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Fonctions des lymphocytes T γδ : multiplicité et diversité.

La diversité de phénotypes, localisations, et spécificités antigéniques des lymphocytes T γδ est à l’origine d’une multitude de fonctions. Contrairement aux lymphocytes T αβ conventionnels, les lymphocytes T γδ re-circulent rarement en permanence dans le réseau lymphatique. Ils restent associés préférentiellement à leur tissu de résidence, et sont souvent activés directement sans dépendre réellement des cellules présentatrices d’antigènes spécialisées. Ils effectuent donc des réponses effectrices très rapides qui jouent un rôle important dans le maintien de l’intégrité de l’organisme. Comme les autres cellules de l’immunité innée, ceci leur permet également de jouer un rôle important dans le contrôle du développement de la réponse adaptative. Il faut par ailleurs noter qu’une population γδ donnée, définie par un TCR particulier, peut également se composer de sous-populations ayant des phénotypes différents associés à des fonctions distinctes. Par exemple, comme mentionné précédemment, le marqueur CD27 chez certaines sous-populations murines définit

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un biais pour la production d’IFN-γ ou d’IL-17. Ce même marqueur, en association avec CD45 permet de distinguer plusieurs sous-populations au sein des lymphocytes T Vγ9/Vδ2 humains (57).

3.1) Fonctions effectrices

Les sous-populations γδ sont, comme les lymphocytes T CD8, les populations αβ non- conventionnelles et les cellules NK, dotées d’une machinerie de cytotoxicité leur permettant de lyser leurs cellules cibles par induction de l’apoptose. Cette machinerie présente deux composantes principales : les granules lytiques faisant intervenir principalement le couple perforine/granzyme, et le système Fas/FasL (Figure 9). Chez les lymphocytes T γδ, comme les cellules NK, les granules lytiques sont préformés, ce qui leur permet une cytotoxicité immédiate. Ceci les distingue des lymphocytes T CD8 qui ne sont « armés » qu’après avoir été activés par une cellule présentatrice d’antigènes. La spécificité pour la cellule ciblée est assurée par un relargage vectoriel des granules (58). Après reconnaissance de l’antigène, les granules vont en effet être orientés directement au niveau de la synapse immunologique formée entre cellule effectrice et cellule cible par les interactions entre le récepteur activateur (TCR dans le cas des lymphocytes T) et de nombreuses molécules d’adhésion et de co- stimulation.

Les granules cytotoxiques, dérivés des lysosomes, contiennent de nombreuses protéines majoritairement impliquées dans l’activation des voies d’apoptose, mais certaines d’entre elles, comme la granulysine, pourraient également avoir des activés microbicides (59). Le mécanisme exact d’action du couple perforine/granzyme est encore mal connu et les données actuelles ont principalement été obtenues in vitro dans des modèles simplifiés où les cellules cibles sont incubées en présence de ces protéines.

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Figure 9. Mécanismes de cytoxicité : induction de l’apoptose de la cellule cible.

La reconnaissance de l’antigène induit la polarisation et le relargage des granules cytotoxiques vers la synapse immunologique, et potentiellement l’interaction Fas/FasL. Les granzymes sont internalisées par endocytose et libérées dans le cytoplasme sous l’action de la perforine. Le rôle principal des granzymes et du couple Fas/FasL est d’induire l’apoptose des cellules cibles, via l’activation des caspases, mais aussi en activant directement certaines cibles des caspases. Ces voies cytotoxiques sont communes aux lymphocytes T CD8 et non- conventionnels ainsi qu’aux cellules NK.

Adapté de (14).

Si la perforine était à l’origine vue comme un canal permettant l’entrée des autres protéines dans la cellule cible, des données plus récentes suggèrent que le mécanisme est plus complexe et fait intervenir une endocytose des protéines effectrices (60), pouvant également impliquer des récepteurs aux granzymes tels que le récepteur au mannose-6-phosphate (61). Les granzymes sont des sérine-protéases activant les voies apoptotiques des cellules cibles via plusieurs mécanismes dépendants ou non des caspases. En effet, il semblerait que les

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granzymes soient capables de remplacer les caspases dans de nombreux processus de l’apoptose (14).

Le deuxième mécanisme majeur de cytotoxicité par les lymphocytes T γδ fait intervenir le couple Fas/FasL. FasL (pour Fas Ligand) est une protéine homotrimérique membranaire de la famille du TNF et son récepteur Fas est couplé à des voies de signalisation pro-apototiques induisant la mort de la cellule cible, principalement via l’activation des caspases. L’interaction Fas/FasL est, de la même façon que la polarisation des granules cytotoxiques, facilitée par la formation de la synapse immunologique.

En plus de ces fonctions effectrices de lyse de la cellule cible, les lymphocytes T γδ sont également une source importante de cytokines permettant l’activation d’autres sous- populations du système immunitaire. Globalement, les lymphocytes T γδ ont un profil de sécrétion de cytokines qui est plutôt biaisé vers une réponse de type Th1 (62) ce qui est en accord avec une implication préférentielle dans des réponses dirigées contre des pathogènes intracellulaires, ou dans l’immunosurveillance des cellules stressées ou transformées. Certaines sous-populations particulières peuvent toutefois secréter des cytokines de type Th2, comme l’IL-4 ou l’IL-10.

Bien que reposant essentiellement sur la reconnaissance antigénique par le TCR, les mécanismes d’activation de la cytotoxicité ou de la sécrétion de cytokines par les lymphocytes T γδ peuvent également impliquer l’ADCC (Antibody-Dependent Cell Cytotoxicity), comme pour les cellules NK. Cette propriété est toutefois restreinte aux sous- populations exprimant le marqueur CD16 (aussi appelé FcγRIII), un récepteur de basse affinité pour le fragment constant des immunoglobulines. CD16 ne joue probablement qu’un

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rôle secondaire, complétant l’activation par le TCR (63, 64). De la même façon, les lymphocytes T γδ expriment certains TLR ayant un rôle principalement co-stimulant (65).

Jusqu’à présent, les ligands des TCR γδ décrits sont principalement de nature endogène, ce qui pourrait entraîner une auto-réactivité de ces lymphocytes. Leur activation est donc finement régulée par des récepteurs pour les antigènes du CMH ou apparentés, les NKR (pour Natural Killer Receptor car initialement décrits sur les cellules Natural Killer) pour empêcher toute réaction auto-immune (66). Ces récepteurs peuvent être divisés en deux groupes, de type activateur ou inhibiteur. Le rôle des récepteurs de type inhibiteur (iNKR) est d’antagoniser la signalisation des récepteurs activateurs (dont le TCR) via la reconnaissance des molécules du CMH-I. En cas de diminution d’expression du CMH-I, fréquente dans les infections virales ou au cours de la transformation tumorale, ces récepteurs ne transmettront donc plus leurs signaux inhibiteurs (hypothèse du « soi manquant »). Les récepteurs activateurs (aNKR) reconnaissent généralement des molécules apparentées au CMH-I telles que MICA/MICB ou les protéines de la famille RAET (aussi appelées ULBP) dont l’expression est initiée en cas de stress cellulaires. Comme pour le CMH-I, de nombreuses protéines virales sont impliquées dans l’inhibition de l’expression de ces marqueurs de stress notamment pour échapper à la cytotoxicité des cellules NK.

Pour les lymphocytes T γδ, cette caractéristique a été principalement étudiée dans le cas de la sous-population Vγ9/Vδ2 humaine. La très grande majorité des cellules de cette sous- population exprime des récepteurs de type inhibiteurs (67) jouent un rôle majeur dans la régulation de leur activation, notamment le couple CD94/NKG2A qui reconnaît principalement HLA-E. Cependant, cette régulation reste un phénomène très complexe et multifactoriel dépendant de l’intégration des signalisations induites par de nombreux récepteurs activateurs et inhibiteurs (68).

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Plus récemment, une nouvelle fonction effectrice a également été décrite pour les lymphocytes T humains de type Vγ9/Vδ2. Cette sous-population, une fois activée, présenterait en effet les caractéristiques d’une cellule présentatrice d’antigènes : activation de l’expression de CCR7 (favorisant une migration vers les ganglions lymphatiques) et des antigènes des CMH-I et II, comparable au phénotype des cellules dendritiques ; induction de la capacité d’internalisation et de présentation d’antigènes solubles ; forte capacité à activer des lymphocytes T CD8 naïfs (69, 70). Ces caractéristiques soulignent une fois de plus la position des lymphocytes T γδ à l’interface entre immunité innée et immunité adaptative.

3.2) Fonctions régulatrices

Faisant partie de la première ligne de défense contre les pathogènes, les lymphocytes T γδ participent à la régulation des autres sous-populations du système immunitaire. Ce rôle est principalement rempli par leur capacité à sécréter rapidement de nombreuses cytokines. Un des rôles importants dans le passage de relai entre immunité innée et adaptative par les lymphocytes T γδ pourrait résider dans leur forte capacité à stimuler les cellules dendritiques immatures. Cette propriété a principalement été décrite pour les lymphocytes T Vγ9/Vδ2 et se déroule via la sécrétion de diverses cytokines, notamment l’IFN-γ et le TNF-α (71, 72). Récemment, ils ont également été décrits comme antagonisant les lymphocytes T CD4 régulateurs dans le cadre de la réponse contre les mycobactéries (73).

Les lymphocytes T γδ sont généralement associés à une réponse de type Th1. Néanmoins certaines sous-populations pourraient également avoir un rôle voisin des Th2, par exemple en activant les lymphocytes B, participant ainsi à l’immunité humorale. C’est le cas d’une sous- population Vγ9/Vδ2 chez l’homme, définie par le marqueur CXCR5, qui potentialise la sécrétion d’anticorps par les lymphocytes B. Ce mécanisme fait intervenir principalement deux cytokines, l’IL-4 et l’IL-10, ainsi que CD40L et ICOS, des molécules de co-stimulation

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classiquement impliquées dans l’activation des lymphocytes B (74). De façon similaire, les lymphocytes T γδ intra-épithéliaux de l’intestin chez la souris (Vγ7) sécrètent du TGF-β, cytokine jouant un rôle important dans la production des IgA, anticorps classiquement associés aux muqueuses (75).

Certains lymphocytes T Vγ1 pourraient intervenir en fin de réponse immunitaire en participant à l’arrêt de la réaction inflammatoire (via la secrétion de cytokines comme l’IL-4) et l’élimination de cellules activées, comme les macrophages (76). Enfin, de nombreuses études in vivo ont montré que les lymphocytes T γδ participent également à l’induction de la tolérance périphérique, mais les mécanismes sous-jacents sont peu connus (77).

En complément de ces rôles de modulation du système immunitaire, les sous-populations γδ intra-épithéliales jouent également un rôle très important dans le maintien de l’intégrité des tissus auxquels elles sont associées. Cette propriété a particulièrement été étudiée pour les lymphocytes T Vγ5/Vδ1 chez la souris. En plus de leur implication dans les mécanismes de défense contre des pathogènes ou dans l’immuno-surveillance, ces lymphocytes sont également une source importante de facteurs de croissance notamment pour les kératinocytes (Keratinocyte Growth Factor, KGF), favorisant ainsi la régénération du tissu endommagé suite à une blessure ou une infection (78). Cette capacité a également été décrite pour les lymphocytes T γδ intra-épithéliaux de l’intestin (79).

Ces fonctions très variées (Figure 10) suggèrent que les lymphocytes T γδ, bien que plus rares que les lymphocytes T conventionnels, jouent un rôle primordial dans le maintien de l’intégrité de l’organisme, en participant directement ou indirectement aux réponses immunitaires, ainsi qu’.à l’homéostasie tissulaire. Ceci est validé par de nombreux modèles murins déficients pour tout ou partie des sous-populations γδ et des données décrivant le rôle de plusieurs de ces sous-populations dans des pathologies diverses décrites ci-après.

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Figure 10. Fonctions des

lymphocytes T γδ.

Les principales fonctions décrites des lymphocytes T γδ sont schématisées. Elles sont en général restreintes à des populations particulières. Voir le texte pour le détail. LB, LT : Lymphocytes B et T. CD : cellule dendritique.

4) Lymphocytes T γδ et pathologies : dualité de leurs rôles.

Compte tenu de leur grande variété de fonctions et de leur localisation préférentielle au niveau des épithéliums, donc en première ligne de défense de l’organisme, les lymphocytes T γδ jouent un rôle important dans le contrôle des infections. Ayant souvent des propriétés cytotoxiques et un profil de cytokines plutôt de type Th1, ils sont impliqués dans la défense contre divers pathogènes intracellulaires. Ils pourraient également moduler le développement de diverses pathologies auto-immunes et inflammatoires. Enfin, ils jouent un rôle primordial dans l’immuno-surveillance des cancers. Les lymphocytes T γδ contribuent à la protection de l’organisme, mais ils peuvent également avoir des effets néfastes.

4.1) Pathogènes intracellulaires 4.1.1) Bactéries et parasites

Un des tout premiers rôles des lymphocytes T γδ dans la réponse dirigée contre les pathogènes a été suggéré par leur capacité à être activés par des extraits issus de préparations

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mycobactériennes (Purified Protein Derivative ou PPD). Ceci a été montré chez la souris aussi bien que chez l’homme et originellement l’antigène impliqué dans cette activation a été identifié comme étant un homologue mycobactérien de la protéine Hsp60 (Heat shock protein de 60kDa) (80-82). La réponse contre les mycobactéries a par la suite été restreinte, chez l’homme, à la sous-population Vγ9/Vδ2, qui est largement majoritaire au niveau du sang périphérique (83, 84). Les antigènes mycobactériens principalement responsables de l’activation des lymphocytes T Vγ9/Vδ2 humains n’ont été caractérisés que plus tard, et correspondent à de petits alkyls phosphorylés appelés phosphoantigènes (85) (voir Chapitre II, section 5.2, p.67). Ces antigènes ont par la suite été décrits comme produits par de nombreuses autres bactéries intracellulaires, ce qui explique la large réactivité des lymphocytes T Vγ9/Vδ2. Cette sous-population joue également un rôle important dans la défense contre l’infection par diverses souches de Plasmodium, l’agent pathogène responsable du paludisme, toujours via l’activation par des phosphoantigènes (86).

Enfin, les lymphocytes T γδ sont, aussi bien chez l’homme que chez la souris, impliqués dans la réponse contre d’autres pathogènes intracellulaires tels que les leishmanies ou Listeria

monocytogenes (87, 88).

4.1.2) Virus

Le rôle primordial des lymphocytes T αβ cytotoxiques (CD8+

) ainsi que des cellules NK dans l’immunité anti-virale est connu depuis de nombreuses années. Les lymphocytes T γδ présentant les caractéristiques de ces deux types de cellules immunitaires, il n’est pas étonnant qu’ils participent très largement aux défenses de l’organisme contre les virus. De nombreux travaux chez la souris ont décrit l’activation des lymphocytes T γδ lors d’infections virales variées (89) comme le virus de la leucémie murine (MuLV), certains virus de la famille de l’Influenza, ou le virus de Sendaï pour en nommer quelques uns. Cette large réactivité est

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probablement due à la reconnaissance des cellules infectées via les NKR plutôt que grâce à des antigènes spécifiques (90). Chez l’homme, les deux virus principalement étudiés dans le contexte des lymphocytes T γδ sont le Cytomégalovirus (CMV) et le Virus de l’Immunodéficience Humaine (VIH).

L’infection par le CMV est généralement bénigne chez les individus immunocompétents. En revanche, les patients recevant une greffe d’organe étant généralement sous traitement immunosuppresseur, une infection par le CMV induit de nombreuses manifestions inflammatoires pouvant mettre en jeu le pronostic vital. C’est dans ce cadre que l’activation des lymphocytes T γδ, et plus particulièrement des sous-populations humaines Vδ1 et Vδ3, a originellement été identifiée (91). L’infection par le CMV induit une expansion durable de ces sous-populations γδ, ainsi qu’un biais vers un phénotype de type effecteur cytotoxique et mémoire, avec une nette sélection de sous-types de TCR particuliers (92, 93). L’antigène reconnu par les sous-populations γδ impliquées dans la réponse contre le CMV n’a à l’heure actuelle pas été identifié, mais comme souvent dans les réponses non-conventionnelles anti- virales, il s’agit probablement d’un ligand endogène de stress, exprimé en réponse à l’infection. Il est peu probable que le mécanisme principal fasse intervenir uniquement les NKR, puisque dans ce cas les lymphocytes T Vγ9/Vδ2, majoritaires, devraient largement participer à la réponse contre le CMV, ce qui n’est pas le cas.

La relation entre le VIH et les lymphocytes T γδ est complexe et fait intervenir différentes sous-populations. Comme mentionné précédemment, la population majoritaire dans le sang périphérique est de type Vγ9/Vδ2, représentant environ 80% des lymphocytes T γδ circulants chez la plupart des individus sains. Lors de l’infection par le VIH, il y a une expansion des lymphocytes T γδ caractérisée par une inversion complète du rapport entre les populations

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Vδ2+ et Vδ1+ (94). Bien que les lymphocytes T Vγ9/Vδ2 soient capables de répondre de manière efficace aux cellules infectées par le VIH in vitro (95, 96), leur nombre est dramatiquement réduit au cours de la progression de la maladie et le faible pourcentage restant présente des déficiences fonctionnelles importantes au niveau de leur prolifération et de leurs fonctions effectrices. Les raisons de cette déplétion sélective ne sont pas claires, mais elle pourrait être due à un épuisement du répertoire Vδ2 suite à une activation chronique (97). Certaines sous-populations Vδ2 exprimant le marqueur CD4, on peut émettre l’hypothèse que le VIH est capable d’infecter ces cellules avec des conséquences négatives pour l’ensemble des sous-populations.

Les raisons de l’inversion Vδ2/Vδ1 sont encore discutées. L’idée qu’une réponse anti-VIH médiée par des sous-populations Vδ1 se développe, supportée par le fait que ces cellules sont capables de détruire des cellules infectées (98), est envisageable. Néanmoins, il semble clair que cette réponse est relativement inefficace in vivo, et des données expérimentales indiquent qu’il n’y a pas de sélection de TCR Vδ1 particuliers (99), ce qui suggère qu’il n’y a pas réellement de développement d’une réponse spécifique des lymphocytes T Vδ1 contre le VIH. Pour finir, la déplétion des sous-populations Vγ9/Vδ2 participe largement au développement des pathogènes opportunistes, notamment les mycobactéries.

Les travaux sur les relations entre lymphocytes T γδ et VIH représentent donc des voies potentiellement importantes dans l’étude de la physiopathologie du SIDA.

4.2) Pathologies inflammatoires et auto-immunes

Le fait que les lymphocytes T γδ modulent de nombreuses autres populations du système immunitaire et qu’ils aient un potentiel auto-réactif important suggère qu’ils pourraient participer au contrôle aussi bien qu’au développement de pathologies auto-immunes. Plusieurs travaux chez la souris vont dans ce sens. Dans plusieurs modèles animaux, comme

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ceux de la myocardite (100), de l’arthrite réactive (101), de l’uvéite (102), ou du lupus (103), les lymphocytes T γδ semblent capables de diminuer ou d’exacerber les symptômes. Néanmoins, de nombreux travaux ont montré que les lymphocytes T γδ sont capables de réduire l’inflammation et les dommages tissulaires en contrôlant la sur-activation des lymphocytes T αβ. Les biais pro- ou anti-inflammatoires pourraient dans certains cas être le résultat de l’utilisation de lignées murines différentes. Ces effets divergents pourraient dépendre des sous-populations γδ mises en jeu. En effet, dans plusieurs cas les populations pathogéniques sont CD8+, ou sécrètent de l’IL-17 (104).

Chez l’homme, l’implication des lymphocytes T γδ dans le développement de pathologies auto-immunes et inflammatoires a également été étudiée. Des variations des populations γδ ont par exemple été observées dans le diabète gestationnel et le lupus (105, 106). La pathologie la plus étudiée dans ce cadre est probablement la sclérose en plaques. De nombreux travaux ont pu mettre en évidence un lien entre le développement de cette pathologie et les lymphocytes T γδ, qui pourraient participer activement à la formation des lésions. Deux mécanismes sont principalement en cause : une cytotoxicité directe dirigée contre certaines cellules du système nerveux central (principalement les oligodendrocytes), et une forte production d’IL-17, cytokine ayant le plus grand potentiel pro-inflammatoire et qui est impliquée dans de nombreuses pathologies auto-immunes et inflammatoires telles que la polyarthrite rhumatoïde, la sclérose en plaques, ou la maladie de Crohn (107). Ces résultats sont par ailleurs confirmés dans des modèles murins d’EAE, reproduisant la pathologie humaine assez fidèlement. Encore une fois, l’intervention des lymphocytes T γδ dans cette pathologie est assez complexe, puisqu’ils pourraient également s’avérer protecteurs. De très nombreux facteurs pourraient influencer leur rôle exact, comme les sous-types de populations

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étudiés, le modèle murin considéré, ou même le stade de la maladie auquel ils interviennent (108).

Enfin, une forte infiltration de lymphocytes T γδ a été observée dans les lésions athérosclérotiques, et serait probablement liée à la surexpression d’Hsp60 (109), protéine dont l’expression à la surface des cellules a été rapportée comme influençant la réactivité des lymphocytes T Vγ9/Vδ2 humains (110). Ceci a également été décrit dans le développement de la maladie de Behçet, une vascularite systémique (111).

Globalement, les liens entre lymphocytes T γδ et pathologies inflammatoires ou auto- immunes apparaissent extrêmement complexes et sont encore mal compris, surtout chez l’homme, mais méritent certainement des travaux plus approfondis.

4.3) Cancer

Les premières études fonctionnelles sur les lymphocytes T γδ ont très vite mis en évidence leur capacité à lyser in vitro des cellules tumorales, que ce soit des lignées (112) ou des tumeurs autologues (113). Globalement, cette capacité est étendue à tous les sous-types γδ et