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1.4 Synthèse de cétones α-CF 3

1.6.1 Hydratation des alcynes-CF 3

Une réaction d’hydroalcoxylation de gem-difluorures propargyliques a été développée par un ancien étudiant du laboratoire Paquin pour la synthèse de 1,3-difluorocétones.173 Ces conditions de réaction ont été le point de départ pour l’optimisation de la réaction d’hydratation de (trifluorométhyl)alcynes, ces conditions étant le (Ph3P)AuOTf à 5 %

molaire comme catalyseur dans le THF avec le méthanol comme nucléophile (dans un ratio de 9:1) à température ambiante pendant 18 heures (Tableau 1.1). Obtenant l’éther d’énol et les acétates correspondants, une réaction d’hydrolyse subséquente en utilisant l’acide chlorhydrique à température ambiante pendant 3 heures est nécessaire pour obtenir la cétone. La mise en place de ces conditions mène à la formation de la cétone α-CF3 1.122 comme seul

régioisomère avec un rendement très acceptable de 82 % (entrée 1). Après seulement 4 heures de réaction à température ambiante, la réaction n’est pas complétée avec un rendement modéré de 50 % (entrée 2). À ce point, le ligand JohnPhos a été utilisé à la place du PPh3,

173 Hamel, J.-H.; Hayashi, T.; Cloutier, M.; Savoie, P. R.; Thibeault, O.; Beaudoin, M.; Paquin, J.-F. Org. Biomol. Chem. 2017, 50, 9830-9836.

diminuant ainsi la charge catalytique jusqu’à 1 % molaire qui s’est avérée tout aussi efficace avec un excellent rendement isolé de 94 % (entrée 3). Par la suite, la question sur la pertinence d’une réaction subséquente d’hydrolyse a été mise en avant. L’ajout de l’acide trifluoroacétique, acide soluble dans le milieu organique, permet la réaction d’hydrolyse directement après la réaction d’hydroalcoxylation dans le milieu réactionnel pendant 18 heures en obtenant un rendement de 72 % (entrée 4).

Tableau 1.1. Optimisation de la réaction d’hydroalcoxylation d’alcynes-CF3 catalysée à l’or

Entrée Ligand [Au] (% mol) Temps (h) Rend. (%)

1 PPh3 5 18 82

2 PPh3 5 4 50a

3 JohnPhos 1 18 89

4 JohnPhos 1 18 72a,b

a Conversion incomplète. b Présence de TFA (0,01 M) dans le milieu réactionnel. Seulement

la réaction i a été effectuée.

Avec le résultat encourageant de l’entrée 4 du Tableau 1.1, la poursuite de l’optimisation pour enlever la réaction d’hydrolyse subséquente se poursuit au Tableau 1.2. L’utilisation de l’eau comme co-solvant avec le méthanol dans la réaction d’hydratation permet l’obtention le produit 1.122 comme seul régioisomère avec un rendement de 43 % (entrée

1), ce résultat permettant de confirmer que la présence d’eau s’est montrée compatible avec

la transformation. En revanche, le rendement diminue jusqu’à 12 % lorsqu’il y a seulement l’eau comme nucléophile dans le milieu réactionnel (entrée 2) et la réaction d’hydrolyse ne fonctionne pas du tout avec l’eau comme nucléophile en présence d’acide trifluoroacétique (entrée 3). Ces résultats démontrent que le méthanol est un meilleur nucléophile que l’eau

pour effectuer cette transformation174 et que la présence de TFA affecte la réaction d’hydratation. Lorsque la température de la réaction est augmentée à 40 °C, les rendements sont tous autant efficaces avec ou sans présence de méthanol comme co-solvant (entrées 4 et 5) et la même diminution de rendement est observée lors de l’ajout d’acide trifluoroacétique dans le milieu réactionnel (entrée 6). L’augmentation du temps de réaction jusqu’à 24 heures en utilisant l’eau comme nucléophile seulement permet d’avoir conversion complète en plus d’avoir un bon rendement de l’ordre de 82 % (entrée 7). Le meilleur rendement est obtenu en augmentant la charge catalytique jusqu’à 2 % molaire avec conversion complète après 18 heures de réaction (entrée 8). L’utilisation de 3 % molaire de (JohnPhos)AuOTf provoque une diminution de rendement (entrée 9), résultat encore inexpliqué à ce jour. Le catalyseur d’or est essentiel à la formation du produit puisque 1.122 n’a nullement été formé lorsqu’il a été omis (seulement la présence du AgOTf dans le milieu réactionnel) (entrée 10). De même, la présence du triflate comme contre-ion est essentielle à la transformation, puisqu’il y a aucune conversion avec seulement le (JohnPhos)AuCl dans le milieu réactionnel (entrée 11). Également, la présence d’acide triflique, conditions dites classiques pour permettre l’hydratation d’alcynes, ne permet pas d’activer suffisamment l’alcyne pour permettre la réaction d’hydratation (entrée 12). L’augmentation de la température jusqu’à 70 °C n’a aucun impact, négatif ou positif, sur le rendement, ayant eu 89 % à 40 °C (entrée 8) et 88 % à 70 °C (entrée 13). La quantité d’eau comme nucléophile pour effectuer la transformation peut être entre 5 % et 25 % (entrées 14 et 15). À des concentrations plus élevées que 25 % dans le milieu réactionnel, le produit de départ est de moins en moins soluble dans le solvant et le rendement chute à 42 % (entrée 16). Enfin, le rendement obtenu est similaire lorsque la transformation s’effectue sur une plus grande quantité, soit 1 mmol de l’alcyne-CF3 1.52 (entrée 17). Différents abstracteurs de chlorure

alternatif au triflate d’argent ont été essayé, soit le cuivre et le lithium, pour effectuer la transformation, mais sans succès (entrées 18 et 19) dû au fait que l’argent possède la capacité de trapper le chlorure présent dans le catalyseur (JohnPhos)AuCl. Des tests supplémentaires ont été effectués pour évaluer la tolérance de la transformation par rapport au pH du milieu réactionnel : moins de 1 % de conversion a été obtenu en utilisant une solution tampon phosphate à pH = 7 (entrée 20), tandis qu’une conversion complète et 96 % de rendement

RMN 19F a été obtenu en utilisant l’amine encombrée 2,6-di-tert-butyl-4-méthylpyridine (entrée 21).

Tableau 1.2. Optimisation de la réaction d’hydratation d’alcynes-CF3 catalysée à l’or

Entrée [Au]

(% mol) Temp. (° C) Temps (h) Solvant Rend. (%)

1 1 21 18 MeOH/H2O (1:1) 43a 2 1 21 18 H2O 12a 3 1 21 18 H2Ob 0 4 1 40 18 MeOH/H2O (1:1) 72a 5 1 40 18 H2O 78a 6 1 40 18 H2Ob 24a 7 1 40 24 H2O 82 8 2 40 18 H2O 89 9 3 40 18 H2O 73 10 2c 40 18 H2O 0 11 2d 40 18 H2O 0 12 2e 40 18 H2O 0 13 2 70 18 H2O 88 14 2 40 18 THF/H2O (19:1) 89 15 2 40 1 THF/H2O (19:1) 84 16 2 40 18 THF/H2O (19:1) 42a 17 2 40 18 H2O 91f 18 2g 40 18 H2O 0 19 2h 40 18 H2O 0 20 2 40 18 H2O <1i,j 21 2 40 18 H2O 96j,k

a Conversion incomplète. b Présence de TFA (0,01 M) dans le milieu réactionnel. c Réaction

effectuée avec seulement la présence de AgOTf. d Réaction effectuée avec seulement la présence de (JohnPhos)AuCl. e Réaction effectuée avec seulement la présence de TfOH. f Réaction effectuée sur 1 mmol. g Réaction effectuée avec du (JohnPhos)AuCl et du Cu(OTf)2. h Réaction effectuée avec du (JohnPhos)AuCl et du LiOTf. i Présence d’une solution tampon

phosphate à pH = 7. j Rendement estimé par RMN 19F avec le 2-fluoro-4-nitrotoluène comme étalon interne. k Présence de 2,6-di-tert-butyl-4-méthylpyridine dans le milieu réactionnel (1 équiv.).

Pour donner suite au processus d’optimisation, la cétone α-CF3 1.122 a donc pu être obtenu

dans un rendement isolé de 89 % (Tableau 1.2, entrée 8) suite à une réaction d’hydratation sur l’alcyne-CF3 1.52 correspondant en utilisant l’eau comme nucléophile à 40 °C pendant

18 heures dans le THF comme co-solvant (ratio de 9:1). Après la détermination des conditions optimales de la réaction d’hydratation, l’étendue de la réaction a été testée sur une banque d’alcynes trifluorométhylés (Schéma 1.31). Après quelques tests, la température de la réaction a dû être augmentée jusqu’à 70 °C pour permettre la conversion complète de la transformation de la plupart des alcynes-CF3.

En ce qui concerne les composés aliphatiques, les groupements fonctionnels benzoates 1.123 et 1.125, benzyles 1.126 et 1.129 ainsi que carbamates 1.124 tolèrent les conditions de catalyse avec des rendements isolés allant de 71 à 87 %. Cependant, la cétone α-CF3 1.124 a

été isolée avec une impureté impossible à séparer par chromatographie sur gel de silice et la structure de cette impureté n’a jamais pu être déterminée. Pour les produits 1.124, 1.131 et

1.132, une petite optimisation supplémentaire a dû être effectuée, soit le changement solvant,

passant du THF au 1,4-dioxane, qui est également un solvant fortement utilisé pour des réactions d’hydratation d’alcynes. Pour les composés 1.130, 1.131 et 1.132 avec des groupements alcanes, ils ont obtenu des rendements moyens allant de 66 à 79 %. Malheureusement, pour le groupement silylé 1.128, un faible rendement de l’ordre de 10 % a été obtenu, ce rendement pouvant être expliqué par une déprotection du groupement protecteur TBS, impliquant donc une faible tolérance des groupements silylés face aux conditions acides de catalyse à l’or. En revanche, un rendement de 71 % de la cétone α-CF3

1.127 a été isolé après catalyse du substrat 1.59 (dû à la déprotection du groupement silylé).

L’analyse du spectre RMN en fluor présente deux triplets fluorés dans une intégration de 60:40, indiquant la présence d’un équilibre tautomérique entre la forme ouverte et cyclique (sous forme chaise) de ce composé. Un test supplémentaire pour confirmer cette hypothèse serait de faire des analyses de changement de température en RMN du fluor, permettant de vérifier le changement de ratio entre ces deux signaux fluorés obtenus. Le substrat 1.127 a également été obtenu à partir de l’alcyne-CF3 1.58, mais avec un faible rendement de 30 %.

Pour les aromatiques, la transformation fonctionne avec des composés électrodonneurs et électroattracteurs, ce qui est amélioration de la méthode utilisant l’acide sulfurique pour l’activation puis l’hydratation d’alcynes trifluorométhylés.164a De plus, la réaction

d’hydratation peut avoir lieu avec des groupements en position para, méta et ortho sur un cycle aromatique avec des rendements allant de 62 à 90 %. Les groupements phénol 1.135, méthoxy 1.136, 1.139 et 1.143 et acétate 1.137 sont tolérés au cours de la réaction d’hydratation. Une comparaison peut être effectuée avec le groupement méthoxy sur chacune des positions sur un cycle aromatique ; d’excellents rendements ont été obtenus lorsque le groupement méthoxy est en position para 1.136 et ortho 1.143 avec des rendements de 90 % et 87 % respectivement, contrairement à l’obtention d’un rendement moyen de 64 % lors de sa substitution en méta 1.139. Une limitation de ce système est le volume des substituants en

ortho : avec le chlorure 1.142 et le méthoxy 1.143, l’hydratation s’effectue avec de bons

rendements, tandis que lorsque le groupement est plus encombré stériquement, soit le méthyle 1.144, le rendement chute et l’obtention d’un rendement isolé n’a jamais été possible (seulement estimé par rendement RMN 19F en utilisant le 2-fluoro-4-nitrotoluène comme standard interne). Cet encombrement stérique supplémentaire ne permet pas au (JohnPhos)AuOTf, catalyseur d’or lui-même encombré, de se coordonner adéquatement à l’alcyne, empêchant par la même occasion l’attaque du nucléophile présent dans le milieu réactionnel. Enfin, la double hydratation de l’alcyne bis-trifluorométhylé 1.76 fonctionne avec un rendement moyen de 68 % pour l’obtention du produit 1.145, la charge catalytique ayant dû être augmentée jusqu’à 5 % molaire.

a Réaction a été effectuée à 40 °C. b Réaction a été effectuée sur 1 mmol. c 1,4-Dioxane a été

utilisé comme solvant à la place de THF. d Réaction d’hydratation à partir de 1.58. e

Hydratation à partir de 1.59. f Estimé par RMN 19F avec 2-fluoro-4-nitrotoluène comme étalon interne. g 5 % molaire de (JohnPhos)AuCl et AgOTf ont été utilisés.