II.2 Le microscope à force atomique
II.2.3 Les forces mises en jeu, et les diérents modes de fonctionnement 52
Les diérentes forces rencontrées par la sonde lorsqu'elle s'approche de la surface
sont présentées en gure II.2. Parmi elles, trois forces vont intervenir fortement lors
du fonctionnement de l'AFM pour l'observation de surfaces : les forces de Van der
Waals, les forces capillaires et les forces de répulsion inter atomique [6].
Les forces capillaires sont liées à la condensation de molécules d'eau entre la
pointe et la surface ou à la présence d'un lm d'eau recouvrant la surface ou la
pointe. Ces forces attractives trouvent leur origine dans la tension supercielle
du ménisque d'eau formé dans l'espace pointe - surface. Ces forces dix fois plus
intenses que celles de Van der Waals, apparaissent quand la distance
pointe-surface est comprise entre 10 et 200 nm.
Les forces de Van der Waals apparaissent lorsque l'espace pointe-surface est de
quelques nanomètres et produisent une faible interaction. Elles sont attractives
et trouvent leur origine dans les interactions dipôle - dipôle.
Les forces de répulsion inter atomique, dites aussi forces Coulombiennes,
appa-raissent pour de petites distances pointe - surface (inférieures au nanomètre)
et résultent des interactions entre nuages électroniques pointe - surface.
Entre deux atomes, le potentiel empirique employé pour décrire l'eet combiné de
la répulsion de coeur et de la force de Van der Waals est habituellement le potentiel
de Lennard-Jones [7] :
U(R) = 4
"σ
R
12−
σ
R
6#(II.1)
oùetσsont respectivement l'énergie d'attraction et le rayon de coeur répulsif, et
Rest la distance entre atomes. L'allure du potentiel de Lennard-Jones est représentée
sur la gure II.3, elle souligne l'existence d'une branche attractive (utilisée dans le
mode non-contact) et d'une branche répulsive (utilisée dans le mode contact).
II.2 Le microscope à force atomique
Fig. II.2 Représentation des diérentes forces rencontrées par la sonde lorsqu'elle
s'approche de la surface
Fig. II.3 Potentiel de Lennard-Jones représentant les diérents régimes
d'interac-tions entre la pointe et la surface
CHAPITRE II. OUTILS DE FABRICATION ET DE
CARACTÉRISATION DE STRUCTURES NANOMÉTRIQUES
Ainsi, pour étudier une surface à l'aide d'un AFM, trois modes d'imagerie sont
possibles : le mode contact, le mode non-contact et le mode contact intermittent.
Le mode contact
Dans le mode contact, la pointe est toujours maintenue en contact avec la surface
et les forces agissant entre la pointe et la surface sont à l'origine de la déexion du
levier et donc d'une déviation du faisceau laser. Une force de référence est associée
à une déexion nulle du levier. Ainsi, durant le balayage, la force mesurée (i.e. la
déexion du levier) est comparée à la force de référence et la boucle de contre réaction
annule l'erreur en modiant la position en z de l'échantillon. La déexion du levier
est donc utilisée comme valeur de consigne pour la régulation, et les déplacements
en z de l'échantillon (par l'intermédiaire des tensions appliquées sur le système de
déplacement piézo-électrique) sont alors enregistrés en chaque couple de points (x,y),
et ils sont interprétés comme la topographie de la surface analysée.
Cette méthode n'est pas adaptée à l'étude de surfaces fragiles qui peuvent être
endommagées par les forces de friction qui sont très importantes dans ce mode
d'utilisation.
Le mode non-contact
En mode non-contact les interactions pointe-surface se situent dans le régime
at-tractif. Une cale piézo-électrique placée sous le levier permet de faire osciller ce
dernier proche de sa fréquence de résonance avec une certaine amplitude. La
dé-tection des interactions est basée sur les variations de la fréquence d'oscillation du
levier. Les forces d'interactions en mode non contact sont de l'ordre du piconewton,
c'est pourquoi l'utilisation de ce mode nécessite de travailler dans un
environne-ment contrôlé : faible bruit et faible pollution, c'est à dire dans un environneenvironne-ment
ultravide.
Le mode contact intermittent
Le mode contact intermittent ou mode tapping est un compromis entre le
mode contact et le mode non contact. Les interactions pointe-surface oscillent entre
le régime attractif et le régime répulsif. Comme pour le mode non contact, une cale
piézo-électrique placée sous le levier permet de faire osciller ce dernier proche de sa
fréquence de résonance (cette fréquence varie selon la longueur et le type de levier
utilisé). Il faut que l'amplitude des oscillations soit susamment importante pour
que la pointe ne reste pas collée sur la surface à cause de la force d'adhésion.
Dans ce mode, la pointe vient donc en contact avec la surface à chaque oscillation,
d'où le nom de contact intermittent. Le paramètre d'asservissement dans ce mode
est l'amplitude d'oscillation de la pointe. En eet, celle-ci change en fonction de la
topographie, et la boucle de contre réaction permet de maintenir l'amplitude initiale
constante en modiant la position en z de l'échantillon. Ce mode présente l'avantage
de pouvoir imager presque tous types de surface sans les endommager et aussi de
retarder la détérioration des pointes et donc de prolonger leur durée de vie.
Ce mode est le plus couramment utilisé et diérentes données peuvent être
ac-quises pendant le balayage. Nous pouvons non seulement obtenir une image
topo-graphique de la surface, mais il est également possible de mesurer la diérence de
II.2 Le microscope à force atomique
phase entre les oscillations délivrées par le matériau piézo-électrique et les
oscilla-tions détectées. Cette donnée procure des informaoscilla-tions sur les propriétés d'élasticité
et de viscosité de la surface.
L'AFM utilisé pour cette étude est un modèle commercial : le Dimension 3100
fabriqué par Veeco Instruments, et équipé d'une électronique de contrôle Nanoscope
IV. Les tubes piézo-électriques déplacent la sonde AFM et non pas l'échantillon,
ce qui présente l'avantage de pouvoir balayer des surfaces plus larges. En eet,
les tubes en céramique piézo-électrique supportent mal la torsion et doivent par
conséquent être peu chargés, ce qui est incompatible avec le balayage d'échantillons
de grande taille. Avec ce système de balayage par la pointe, la taille maximale de
balayage est de 100 par 100µm
2. A ces dimensions, les céramiques piézo-électriques
sont fortement non-linéaires et présentent une hystérésis non négligeable. Il convient
donc de les corriger avec une procédure propre au constructeur. En revanche, le
scanner Z possède lui une course maximale de 7 µm environ. A cette taille, on
considère que les eets non-linéaires sont négligeables, il n'est donc aucunement
corrigé, mais seulement calibré sur un réseau. Le microscope est isolé des vibrations
acoustiques (de l'ordre du kHz) et terrestres (de l'ordre de l'Hz) d'une part grâce
à un caisson, et d'autre part à un marbre posé sur un gel de polymères, le tout
monté sur une table à coussin d'air. Enn, la caméra optique, couplée à la platine de
déplacement permettent de se positionner avec une précision de l'ordre du micron
sur un échantillon. L'instrument est présenté sur la gure II.4.
Fig. II.4 Photographie du Dimension 3100. (a) Vue d'ensemble. (b) Vue du scanner
II.2.4 Les artefacts
Les forces mises en jeu et la taille des motifs à scanner étant très faibles, de
nombreux artefacts peuvent exister lors de la mesure. Tout d'abord, la convolution de
la pointe avec la forme de l'échantillon est la plus courante. Elle survient de manière
sensible lorsque les objets présents sur la surface ont des dimensions inférieures ou
comparables à celle de l'apex de la pointe. Il en découle plusieurs conséquences :
la largeur d'un motif observé à l'AFM ne correspond pas forcément à la largeur
réelle, il faut tenir compte du rayon de courbure de la pointe (voir gure II.5a).
Ensuite, si l'apex est plus grande que la taille des motifs imagés, la convolution peut
CHAPITRE II. OUTILS DE FABRICATION ET DE
CARACTÉRISATION DE STRUCTURES NANOMÉTRIQUES
entièrement cacher les motifs (gure II.5c). Une image MEB d'une pointe AFM
typique est donnée en gure II.6.
Fig. II.5 (a)Expression de la largeur réelle en fonction de la largeur apparente et
des dimensions du motif [8]. (b)Cas où la pointe est susamment ne pour que la
convolution n'aecte pas trop les images. (c)Cas où le diamètre des pointes est trop
grand par rapport aux motifs observés, cachant entièrement les motifs.
Fig. II.6 Image MEB d'une pointe AFM
De plus, des artefacts peuvent être liés aux actionneurs piézo-électriques qui
présentent des non-linéarités ainsi que des eets d'hystérésis dans leurs déplacements.
Enn, l'ensemble du dispositif est sensible aux dérives thermiques et mécaniques,
ainsi qu'aux perturbations acoustiques et électromagnétiques. Des précautions
ex-périmentales ainsi que les traitements des données obtenues permettent d'éliminer
la plupart de ces artefacts.
Dans le document
Fabrication top-down, caractérisation et applications de nanofils silicium
(Page 57-61)