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TRAITEMENT DE LA PNEUMOPATHIE NOSOCOMIALE :

VIII. IMPACTE DES PNEUMOPATHIES NOSOCOMIALES

1. Stratégie globale

1.3. Gestion de l’antibiothérapie et antibioprophylaxie

L’utilisation des antibiotiques conduit au risque de sélection de germes résistants, puis de diffusion épidémique de ces germes par transmission croisée. Ce phénomène est particulièrement aigu et visible dans les secteurs de réanimation qui pourront jouer le rôle de plaque tournante, de diffusion épidémique de ces bactéries [193]. Il est donc habituellement recommandé que les unités de réanimation se dotent de protocoles thérapeutiques définissant la nature et la durée des antibiothérapies probabilistes initiales en fonction de l’écologie locale et définissent l’utilisation des antibiotiques à spectre plus étroit, après obtention des informations microbiologiques nécessaires. La distinction entre colonisation et réelle infection mérite d’être établie au cas par cas afin de ne pas favoriser l’émergence de germes résistants par une antibiothérapie intempestive [194].

Différentes techniques permettent, surtout quand elles sont associées, d’améliorer le choix initial de l’antibiothérapie :

• Rédaction et utilisation, en fonction des types d’infections, de protocoles facilement accessibles issus de recommandations.

• Listes d’antibiotiques réservés à certaines indications et délivrés sur justification écrite (comportant des renseignements cliniques et/ou bactériologiques simples, par exemple l’antibiogramme)

• Appel à un référent ou validation par ce dernier de la prescription de certains antibiotiques ;

• Utilisation de systèmes informatiques d’aide à la prescription des antibiotiques comportant en particulier des aide-mémoires, des liens avec les recommandations, des informations sur les résistances bactériennes, des alertes prenant en compte les protocoles de service et les particularités du patient, elle permet l’ajustement de l’antibiothérapie (arrêt, désescalade, maintien d’une association, changement d’antibiothérapie ou de modalités d’administration, etc.).

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Une monothérapie antibiotique est suffisante dans la plupart des infections. Le recours aux associations d’antibiotiques peut avoir pour but d’éviter l’émergence de bactéries résistantes dans le foyer infectieux en diminuant rapidement l'inoculum bactérien, mais il peut contribuer à augmenter la pression de sélection sur la flore commensale. En conséquence, les prescriptions d’associations doivent être strictement limitées, outre les infections à mycobactéries, à des situations bien définies :

• Nécessité d’élargissement du spectre antibactérien : infections sévères et microbiologiquement non documentées ;

• Infections à Pseudomonas aeruginosa ;

• Couple bactéries-antibiotiques à risque d'émergence de résistances :

- Entérobactéries du groupe 3 (Enterobacter, Serratia, Citrobacter freundii, Providencia, Morganella par exemple) et céphalosporines de 3ème génération,

- Staphylococcus aureus et fluoroquinolones, rifampicine, acide fusidique ou fosfomycine,

- Entérobactéries résistantes à l'acide nalidixique et fluoroquinolones,

• Lors de la réévaluation de l’antibiothérapie entre la 24ème heure et la 72ème heure, le maintien d’une éventuelle association doit être discuté. Habituellement, le maintien d’une association ne doit pas être poursuivi plus de 3 jours, sauf dans de rares situations.

Deux types de PAVM sont distingués en fonction de leur chronologie et correspondent à deux types d’écologie différents :

- Les PAVM précoces (inférieurs ou égaux à cinq jours d’intubation) essentiellement liées aux germes communautaires ;

- les PAVM tardives (supérieurs à cinq jours d’intubation), essentiellement liées aux germes de la flore hospitalière.

La prévention des PAVM repose sur l’utilisation de moyens médicamenteux et non médicamenteux. Une antibioprophylaxie après l’intubation diminue l’incidence des pneumopathies précoces mais reste sans effet sur la mortalité, la survenue de PAVM tardive et la durée de VM. Il ne faut probablement pas recommander cette pratique.L’utilisation d’une

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décontamination naso- et oropharyngée par une solution antiseptique diminue l’incidence des PAVM mais est sans effet sur la mortalité et la durée de VM. En raison d’un rapport bénéfice/risque favorable, il faut probablement recommander cette pratique. L’utilisation d’un antibiotique local seul ou associé à l’antiseptique n’ayant pas fait la preuve de son efficacité, ne doit pas être recommandée. La décontamination digestive sélective (DDS) seule diminue l’incidence des PAVM. L’association d’une antibiothérapie systémique à la DDS diminue de surcroît la mortalité en réanimation. Cette stratégie combinée peut probablement être recommandée. Cependant, son application nécessite encore de préciser les modalités (choix des molécules, doses et durée de la DDS et de l’antibiothérapie systémique) et la population cible. Le recours à cette stratégie impose une surveillance renforcée de l’écologie bactérienne du service. Son utilisation n’est probablement pas recommandée dans les unités à forte prévalence de staphylocoques résistant à la méticilline ou entérocoques résistant à la vancomycine. L’impact à long terme de cette stratégie sur l’écologie bactérienne nécessite encore d’être évaluée. Chez l’enfant comme chez l’adulte, il faut un algorithme de sédation analgésie pour réduire la durée de ventilation mécanique. Une procédure prévenant les extubations non programmées est recommandée. En raison de son bénéfice sur l’incidence des PAVM, notamment chez le patient BPCO, la ventilation non invasive doit être privilégiée dans ses indications reconnues. Malgré l’absence de lien formel entre sinusite et PAVM,il faut probablement utiliser l’intubation orotrachéale pour diminuer la survenue des sinusites. En revanche, la voie orale augmente le risque de micro-inhalations et expose à un risque plus élevé d’extubation accidentelle. Chez le nourrisson, l’intubation nasotrachéale doit être recommandée. Le maintien de la pression du ballonnet des sondes entre 25 et 30 cmH2O est recommandé afin de limiter les micro-inhalations tout en préservant l’intégrité de la muqueuse trachéale. Il n’y a pas d’argument pour proposer l’utilisation des sondes imprégnées d’antiseptiques. Il est probable que l’utilisation de sonde d’intubation permettant l’aspiration sous-glottique réduise l’incidence des PAVM précoces. L’aspiration discontinue doit a priori être préférée à l’aspiration continue. Cependant, les conséquences de l’aspiration sous-glottique sur la muqueuse trachéale restent à préciser. La position proclive du patient permet de diminuer l’incidence des PAVM. Chez l’adulte comme chez l’enfant, le décubitus

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dorsal strict est à proscrire sauf indication particulière. Bien que le niveau idéal d’angulation ne soit pas déterminé avec précision, il est raisonnable de proposer une valeur d’au moins 30°.

L’utilisation du système clos d’aspiration trachéale n’est pas recommandée dans le seul objectif de prévenir les PAVM. La trachéotomie précoce, l’utilisation de lit rotatif, les différents systèmes d’humidification des gaz inspirés, le décubitus ventral, la nutrition entérale, n’influencent pas l’incidence des PAVM. La prévention des PN survenant chez les malades ventilés artificiellement nécessite de prendre en compte des facteurs très nombreux et très variés. De nombreuses mesures prophylactiques ont donc été proposées dans cette situation, mais peu ont été réellement évaluées, et les résultats observés alors sont généralement décevants.