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Nous pouvons maintenant expliquer la plupart des observations qui ne rel`event que des propri´et´es de l’interface `a l’´equilibre, c’est-`a-dire la forme des petites gouttes aux temps longs.

5.4.1 Formes des gouttes proches de l’´equilibre

Nous nous int´eressons ici `a la forme de gouttes dans le domaine de coexistence Lα -L3, de petite taille et observ´ees sur typiquement une heure. Leur forme caract´eristique peut ˆetre expliqu´ee par la seule donn´ee de σ(θ).

La grandeur obtenue σ(θ) permet de construire la ((vraie))4 forme d’´equilibre. La construction en deux dimensions est identique, mais l’axe de r´evolution 3D correspond maintenant `a la direction θ = 0. Les gouttes pr´esentent donc une ligne ´equatoriale singuli`ere, ainsi que nous l’observons dans les cristaux directs et inverses des r´egions dilu´ees (voir Fig. 5.2 et Fig. 5.12).

Fig. 5.12 – Si la construction de Wulff est identique en deux dimensions, la forme tridimensionnelle des gouttes diff`ere selon l’organisation des lamelles en plan ou en cylindres. Les gouttes 3D pr´esentent soit deux points singuliers (lamelles empil´ees en cylindres : Fig. 5.4 et 5.19), soit une ligne ´equatoriale singuli`ere (lamelles planes : Fig. 5.2).

Les autres empilements de lamelles sont plus difficiles `a interpr´eter et n´ecessitent une ´etude particuli`ere pour chacun d’entre eux. Nous survolons simplement le cas de l’empilement sph´erique `a titre d’exemple.

On recherche les formes d’´equilibre des gouttes de phase Lαdont les couches smecti-ques restent centr´ees autour d’un point singularit´e et ne pr´esentent pas d’autres d´efauts. On fait l’hypoth`ese que le terme de courbure peut ˆetre n´eglig´e dans l’´equation de Gibbs-Thomson associ´ee `a ce probl`eme5. Il faut donc minimiser l’´energie interfaciale

4. La construction correspondant `a des lamelles planes.

de la goutte tout en respectant l’empilement sph´erique. Ce probl`eme n’a pas ´et´e r´esolu analytiquement. Aussi je pr´esenterai les deux cas limite des fortes et faibles dilutions. Aux faibles dilutions (φw < 0,75), la forte anisotropie de l’´energie interfaciale impose pour seul angle de contact θ0 sur presque toute l’interface. On retrouve la forme de la Fig. 4.5 dont le profil est celui d’une spirale logarithmique. Aux fortes dilutions (φw > 0,9), l’anisotropie est faible au-dessous de θ0, les formes minimisant l’´energie interfaciale tendent alors vers des sph`eres (solution du probl`eme `a anisotropie nulle) dont le centre n’est pas n´ecessairement le centre de l’empilement6 (centre de la croix de Malte entre polariseur et analyseur dans la Fig. 5.13). Enfin, entre ces deux situations extrˆemes, le profil en spirale logarithmique ajuste de moins en moins bien la forme du germe qui pr´esente toute une plage d’orientations diff´erentes de θ0 (Fig. 5.14).

Fig. 5.13 – Dans les r´egions dilu´ees (φw > 0,91), l’anisotropie est faible et la forme des gouttes `a empilement lamellaire sph´erique est proche d’une sph`ere. Les centres de l’empilement et de la goutte ne co¨ıncident pas n´ecessairement. Diam`etres des gouttes voisins de 20− 30µm.

Fig. 5.14 – Dans les r´egions moyenne-ment dilu´es (φw = 80− 90%), l’angle des lamelles `a l’interface n’est plus ´egal `a θ0 partout. Le profil d’une goutte `a empi-lement sph´erique, n’est plus parfaitement ajust´e par une spirale logarithmique mais est plus compact.

5.4.2 Interface L

α

-L

3

libre

Dans les capillaires cylindriques pr´ec´edents (diam`etre 300µm), lorsque les deux phases sont en quantit´es voisines (ce qui peut ˆetre obtenu soit en augmentant h/c, soit

taille et l’on a vu que cette approximation n’´etait plus valable aux grandes courbures.

6. Nous verrons un cas diff´erent en 3epartie: lorsque l’orientation θ = 0 est pr´ef´er´ee, les gouttes

en diminuant la temp´erature), les deux phases se s´eparent et une interface libre est alors cr´e´ee. Sa forme au voisinage de l’axe, d´ej`a remarqu´ee dans [78], est un cˆone de r´evolution (voir Fig. 5.15). D’apr`es ce qui pr´ec`ede, il est trivial de v´erifier qu’il s’agit bien de la surface d’´energie interfaciale minimale lorsque l’orientation de l’interface est θ0. En effet, cette g´eom´etrie minimise `a la fois l’aire de l’interface (avec la contrainte θ < θ0) et l’´energie interfaciale σ et donc minimise l’´energie interfaciale totale. L’utilisation de cette g´eom´etrie permet donc de prolonger la mesure de θ0 dans les r´egions concentr´ees.

Fig. 5.15 – En capillaire cylindrique, les interfaces libres entre les phases Lα et L3

sont des cˆones d’orientation θ0. Ici, une r´egion lamellaire d’empilement cylindrique est prise en sandwich entre deux domaines L3.

5.4.3 Facettage surfacique et volumique

Que se passe-t-il lorsque l’on force un cristal `a adopter une orientation interdite? Il est bien connu depuis le travail de Herring [82], qu’une telle interface est d´estabilis´ee localement par l’apparition d’une structure en vall´ees et collines (((hill-and-valley in-stability))). En effet, l’´energie d’une telle instabilit´e, Fig. 5.16, sera plus basse que la surface plane d`es que ces orientations n’apparaissent pas sur la forme d’´equilibre. De telles instabilit´es ont ´et´e observ´ees exp´erimentalement et ´etudi´ees `a l’interface Sm-A/Sm-B dans [79, 50].

Dans le cas pr´esent, ce ph´enom`ene concerne toutes les orientations globales d’angle plus grand que θ0, soit les situations o`u les lamelles sont orient´ees quasi-perpendicu-lairement `a l’interface. L’angle de l’instabilit´e est l’angle le plus proche des orientations interdites, c’est `a dire θ0 (voir Fig. 5.16). Les aspects dynamiques li´es `a cette propri´et´e (par exemple la formation du bˆatonnet de la Fig. 4.3) seront ´etudi´es plus en d´etail Chap. 8, mais ce qu’il doit ˆetre retenu ici est la cons´equence suivante. La phase la-mellaire pr´esentant une orientation de ses couches perpendiculaires `a l’interface (que ce soit impos´e ou obtenu spontan´ement pendant sa croissance) voit cette interface fa-cett´ee par l’instabilit´e de Herring. Cette instabilit´e n’´etant pas d’origine dynamique, elle subsiste notamment dans les bˆatonnets au temps longs (voir Fig. 5.17).

Fig. 5.16 – L’instabilit´e de Herring se produit lorsque l’orientation globale d’une interface n’apparaˆıt pas dans la forme d’´equilibre. L’interface se d´esabilise spon-tan´ement en vall´ees et collines en cr´eant des orientations non-interdites. Dans le cas ´etudi´e, cette orientation est θ0, l’ori-entation la plus proche du domaine d’ori-entations interdites. @ @ @ @ @ I @ @ @ @@R  P A

Fig. 5.17 – Les bˆatonnets ayant form´e, au cours de leur croissance, des orienta-tions globales interdites pr´esentent des li-gnes anguleuses qui ne disparaissent pas au cours du temps.

L’interface Lα-L3 pr´esente donc deux types de facettage :

– Le facettage en surface concerne les orientations proches de π/2. L’instabilit´e en ((vall´ees et collines)) fait apparaˆıtre l’orientation pr´ef´erentielle θ0. Elle est d’origine locale et donc est pr´esente `a toutes les tailles caract´eristiques.

– Les orientations proches de θ = 0 (orientation parall`ele des couches `a l’interface de la Fig. 4.6) ne sont pas d´estabilis´ees en surface mais, dans les r´egions de forte anisotropie, elles sont d´eform´ees par un ((facettage volumique)), se traduisant par la cr´eation de d´efauts (Fig. 4.8 et 5.6). Ce ph´enom`ene r´esultant d’une comp´etition entre les ´energies de courbure et les effets de surface, d´epend de l’´epaisseur de la phase lamellaire, comme nous le verrons Chap. 6.