• Aucun résultat trouvé

L

’objectif de la première partie de cette thèse était d’analyser les limites organisationnelles de la gestion publique des déchets solides au Cameroun. Pour cela, nous avons présenté d’une part les fondements théoriques du service public des déchets solides, et d’autre part, nous avons analysé la gestion publique des déchets solides au Cameroun.

Etant donné que le service public de gestion des déchets au Cameroun est un exemple type de partenariat public-privé (3P), nous avons exploré les approches théoriques directement liées aux 3P telles que la théorie de l’inefficience-x (Leibenstein, 1966), la théorie des choix publics (Buchanan & Tollison, 1972), la théorie du New Public Management (Bernrath, 1998) et la théorie des marchés contestables (Baumol et al., 1986). Les théories des coûts de transaction (Coase, 1937) et de l’agence (Tirole, 1999) relèvent les difficultés de coordination au sein des organisations publiques pour promouvoir les 3P. Par définition, un déchet peut être une source de nuisance et donc de production d’externalités, mais il peut également être source de revenu par exemple ; ce qui explique le choix de la nouvelle Economie Publique qui fait la part belle à la théorie de la règlementation et aux solutions privées susceptibles d’internaliser les externalités.

Nous avons également présenté le cadre législatif en matière de gestion de l’environnement au Cameroun ainsi que le cadre organisationnel de la gestion publique des déchets solides à Yaoundé. L’évolution des niveaux de collecte et de production des déchets solides de Yaoundé a été appréciée.

A l’aide d’un petit modèle mathématique qui met en relation la production des déchets avec l’évolution de la population, nous avons estimés les quantités produites de déchets solides à Yaoundé entre 1990 et 2008. Il ressort de nos estimations que chaque Yaoundéens produit en moyenne 288,92 kg de déchets solides tous les ans. Alors qu’en 1990, 510 tonnes de déchets solides en moyenne étaient produits tous les jours à Yaoundé, en 2008 la production journalière se chiffrait à 1700 tonnes. En

152

confrontant ces résultats avec les quantités de déchets solides collectées par HYSACAM, nous avons calculé les différents taux de collecte.

Le taux de collecte moyen des déchets solides à Yaoundé en 2002, 2003 et 2004 était respectivement de 35%, 47% et 47%. Entre 1999 – 2008, période à laquelle HYSACAM a repris le service public de collecte des déchets solides à Yaoundé après près d’une décennie d’arrêt de service entre 1991 et 1998, le taux de collecte moyen est estimé à 47%. Mais si l’on prend en considération la collecte sur toute la période de l’étude (1990 – 1998) le taux de collecte moyen de la période est de 34%.

Par ailleurs l’analyse économétrique de l’évolution des taux de production et de collecte des déchets solides à Yaoundé révèle que le rythme de la production des déchets (taux de croissance des quantités produites = 12,73) est largement supérieur à celui de la collecte (taux de croissance des quantités collectées = 11,54). Ce qui est préjudiciable sur le long terme puisque synonyme d’accumulation progressive des déchets.

L’une des originalités de cette partie de la thèse repose sur le fait que nous avons proposé un indice composite de performance d’un service public de gestion des déchets solides au Sud. Cet indice composite de performance se veut être un outil d’évaluation interne ou externe nécessaire à toute prise de décision en matière de gestion des déchets solides au Sud. Il est constitué d’un ensemble de valeurs qui nous semblent indispensables dans tout processus d’évaluation d’un service public de gestion des déchets solides. Il prend en compte les aspects institutionnels liés à la gestion des déchets solides et s’appuie sur le concept de développement durable. Quatre modules le constituent : le module institutionnel, social, économique et environnemental. Après avoir construit les modules de notre indice composite de performance, nous l’avons rendu opérationnel en affectant des coefficients à tous les indicateurs de performance que nous avons retenus. Ainsi un indice compris entre 0 et 7 points reflète la sous performance du service mis en place ; au-delà de 07 points, le service mis en place peut être qualifié de performant.

153

A partir de cet outil, nous avons mis en évidence la performance de l’organisation de la gestion des déchets solides à Yaoundé. Il ressort de nos analyses que l’indice de performance du service public de gestion des déchets solides à Yaoundé est égal à 05, ce qui nous a permis de conclure que ce service est sous-performant et que des efforts doivent être faits afin de l’améliorer. Plus précisément il s’agit :

- d’évaluer périodiquement le cahier des charges (de HYSACAM) ;

- de rendre le contrat de gestion des déchets solides incomplet pour éviter les comportements opportunistes (c’est-à-dire de veiller à écrire un contrat détaillé qui inclut des clauses d’indexation sur l’inflation ou sur le coût de fourniture et prévoit des procédures claires de révision et de recours à l’arbitrage) ;

- de sanctionner les pollueurs (principe pollueur – payeur) ;

- d’investir dans la construction des infrastructures de gestion des déchets solides tels que les centres de précollecte/regroupement des déchets dans les bas-fonds inaccessibles aux camions de ramassage des déchets ;

- d’institutionnaliser la précollecte et le compostage afin de réduire les externalités négatives liées à l’enfouissement des déchets fermentescibles ;

- de mettre en place un mécanisme de financement de la précollecte basé sur la contribution directe des ménages à hauteur de 10 FCFA / ménage. L’autre solution consisterait à indexer cette redevance sur les factures d’électricité ;

- de mettre en place des dispositifs de traitement des lixiviats et biogaz.

Du fait de la sous-performance du service public de gestion des déchets solides à Yaoundé, nous avons proposé et évalué les coûts d’un système alternatif de gestion des déchets solides qui prendrait en compte les préoccupations de développement socio – économique et environnemental de la ville de Yaoundé. Notre système va de la précollecte au traitement des lixiviat et biogaz en passant par le compostage et la collecte traditionnelle.

154

La mise en place de notre système alternatif (précollecte – compostage – collecte et transport – enfouissement – traitement des lixiviats – traitement des biogaz) nécessite un budget de 28967 FCFA/t mise en décharge ce qui représente le double du budget actuel (15600 FCFA/t mise en décharge) soit une augmentation de budget de l’ordre de 46% par rapport au budget annuel actuel qui est de 06 milliards de FCFA (près de 10 millions d’euros).

Ce système alternatif ne peut s’appliquer correctement que si toutes les clauses du contrat qui lie la CUY et HYSACAM sont respectées. Le contrat que nous avons proposé en fin de première partie définit précisément l’objet du service (durée du service, objectifs chiffrés, etc.), l’exécution du service (obligations de l’entreprise en charge de la collecte, définition des périmètres à couvrir, etc.), les dispositions techniques (matériels et entretiens), financières (mode de paiement, révision des prix, etc.), diverses (rapport annuel du service rendu, procédure de résiliation de contrat, etc.).

Il apparaît clairement dans cette première partie que bien que des efforts considérables soient faits au Cameroun pour assurer une gestion performante des déchets solides, le système de gestion des déchets actuel mérite d’être repensé afin de prendre en compte les préoccupations de développement durable (socio-économiques et environnementales) de la ville de Yaoundé.

De part la nature majoritairement fermentescible des déchets produits aussi bien à Yaoundé que partout au Cameroun, la recommandation phare en vue d’améliorer le service public de gestion des déchets actuels au Cameroun consiste à traiter les déchets solides avant enfouissage à travers les opérations de micro-compostage dans les bas-fonds inaccessibles aux Camions de ramassage.

Dans la deuxième partie de cette thèse, nous explorons donc la pertinence du compostage dans le système alternatif de gestion des déchets solides que nous proposons.

155

DEUXIEME PARTIE :

PERTINENCE DU COMPOSTAGE DANS UN SYSTEME ALTERNATIF