• Aucun résultat trouvé

1.2 Analyse de la contrainte et de la déformation par le maclage

1.2.2 Les facteurs qui influent sur le maclage et son seuil

1.2.2.1 Rôle de la contrainte différentielle

Les données expérimentales montrent que pour une taille de grain, une température et

une pression de confinement données, la contrainte différentielle (1-3) est l‘un des facteurs

qui influence le plus le nombre de macles par millimètre dans un cristal (twin density), le

pourcentage de la fraction maclée du cristal (twin volume fraction) et le pourcentage de

cristaux maclés dans un agrégat (twinning incidence). Il faut noter que la formation d'une

macle mécanique est un processus discontinu à toutes les échelles. L'initiation d'un

micro-élément maclé demande des contraintes plus élevées que le développement et la propagation

ultérieurs de la macle, à partir de ce micro-élément. Il est aussi important de souligner que la

.

contrainte différentielle seuil correspond à la contrainte nécessaire à la propagation de la

macle, quand celle-ci est déjà initiée. En effet, les macles mécaniques s'initient probablement

en des zones de concentration de contraintes, telles que les discontinuités mécaniques (joints

de grain, points triples, etc) nombreuses dans les cristaux et agrégats naturels.

1.2.2.2 Rôle de la température

La température a un rôle important sur l'allure des macles et non sur leur

développement, car ce n'est pas un mécanisme thermo-activé.

Par contre, la densité de maclage en dépend car au cours de la déformation, il est plus

facile de créer de nouvelles macles que d‘épaissir les macles existantes à température

inférieure à 170-200°C. La déformation par cisaillement simple est alors absorbée par de

nombreuses macles très fines, donc la densité de maclage augmente suivant la flèche bleue

(figure 10). Inversement, à température supérieure à 200°C, il est plus facile d‘épaissir les

macles que d‘en créer de nouvelles : on obtient des macles qui sont moins nombreuses mais

très épaisses. La déformation se fait donc suivant la flèche orange (figure 10), à température

supérieure à 200°C, et se fait suivant la flèche bleue à température inférieure à 170°C. La

largeur des macles et la densité de maclage sont alors utilisables comme des indicateurs de la

température associée à la déformation naturelle des calcaires (Ferrill, 1998 ; Ferrill et al.,

2004), bien qu‘une étude récente vienne nuancer ces résultats (Janssen et al., 2007).

Figure 10: Graphique de l'intensité moyenne de macles versus l'épaisseur moyenne des plans de

macle. Les couleurs sont en relation avec le degré de déformation. Les flèches orange et bleue illustrent respectivement le sens d'augmentation de la déformation pour 200° et 170°. D‘après Ferrill et

L'épaisseur moyenne des macles de la calcite est directement corrélée à la température

de déformation, de sorte que les macles fines sont dominantes à une température inférieure à

170°C et à ce que les macles épaisses dominent pour les températures supérieures à 200°C.

Au-delà de 250°C, la recristallisation dynamique devient un important mécanisme. La densité

de maclage (nombre de plans de macles/mm) se corrèle inversement à la température, et la

combinaison de données d'intensité de maclage avec l'épaisseur des macles peut donner des

informations tant sur l'intensité que sur la température de la déformation. Cette relation fournit

un géothermomètre (BT) de déformations pour les roches qui présentent peu ou pas de

données de paléotempérature.

1.2.2.3 Rôle de la vitesse de déformation

La "twinning incidence", la "twin volume fraction" et le nombre de macles par mm

("twin density") sont à peu près indépendants à la vitesse de déformation (Friedman et Heard,

1974; Tullis, 1980 ; Rowe et Rutter, 1990).

.

Figure 11: Graphiques des caractéristiques du maclage, à partir d'échantillons des Alpes et

Appalaches. Les codes de couleur sont en fonction de la température de déformation déduite du maximum d'enfouissement ou des indicateurs métamorphiques. (a) Épaisseur moyenne des macles versus déformation par maclage, (b) densité de maclage versus déformation par maclage, (c) densité de maclage versus épaisseur moyenne des macles, (d) produit de l'épaisseur moyenne des macles et de

densité de maclage (rapport cristaux maclés par cristaux non maclés) versus la déformation par maclage. Points incluant des données du tableau 1 de Ferrill (1991), Spraggins et Dunne (2002; données brutes), et Smart et al. (1997; données brutes). Des données microthermométriques non publiées d'inclusions fluides de M.A. Evans ont été utilisées pour contraindre les 65°C, la température des échantillons de Smart et al. (1997) et la température de 235°C définie à partir des données d'Evans et Dunne (1991). Les lignes rouges et bleues séparent les domaines de données caractérisées par la

Figure 12: (a) Illustration schématique de l'influence de la température sur la déformation par maclage de la calcite (d'après Burkhard, 1993). Exemples de photos des différents types de macles (lumière polarisée). (b) Macles de type I de la Chaîne Subalpine du nord, France (Ferrill, 1991). La largeur de la photo est de 0.68 mm. (c) Macles de type II du Nord de Mountain thrust sheet dans la Great Valley,

Central Appalachian Valley et Ridge Province (Evans et Dunne, 1991). À noter que les macles fines sont localement développées avec les macles épaisses. La largeur de la photo est de 0.22 mm. (d) Macles de type III des Ardon thrust slice des Diablerets nappe dans les Alpes Helvétiques (Burkhard,

1990). La largeur de la photo est de 0.14 mm. (e) Macles de type IV des Doldenhorn nappe (échantillons 199.3) dans les Alpes Helvétiques (Burkhard, 1990). La largeur de la photo est de 0.14

mm. Les photos (d) et (e) sont prises à partir de lames ultra-fines (épaisseur approximative de 5 microns ou moins).

1.2.2.4 Rôle la pression isotrope et de la pression de fluide

Turner et al. (1954) ont montré que la contrainte normale sur un plan de macle donné

augmente la contrainte cisaillante critique nécessaire au maclage de moins de 1% de la valeur

de cette contrainte normale. Friedman et Heard (1974) confirment que les macles

n‘apparaissent pas si l‘échantillon est soumis uniquement à une pression isotrope.

.

1.2.2.5 Rôle de la taille des grains

La limite des cristaux est un frein au développement des macles qui se propagent dans

le cristal comme une fracture en mode de cisaillement. Au cours de plusieurs études

expérimentales, Schmid et Paterson (1977), Casey et al. (1978), Spiers (1982) et Spiers et

Rutter (1984) ont montré qu'il est plus facile de macler les cristaux de grande taille que ceux

de petite taille. Ainsi, plus les cristaux de calcite sont gros, plus il est facile de développer des

macles. Pour une même contrainte différentielle, plus la taille des grains est importante, plus

le pourcentage de macles est grand (figure 13). Ce constat est dû au rapport entre le bord des

grains et le volume des grains, paramètre qui influe sur le maclage. Lorsque la taille des

grains augmente, le seuil du maclage diminue. Il faut donc prendre en compte l‘influence de

la taille du grain lors de l'application des méthodes inverses, qui présupposent une valeur

constante du seuil de maclage.

1.2.2.6 Rôle de la déformation interne

Plusieurs études expérimentales ont montré qu'il est plus facile de macler des cristaux

non déformés que de reprendre des cristaux déjà maclés (phénomène de "strain hardening").

Ainsi, plus les cristaux sont déformés, plus il est difficile d‘y développer de nouvelles macles.

On notera qu‘à plus haute température ou lorsqu‘une roche subit trop de déformation que le

maclage seul ne peut absorber, d‘autres mécanismes prennent le relai (glissement sur les plans

de clivage), entraînant parfois une allure courbe de certaines macles.

En admettant que des grains de calcite de différentes tailles ont enregistré la même

contrainte différentielle pour une phase tectonique donnée et au vu de l‘influence de la taille

des grains sur le seuil de maclage, la valeur que l‘on devrait choisir pour ce dernier doit

dépendre de la taille des grains ; Rocher et al. (2004) ont d‘ailleurs pris en compte la variation

de la taille des grains de la calcite dans la désignation du seuil de maclage. En effet sur les

échantillons traités au cours de cette thèse, on a noté que plus la taille des grains est petite,

plus le taux de déformation est faible et ce pour le même échantillon et pour la même phase

tectonique. En se basant sur nos remarques et nos mesures, on a essayé dans la figure 13 de

représenter l‘évolution de la valeur du seuil de maclage par rapport à la taille du grain et aussi

par rapport au taux de déformation. Ces courbes ont été obtenues en se basant sur les données

de macles (Lacombe et al., 2007; Lacombe et al., 2009; Amrouch et al., 2010a). On propose

de détailler l‘exemple de l‘échantillon SMA7 qui présente des cristaux de tailles très

différentes (Figure 13). Après l‘analyse des macles de la calcite pour cet échantillon, on a

décidé de retraiter les cristaux mesurés mais cette fois en les séparant en deux catégories. La

première catégorie présente des grains de calcite dont la taille est supérieure à 300 µm et la

deuxième catégorie regroupe les cristaux dont la taille est inférieure à 300 µm. On a choisi la

taille de 300 µm car c‘est elle qui permettait d‘avoir un nombre à peu près équivalent de

cristaux dans chacun des groupes.

NB : ce raisonnement devient plus compliquer à appliquer dans le cas des cristaux en

fibres vu la grande variation du diamètre du cristal dans l‘espace.

Figure 13: Évolution de la valeur du seuil de maclage en fonction de la taille des grains de calcite. Ces

résultats sont basés sur les différentes données de macles obtenues sur plusieurs échantillons venant du Fars (Lacombe et al., 2007), d‘Albanie (Lacombe et al., 2009), du Pli de Sheep Mountain (Amrouch et al., 2010a) et prend en compte aussi les résultats sur la relation seuil de maclage/taille des grains de

Rocher et al. (2004).

Le tableau 1 résume les résultats obtenus par ce traitement. Pour ces deux groupes, on

note une similitude dans les directions des axes principaux des contraintes et souvent pour le

rapport , mais la valeur du seuil interne ‘

a

(voir p 65-66) est plus faible pour les cristaux de

petite taille, ce qui signifie que pour que ces derniers maclent, ils devraient subir une

contrainte plus élevée. Vu que les deux groupes ont enregistré le même état de contrainte, cela

signifie que le seuil de maclage est plus important pour les petits cristaux. On a aussi noté que

le deuxième tenseur n‘a été enregistré que par les cristaux de grande taille ; les contraintes qui

en sont responsables n‘étaient certainement pas assez fortes pour atteindre le seuil de maclage

.

des petits cristaux. Si cet état de contrainte est tardif il faut prendre aussi en compte l‘effet du

durcissement des cristaux par le premier événement de maclage, ce qui augmente encore la

valeur de son seuil.

Sur la figure 13, il faut envisager que pour des tailles de cristaux importante (>

700-800 microns) ou faible (<50-100 microns), les courbes ne sont quasiment pas « contraintes » ;

il est possible par ailleurs que pour ces tailles « extrêmes », seule la quantité de déformation

interne pourrait jouer. Ce problème qui concerne les cristaux de petite taille (inférieure à 50

µm) et de grande taille (supérieure à 700 µm) concerne surtout la quantification des grandeurs

des contraintes mais n‘affecte en rien l‘étude de leur orientation.

Dans tous les cas au cours des travaux que j‘ai menés ou auxquels j‘ai collaboré (Iran,

Wyoming, Albanie), le choix de la valeur du seuil retenu a été guidé à la fois par la quantité

de déformation interne par maclage et par la taille des grains, et dans les traitements des

sous-lots de données ont été séparés en fonction de la taille des grains et ont donné lieu à des

traitements séparés.

Tableau comparatif des résultats de traitement des macles de la calcite de cristaux de différentes tailles. GR : cristaux dont la taille est supérieure à 300 µm ; PTT : cristaux dont la

taille est inférieure à 300 µm. a : seuil de maclage,  = (1-3)/(1-2) ; a ‗ : seuil interne de

Figure 14: Photo d‘une veine de calcite de l‘échantillon SMA7 illustrant la différence de taille des cristaux mesurés dans un même échantillon : en bleu des gros cristaux de calcite maclée et en rouge

des petits cristaux de calcite maclée.

Illustration des différents degrés de déformation obtenus dans les échantillons de Sheep Mountain.

Le tableau 2 et la figure 15 montrent des exemples de grains de calcite maclée avec

différent pourcentage de déformation (lié directement à la densité de maclage). Les valeurs de

ces pourcentages de déformation ont été calculées en prenant en compte l‘épaisseur moyenne

des macles, le nombre de ces derniers, l‘épaisseur des macles par rapport au diamètre du

grain. Il faut noter que ce taux représente une moyenne pour chaque échantillon, car il faut

.

faire ce calcul pour chacune des familles de macles quand le grain de calcite en présente plus

d‘une, et le refaire ensuite pour l‘ensemble des grains mesurés.

Figure 15: Exemples de cristaux de calcites maclées avec une densité de maclage qui diminu de

gauche à droite ; on note une différence de densité pour l‘échantillon (1) entre la veine (faible densité) et la matrice (forte densité de maclage), on peut déduire de cet exemple que le maclage enregistré dans

Figure 16: A : valeurs et évolution comparées des seuils de maclage et d‘activation des systèmes de glissement avec la température (d‘après De Bresser et Spiers, 1997 et Lacombe, 2001).

Avant de commencer l‘aquisition des mesures, on scanne la lame ce qui permet de

localiser et numéroter chacun des cristaux mesurés (figure 17). Ceci rend possible le

traitement des grains par catégorie de taille (quand le nombre de cristaux par catégorie le

permet) et aussi de faire les allées-retours entre les fichiers de traitement et la lame afin de

relocaliser les cristaux en cas de besoin d‘une quelconque vérification.

.

Figure 17: Photo des veines N-S et S-W de l‘échantillon P37, les cristaux de calcite mesurés sont

numérotés.

1.3 Méthodes de quantification des paléocontraintes et