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4.3 Facteurs d’influence de la crédibilité

4.3.9 Disponibilités des ressources

La question de la disponibilité des ressources apparait cruciale dans le discours des participants rencontrés. Bien qu’il s’agisse ici d’un aspect qui arrive ultimement dans ce chapitre de présentation des résultats, son importance n’en demeure pas moindre. Aux dires des participants consultés, une évaluation de qualité exige des moyens financiers. Lorsque ces moyens ne sont pas au rendez-vous, la rigueur et la crédibilité de l’exercice évaluatif peuvent être amputées et compromises, les ressources financières ne permettant pas d’engager ou de mobiliser les ressources humaines qui consacreraient le temps et l’énergie nécessaires au bon déploiement de l’évaluation.

Les difficultés de l’évaluation, c’est de trouver un compromis entre le fait d’avoir des résultats qui sont intéressants sur la table et, en même temps, tes ressources qui sont limitées. C’est un peu toujours ça le dilemme de l’évaluation, c’est que tu dois avoir une meilleure utilisation possible de tes ressources qui sont limitées.

C’est sûr que quand des bailleurs de fonds vont demander de l’évaluation, s’ils ne mettent pas de ressources là-dedans, là, ça va embêter les gens. Mais quand le bailleur de fonds dit « OK, on vous demande ça et on va vous donner des sous pour vous aider à le faire », là, c’est plus facile.

Ça doit être une évaluation qui est faite avec les ressources

nécessaires pour que ça soit crédible. Si on essaye de couper les coins ronds, cela peut devenir problématique. Mais si on peut faire

l’évaluation, si on a le désir, il faut qu’on ait les ressources

nécessaires, soit les ressources humaines et budgétaires pour que ça soit quelque chose qui accompagne les actions au quotidien.

Ayant à jongler avec des ressources humaines et financières limitées, particulièrement dans les milieux communautaires sujets à différentes coupures budgétaires, les participants mentionnent que leur travail au quotidien est affecté à

plusieurs niveaux par les enjeux qu’occasionnent leur mobilisation et leur disponibilité. Un dossier moins prioritaire et moins concret, comme celui de l’évaluation, peut en être affecté. Une démarche évaluative requiert l’accomplissement de tâches spécifiques supplémentaires pour les parties prenantes; alors que plusieurs d’entre elles peinent à passer au travers leur pile de dossiers dans leurs fonctions régulières, la situation nécessiterait l’embauche d’une ressource additionnelle, spécialement dédiée à l’évaluation.

Parce que c’est le problème qu’on a souvent dans le communautaire, souvent ce n’est pas notre formation de base, mais qu’en plus on n’a pas le temps de le faire.

L’autre notion, c’est la notion de temps à consacrer à l‘évaluation, je pense. Dans les milieux communautaires comme le nôtre, il y a eu énormément de coupures d’un peu partout dans les dernières années. Donc les tâches se sont alourdies et l’évaluation demeure quand même super intéressante. Je parle dans notre cas à nous, on veut toujours en faire, mais les ressources pour pouvoir consacrer du temps à cette évaluation-là s’amenuisent aussi.

[Les bailleurs de fonds] financent pour qu’on se forme en évaluation, mais ça reste que je n’ai pas plus de temps pour le faire. J’ai beau mieux connaitre et me sentir plus à l’aise […], mais ça reste que je n’ai pas plus de temps pour le faire et il est là le problème.

L’équipe était tellement occupée! On n’a pas juste ça à faire aussi. C’est un des défis de l’évaluation. L’opération, le quotidien se poursuivent…

Je me souviens, au début de ma carrière, je disais, « c’est du temps perdu ». Je préférais être sur le terrain avec les personnes, trouver des nouveaux projets […].

Nous on n’avait pas prévu d’heures pour participer à des processus d’évaluation. On n’est pas payé dans le projet pour le faire ça. Donc là, il faut le faire parce que c’est une exigence. Donc c’est un irritant, on a déjà peu de marge de manœuvre financièrement.

Plusieurs participants ont avoué que s’il n’en avait pas été d’exigences de bailleurs de fonds, le budget destiné à l’évaluation aurait été consacré à autre chose, dont aux services à la clientèle. Ainsi, malgré qu’elles reconnaissent le bien-fondé de l’évaluation, elles auraient procédé à un exercice évaluatif différent, plus simple et moins onéreux. Ces contraintes au niveau de la disponibilité des ressources peuvent expliquer pourquoi les participants jugent fortement utile de renforcer leurs capacités en matière d’évaluation, n’ayant pas à dégager une enveloppe budgétaire pour contracter un évaluateur.

Je ne me lancerais pas dans [une grosse évaluation]. J’irais avec quelque chose de plus superficiel. En fait, j’aurais l’idée d’évaluer mes programmes pareil et mes activités pareil, mais je le ferais vraiment de façon moins complexe. Parce que je trouve ça intéressant de savoir quel impact on a et quels objectifs on atteint. Parce qu’on ne travaille pas juste pour travailler, on travaille pour quelque chose quand même. […] Mais j’y passerais un peu moins de temps quand même […].

Il ne semble pas exister de recette miracle ou de solution magique pour voir aux défis liés à la mobilisation et à la disponibilité des ressources humaines et financières et la situation sous-jacente à cette question échappe bien souvent au contrôle de l’évaluateur. Néanmoins, les participants interrogés évoquent l’importance de prévoir un budget évaluatif au moment de la conception d’un projet, l’identification ciblée de parties prenantes assignées aux tâches évaluatives ainsi que la contribution financière des bailleurs de fonds.

En résumé, la disponibilité des ressources s’avère un enjeu central pour les participants. Les ressources injectées à une démarche d’évaluation influent sur la qualité et la crédibilité de cette dernière. Les milieux devant faire face à des limites importantes au niveau des ressources humaines et financières doivent chercher un

équilibre à atteindre entre les ressources à leur disposition et leurs besoins en matière d’évaluation.