la
com-position et le rôle précis joué par ces complexes.
3.2 Le complexe Cadhérine-Caténine : un des agents
prin-cipaux de l'adhésion cellulaire
Les cadhérines sont des glycoprotéines transmembranaires participant à l'adhésion
de type cellule-cellule et à la reconnaissance cellule-cellule [Yap et Goodwin, 2004]. Les
principaux types de cadhérines sont nommés en rapport avec le type de tissu où
celles-ci furent découvertes. Par exemple les E-, N- et VE-cadhérines correspondent
respec-tivement à des cellules épithéliales, nerveuses et endothéliales vasculaires. Une protéine
cadhérine est caractérisée par un domaine extracellulaire et un domaine intracellulaire. Le
domaine extracellulaire se compose exactement de cinq parties extracellulaires répétées
(voir gure 3.1). Les ligants entre deux domaines extracellulaires d'une même cadhérine
sont composés d'ions de calcium (Ca2+). Le domaine intracellulaire d'une cadhérine sert
quant à lui d'intermédiaire entre la cellule et le domaine extracellulaire.
3.2.1 Domaine extracellulaire d'une cadhérine
La liaison entre deux cellules voisines est assurée par des connexions entre de
nom-breuses molécules cadhérines appartenant aux deux cellules. Cette liaison est plus
par-ticulièrement assurée par les domaines extracellulaires des molécules cadhérines. Deux
Dans le document
Modèles statistiques du développement de tumeurs cancéreuses
(Page 98-102)