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Films support´ es stationnaires : mod` ele de Landau-Levich-Derjaguin 34

2.2 Mod` eles historiques

2.2.2 Films support´ es stationnaires : mod` ele de Landau-Levich-Derjaguin 34

Landau-Levich-Derjaguin

Le mod`ele de Landau, Levich et Derjaguin [54, 34] d´ecrit le film stationnaire d´epos´e sur une plaque verticale infinie tir´ee `a vitesse constante U hors d’un bain de liquide pur (tension de surface γ, viscosit´e η). L’argumentation repose sur la d´ecomposition du film en trois zones distinctes, repr´esent´ees sur la figure 2.2 :

• le film plat, dont l’´epaisseur h0 – constante et uniforme – constitue l’inconnue

recherch´ee dans le probl`eme,

• le m´enisque statique, correspondant `a la portion de m´enisque inchang´ee par

rap-port `a la situation o`u la plaque est immobile (figure 2.2),

• la r´egion de transition entre les deux zones pr´ec´edentes, de longueur  a priori

C’est dans cette derni`ere r´egion que les ´equations de l’hydrodynamique pr´esent´ees dans la section pr´ec´edente vont ˆetre r´esolues, dans le cadre d’une description cisaill´ee. ´

Equations dans le m´enisque dynamique

Dans le m´enisque dynamique, les ´echelles de longueur typiques selon les directions x et y sont respectivement donn´ees par ` et h0. On suppose alors que la condition de l’approximation de lubrification ε = h0/`  1 est satisfaite, ce qui devra ˆetre v´erifi´e a posteriori puisque ni h0, ni ` ne sont connus `a ce stade.

En consid´erant des vitesses de tirage suffisamment faibles pour que l’inertie et la gravit´e soient n´egligeables, l’´ecoulement dans le film peut ˆetre d´ecrit par les ´equations de Stokes (2.18), o`u la pression est simplement pilot´ee par la capillarit´e, soit P = Patm−γ ∂xxh. Le profil de vitesse u(x, y), parabolique selon y, s’obtient alors par int´egration de l’´equation (2.18a) en tenant compte du non glissement `a la paroi solide, u(y = 0) = U , et de la condition de contrainte nulle (2.22) `a l’interface liquide/air et s’´ecrit

u(x, y) = −γ ηxxxh  y2 2 − hy  + U. (2.23)

On peut montrer que ce profil pr´esente un point de stagnation – i.e. une position y pour x fix´e telle que u(x, y) = 0 – d`es que le film a une ´epaisseur h(x) > 3h0. Ce point apparaˆıt `a la surface pour h(x) = 3h0, avant de se d´eplacer `a l’int´erieur du film pour h(x) > 3h0, comme repr´esent´e qualitativement sur la figure 2.2 (point violet).

La conservation du d´ebit h¯u = U h0 dans le film m`ene `a l’´equation suivante pour l’´epaisseur adimensionn´ee Y ≡ h/h0 :

Y000 = 3 1 − Y

Y3 , (2.24)

o`u le prime symbolise la d´eriv´ee par rapport `a la coordonn´ee verticale adimensionn´ee X ≡ x/`. Pour obtenir l’´equation (2.24), le choix naturel qui s’est impos´e pour l’´echelle de longueur du m´enisque dynamique est

` = h0Ca−1/3, avec Ca ≡ η U

γ (2.25)

le nombre capillaire. Ce nombre sans dimension compare l’effet de l’entraˆınement vis-queux sur la plaque, qui aide `a la formation du film, `a la tension de surface, qui s’oppose `

a la d´eformation de l’interface.

L’´equation diff´erentielle du troisi`eme ordre (2.24), assortie des conditions aux limites Y → 1, Y0 → 0 et Y00 → 0 de raccord au film plat lorsque X → +∞, est r´esolue num´eriquement.

Raccord asymptotique des courbures

Reste `a d´eterminer l’´epaisseur h0 du film plat, qui a ´et´e utilis´ee pour adimensionner les ´equations. La m´ethode, d´esormais classique, propos´ee par Landau et Levich consiste `

a raccorder la courbure en bas du m´enisque dynamique `a celle en haut du m´enisque statique (donn´ee par l’´equation (1.9)), ce qui s’´ecrit

xxh = √

2

L’adimensionnement de cette condition de raccord permet finalement d’obtenir l’´ epais-seur h0 du film plat entraˆın´e, qui varie en fonction du nombre capillaire selon la relation connue sous le nom de loi de Landau-Levich

hLLDY

00(−∞) √

2 `cCa

2/3≡ kLLD`cCa2/3, (2.27) o`u la valeur du pr´efacteur kLLD≈ 0.9458 est calcul´ee `a partir de la courbure asympto-tique Y00(−∞) donn´ee par la solution num´erique de l’´equation (2.24) [84].

Notons que si le liquide enduit sur la plaque n’est pas pur mais contient des tensioac-tifs, il peut ˆetre plus appropri´e de consid´erer la limite d’une interface liquide/air rigide, auquel cas la condition aux limites `a l’interface liquide/air est remplac´ee par

u = U en y = h. (2.28)

On peut alors montrer que le pr´efacteur de l’´equation (2.27) se trouve modifi´e en 42/3kLLD≈ 2.383 [77].

Domaine de validit´e des hypoth`eses

Ce dernier paragraphe discute le domaine d’application – en terme de nombre ca-pillaire – des principales hypoth`eses faites dans le mod`ele de Landau et Levich, `a savoir l’approximation de lubrification dans le m´enisque dynamique, le caract`ere n´egligeable de la gravit´e ainsi que celui de l’inertie.

• Approximation de lubrification – Il d´ecoule imm´ediatement de l’´equation (2.25) que le rapport d’aspect s’exprime comme ε = Ca1/3, si bien que l’approxima-tion de lubrifical’approxima-tion est a priori justifi´ee dans le m´enisque dynamique pour des nombres capillaires Ca < 10−3.

• Rˆole de la gravit´e – On peut montrer que le gradient de pression dˆu `a la gravit´e, ρg, demeure petit devant le gradient de pression capillaire −γ∂xxxh tant que Ca1/3 1, soit pour des nombres capillaires tels que Ca < 10−3. Au-del`a s’´etend un r´egime, ´etudi´e par Derjaguin [34], o`u les effets de la courbure du m´enisque deviennent n´egligeables devant la gravit´e, ce qui modifie l’exposant de la loi (2.27) en 1/2.

• Rˆole de l’inertie – Lorsque la vitesse de tirage U devient suffisamment grande, l’inertie du liquide rentre elle aussi en jeu, ce qui donne naissance `a des r´egimes complexes [84]. Le nombre de Reynolds, qui compare les effets inertiels aux effets visqueux, peut s’´ecrire en fonction du nombre capillaire comme Re ∝ Ca5/3, o`u la constante de proportionnalit´e n’est fonction que des propri´et´es du liquide et vaut, par exemple, 2 × 105 pour l’eau. Au vu des ´equations (2.16), l’inertie reste n´egligeable devant les forces visqueuses tant que ε2Re  1, ce qui correspond pour l’eau `a des nombres capillaires Ca < 5 × 10−3.

En r´esum´e, on s’attend `a ce que la loi (2.27) soit valide pour des nombres capillaires Ca < 10−3, ce qui est bien v´erifi´e pour des liquides purs comme les huiles [69, 99]. Pour des solutions aqueuses de tensioactifs, en revanche, des ´ecarts significatifs `a la loi en Ca2/3 ont ´et´e observ´es `a nombres capillaires Ca < 10−3, comme nous le verrons plus en d´etails au chapitre suivant.

2.2.3 Films libres stationnaires : mod`ele de Frankel

Quelques ann´ees apr`es Landau, Levich et Derjaguin, Frankel, Mysels et Shinoda [72] ont d´ecrit par un mod`ele tr`es semblable la demi-´epaisseur h0d’un film libre stationnaire

g

h(x) u(x,y) h0 U x y U 0 Film plat Ménisque dynamique Ménisque statique

l

U

Figure 2.3 – Sch´ema d’un demi-film libre g´en´er´e `a vitesse constante U par traction d’un cadre vertical hors d’un bain de liquide savonneux. Le d´ecoupage du film en trois zones (sch´ema de gauche) est analogue `a celui r´ealis´e dans le cadre du mod`ele de Landau, Levich et Derjaguin. Le profil de vitesse dans le m´enisque dynamique (en rouge sur le sch´ema de droite) est toujours parabolique, mais satisfait cette fois une condition de sym´etrie `a l’axe y = 0 (en trait mixte) et une condition de non-glissement `

a l’interface liquide/air. Il poss`ede ´eventuellement un point de stagnation (point violet).

g´en´er´e par traction d’un cadre vertical hors d’un bain liquide (figure 2.3). Un film libre de liquide pur ´etant intrins`equement non-stationnaire, le cas consid´er´e ici est celui d’un film stabilis´e par des tensioactifs et dont les interfaces liquide/air sont le si`ege de contraintes tangentielles non-nulles. L’hypoth`ese est alors faite que ces contraintes sont suffisamment grandes pour que l’on puisse supposer les interfaces liquide/air rigides. Comme pour les films support´es, les ´equations de Stokes m`enent `a un profil parabolique pour la vitesse verticale

u(x, y) = − γ

xxxh y

2− h2 + U, (2.29) avec cette fois la condition de sym´etrie ∂yu = 0 en y = 0 et la condition d’interfaces liquide/air rigides (2.28). On peut montrer que ce profil poss`ede le mˆeme point de stagnation que celui du mod`ele de Landau, Levich et Derjaguin.

La conservation du d´ebit dans le film conduit alors rigoureusement `a la mˆeme ´equation (2.24) que dans le mod`ele de Landau, Levich et Derjaguin pour l’´epaisseur adimension-n´ee Y ≡ h/h0. C’est tout `a fait normal car les conditions aux limites sont les mˆemes dans les deux cas ; on les a seulement interverties entre y = 0 et y = h, comme on peut le voir en comparant les figures 2.2 et 2.3. La seule diff´erence r´eside dans le fait que seule la moiti´e du film libre a ´et´e consid´er´ee ici, si bien que la loi r´egissant l’´epaisseur r´eelle du film 2h0 poss`ede un pr´efacteur kFr = 2kLLD, soit

2hFr ≡ kFr`cCa2/3 ≈ 1.892 `cCa2/3. (2.30) On peut remarquer que kFr < 42/3kLLD : l’´epaisseur d’un film libre avec deux inter-faces liquide/air rigides est plus petite que celle d’un film support´e dont l’interface liquide/air est ´egalement rigide. Ceci est dˆu au fait que la succion capillaire, qui r´esiste `

contre un seul pour un film s’appuyant sur une plaque.

Le domaine d’application de l’´equation (2.30), connue sous le nom de loi de Frankel, est le mˆeme que celui de la loi de Landau et Levich, `a savoir Ca . 10−3. Si cette loi est souvent v´erifi´ee qualitativement dans les exp´eriences, des d´eviations nombreuses et vari´ees sont observ´ees [107], comme nous le discuterons au chapitre suivant.