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4.2 Définition de l’évaluation crédible

4.2.1 En fonction de ses finalités

L’étude des perceptions des participants à l’égard de l’évaluation crédible met en relief un aspect récurrent et d’importance lié aux finalités qu’elle poursuit. Celles-ci concernent l’utilité des résultats de l’évaluation ainsi que l’appropriation du processus évaluatif par les parties prenantes.

4.2.1.1 Utilité des résultats

L’utilité demeure une dimension centrale dans la conception et la façon de définir l’évaluation par les participants. Lorsqu’ils sont invités à fournir leur propre définition de l’activité évaluative, plusieurs participants font référence à son utilité, notamment en termes de pertinence et d’objectifs. Pour eux, l’évaluation peut se définir comme un moment de réflexion pour effectuer une prise de conscience, un

temps d’arrêt ou une photographie afin de constater l’état des choses et de prendre le pouls d’une situation. Elle est perçue comme un outil d’analyse et d’aide à la prise de décisions propre à une approche d’amélioration et à un souci de développement. Elle

fournit un contenu et des données probantes, lesquels sont utiles et essentiels à la réflexion que doivent entreprendre les acteurs d’un milieu afin d’améliorer la qualité des actions qu’ils mettent de l’avant. La démarche évaluative leur permet d’obtenir des éléments de réponse quant à leurs questionnements relativement à ce qui

fonctionne et ce qui ne fonctionne pas et d’apporter les changements et ajustements

qui s’imposent afin d’atteindre les objectifs sur lesquels prennent assises leurs interventions au quotidien.

L’évaluation, pour moi, c’est d’abord et avant tout de voir si ce qu’on fait dans nos actions […] donne quelque chose, si […] ça produit des résultats, des impacts, […] si on prend les bons chemins [pour] les objectifs qu’on souhaite. Et c’est une manière […] de s’ajuster en cours de route et d’innover au besoin, si on voit que nos pratiques ne sont peut-être plus aussi efficaces qu’elles l’ont déjà été..

Je pense que c’est un processus qui t’amène à réfléchir sur l’action que tu mènes, à valider des orientations que tu as prises. Je le vois plus comme un outil d’analyse qui t’aide à avancer dans ta réflexion, ton orientation, que de contrôle et de répression.

Je pense que les gens voient […] plus d’intérêt au côté d’aide à la prise de décisions, c’est-à-dire de savoir : est-ce qu’on fait bien, est-

ce que je me permets réellement d’atteindre tel objectif ou est-ce que mon action ou mon activité pourrait être améliorée?

L’évaluation, ça me permet de mieux comprendre les impacts qu’on a sur les populations avec lesquelles on travaille et de savoir à quel point est-ce qu’on vise juste ou non avec les interventions qu’on fait et les programmes, les projets qu’on met en place.

Pour moi, l’évaluation c’est de permettre de faire un bilan, de faire le point sur ce qui s’est passé, comment ça s’est déroulé. Est-ce que les participants ont apprécié? Est-ce qu’on a répondu à nos objectifs? […] Est-ce qu’on a répondu en termes de temps, de qualité, de

quantité par rapport à ce qu’on devait faire? Ça permet également de faire le point sur ce qui serait à améliorer, à changer […].

L’évaluation est également associée à une démarche rigoureuse pour documenter

l’impact que peuvent avoir les activités d’une organisation sur une population

spécifique. Les informations que génère l’évaluation peuvent favoriser une valorisation du travail des acteurs et conférer une certaine crédibilité et notoriété à l’organisation. Ces informations s’avèrent ensuite pertinentes pour faire valoir les actions de l’organisation en quête de financement auprès de différents bailleurs de fonds. De plus, les résultats que produit une évaluation demeurent une façon de légitimer certaines dépenses publiques; l’évaluation s’impose ainsi comme étant un

mal nécessaire en guise de mécanisme de reddition de comptes pour certains

participants.

C’est une belle façon de s’assurer […] qu’on rencontre nos objectifs et que nos clients sont satisfaits. Et […] qu’on puisse communiquer à [nos bailleurs de fonds] les impacts et les résultats de nos

programmes.

Ça permet de mettre en valeur ce que l’on fait, tant pour le service lui-même, que pour la recherche de financement qui est inévitable pour nous.

Je pense que ça permet de renforcer l’image qu’on a, comme des gens professionnels qui ne [font] pas juste des choses comme ça, sans trop réfléchir. Non, on réfléchit à ce qu’on fait, comment on le fait,

pourquoi on le fait et on veut avoir des preuves de ça. Pour augmenter aussi notre crédibilité et pour après revendiquer du financement. Si j’arrive à démontrer que par mon projet, j’atteins tel et tel objectif, ça sera plus facile après de légitimer le fait de demander plus de

financement pour ce projet.

4.2.1.2 Appropriation du processus

Maints participants ont manifesté un important besoin à être mieux formés et outillés pour faire face à l’évaluation, qui est une activité de plus en plus exigée et présente dans leurs fonctions professionnelles. Plusieurs affirment apprécier le fait de retirer des apprentissages et de développer une certaine culture évaluative suite à une démarche d’évaluation où ils ont été impliqués. À leurs yeux, une expérience évaluative positive, crédible et utile est associée à un renforcement de leurs capacités relativement à l’évaluation, de façon à être en mesure de réinvestir les apprentissages qu’ils réalisent dans le cadre de tâches évaluatives subséquentes et de mieux juger de la qualité d’une évaluation. Des participants mentionnent avoir été encouragés et soutenus à s’approprier le processus d’évaluation afin de développer leurs connaissances en évaluation et de les réutiliser. Ce renforcement des capacités évaluatives obtient une incidence positive sur les démarches d’évaluation ultérieures initiées, celles-ci devenant mieux reçues et acceptées par les parties prenantes et pouvant être anticipées avec davantage d’aisance et de facilité.

On est toujours en évaluation et on se questionne toujours sur les projets, sur les résultats qu’on a. […] Ça me surprend que certaines personnes ne le fassent pas parce que c’est logique, ça va de soi. Je suis quand même contente du processus qu’on fait parce que ça m’outille, ça m’aide beaucoup à éclaircir ma façon d’évaluer nos

pratiques.

On savait aussi que ça servait à acquérir des outils d’évaluation pour nos projets futurs, donc ça nous semblait pertinent aussi que

l’ensemble de l’équipe y participe.

Donc on s’est doté de ces deux façons de fonctionner qui sont plus participatives […]. Donc ça, c’est sûr qu’on l’a quand même pas mal développé suite à l’expérience [de l’évaluation] du programme, qui était quand même pas mal plus rigoureuse […]. C’est sûr qu’on a pris des façons de procéder qui sont un peu plus légères, mais qui nous permettent quand même de réévaluer […].

On a réutilisé des outils. En fait, on a transformé un petit peu nos sondages maison qu’on faisait. Et j’ai toujours le souci des objectifs beaucoup plus précis maintenant.

Je dirais que plus on en fait, plus en s’en sort, mieux on est outillé. En tout cas, moi, c’est la conclusion que j’en fais. C’est vrai que ce n’est pas facile, mais vraiment, je trouve qu’on en sort avec une autre vision aussi des résultats.

Ainsi, aux dires des participants, les différentes évaluations qu’expérimentent les parties prenantes permettent de les habiliter sur le plan de la démarche d’évaluation; celles-ci se familiarisent et s’approprient le processus propre à la pratique, de façon à transposer les apprentissages tirés dans le cadre de contextes évaluatifs autres.

En somme, dans le discours des participants, les finalités principales de l’évaluation gravitent autour de l’utilité qu’elle revêt aux yeux des parties prenantes. Celle-ci se décline de différentes façons, notamment en termes d’utilisation des résultats pour vanter les bienfaits des activités d’une organisation ou pour appuyer une demande de financement auprès d’un bailleur de fonds. Néanmoins, une facette récurrente et omniprésente dans les propos des participants en lien avec l’utilité d’une évaluation concerne les apprentissages et l’habilitation en matière d’évaluation que peut apporter une expérience évaluative. L’évaluation étant partie intégrante des pratiques de

gestion d’un nombre grandissant d’organisations, l’utilité d’une évaluation semble se mesurer en fonction des apprentissages qu’elle leur permet de réaliser et figure au premier plan dans leur façon de concevoir et définir l’évaluation crédible.