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favorise l’absentéisme. Cela veut dire que les enfants ne sont

Dans le document les défis du droit à l’éducation (Page 87-90)

absolument pas scolarisés dans le collège de secteur, alors qu’une attestation sur l’honneur indiquant qu’on habite dans un lieu-dit

bakalycée ”, “ Paul Jean Louis ”, sans eau ni électricité, ça devrait suffire.

On fait tout pour compliquer la vie des gens et favoriser toute cette activité informelle. Ce qui devrait nous importer c’est que l’enfant soit scolarisé tout près dans le collège de secteur pour qu’il ne soit pas absent. ”

Extrait d’entretien — responsable du CIO, janvier 2020.

Croisant entretiens et observations, nous avons pris conscience que la production d’attestation d’héberge-ment détournait totaled’héberge-ment l’idée d’être scolarisé dans l’établissement de secteur. En l’absence de transports scolaires, les enfants et les adolescents marchent, parcourent une grande partie de la ville ou même font du stop pour se rendre dans leurs établissements res-pectifs, augmentant ainsi le risque d’absentéisme et de décrochage scolaire.

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Exemples de lieux de scolarisation hors secteur

Sur cette carte est représentée en jaune le secteur de l’établissement matérialisé par une étoile. Les enfants vivant dans ce secteur devraient donc intégrer cet établissement. Or, en rouge on peut voir les établissements fréquentés par les enfants du secteur jaune.

Source : Capture écran d’une image satellite, réalisée par Google Earth, le 3/12/20.

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Lieux de vie des enfants

Représentation des lieux de vie réels des enfants scolarisés dans l’établissement présenté en rouge.

Dans le cadre d’activités réalisées dans une classe de CM1 (école matérialisée en rouge sur la carte), les transports scolaires utilisés par les enfants ont été étudiés : d’après un sondage, 17 des 24 élèves viennent à pied : deux tiers

déclarent marcher au moins 20 minutes.

3 arrivent en bus, 2 en taxi privé, 2 autres ont recourt par intermittence au taxi et à la marche et un seul enfant vient avec sa mère en scooter.

Source : Capture écran d’une image satellite, réalisée par Google Earth, le 3/12/20

Gardons à l’esprit que les familles de Saint-Laurent-du-Maroni sont des familles nombreuses. En 2017 lors du recensement, 30,4 % 319 des familles (soit un tiers) répondent avoir quatre enfants ou plus, âgés de moins de 25 ans, alors que la moyenne nationale se main-tient à 2,3 % 320. Ainsi, l’enjeu de la distance vis-à-vis de l’établissement s’accentue avec le nombre d’en-fants à scolariser au sein d’une même famille. Il n’est pas rare que des fratries soient scolarisées dans des établissements différents, faute de place.

Pour pallier la difficulté de la fausse attestation d’hé-bergement, la HALDE321 avait demandé, en 2009, à ce que le lieu de vie des enfants prime sur l’attestation d’hébergement ; c’est finalement par l’intermédiaire d’un décret national du 29 juin 2020, que cette préco-nisation s’impose, puisqu’il est indiqué dans l’article 1,

« il peut être justifié du domicile par tous moyens, y compris une attestation sur l’honneur. Le maire peut faire procéder à la vérification de la domiciliation sur le territoire de la commune. Cette vérification ne peut faire obstacle à l’inscription de l’enfant sur la liste scolaire ».

Les observations de terrain ne permettent pas d’affir-mer que ce décret est appliqué par les services des affaires scolaires de la municipalité de Saint-Laurent-du-Maroni ni même par le CASNAV du rectorat. Si nous avons cependant constaté auprès de familles rencontrées qu’il semble possible d’attester sur l’honneur de son lieu de vie, pour ce faire, les ser-vices municipaux des affaires scolaires orientent les familles vers la police municipale pour que cette der-nière se déplace au domicile indiqué et atteste de la véracité du lieu de vie des familles. Un échange infor-mel en septembre 2020 avec un agent de la police municipale a confirmé cette pratique, la justifiant par la forte présence d’habitats informels. Cette pratique a été mise en place bien avant la sortie du décret et

319 Insee, Saint-Laurent-du-Maroni, op. cit.

320 Insee, France, op. cit.

321 Par une délibération (n°2009-318) en date 14 septembre 2009, la Halde a répondu à la réclamation sur les mesures discriminatoires relatives l’accès à l’éducation en Guyane déposée le 25 septembre 2008 par le Collectif pour la scolarisation de tous les enfants en Guyane, le collectif Migrants Outre-Mer (Mom) et la LDH de Cayenne. Obstacles à l’accès à l’éducation en Guyane… (2010)., MOM., op. cit.

ne semble donc pas y être corrélée. Bien que cette pratique puisse de prime abord favoriser le respect d’une scolarisation au plus près en prenant en compte le lieu de vie des enfants, nos observations de terrain ont démontré le contraire. Des familles rencontrées ont fait état de la longueur des délais d’attente avant que la police ne se déplace, quand elle se déplace, ou de la perte récurrente des dossiers. La conversation avec l’officier de police précité a mis en avant le carac-tère fastidieux et la surcharge de travail. Toutefois il n’a pas été possible d’avancer sur le sujet, sans l’accord préalable de la Maire. D’autre part se pose la ques-tion de la vérificaques-tion par la police municipale de lieu de vie informel notamment pour des populations en situation illégale. Si lors d’échanges avec des familles en attente de scolarisation le rapport à la police ne semblait pas être un problème, nous sommes en droit de nous interroger sur les formes de pression et de crainte d’expulsion que peuvent encourir des familles en situation irrégulière. Au lieu d’apparaître comme une mesure d’accès aux droits et principalement du droit à l’école, le contrôle par la police municipale des adresses déclarées dans les dossiers scolaires, s’apparente à une forme d’exclusion de l’école, tant par l’allongement des temps d’inscription que par les craintes supposées d’expulsion.

Exemple 1—

Une mère, d’origine haïtienne,

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