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4.1 Etude bibliographique

4.1.2 Facteurs influençant la dégradation thermique

Nature chimique du polymère

La stabilité thermique d’un polymère dépend essentiellement des na- tures chimiques de ses constituants. La présence de liaisons saturées, de nœuds de réticulation stables et une forte aromaticité du réseau polymère favorisent sa résistance au vieillissement thermique [Dyakonov et al., 1996] [Patterson-Jones et Smith, 1968]. Pour un même polymère d’une même composition chimique, celui qui est réticulé au taux de conversion le plus élevé sera également plus stable thermiquement [Dyakonov et al., 1996]. En revanche, en comparant plusieurs polymères, celui qui possède la plus haute température de transition vitreuse ne se révèle pas toujours être le plus stable thermiquement [Dyakonov et al., 1996]. En effet un réseau fortement réticulé avec composé de liaisons peu résistantes à l’oxydation aura une durée de vie moindre que celui qui est moins réticulé et composé de liaisons saturées et des nœuds de réticulations stables.

Dans les travaux d’Ernault qui étudie trois systèmes époxy/amine, il a été démontré que la nature chimique du polymère va modifier la réactivité des sites oxydables et que l’architecture du réseau, plus particulièrement son encombrement stérique et le nombre de sites oxydables dans le réseau, a aussi une influence sur la cinétique de dégradation [Ernault, 2016].

Les études de Patterson-Jones et Lee sur plusieurs systèmes époxydes mettent en évidence une meilleure stabilité thermique des époxydes novolaques comparé aux systèmes DGEBA/amine [Patterson-Jones et Smith, 1968] ou aux résines époxydes dérivées des bisphénol A [Lee, 1965]. Cette meilleure stabilité thermique, établie par le biais d’essais thermogravimétriques, serait expliquée par une meilleure stabilité des liaisons méthylènes envers les liaisons isopropylidènes (Figure 4.1.6) pour des raisons de plus faible encombrement stérique et de l’hyperconjugaison possible des atomes hydrogène aliphatiques. Van de Voorde a montré qu’une résine époxyde présente une bonne résistance à l’oxydation et à l’hydrolyse à condition qu’elle ait un équivalent époxy inférieur à 200g/ep couplé à un fort taux d’aromaticité [Van de Voorde, 1970]. Plus l’équivalent époxy est faible, plus la chaine élémentaire est riche en terminaisons réactives. Si en plus, cette chaine est riche en cycles aromatiques, le réseau fortement réticulé obtenu sera thermostable.

La présence des liaisons méthylènes dans les résines phénoliques triazine contribueraient donc à améliorer leur stabilité thermique comparé aux autres polymères cyanates esters.

Figure 4.1.6 – Représentation des liaisons (a) isopropylidène et (b) méthylène

Richaud et Verdu ont fait une étude sur le vieillissement chimique par oxydation de différents polymères et ont fait un classement structure-stabilité thermique [Richaud et Verdu, 2011], sur la Figure 4.1.7. Il n’existe pas de critère indiscutable des stabilités. En présence d’oxygène, certains polymères peuvent être jugés stables car ils ont une forte imperméabilité à l’oxygène qui confine l’oxydation dans une couche superficielle assez mince pour que l’oxydation n’ait pas de conséquences importantes sur les propriétés méca- niques, la variation de masse ou toute autre caractéristique moyennée sur l’épaisseur. Dans ce classement, hormis les polymères sans hydrogène, ce sont les polymères aromatiques qui s’avèrent être les plus thermostables.

Figure 4.1.7 – Classement consensuel de la structure-stabilité proposé par Richaud et Verdu [Richaud et Verdu, 2011]

Atmosphère de vieillissement

Des études ont montré que la dégradation thermique sous atmosphère inerte est plus sévère qu’elle ne l’est sous air [Pogany, 1969]. Le processus des coupures de chaines thermo-activé n’est pas compensé par la sur-réticulation ou la recombinaison car elles ont besoin d’oxygène pour avoir lieu. De plus, Patterson constate qu’un vieillissement thermique sous air peut conduire à la formation de radicaux libres qui peuvent se recombiner et donc augmenter

4.1. Etude bibliographique 131 le degré de réticulation du réseau [Paterson-Jones, 1975]. Il faut cependant noter qu’à température élevée, quel que soit l’atmosphère, ce sont des phénomènes de thermolyse qui apparaissent en premier, accompagnés de la formation de composés plus stables thermiquement lors de réarrangements moléculaires [Buch, 2000]. Sous vide, les segments de chaînes créés par les réactions de thermolyse vont avoir tendance à migrer à la surface et à se volatiliser [Pogany, 1969] [Dyakonov et al., 1996]. Pour Marais, le phénomène de thermolyse est négligeable pour des températures inférieures à la Tg alors

que pour Dyakonov et Pogany d’importantes scissions de chaines ont lieu après vieillissement sous azote à des températures modérées [Pogany, 1969] [Dyakonov et al., 1996]. Des études sur une résine époxyde ont montré une diminution de la Tg après un vieillissement sous air et une augmentation

après vieillissement sous azote.

Géométrie

Plusieurs études ont soulevé l’importance de la surface exposée lors du vieillissement. En effet, il a été montré que la cinétique de dégradation des polymères est dépendante de la géométrie des éprouvettes. En général, la perte de masse relative est plus conséquente sur de petits échantillons [Bowles et Meyers, 1986] [Nelson, 1983] [Piccirelli et Shanahan, 2000] ou sur des échantillons de faible épaisseur [Colin et al., 2001b]. Un exemple sur l’effet de la géométrie a montré dans le cas du vieillissement sous air à 200˚C d’un adhésif composite époxy-imide/verre que les échantillons de dimension 14,5 x 7,5 x 3 mm3 présentent une perte de masse plus importante de 0,074%

après 6000h de vieillissement que ceux de dimension 14,5 x 14,5 x 3 mm3

qui présentent une perte de masse de 0,066% et encore plus importante par rapport à ceux de dimension 26,5 x 22,5 x 3 mm3 qui perdent seulement

0,057% [Piccirelli et Shanahan, 2000]. Pour l’effet de l’épaisseur, par exemple lors d’essais de vieillissement effectués sous air à 240˚C sur une résine poly(bismaléimide), après 48h de vieillissement l’échantillon d’épaisseur 50µm a perdu environ 12% de sa masse tandis que celui qui mesure 1,5mm d’épais n’a perdu que 1 à 2% de sa masse [Colin et al., 2001b].

Sur les matériaux épais (un à plusieurs mm), la diffusion de l’oxygène dans le matériau joue également un rôle important sur les mécanismes et la cinétique de dégradation. Ces mécanismes sont alors hétérogènes sur l’épaisseur du po- lymère [Audouin et al., 1994]. Par exemple sur la Figure 4.1.8 où la couche oxydée est observée en microscopie optique que un polymère époxy vieilli 200h à 200˚C sous air, deux zones distinctes apparaissent [Colin et al., 2001a] [Colin et al., 2005] :

• une première couche superficielle très rugueuse indiquée par le « critère 1 » qui correspond à la limite entre cette couche superficielle et les sous- couches oxydées ;

• une deuxième couche intermédiaire plus lisse que la couche superficielle et plus brillante que le cœur, délimitée par le « critère 2 » qui montre la limite entre l’ensemble de la couche oxydée et le cœur non oxydé.

Figure 4.1.8 – Observation en microscopie optique de

l’évolution de la couche oxydée dans l’épaisseur d’un polymère époxy vieilli 200h à 200˚C sous air [Colin et al., 2005]

4.1.3

Conséquences de la dégradation thermique sur les