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La loi n° 96/12 du 5 août 1996 portant loi-cadre relative à la gestion de l’environnement au Cameroun définit en son article 4 un « polluant » comme toute substance ou tout rejet solide, liquide ou gazeux, tout déchet, odeur, chaleur, son, vibration, rayonnement ou combinaison de ceux-ci, susceptibles de provoquer une pollution. Cette loi considère un « pollueur » comme toute personne physique ou morale émettant un polluant qui entraîne un déséquilibre dans le milieu naturel.

Elle définit la « pollution » comme toute contamination ou modification directe ou indirecte de l’environnement provoquée par tout acte susceptible d’affecter défavorablement une utilisation du milieu favorable de l’homme, de provoquer ou qui risque de provoquer une situation préjudiciable pour la santé, la sécurité, le bien-être de l’homme, la flore et la faune, l’air, l’atmosphère, les eaux, les sols et les biens collectifs et individuels.

Selon l’article 9 de cette même loi, la gestion de l’environnement et des ressources naturelles s’inspire, dans le cadre des lois et règlements en vigueur, de plusieurs principes dont le principe pollueur – payeur selon lequel les frais résultant des mesures de prévention, de réduction de la pollution, de la lutte contre celle-ci et de la remise en

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l’état des sites pollués doivent être supportés par le pollueur. Malheureusement ce principe n’est pas encore réel dans les faits car il n’existe pas encore de dispositions qui permettent aux pollueurs de payer directement sous forme de taxe par exemple les charges relatives à leurs actions sur l’environnement.

La législation et la réglementation en cours qui régissent la gestion publique des déchets au Cameroun sont :

- la loi n°96-6 du 18 Janvier portant révision de la Constitution du 2 Juin 1972 ;

- la loi n°74/25 du 5 Décembre 1974 portant Organisation communale qui spécifie le droit des Communes à percevoir des taxes directes en vue d’assurer l’exploitation d’un service technique ou d’un établissement public ;

- la loi n°87/015 du 15 Juillet 198727 portant Création des Communes Urbaines qui donne la responsabilité de la gestion des ordures ménagères aux communes urbaines d’arrondissement (CUA), l’hygiène et la salubrité des villes aux Communautés Urbaines ;

- la note circulaire n°069/NC/MSP/DMPHP/SHPA du 20 Août 1988 relative à la collecte, au transport et au traitement des déchets industriels, ordures ménagères et vidange sanitaire ;

- les décrets n°77/220 du 1er Juillet 1977 et n°80/017 du 15 Janvier 1980 fixant les taux minima des taxes à collecter par les municipalités qui assurent un service de collecte des ordures ménagères. Ce taux varie entre 50 et 30000

27 La loi n°87/015 du 15 Juillet 1987 portant Création des Communes Urbaines précise que les Communautés Urbaines sont compétentes en matière d’hygiène et salubrité et que les Communes Urbaines sont compétentes en matière d’enlèvement des ordures et déchets d’épuration des eaux usées et assainissement. Ainsi, cette loi confère à la communauté Urbaine les compétences en matière d’hygiène et de salubrité et, aux communes, les charges de collecte et d’enlèvement des ordures ménagères.

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F CFA par an pour les établissements payant patentes et licences ayant un capital inférieur à 500000 F.

La réglementation actuelle ignore les activités des ONG nationales et internationales qui interviennent aujourd’hui dans différents quartiers des villes dans divers domaines (collecte à domicile des ordures, ramassage des ordures ou location d’engins pour dégager les voies encombrées, encadrement et formation des populations à la gestion de l’environnement, balayage des rues, recyclage des ordures par la récupération et le compostage).

Ces ANG opèrent encore dans un cadre informel, bien que souvent des assistances extérieures ou des financements spontanés des populations leur soient apportés.

En plus de ces dispositions spécifiques, relatives à la gestion des DS, les conventions et accords internationaux signés et ratifiés par le Cameroun dans le domaine de l’environnement sont :

- la Convention de Brazzaville ou traité de la Commission des Forêts d’Afrique Centrale (COMIFAC), 2005 ;

- la Convention relative aux zones humides d'importance internationale particulièrement comme habitats des oiseaux d’eau ou Convention de Ramsar, 2005 ;

- la Convention de Stockholm sur les polluants organiques persistants, 2004 ;

- le Protocole de Carthagène sur la Biosécurité, 2003 ;

- la Convention de Rotterdam sur la procédure de consentement préalable à certains produits chimiques et pesticides dangereux qui font l’objet d’un commerce international (PIC), 2002 ;

- la Convention de Bâle sur le Contrôle des Mouvements Transfrontières - des Déchets dangereux et leur élimination, 2001 ;

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- la Convention des Nations Unies sur la lutte contre la désertification dans les pays gravement touchés par la sécheresse et/ou la désertification (CNULD), 1997 ;

- le Protocole de Kyoto, 1997 ;

- la Convention sur la Diversité Biologique (CDB), 1994 ;

- la Convention Cadre des Nations Unies sur les Changements Climatiques (CCNUCC), 1994 ;

- la Convention de Vienne pour la Protection de la Couche d’Ozone, 1989 ;

- le Protocole de Montréal à la Convention de Vienne, 1989 ;

- la Convention d’Abidjan et son protocole relatifs à la coopération en matière de protection et mise en valeur du milieu marin et ses zones côtières de la région d’Afrique de l’Ouest et du Centre, 1984 ;

- la Convention sur le commerce international des espèces de faune et de flore sauvages menacées d'extinction (CITES), 1981.

L’annexe 1 présente les conventions internationales en matière de gestion des déchets non dangereux et des déchets solides ainsi que celles qui ont déjà été ratifiées par le Cameroun.

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) Les acteurs impliqués dans la filière de gestion des déchets solides au

Cameroun

Beaucoup d’acteurs sont impliqués dans la filière de gestion des DS au Cameroun. Il s’agit : des acteurs institutionnels (Ministères, Communes, Institutions de recherche), des acteurs non gouvernementaux (ONG et associations), des usagers (les populations), des sociétés privées (HYSACAM) et des bailleurs de fonds internationaux (FMI et Banque Mondiale) dont l’influence est déterminante.

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Tableau 11 : Récapitulatif de la distribution des rôles entre acteurs en présence à Yaoundé

Acteurs institutionnels Activités Ministères Techniques Mairies Institutions de recherche AN G Sociétés privés et G IC Bailleurs de fonds Usagers D éfinition du contenu du concept de propreté urbaine X X X

D éfinition des normes de

salubrité X X

Contrôle du respect des

normes au niveau local X X Collecte des impôts pour

la propreté urbaine X X G estion des crédits de la

propreté urbaine X X XX

Identification des

priorités locales XX X X X

Financement des actions

locales X X X X

G estion du service de la

propreté urbaine X X

Collecte, transport et mis en décharge des déchets

urbains X X X

Valorisation des déchets X X X X

Evaluation des quantités

de déchets produits X X X X Etablissement des politiques locales en matière de propreté urbaine X X X

Collecte des données pertinentes et études spécifiques de la planification de la propreté urbaine

X X X X X X X

Suivi des indicateurs de

la propreté urbaine X X X

Source : Tanawa et al., (2002)

Légendes : XX Cas de figure ayant existé dans le passé et qui n’a plus cours aujourd’hui X Situation actuelle

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 Les acteurs institutionnels

Au Cameroun, plusieurs départements ministériels sont impliqués dans la gestion publique des DS solides. L’instance supérieure en charge de la gestion des DS solides qu’est la commission interministérielle pour la gestion des DS au Cameroun a été mise sur pied en 1995 et placé sous l’autorité du premier ministre28.

Les structures étatiques impliquées dans la gestion publique des DS sont :

- le ministère en charge de l’Administration du Territoire, le tuteur des municipalités ;

- le ministère en charge de l’Agriculture, responsable du contrôle des engrais ;

- les ministères en charge des Mines, de l’eau et de l’énergie, responsables des problèmes de nuisances et rejets industriels, notamment du contrôle de la pollution, des déchets industriels et de l’assainissement ;

- la Société Nationale d’Investissement, responsable de la transformation industrielle des ordures ;

- le ministère en charge de la Santé Publique, impliqué dans les aspects sanitaires des déchets ;

- les ministères en charge de l’environnement et des Forêts, responsables de la gestion de l’environnement ;

- les ministères en charge du développement urbain et de l’Habitat responsables de la planification urbaine, et de la gestion de l’hygiène et salubrité, de l’environnement et de l’esthétique urbain29.

28 Décret No. 95/230/PM du 31/04/95 portant création d’une commission en vue de développer les stratégies de gestion des déchets.

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Le ministère en charge du développement urbain et de l’Habitat a la compétence en matière de développement social des quartiers, de l'hygiène et de la salubrité ainsi que de la supervision de la collecte, de l'enlèvement et du traitement des DS. En attendant le décret d’application de la loi n° 2004/018 du 22 juillet 2004 fixant les règles applicables aux communes qui confère les compétences de gestion des DS et de l’insalubrité aux communes, plus de précision sur les compétences des Communautés Urbaines et des Communes Urbaines d’Arrondissement s’impose, car ce flou institutionnel n'est pas de nature à rendre aisée la gestion des DS.

La loi confie d’une part la gestion des DS aux Communes Urbaines d’Arrondissement et d’autre part, l’hygiène et la salubrité publique à la Communauté Urbaine30 ; bien que dans les faits ce soient les communautés urbaines qui gèrent les déchets. La loi n° 74/23 du 05 décembre 1974, portant organisation communale en son article 93, donne le droit aux communes de percevoir le produit de l’impôt forfaitaire, des contributions des patentes et licences et de la taxe sur le bétail. L’article 95 permet au Conseil Municipal d’instituer des taxes dites « Taxes communales directes », dont le produit est recouvré en même temps que les impôts perçus. Ces taxes se présentent sous forme de redevances forfaitaires annuelles exigibles aux habitants d’une agglomération et comprennent les taxes d’eau, d’électrification, d’éclairage et d’enlèvement des ordures ménagères, ainsi que les taxes de fonctionnement des ambulances municipales.

Les institutions de recherche comme l’Ecole Nationale Supérieure Polytechnique de Yaoundé (ENSP) ou encore les Universités jouent un rôle important dans la gestion des DS au Cameroun. D’ailleurs, Cette thèse contribue améliorer la gestion actuelle des déchets au Cameroun.

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 Les acteurs non gouvernementaux31

L'émergence de ce groupe d'acteurs a été favorisée en 1990 par la loi sur les Associations (n°90/053 du 19/12/90). Mais elles doivent leur essor aux défaillances de l'Etat et des municipalités dans l’offre des services urbains de proximité tels que l'eau, l’éclairage public et l’enlèvement des DS. Ces ANG sont constituées de petits groupes de jeunes ayant un effectif moyen entre 20-50 membres. Elles fondent leurs actions sur les liens sociaux qui existent entre les populations, ce qui renforce leurs capacités à mobiliser et à sensibiliser les populations. Bien que dotées de structures

31 Pour montrer la pertinence des actions que peuvent conduire les ANG dans les quartiers à travers la précollecte et le recyclage, Sotamenou (2006) présente les expériences de deux ONG exerçant dans la ville de Yaoundé : l’ONG Sarkan Zoumountsi dans le 2ème arrondissement de Yaoundé et l’association TAM-TAM MOBILE dans 6ème arrondissement. Elles assuraient la précollecte des déchets dans les bas-fonds, populeux par ailleurs et inaccessibles aux camions de ramassage des DS à l’aide des outils adaptés comme les pousse-pousse (fourre-tout), des brouettes, des sacs en fibres de 100 kg, des râteaux, des pelles, des tridents, des houes et des pioches.

L’ONG « Sarkan Zoumountsi » qui assurait la précollecte et le compostage depuis 1995 au quartier Briqueterie (3800 ménages pour un peu plus de 27 000 habitants) employait de façon permanente 40 jeunes du quartier. Tous les matins, les DS précollectés étaient stockés dans un centre de précollecte où ils étaient triés et recyclés. Mais seulement la faiblesse des contributions des ménages (0,1 dollars US/jour) n’a pas permis la pérennisation de l’opération et aujourd’hui faute de moyens financiers cette ONG est en cessation d’activité. Alors qu’initialement, pour une production hebdomadaire de 161 tonnes de DS dans le quartier en 2002, le centre de précollecte de la Briqueterie devait permettre de récupérer 6,88 tonnes de déchets plastiques, papiers, aluminium et verre et de fabriquer 28,1 tonnes de compost toutes les semaines. Il ne restait donc plus qu’à évacuer 126,04 tonnes de « déchets inutiles » vers la décharge municipale. Cette réduction du tonnage des DS à transporter par HYSACAM aurait permis à la CUY de faire une économie de près de 50 000 USD tous les ans.

En 2004, une dizaine de jeunes du quartier Melen (915 ménages, un peu plus de 6090 habitants), membres de l’association Tam-Tam Mobile assuraient la précollecte tous les matins dans le quartier et déversaient en moyenne 03 tonnes de DS par jour dans les bacs à ordures de HYSACAM soit environ 70 tonnes de DS par mois. Mais aujourd’hui comme toutes les autres associations de précollecte de la ville, elle exerce dans des conditions difficiles liées notamment à la faiblesse des contributions des ménages et au manque de soutien institutionnel.

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organisationnelles précaires, elles peuvent offrir un niveau de service appréciable à l’échelle de quartier. Elles mobilisent la participation directe des populations tout en leur permettant de participer directement aux décisions concernant les projets locaux comme la précollecte et le traitement des DS.

Au Cameroun en général et à Yaoundé en particulier, de nombreuses associations ont développé des projets pour la gestion décentralisée des déchets entre 1990 et 1998. Mais seulement, leurs actions sont restées négligeables puisque ne bénéficiant d’aucun soutien institutionnel. Le fait que HYSACAM soit payée sur la base du tonnage ne facilite pas la tâche aux associations locales et pourtant ces ANG travaillent dans des zones généralement non couvertes par HYSACAM. Après la loi sur les libertés d’associations de Décembre 1990, le nombre d’ONG et d’associations travaillant dans le domaine de la collecte, le traitement et le recyclage des DS a considérablement augmenté. Jusqu’aujourd’hui, bien que confrontés aux problèmes de financement et de soutien institutionnel, certaines ANG sont impliquées dans la précollecte, la récupération, le recyclage et même la transformation par compostage. A titre d’exemple, on peut citer le CIPRE, CIPCRE, ERA – Cameroun, Tam – Tam Mobile, FOCARFE, Sarkan Zoumounsti.

  

 Les usagers

Les usagers qui sont les premiers bénéficiaires du service de la propreté urbaine, ne sont pas hélas souvent associés au processus d’enlèvement des DS. Un programme de sensibilisation est intégré dans le contrat de HYSACAM uniquement pour faire changer le comportement de l'usager. Les spots publicitaires tels que « jetez vos ordures dans les bacs », « ne mettez pas le feu dans les bacs », sont largement diffusés à travers les banderoles, les tracts et la télévision. Comme au Maroc, les femmes et les enfants au Cameroun participent majoritairement au transport des DS de leur domicile vers une décharge ou un bac à ordure (Ebot Manga et al., 2008 ; Achankeng, 2003 ; Yang et al., 2001). En effet, au Maroc 50% de femmes et 20% d’enfants se chargent du transport des DS contre 18% de femmes et 55% d’enfants au Cameroun (De la Laurencie, 2002 ; Ngnikam, 2002).

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 Les sociétés privées

Les acteurs privés ont un contrat de marché public pour assurer le nettoyage de tout ou partie de la ville. Ce contrat peut les lier à l’Etat seul ou à la municipalité associée à l’Etat. Le problème avec les sociétés privées c’est que dans aucune ville d’Afrique subsaharienne, leur contrat ne couvre la totalité de la ville. Cette disposition nets formalisée dans aucun document officiel mais c’est une réalité dans la mesure où la société est payée par tonne d’ordure collectée d’une part et d’autre part les provisions financières destinées à ce service sont insuffisantes (Ngnikam, 2002). En plus de HYSACAM, des Groupes d’Initiative Commune (GIC) participe à la collecte des DS (moyennant rémunération de la part des usagers bénéficiant de leurs services) notamment à Yaoundé mais à hauteur de 1% de ce qui est collecté par HYSACAM. C’est le cas du GIC JOVELEC qui assure la précollecte des DS et le compostage dans le quartier Mendong situé à la périphérie de Yaoundé (plus de 8000 habitants). Les statistiques obtenues à la décharge municipale de Yaoundé estiment à environ 115 tonnes de DS en moyenne collectés par les ANG de la ville.

  

 Les bailleurs de fonds

La Coopération Française à travers le Fonds Social de Développement et la Banque mondiale financent de temps en temps des initiatives telles que la précollecte, la récupération ou la valorisation agricole des déchets. Ce fut notamment le cas du Programme Social d’Urgence (PSU) financé entre 1993 et 1998 par la Banque mondiale et qui intervenait dans l’enlèvement des DS et l’assainissement à Yaoundé. Le tableau 11 montre que la collecte des DS concerne plusieurs acteurs dont le chevauchement des compétences représente une source de conflits.

b) Le cadre organisationnel de la gestion publique des déchets solides à