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3.2 Essais thermogravimétriques sur les résines à l’état de réception

3.3.1 Compétition entre réticulation et dégradation thermique

Pour obtenir une température de transition vitreuse élevée, supérieure à 300˚C, il est recommandé de réticuler les résines phénoliques triazines en 2 étapes :

• une cuisson à des températures proches de celles mesurées sur le pic exothermique de la réaction observé en DSC,

• une post-cuisson à des températures supérieures à 200˚C pouvant aller jusqu’à 315˚C [Hay, 1994].

A de telles températures de mise en œuvre, il apparaît une compétition entre les phénomènes de réticulation et dégradation. Cette compétition a été démontrée par Pang et Gillham sur des résines thermodurcissables de type époxyde qui présentent une haute température de transition vitreuse (Tg)

d’environ 170˚C. En effet, afin d’atteindre un taux d’avancement maximal de la réaction de réticulation, il est nécessaire d’augmenter la température de cuisson car la cinétique de réaction devient lente à l’état vitreux. Un taux d’avancement maximal peut également ne pas être atteint car la réaction devient contrôlée par la diffusion et non plus par la chimie au-delà de l’état de gel ou vitreux [Pang et Gillham, 1990]. L’augmentation de la température de réticulation va permettre l’augmentation de la Tg à la fois en complétant

par le départ de molécules de faibles masses molaires. Si une dégradation thermique a lieu au cours du cycle de réticulation, la Tg du matériau sera

inférieure à la Tg optimale (Buch, 2000).

Les travaux de Georjon sur la résine Bisphénol A Dicyanate confirment que pour une température de cuisson de 250˚C et 275˚C sous air, la Tg chute de 50˚C lorsque le temps de cuisson dépasse un certain temps

[Georjon et al., 1993]. Il est donc difficile d’atteindre le taux d’avancement maximal de réticulation sans commencer à dégrader ces résines. Pour une cuisson sous argon à ces températures, la chute de Tg est moindre mais pas

négligeable.

3.3.2

Post-cuisson sous air

Les résines PT15 et PT30 sont utilisées pour fabriquer des pièces en matériau composite mises en œuvre par le procédé RTM. Dans ce procédé, les résines sont injectées dans une préforme fibreuse placée dans un moule fermé sous vide et mis sous pression jusqu’à 3 bars. L’environnement du procédé RTM ne permet pas une cuisson à des températures supérieures à 200˚C. Or, pour atteindre une cuisson complète et augmenter la température de transition vitreuse, les résines PT doivent être chauffées à plus haute température. C’est pourquoi le cycle de cuisson est divisé en deux étapes : une cuisson qui sera réalisée dans le moule et une post-cuisson à plus haute température hors moule. Avant la cuisson, les résines sont d’abord dégazées sous vide pendant 30min à 90˚C. Cette étape essentielle permet d’éliminer l’humidité contenue dans les résines et ainsi éviter la formation de carbamates pendant la réticulation qui se décomposent à 180˚C en amine et dioxyde de carbone [Pascault et al., 1994]. La décomposition en dioxyde de carbone va provoquer des porosités qui affaiblissent mécaniquement le matériau. De plus, les amines formées par la décomposition des carbamates peuvent aussi réagir avec les fonctions cyanates et créer des chaînes linéaires qui vont faire baisser la température de transition vitreuse du matériau final. Contrôler l’humidité pendant la réticulation permet donc d’obtenir une réticulation complète et d’obtenir une meilleure stabilité thermique et d’optimiser les performances mécaniques du matériau.

Le premier cycle de cuisson et post-cuisson appliqué est décrit sur la Figure 3.3.1.

La première étape de cuisson est la suivante : une rampe de montée en température de 2˚C/min suivie d’un palier de 1h à 180˚C ainsi qu’une deuxième rampe de montée en température de 1˚C/min suivi d’un palier de 3h à 200˚C sont appliqués aux deux résines.

3.3. Optimisation du cycle de cuisson 91

Figure 3.3.1 – Cycle de cuisson divisé en deux étapes : (a) cuisson et (b) post-cuisson

La première température isotherme à 180˚C a été sélectionnée afin de réduire la viscosité et augmenter la mobilité des chaînes avant que la réaction de réticulation ne démarre. De plus, deux types d’eau liée peuvent se retrouver dans les résines : le type I où l’eau se lie à la résine par une liaison hydrogène unique et qui est facilement désorbée et le type II où l’eau se lie à la résine par de multiples liaisons hydrogènes et qui requiert des températures de 140˚C pour s’extraire [Zhou et Lucas, 1999]. Ainsi ce palier à 180˚C permettrait d’évacuer l’eau liée résiduelle et d’assurer la décomposition d’éventuels carbamates avant de commencer la réaction de réticulation. La deuxième température isotherme à 200˚C a été sélectionnée à partir des essais dynamiques réalisés en DSC, sur la Figure 3.1.3. Pour toutes les vitesses de chauffe, le début du pic exothermique apparaît entre 150 et 200˚C.

Ensuite, le cycle de post-cuisson appliqué est un palier isotherme de 3h à 260˚C après une montée en température de 1˚C/min. Cette température de palier est également sélectionnée car elle apparaît dans la plage de température couverte par les pics exothermiques observés en DSC.

La structure chimique des réseaux est analysée par IRTF en fonction du cycle de cuisson appliqué. Ces spectres présentés sur la Figure 3.3.2 pour la résine PT30 sont obtenus en accumulant 16 scans avec une résolution de 2 cm-1dans la gamme spectrale de 600 à 4000 cm-1. Pour comparer les différents

échantillons, ils sont normalisés par rapport à la bande de référence à 1015 cm-1 qui correspond à la déformation des liaisons C-H du cycle phénolique

dans le plan. Après l’application du cycle de cuisson et de post-cuisson sous air, la double bande à 2234 et 2261 cm-1caractéristique des fonctions cyanates

n’est plus visible. Ce résultat montre que la réticulation de la résine est complète. Le même résultat est observé pour la résine PT15.

Figure 3.3.2 – Détection de l’oxydation par l’identification

de carbonyle par IRTF pour la résine PT30 après cuisson, post-cuisson sous air et post-cuisson sous vide

Comme les résines PT forment un réseau tridimensionnel dense avec une mobilité des chaînes réduite, leur température de transition vitreuse n’est pas observée par DSC. La température de la relaxation principale α (Tα)

mesurée au maximum de tan(δ) est donc suivie par rhéologie sur la Figure 3.3.3. Après application de ce cycle de réticulation, Tα est égale à 336 ±

1˚C pour le polymère PT15 et à 406 ± 3˚C pour le polymère PT30. Ces valeurs de Tαsont en accord avec les spécifications techniques des applications.

3.3. Optimisation du cycle de cuisson 93

Figure 3.3.3 – Mesure des Tα au maximum de tan(δ) pour

les résines PT15 et PT30 après le cycle de post-cuisson sous air ; vitesse de chauffe de 3˚C/min, fréquence de 1 rad/s et déformation de 0,5% Pourtant, après application de ces cycles de cuisson, les deux polymères sont devenus noirs et ne sont plus transparents (Figure 3.3.4), ce qui signifie qu’ils sont déjà oxydés comme le confirme les mesures des spectres IRTF données en exemple pour le polymère PT30 sur la Figure 3.3.2. En effet, après application du cycle de cuisson suivi du cycle de post-cuisson sous air, une bande apparaît vers 1720 - 1740 cm-1 sur le spectre IRTF du polymère PT30.

Cette bande est caractéristique des carbonyles qui sont identifiés comme étant des marqueurs de l’oxydation [Li et al., 2013].

Figure 3.3.4 – Aspect de la résine PT30 après la cuisson à 200˚C (a) et la post-cuisson à 260˚C (b)

Pang et Gillham ont également mis en avant la compétition possible entre la fin de la réaction de réticulation des résines thermodurcissables et le début de leur dégradation lorsque la température de transition vitreuse ciblée est élevée [Pang et Gillham, 1990]. En effet, comme la cinétique de la réaction chimique décroit à l’état vitreux, il est nécessaire d’augmenter la température

de réaction pour avoir une mobilité suffisante des chaînes pour finir la réaction de réticulation. A ces températures élevées apparaissent alors des réactions de dégradation.

Afin d’éviter l’oxydation et la dégradation prématurée des polymères, une optimisation de ce premier cycle est réalisée.