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Hpsg et approche elliptique

Partie II Analyse de la coordination 75

5.5 Comparaison avec d’autres mod´elisations

5.5.2 Hpsg et approche elliptique

Dans cette section, nous pr´esentons l’approche de [BS04]. Les auteurs d´efinissent un cadre g´en´eral pour mod´eliser la coordination de constituants, de non constituants avec mont´ee de nœuds, les s´equence d’arguments et enfin les coordinations disparates. Ils s’ins-crivent dans une mod´elisation elliptique du ph´enom`ene.

Les auteurs adressent deux critiques `a l’approche pr´esent´ee plus haut :

1. Les coordinations de non-constituants et les d´ependances non-born´ees sont mod´elis´ees de le mˆeme fa¸con dans les Gc. Notamment, les deux n´ecessitent les combinateurs pour la mont´ee de type et la composition.

2. Les Gc doivent supposer que les symboles de ponctuation sont trait´es comme des conjonctions de coordination.

Le premier point indique que l’on ne peut pas, dans les Gcc, mod´eliser les coordina-tions de non-constituants sans mod´eliser les d´ependances non-born´ees, et r´eciproquement.

Or les auteurs donnent un certain nombre de langues, comme le Hausa, dans lesquelles

les constructions faisant intervenir des d´ependances non-born´ees comme des extraposi-tions, des topicalisaextraposi-tions, des constructions cliv´ees existent, sans que les coordinations de non-constituants soient autoris´ees. Ces langues sont impossibles `a mod´eliser dans les Gc. Le second point, fond´e sur des exemples, indique que le fait de donner aux symboles de ponctuation, comme les virgules ou les points de suspension, le statut de conjonctions de coordination pour mod´eliser certaines coordinations de non-constituants entraˆıne une surg´en´eration.

La th`ese des auteurs est qu’il n’existe que des coordinations de constituants, qui peuvent parfois mettre en jeu des ph´enom`enes d’ellipse. Dans la phrase suivante, on coordonne deux propositions. La premi`ere est d´efective : il y manque l’objet du verbe.

(5.29) [Jean aime Picasso ] mais [Marie d´eteste Picasso].

De la mˆeme fa¸con, il n’existe pas dans l’approche elliptique de coordination disparate : ici encore, l’on coordonne deux propositions et non pas un nom et un adjectif.

(5.30) [ Jean est ˆapre `a la tˆache ] et [ Jean est bon bˆucheron].

Un sch´ema g´en´eral Une coordination denconjoints peut se repr´esenter sch´ematiquement par une chaˆıne ABnBn−1. . . B2CB1D, o`u C est une conjonction et A et D sont des par-ties ´elid´ees (qui peuvent ˆetre vides). Cette chaˆıne doit se r´e´ecrire pour faire apparaˆıtre clairement les parties ´elid´ees pour chaque conjoint. Elle prend alors la forme suivante :

(ABnD)C(ABn−1D)C . . .(AB2D)C(AB1D)

Dans l’expression ci-dessus les ABiD doivent tous ˆetre des constituants de mˆeme nature.

De plus, les auteurs peuvent caract´eriser les ph´enom`enes de coordinations selon A et D :

– Si A =ǫ et D=ǫ alors, on a une coordination de constituants.

ǫ Jean Paul et Marie ǫ

⇒ (ǫ Jean ǫ) et (ǫ Paulǫ) et (ǫ Marie ǫ)

– Si D=ǫ et A6=ǫ, alors on a affaire `a une coordination de s´equence : (Jean donne) des tulipes `a Marie et des roses `a Nathalie ǫ

⇒ (Jean donne des tulipes `a Marie ǫ) et (Jean donne des roses `a Nathalie ǫ) – Si D6=ǫ et A=ǫ, alors on est en pr´esence d’une mont´ee de nœud droit :

ǫ Jean aime mais Marie d´eteste (Picasso)

⇒ (ǫ Jean aime Picasso ) et (ǫ Marie d´eteste Picasso)

Mod´elisation Nous ne pr´etendons pas ici donner une pr´esentation des Hpsg. Nous renvoyons le lecteur au tr`es p´edagogique [SWB03]. Nous supposons que le lecteur poss`ede quelques connaissances de ce formalisme.

Les conjonctions de coordination sont trait´ees comme des marqueurs qui introduisent une nouvelle marque crd qui est positionn´ee `a + si le syntagme commence par une conjonction de coordination et `a − sinon. L’entr´ee lexicale repr´esent´ee sur la figure 5.23 est celle d’une conjonction de coordination. Elle doit se combiner avec un ´el´ement marqu´e

5.5. Comparaison avec d’autres mod´elisations crd − pour donner une structure qui contient les mˆemes marques mais crd +. On distingue cette marque crdde la marque souvent pr´epositionnelle marking puisque les deux peuvent marquer un constituant (par exemple et `a la plage).

Figure 5.23 – Entr´ee lexicale pour une conjonction de coordination

Il faut ´egalement consid´erer que les constructions `a partir de entr´ees lexicales propagent notre nouvelle marque.

On peut maintenant donner la r`egle qui rend compte du sch´ema de r´e´ecriture des coordinations. Elle est pr´esent´ee sur la figure 5.24.

Figure 5.24 – R`egle de construction d’un segment coordonn´e

Le domaine de la structure m`ere est exactement la chaˆıne d’entr´ee de notre sch´ema. Le traitsyncoindex´e entre la m`ere et les deux filles indique que l’on coordonne deux ´el´ements de mˆeme nature que leur coordination. Ils ont notamment les marques en commun, par l’interm´ediaire du trait marking. On comprend maintenant pourquoi le trait crd est distinct des autres marques. Il est n´ecessaire que la premi`ere fille soit marqu´ee crd - et la seconde crd +. La structure m`ere est libre : elle peut ˆetre marqu´ee crd - ou +. De plus, la coordination C est optionnelle (liste `a 0 ou 1 ´el´ement). Ceci permet d’emboˆıter de telles structures binaires pour mod´eliser la coordinationn-aire.

Les structures des deux structures filles nous donne la chaˆıne du sch´ema apr`es r´e´ecriture.

Le premier conjoint est constitu´e de la liste d’´el´ements A, qui peut ˆetre vide, puis de la liste d’´el´ementsB1 qui elle ne doit pas ˆetre vide, suivie d’une liste potentiellement vide d’´el´ements qui n’appartiennent pas au domaine de la structure m`ere. Cette derni`ere

liste n’a pas de r´ealit´e dans la forme de surface. Elle repr´esente donc la partie ´elid´ee qui correspond `a D et qui doit ˆetre ajout´ee au premier conjoint.

On remarque que chaque ´el´ement de la liste d’´el´ements ´elid´ee du premier conjoint doit s’unifier avec un ´el´ement de D pour le trait hd (la partie syntaxique) et frm (la partie phonologique). Les autres traits sont libres. C’est ainsi que l’on duplique le mat´eriel manquant. Et il en sera de mˆeme pour les ´el´ements de la partie ´elid´ee du second conjoint qui doivent s’unifier pour certains traits avec des ´el´ements de A.

Le second conjoint commence par la conjonction de coordination suivie d’une liste d’´el´ements ´elid´es de la structure m`ere puis la liste B2 des ´el´ements du second conjoint tels qu’ils apparaissent dans la chaˆıne d’entr´ee. Le second conjoint se termine par la liste d’´el´ementsD qui peut ˆetre vide.

Limites de l’approche Cette approche bien qu’elle donne satisfaction dans de nom-breux cas poss`ede quelques d´efauts. Elle peine `a expliquer pourquoi certaines formes contract´ees (avant r´e´ecriture) sont accept´ees tandis que les formes ´etendues (apr`es r´e´ecriture du sch´ema) ne le sont pas.

(5.31) (a) J’ai donn´e un DVD `a Jean et non une cassette `a Pierre.

(b) * J’ai donn´e un DVD `a Jean et j’ai donn´e non une cassette `a Pierre.

Un autre probl`eme vient de l’analyse des adverbes restrictifs :

(5.32) Jean donne seulement dix roses blanches `a Pierre et vingt roses rouges `a Paul.

Selon le sch´ema que nous avons vu, les deux r´e´ecritures possibles sont :

(5.33) (a) [Jean donne seulement dix roses blanches `a Pierre] et [Jean donne seulement vingt roses rouges `a Paul.]

(b) [Jean donne seulement dix roses blanches `a Pierre] et [Jean donne vingt roses rouges `a Paul.]

Aucune de ces deux r´e´ecritures ne donne le sens d´esir´e, c’est-`a-dire celui o`u l’adverbe seulement restreint les deux conjoints `a la fois.

Il existe aussi un probl`eme calculatoire. Il faut consid´erer toutes les possibilit´es de suites d’´el´ements A et D et donc ´enum´erer tous les contextes `a gauches et `a droite des conjoints.

Enfin, l’argument que les auteurs donnent pour ´eliminer l’approche par factorisation des Gc est le suivant : la phrase 5.34 requiert dans l’approche de donner `a la virgule le statut de conjonction de coordination. On peut alors g´en´erer des phrases sans v´eritable conjonction de coordination qui exhibent le ph´enom`enes de coordination. Les auteurs en concluent que cette mod´elisation am`ene `a surg´en´erer. Pourtant, [Mou07] indique que de telles phrases existent en fran¸cais, essentiellement dans le contexte du style journalistique.

(5.34) Jan travels to Paris on Monday, to London on Tuesday and will fly to Tokyo on Sunday.

Leur proposition est d’analyser la phrase de la fa¸con suivante :

(5.35) Jan [ [travels to Paris on Monday] , [ [travels to London on Tuesday] and [will fly to Tokyo on Sunday]]].

5.5. Comparaison avec d’autres mod´elisations Malheureusement, cette analyse ne correspond pas `a la structure obtenue par leur sch´ema de r´e´ecriture. Si travels est assimil´e `a A alors il doit ˆetre r´ep´et´e dans les trois conjoints et donc ´egalement dans le dernier.

En conclusion, cette approche grˆace `a sons sch´ema de r´e´ecriture simple permet de donner une repr´esentation unifi´ee des coordinations de constituants et de certaines coor-dinations de non-constituants (mis `a part legapping). En revanche, elle souffre de quelques lacunes, au niveau linguistique et au niveau informatique. D’ailleurs, aucune implantation de cette mod´elisation n’existe pour la simple raison que ce type de r`egle est impossible

`a ´ecrire avec les syst`emes de type LKB [Cop99]. En particulier, c’est la coindexation des Fi, Gj Hk et Il dans la r`egle de construction qui est difficile `a exprimer.