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Intégré dans le processus d’initiation rituelle destinée à mener l’enfant vers la maturité, le mariage traditionnel se décline à son tour comme un ensemble de rites et étapes, incombant en premier lieu, aux familles désireuses d’unir leurs enfants. S’il est vrai que ces rites varient d’une ethnie à l’autre, il demeure constant que chez tous les peuples africains, la célébration du mariage (§2) fait suite à l’étape des fiançailles ou promesses de mariage (§1).

§1. Fiançailles ou promesses de mariage

Les fiançailles, dans le contexte traditionnel africain où le lien matrimonial se veut communautaire, peuvent être définies comme une manifestation de volonté, un engagement pris par les deux familles des futurs époux d’unir leurs enfants. C’est « un contrat solennel révocable, intervenant entre un homme et une femme ainsi que leurs familles respectives, et qui fait naitre pour eux, l’obligation de préparer la vie conjugale de cet homme et de cette femme, et de les unir un jour par mariage »415.

Le législateur ivoirien de 1964, à l’instar du Code Civil français, ne réglementa pas les promesses de mariage, les faisant basculer dans la catégorie des faits juridiques dénués de force obligatoire416. Une position étonnante car les fiançailles étaient une étape cruciale de l’union coutumière, en ce qu’elles consistent au choix du futur ou de la future épouse, lequel se fonde sur un faisceau d’éléments tenant à la personnalité du ou de la promise, de son rang social, de sa famille et des interdits matrimoniaux du clan.

Elles sont donc le lieu de nombreuses tractations destinées à s’assurer de la qualité du choix opéré, et à garantir le succès de l’union envisagée. Pour ce faire, chez certains peuples tels que les Malinkés, les fiançailles se déroulent en plusieurs étape : les pré-fiançailles qui consistent à la prise de contact et l’envoi des émissaires des familles respectives, l’étape des

415 SOHIER Antoine, Traité élémentaire de droit coutumier du Congo belge, op.cit., p. 54. 416

ASSI-ESSO Anne-Marie Hortense, Précis de droit civil ivoirien : les personnes- la famille, 1ère édition, LDI (Librairie de Droit Ivoirien), 1997, pp. 248-249.

investigations visant à déceler les aspects physiques, moraux et même ésotériques417 de la future fiancée, l’envoi de la première puis de la seconde cola, avant l’étape des fiançailles à proprement dit418. Les fiançailles sont donc une institution juridique coutumière rigoureusement réglée, aussi bien dans sa forme (A) que dans ses effets (B).

A. Règles de forme

L’étude des coutumes matrimoniales ivoiriennes, réalisée à l’initiative du Gouverneur Clozel, fait ressortir un certains nombres de traits communs quant à l’initiative du projet marital.

Il ressort des différentes enquêtes menées que, chez tous les peuples, celle-ci incombait toujours au mari ou à sa famille, qui portait sa demande auprès du groupe de la jeune femme convoitée. Il s’agissait exclusivement d’unions hétérosexuelles, (même si comme nous le relève l’auteur Charles Gueboguo, l’homosexualité n’était pas une pratique méconnue des tribus africaine notamment chez les Akan Ashantis419). Les enquêteurs ne firent état d’aucun cas de mariage de femmes, (tel qu’il fut pratiqué chez les Nuer, mariage par lequel une femme riche sans enfant, pouvait en épouser une autre et lui fournir un pauvre ou un esclave comme géniteur, pour ainsi obtenir « une progéniture par procuration »420).

417 Dans la croyance malinké, le « tété »ou « nôrô », est une caractéristique de la future épouse observable

par les initiés, qui se réfèrent en cela sur ses traits physiques, pour déterminer la chance, la bonne fortune ou la malchance, ou encore les mauvais génies qui peuvent l’entourer. L’existence d’un mauvais « tété » ou « nôrô » est un cas d’empêchement de mariage.

418 Voir CAMARA Bakary, « Fondements juridiques du mariage dans le pays bamanan malinke : du

système coutumier au code malien du mariage et de la tutelle de 1962-l‘évolution dans la continuité », Revue

pluridisciplinaire de l’Université Gaston Berger de Saint-Louis, Presses Universitaires de Saint-Louis, Série

Lettres, sciences humaines et sociales, n° 21, Sénégal, Juin 2011, p 207.

419 GUEGOGUO Charles, « L'homosexualité en Afrique : sens et variations d'hier à nos jours », Socio-

logos, Revue de l'association française de sociologie [En ligne], 1 | 2006, mis en ligne le 21 mars 2006.

http://socio-logos. revues. org/37

Voir sur ce point, MFOUNGUE Bounang Cornelia, « Le mariage africain, entre tradition et modernité: étude socio-anthropologique du couple et du mariage dans la culture gabonaise », Sociology, Université Paul Valéry- Montpellier III, 2012.

420

EVANS-PRITCHARD Edward Evan, Parenté et mariage chez les Nuer, traduit par MANIN Monique, Préface de MERCIER Paul, Payot, Paris, 1973.

Ces caractéristiques pouvaient s’expliquer par le système d’économie communautaire de ces sociétés primitives, où la production de richesse était essentielle à la survie du groupe. Celle-ci dépendant du nombre, la lutte pour les hommes visait à assurer une force de travail et une capacité de production de plus en plus croissante.

C’est en cela que l’enfant était considéré comme une richesse aux mains de sa communauté421. Cela était d’autant plus vrai pour les filles dont la procréation assurait la pérennité du lignage. On comprend dès lors pourquoi la polygamie était pratiquée dans l’ensemble de ces tribus et la place centrale de l’institution dotale dans la formation des unions coutumières (visant à compenser la perte économique et l’affaiblissement que représentait le départ d’une jeune fille de son groupe familial422).

On dénombrait en Côte d’ivoire deux systèmes coutumiers de demande en mariage, qui se fondaient chacun sur cette importance accordée à la femme dans la lutte pour la survie du groupe. On a d’une part, les fiançailles qui se déroulaient avec accord de la promise (1) et ceux qui se liaient par le seul accord des familles, voire même totalement à son insu (2).

1. Avec accord de la fille

Les travaux menés par les administrateurs coloniaux Delafosse, Tellier, Benquey et Cartron, démontraient que les Akans étaient les plus libertaires en matière maritale.

Il n’existait pas, par exemple chez les Baoulé, de fiançailles réglées par la coutume. Le jeune homme qui remarquait une femme qu’il désirait épouser devait d’abord s’en accommoder avec elle et lui faire des cadeaux, avant d’en référer ensuite à ses parents, auprès desquels il formulait sa demande. Le consentement de la jeune fille emportait presqu’automatiquement celui de sa famille. Il n’existait chez eux, en dehors de la puberté, aucune condition particulière à satisfaire pour contracter mariage, encore que, un homme pouvait toujours épouser une jeune fille impubère, mais devait attendre sa puberté avant de

421

KRECOUM Boua Marius, Le mariage à l’épreuve des mutations, op.cit., p. 43.

consommer le mariage. Toutefois, les inimitiés de familles, la parenté fut-elle au 4è degré, ou le rang social inférieur du postulant pouvaient être des raisons de refus de sa demande423.

Les coutumes Agnis de l’Indénié et du Sanwi ainsi que celles des Abrons ne présentaient pas pareille facilité de contracter mariage, mais consacraient tout de même, une liberté plus ou moins grande laissé à la femme dans le choix de son futur époux. Ainsi dans l’Indénié, le jeune homme devait dans un premier temps, courtiser la fille et passer une nuit avec elle à l’insu de ses parents. C’est cet évènement qui constituait la promesse de mariage. Il pouvait alors, dès le lendemain, faire demander aux parents de la fille leur consentement au projet de mariage424.

Quant aux Agnis du Sanwi, s’il était fréquent chez eux, que les familles s’entendent entre-elles pour fiancer leurs enfants depuis leur tendre enfance (lesquelles promesses étaient scellées par des cadeaux offerts par la famille du jeune homme), cela n’empêchait pas une grande liberté laissée à la femme, dont le consentement seul suffisait en fait de mariage, même en cas de refus de sa famille425.

Les coutumes Abrons en revanche n’accordaient que peu de liberté en matière matrimoniale, aussi bien pour l’homme que pour la femme, en ce que le défaut de consentement de l’un des époux n’entachait en rien la validité de l’union. La jeune fille était toujours promise par son père et n’était jamais demandée par le jeune homme qui, quelles que fussent ses qualités aurait vu sa demande rejetée. Par ailleurs, le mariage n’était autorisé qu’entre Abrons, Koulangos et Pakhallas et interdit avec les Dioulas, Wandaras, Achantis et toute autre race étrangère. La promesse de mariage émanant du père intervenait en général dès la naissance de la jeune fille, après consultation de sa mère à qui revenait la fixation du jour du mariage.

423 « Coutumes des Agnis du Baoulé », recueillies par M. DELAFOSSE M., administrateur-adjoint des

colonies, CLOZEL François Joseph et VILLAMUR Roger, Les coutumes indigènes de la Côte d’Ivoire…,

op.cit., p. 95.

424 « Coutumes des Agnis de l’indénié », recueillies par M. TELLIER, administrateur-adjoint des

colonies, CLOZEL François Joseph et VILLAMUR Roger, ibidem, p. 147.

425

« Coutumes des Agnis du Sanwi », recueillies par M. CARTRON H., administrateur-adjoint des colonies, CLOZEL François Joseph et VILLAMUR Roger, ibidem, p 171.

Toutefois, la jeune fille Abron pouvait avoir un petit ami différent de son fiancé, et même cohabiter avec lui durant vingt jours de suite. Les relations qu’elle entretenait avec ce dernier devaient en revanche rester platoniques, sous peine de lourdes sanctions.

La volonté des époux Abrons s’exprimait d’avantage en matière de divorce dont les causes n’étaient pas définies par la coutume. Chacun des époux, aussi bien le mari que la femme, pouvait dissoudre le mariage en se retirant du foyer. L’affaire pouvait certes être portée devant le tribunal du chef du village, mais les parties demeuraient libres d’exécuter ou non la sentence426.

A la différence des Akans, les coutumes des autres groupes ethniques divergeaient dans le traitement de la promesse de mariage. Dans le groupe Mandé, seules les coutumes de Séguéla penchaient pour la nécessité d’un accord de la fiancée à la validité de l’entreprise. Mais dans la pratique, celui-ci ne lui était demandé que lorsqu’on avait l’assurance de son consentement. À défaut, son consentement lui était généralement extorqué par son père, en acceptant les cadeaux de fiançailles et une partie de la dot qu’il ne pouvait pas rembourser, il contraignait sa fille à se marier avec le prétendant le plus offrant, de peur de l’insolvabilité de son géniteur. Il demeurait néanmoins que la jeune fille pouvait tout de même se refuser à de tels subterfuges427.

Chez les lagunaires, les coutumes Alladian retenaient comme empêchement absolu au mariage, le défaut de consentement de l’un des conjoints au même titre que la parenté428. Il en allait pareillement chez Brignans du Cercle de Lahou429 et chez les Adioukrou : le refus des parents n’était pas un empêchement au mariage si la fille y consentait430.

426 « Coutumes des Abrons», recueillies par M.BENQUEY, Capitaine d’Infanterie Coloniale,

administrateur du cercle de Bondoukou, CLOZEL François Joseph et VILLAMUR Roger, ibidem, p. 191.

427 « Coutumes de Séguéla», recueillies par M. MOREAU, Capitaine d’Infanterie Coloniale,

Commandant de la circonscription de Séguéla, CLOZEL François Joseph et VILLAMUR Roger, ibidem, p. 325.

428

« Coutumes des Alladians», recueillies par M. LAMBLIN H., administrateur-adjoint des colonies, CLOZEL François Joseph et VILLAMUR Roger, ibidem, p. 391.

429 « Coutumes des Brignans (cercle de Lahou)», recueillies par M. RIBES N., Administrateur des

colonies, CLOZEL François Joseph et VILLAMUR Roger, ibidem, p. 451.

430

« Coutumes des Adiokrou», recueillies par M. AUBIN, Commis des affaires indigènes, CLOZEL François Joseph et VILLAMUR Roger, ibidem, p. 433.

Quant au groupe Krou, seuls les Kroumen du Cavally prenaient en compte, avec celui des parents, les consentements du jeune homme et de la jeune fille (dont le défaut était même constitutif d’un empêchement absolu au mariage431), tandis que chez les Kroumen de Sassandra, les jeunes filles étaient dans le commerce.

2. Sans accord de la fille

Les Kroumen de Sassandra faisaient partie des rares peuples ivoiriens, avec les Néyaus et les Dioula du pays de Kong et du Djimini, chez lesquels le mariage avait lieu par achat.

Les femmes Néyaus étaient traitées comme de véritables esclaves, chargées des travaux champêtres et ménagers. La polygamie y était sans limite. Le père pouvait acheter une ou plusieurs femmes pour son fils, en général dès leur naissance. L’achat se faisait auprès de leur père, pour un prix oscillant autour de quarante paquets de manilles, un fusil, un baril de poudre, quelques pagnes Baoulé (Kita) et des étoffes européennes.

Il n’y avait donc ni fiançailles, ni cérémonie de mariage. La femme était simplement livrée à son mari dès ses premières menstruations, et ne retournait que très rarement chez ses parents. Le divorce était très rare et n’était soumis à aucune juridiction. Il était laissé à l’appréciation du mari, qui s’arrangeait toujours pour obtenir le retour de l’épouse qui avait déserté son foyer, au moyen de menus cadeaux ou de la pression des chefs. Ce système qui peut s’avérer choquant, était la conséquence d’une exogamie stricte, occasionnant la rareté d’épouses potentielles. En effet, les Néyaus ne pouvaient marier, ni une parente (en sachant que celle-ci s’établissait à la fois par la ligne maternelle et paternelle), ni une ressortissante de Fresco, ni même une fille de San Pedro, car ils provenaient tous d’une origine commune432.

431 « Coutumes des Kroumen du Cavally», recueillies par M. RICHARD, Lieutenant d’Infanterie

Coloniale, commandant le poste de Taté, CLOZEL François Joseph et VILLAMUR Roger, ibidem, p. 508.

432

« Coutumes des Kroumen de Sassandra», recueillies par M. THOMANN G., Administrateur-adjoint des colonies, CLOZEL François Joseph et VILLAMUR Roger, ibidem, p. 495.

Dans le pays de Kong et le Djimini, les coutumes Dioula et Bambara433 tranchaient toutes pour un mariage par achat qui ne tenait pas compte du consentement de la femme, alors que le jeune homme ne pouvait être contraint à épouser une fille dont il ne voulait pas. Les fiançailles avaient lieu dès la naissance de la jeune fille, sur demande des parents du fiancé, et ne pouvaient être rompues que par la mort de l’un des fiancés. Ce pouvait être des unions endogamiques pouvant intervenir entre cousins germains, oncle et nièce, ou tante et neveu, ou exogamiques, auquel cas, l’épouse provenant d’une tribu tierce était considérée comme une captive, et pouvait être revendue434

A Bouna, le mariage avait aussi lieu par achat. La jeune fille n’était que rarement consultée, mais en cas de refus, elle se voyait obligée au moyen de sévices corporels à accéder à la demande de ses parents. Quant aux hommes, ils devaient impérativement obtenir, pour se marier, le consentement du père ou du chef de famille, qui détenait tout le patrimoine familial, étant donné qu’une partie de la dot devait être payée dès les fiançailles. La pratique du lévirat faisait aussi automatiquement du frère hériter, le mari de l’ensemble des épouses de son défunt frère. Il n’y avait pas véritablement d’âge minimum pour contracter mariage, la nubilité était fixée à la circoncision pour le garçon et à l’excision pour la fille. Le divorce était réglé par la coutume et intervenait en cas d’impuissance de l’homme ou de stérilité de la femme, d’adultère, de sévices, mauvais traitements continus, d’abandon de foyer, de négligence ou de maltraitance435

L’épouse Pakhalla était elle aussi dans une situation précaire, mais jouissait d’une certaine considération. S’il était constant que son défaut de consentement n’avait aucune incidence sur son entrée en mariage, et que ses fiançailles se déroulaient en général le jour même de sa naissance, une fois mariée, la coutume lui conférait un certain nombre de droits et une réelle emprise sur le devenir de ses filles.

433

La distinction tient à la conversion des Dioula à l’Islam tandis que les Bambara sont restés païens. Il ne s’agit donc pas du peuple Bambara de la région du Haut-Sénégal-Niger.

434 « Coutumes du pays de Kong et du Djimini», recueillies par M. le Capitaine DELACOU de

l’Infanterie coloniale, CLOZEL François Joseph et VILLAMUR Roger, ibidem, p. 317.

435

« Coutumes de Bouna», Extraits du rapport de M. le Lieutenant GREIGERT de l’Infanterie coloniale, CLOZEL François Joseph et VILLAMUR Roger, ibidem, p. 305.

Qu’elle fusse captive ou libre, le mariage n’avait jamais lieu par achat et le mari se devait de traiter toutes ses femmes libres ou captives de la même façon. Toutes avaient droit au même nombre de nuits, devaient être nourries, habillées et soignées le mari et ce, même après leur divorce dont elles pouvaient avoir l’initiative. Après leur divorce, elles ne pouvaient se remarier, mais pouvaient avoir plusieurs amants. Les enfants qu’elles avaient ainsi, demeuraient ceux de l’ex-mari. En ce qui concerne leur progéniture, le consentement de la femme était nécessaire aux fiançailles de sa fille et son mari ne pouvait passer outre. C’est aussi la mère qui prononçait l’union de sa fille en allant la chercher pour la remettre à son époux436.

Quelle se déroulât avec ou sans accord du ou des fiancés, pour être valablement scellée, toute demande en mariage s’accompagnait d’un certain nombre de dons, corvées ou stages, rites et /ou actes symboliques, prévus par l’ensemble des coutumes étudiées.

B. Règles de fond

L’entrée en fiançailles ou les promesses de mariage apparaissent comme des contrats purement consensualistes, qui seraient formés par le seul échange de consentement de ceux qui, suivant la coutume visée, ont vocation d’une part, à demander en mariage et d’autre part, à acquiescer à ladite demande.

Mais une telle conclusion serait hâtive. Il s’agit en réalité de véritables contrats formels de droit coutumier. L’examen des coutumes matrimoniales des peuples ivoiriens, nous prouve en effet que le seul accord de volonté des parties ne suffisait pas à la validité des fiançailles. Suivant l’ethnie, les fiançailles ne produisaient d’effets juridiques qu’à partir du moment où, le ou les demandeurs n’avaient accomplis pour le ou les acceptants, un certains nombre de solennités prévues par la coutume (1), ou encore effectué la remise de choses d’importances plus ou moins symboliques (2).

436

« Coutumes des N’goulangos ou Pakhallas», Extraits du rapport de M. FOLQUET, commis des affaires indigènes, CLOZEL François Joseph et VILLAMUR Roger, ibidem, p. 347.

1. Un contrat solennel

S’il est certain, dans ce système totalement dépourvu d’écriture, que la formation des contrats n’était soumise à aucune condition de production d’écrit, il n’empêche qu’il n’est pas totalement erroné de qualifier la promesse de mariage de droit coutumier, de contrat solennel. A ce propos, la doctrine ne démontre t-elle pas que «sans pouvoir conclure à l’existence d’une théorie générale traditionnelle des obligations en Afrique, des recherches en jurisprudence ont néanmoins révélé qu’un droit traditionnel des contrats a existé avant l’époque coloniale et continue, malgré l’influence du code civil hérité du législateur colonial français, à connaître des vestiges d’application grâce à des règles originales relatives à la formation et à la preuve du contrat »437 ?

Cette solennité des fiançailles de droit traditionnel réside donc dans le fait que, chez la quasi-totalité des ethnies étudiées, leur formation induisait en outre des exigences d’ordre sociologiques, psychologiques, physiologiques et religieuses, la nécessité de l’exécution d’un certain nombre de rituels, usages et corvées incombant le plus souvent au fiancé, et destinés à en garantir non seulement la validité mais aussi la preuve testimoniale.

A titre d’illustration, chez les Abron, en dehors des conditions de nubilité (fixée à la puberté de la fille et entre 16 et 18 ans pour le garçon), d’intégrité physique et morale et de