• Aucun résultat trouvé

Grammaires cat´egorielles combinatoires

Partie II Analyse de la coordination 75

5.5 Comparaison avec d’autres mod´elisations

5.5.1 Grammaires cat´egorielles combinatoires

La proposition g´en´eralement admise dans lesGcest que la coordination s’analyse par factorisation [Ste90; Mor94]. Il y a deux raisons `a cela :

– l’analyse des diff´erents sous-ph´enom`enes est uniforme, mˆeme pour le gapping, – cette mod´elisation est relativement simple (sauf peut-ˆetre pour legapping) et s’´etend

naturellement aux coordinations disparates.

Etant donn´e que notre mod´elisation des coordinations disparates est directement ins-´ pir´ee de la mod´elisation propos´ee pour les Gc par [Bay96], nous ne revenons pas sur celle-ci dans cette section.

D´efinition

On rappelle que les Gcc associent `a chaque mot des cat´egories construites sur un ensemble de cat´egories atomiques{S, GN, GP, N}et de symboles{\, /}. Il existe aussi des combinateurs qui permettent de r´e´ecrire des suites de cat´egories. Si une suite de r´e´ecritures permet de passer de l’expression d’entr´ee `a S, alors l’analyse r´eussit. En particulier, il existe deux combinateurs d’application, l’application avant (f a) et l’application arri`ere (ba). Nous suivons les auteurs desGcc dans leur notations aussi bien pour les symboles /et \que pour les combinateurs que l’on note simplement au niveau des r`egles et jamais dans les expressions elles-mˆemes. Nos deux premiers combinateurs se notent donc :

Y X\Y ⇒ba X X/Y Y ⇒f a X

Ce sont les combinateurs de base. Nous allons maintenant voir d’autres combinateurs qui permettent de comprendre la mod´elisation de la coordination dans lesGcc.

Le premier combinateur T permet de transformer un argument en fonction : c’est le combinateur de mont´ee de types. Il en existe deux versions selon l’ordre d’application :

X ⇒<T Y\(Y /X) X ⇒>T Y /(Y\X)

Il nous faut ´egalement un combinateur pour composer les types. C’est l’´equivalent du raisonnement hypoth´etique des Gc de logique des types. Il s’appelle B pour des raisons historiques :

X/Y Y /Z ⇒>B X/Z Y\Z X\Y ⇒<B X\Z

5.5. Comparaison avec d’autres mod´elisations

La coordination

On attribue `a la conjonction de coordination un typeconj. On se dote ´egalement d’un combinateur & :

X conj X ⇒& X (5.26)

Cette premi`ere pr´esentation met les conjoints `a la mˆeme distance de la conjonction.

On retrouve ici l’origine de notre id´ee des DAP en trois parties. Les parties basses de notre mod´elisation sont les deux X en partie gauche de la r`egle & et la partie haute est repr´esent´ee par le X en partie droite.

Une variante est ´egalement possible qui met le second conjoint plus proche de la conjonction. Il faut pour cela deux r`egles :

conj X ⇒>& [X]&

X [X]&<& X (5.27)

L’application de ces deux r`egles 5.27 permet de retrouver la r`egle 5.26. Mais ces deux r`egles offrent une granularit´e plus fine : en effet, entre l’application des deux r`egles la co-ordination est dans un ´etatnon r´esolu qui permettra de mod´eliser le gapping. Donc, pour les ph´enom`enes simples, on peut appliquer indiff´eremment 5.26 ou les deux r`egles 5.27 cons´ecutivement. Pour le gapping en revanche, on appliquera les deux r`egles 5.27 entre-coup´ees d’une transformation assez importante de la phrase.

Coordination de constituants Si la cat´egorie X est atomique, alors on a une coor-dination de constituants comme dans :

Jean GN

et conj

Marie GN &

GN

dorment S\GN ba S

Coordination de non-constituants Si la cat´egorie X est complexe, on a une coor-dination de non-constituants. Il faut cependant utiliser les combinateurs T et B pour retrouver la mˆeme cat´egorie de part et d’autre de la conjonction de coordination :

Jean

GN >T

S/(S\GN)

aime (S\GN)/GN

>B

S/GN et

conj

Marie

GN >T

S/(S\GN)

d´eteste (S\GN)/GN

>B

S/GN &

S/GN Picasso

GN S f a

Coordination de s´equences On ne distingue pas les coordinations de s´equences d’ar-guments des autres types de coordinations, voir [Ste90; Dow88]. Qu’il y ait un argument ou plusieurs, l’analyse est semblable `a celle que nous venons de pr´esenter pour la mont´ee de nœuds. Tout d’abord, on utilise la mont´ee de type (T) et la composition (B) pour exhiber la sym´etrie des conjoints. Puis, on applique le combinateur de coordination. On peut tout de mˆeme constater que les types mis en jeu sont plus complexes. L’exemple de coordination de s´equences est repr´esent´e sur la figure 5.5.1.0.0. On note V =S\GN.

Avant de passer au gapping, il faut remarquer que les cat´egories que nous avons co-ordonn´ees dans cette derni`ere partie sont des cat´egories qui font apparaˆıtre la nature verbale des ´el´ements mis en jeu dans la coordination. On peut donc dire qu’en creux, la mod´elisation par factorisation fait apparaˆıtre l’´el´ement ´elid´e.

Gapping Pour le gapping, il faut permettre de retrouver la sym´etrie qui autorise une mod´elisation par factorisation. [Ste90] donne une r`egle de d´ecomposition lexicale qui per-met d’aller chercher dans le premier conjoint la partie manquante au second conjoint.

Nous allons prendre comme exemple, la phrase Joseph est informaticien et Charles m´ecanicien. On d´ecompose l’analyse en deux. Pour le premier conjoint l’analyse est simple :

Joseph GN

est (S\GN)/N

informaticien N f a

S\GN S ba

Ensuite, il nous faut pouvoir analyser le second conjoint comme un constituant auquel il manque quelque chose, en l’occurrence une phrase `a laquelle il manque un verbe. Nous avons besoin d’un nouveau combinateur qui est une composition particuli`ere :

[X/(S\GN)]& (S\GN)\Y ⇒B& [X\Y]&

Ce combinateur indique que si l’on a un conjoint droit de typeX qui r´eclame un verbe

`a sa droite et un verbe auquel il manque une d´ependance de type Y `a sa gauche, alors on peut r´e´ecrire le tout en un conjoint droit de type X `a laquelle il manque un Y `a sa gauche. Le verbe disparaˆıt : il est ´elid´e, c’est le trou verbal.

Analysons notre second conjoint. Il faut tout d’abord monter les types de Charles et m´ecanicien pour faire apparaˆıtre le verbe qui nous permettra d’appliquer notre nouveau combinateur.

et conj

Charles

GN >T

S/(S\GN)

>&

[S/(S\GN)]&

m´ecanicien

N <T

(S\GN)\((S\GN)/N)

>B&

[S\((S\GN)/N)]&

5.5.Comparaisonavecd’autresmod´elisati

Jean GN

donne (V /GN)/GN

des tulipes

GN <T

(V /GP)\((V /GP)/GN)

`a Marie

GP <T

V\((V /GP)/GN)

<B

V\((V /GP)/GN)

et conj

des roses

GN <T

(V /GP)\((V /GP)/GN)

`a Nathalie

GP <T

V\((V /GP)/GN)

<B

V\((V /GP)/GN)

&

V\((V /GP)/GN) S\GN ba

S ba

Figure 5.22 – Coordination de s´equences avec les grammaires cat´egorielles.

Le type de ce second conjoint indique qu’il a le mˆeme comportement syntaxique qu’une phrase `a laquelle il manque la copule, qui est attendue `a gauche.

Il est maintenant temps de joindre les deux analyses. Mais il faut tout d’abord exhiber la copule dans le premier conjoint. [Ste90] d´efinit pour cela un nouveau combinateur qu’il appelle le combinateur de d´ecomposition lexicale34 :

S⇒dec X S\X (o`uX est une cat´egorie pr´esente dans l’analyse)

X est une cat´egorie qui apparaˆıt dans l’analyse qui a donn´eS. C’est un combinateur atypique puisqu’il d´epend du contexte dans lequel il est utilis´e.

Ce combinateur est aussi tr`es particulier puisque il y a plus de cat´egories dans la partie droite de la r`egle que dans la partie gauche. Il indique qu’une proposition peut ˆetre scind´ee en deux parties. La partie droite attend la partie gauche pour fournir une proposition par application arri`ere. Ce combinateur rend la r`egle d’application arri`ere inversible, `a condition que la cat´egorie r´esultat de cette application soit S.

On peut maintenant analyser notre phrase :

(S\GN)/N

Joseph est informaticien

S dec

S\((S\GN)/N)

et Charles m´ecanicien [S\((S\GN)/N)]&

<&

S\((S\GN)/N) S ba

L’analyse se termine par une application de la seconde r`egle du combinateur &, qui indique que les cat´egories des conjoints sont les mˆemes. C’est `a dire que l’on revient `a un traitement de la coordination normal, apr`es avoir fait en sorte de retrouver cette sym´etrie par l’utilisation des nouveaux combinateurs.

Le combinateur de d´ecomposition est tout de mˆeme tr`es particulier : il augmente la longueur des expressions et il doit s’aider du contexte de la phrase (sinon, il y a une infinit´e de possibilit´es pour le X). On imagine mal pouvoir g´en´eraliser ce type de combinateurs sans remettre en cause la complexit´e voire la d´ecidabilit´e des Gcc. D’ailleurs dans les articles r´ecents, comme [SB07], cette analyse n’est pas pr´esent´ee. En effet, on g´en`ere des phrases incorrectes, comme dans l’analyse suivante :

(S\GN)

Jean GN

dort S\GN

S ba dec

S\(S\GN)

et conj

Marie

GN >T

S/(S\GN)

>&

[S/(S\GN)]&

tranquillement (S\GN)\(S\GN)

>B&

[S\(S\GN)]&

<&

S\(S\GN) S ba

34. il y a bien sˆur un autre combinateur o`u\ est remplac´e par/. Mais Steedman ne l’utilise pas.

5.5. Comparaison avec d’autres mod´elisations Le probl`eme peut sans doute se r´esoudre en ajoutant des modalit´es pour contrˆoler l’associativit´e des combinateurs. Il apparaˆıt n´eanmoins que l’analyse dugapping n’est pas tout `a fait satisfaisante. Elle est relativement complexe, elle met en jeu des combinateurs aux comportements inhabituels et elle provoque une surg´en´eration.

Plus g´en´eralement, les Gcc, comme les Gc de logique des types, surg´en`erent. On peut le constater sur les ph´enom`enes comme la mont´ee de nœud droit notamment. Par exemple, consid´erons l’exemple suivant :

(5.28) * [Jean aime] et [Marie va `a] Paris.

Dans ce cas, les grammaires cat´egorielles attribuent le typeS/GN aux deuxconjoints.

LesGcleur attribuent le mˆeme comportement syntaxique, c’est-`a-dire celui d’un groupe auquel il manque un syntagme nominal `a droite pour donner une proposition compl`ete.

Et cette phrase est donc accept´ee.

Cela est dˆu au fait que pour ˆetre coordonn´es, deux segments ont juste besoin d’ˆetre du mˆeme type. Par analogie avec lesGi, on peut dire que deux segments sont coordonnables si et seulement si leurs interfaces sont les mˆemes. Cette ´equivalence est trop permissive.

Dans notre proposition, nous indiquons que cette condition est n´ecessaire mais elle n’est pas suffisante. Il faut ´egalement que les structures arborescentes (les DAP) se superposent.

LesGcse munissent donc de modalit´es pour contrˆoler l’associativit´e et la commutativit´e des combinateurs.

Mais l’on peut s’interroger sur l’utilisation des modalit´es qui compliquent de plus en plus l’´ecriture et la compr´ehension de la grammaire. D’ailleurs lesnouvelles Gc, comme par exemple celles que pr´esente [Mus03; de 01], s’opposent tr`es nettement `a l’emploi de modalit´es. Elles appliquent (simultan´ement ou en cascade) plusieurs niveau de composi-tion : morphologique, syntagmatique, s´emantique. . . de mani`ere `a ce que chaque partie soit simple `a ´ecrire et `a maintenir bien sˆur mais aussi pour distinguer les niveaux de com-position clairement. Il est ainsi plus facile de distinguer le niveau des chaˆınes du niveau des arbres, qui est la principale cause de surg´en´eration pour les Gc.