Système cardiovasculaire.
Parmi les HRT, seuls HRT1 et HRT2 sont exprimés dans le cœur. Plus spécifiquement,
HRT1 est présent dans les oreillettes et HRT2, dans les ventricules (Figure 21).
La première fonction d’un HRT a été identifiée chez le poisson-zèbre. Le mutant Gridlock
Grl
ml145est caractérisé par des anomalies au niveau des régions artérielles et par des veines
étendues (Zhong et al., 2000). Ensuite, l’obtention de souris knock-out pour HRT2 par
différentes équipes a mis en évidence des défauts importants dans le système cardiovasculaire
(Sakata et al., 2002; Gessler et al., 2002; Donovan et de Miguel, 2003). Le cœur des souris
knock-out est moins développé que celui des souris sauvages (Figure 22A). Une ouverture
dans la cloison ventriculaire, une sténose de la valvule tricuspide et une myocardiopathie sont
également caractéristiques du knock-out HRT2.
La souris knock-out pour HRT1 ne présente pas de défauts apparents mais lorsque HRT1 et
HRT2 sont inactivés, les anomalies du système cardiovasculaire sont plus importantes.
L’ensemble embryon-placenta-vésicule ombilicale HRT1 est affecté (Figure 22B) (Fischer et
al., 2004). Les embryons sont plus petits. Les vésicules més- et télencéphaliques ne sont pas
présentes. La vésicule péricardique est anormalement plus développée. La plupart des souris
double knock-out pour les gènes HRT1 et HRT2 présentent des hémorragies importantes au
jour 9,5 et meurent au jour 11,5 après fécondation.
Quel serait le mécanisme d’action moléculaire des HRT?
Il a été démontré dans des expériences de surexpression en cellules et dans des expériences de
co-transfections que HRT2 et HRT1 répriment l’expression, respectivement, du facteur de
croissance endothéliale vasculaire (VEGF) et de son récepteur VEGFR2 (Chin et al., 2000;
Henderson et al., 2001). L’expression de VEGF est contrôlée positivement par ARNT et
HAND. Ces deux facteurs bHLH sont séquestrés par HRT1 et HRT2 via le domaine Orange
et/ou intermédiaire ; cet isolement des facteurs activateurs conduit à une diminution de
l’expression des gènes dépendant de ARNT ou de HAND (Chin et al., 2000; Firulli et al.,
2000).
A
VEGF Veine
ARNT EPAS
Co-Rép ?
Figure 23 : Schéma représentant les connaissances actuelles des effets des HRT dans la formation du système cardiovasculaire (A) et la myogenèse (B).
Les protéines sont représentées par des cercles et les gènes par des rectangles. L’activation est symbolisée par Îet la répression, par . Les --- représentent une interaction protéique. La couleur des flèches correspond à l’effet final désigné à droite de la figure.
HRT2 HRT1
Artère
Muscles
Myogénine
MyoD
HRT1
Muscles
B
E47
Hand E12
VEGF R
Introduction
Le domaine basique, responsable de la liaison à l’ADN des bHLHO, est similaire chez les
HES et chez les HRT (Figure 19). Des expériences de retard de migration en gel
d’électrophorèse ont montré une affinité plus importante de HRT1 et HRT2 pour les
séquences « E-box » de type B et C (Iso et al., 2001b; Pichon et al., 2004).
Dans les cas présentés ici, il n’y a pas d’activité de répression directe des HRT. Ces derniers
semblent bien capables de recruter des co-répresseurs. Les Groucho/TLE sont faiblement
associés aux HRT ; ce qui est sans doute dû à la dégénérescence du motif WRPW (Fischer et
al., 2002; Pichon et al., 2004). Par contre, les complexes comprenant N-CoR, mSin3A et
HDAC1 interagiraient avec le domaine bHLH de HRT2 (Iso et al., 2001b). SIRT1, autre
co-facteur histone-désacétylase, interagit avec HRT2 via le domaine basique (Takata et Ishikawa,
2003). De plus, les HRT peuvent s’hétérodimériser entre elles (Leimeister et al., 2000).
Ces données regroupées constituent le schéma suivant (Figure 23A).
Les dimères activateurs HAND/E12 et ARNT/EPAS permettent la différenciation des cellules
vers la vascularisation par l’intermédiaire de la voie VEGF/VEGFR. Par leur interaction avec
HAND et ARNT, HRT1 et HRT2 entraineraient la formation d’artères.
Myogenèse.
HRT1 est présent dans la partie des somites qui donnera naissance aux muscles (Nakagawa
et al., 1999). Dans les cellules myoblastiques non différenciées C2C12, HRT1 est
abondamment exprimé. Au cours de la différenciation, son transcrit diminue. L’expression
exogène de HRT1 et HRT2 en C2C12 inhibe la formation de myoblastes (Sun et al., 2001a).
Le mécanisme moléculaire impliquant les bHLH-O peut se baser sur les observations
suivantes. HRT1 et HRT2 sont tous les deux capables d’inhiber la formation du dimère
activateur MyoD/E47. HRT1 et HRT2 répriment l’activation du promoteur myogénine,
dépendant de MyoD, dans des expériences de co-transfection. Il a été montré que le domaine
intermédiaire de HRT1 était important pour cette répression et que son domaine Orange était
nécessaire et non suffisant (Sun et al., 2001a).
Introduction
Tenant compte de ces données, le modèle suivant est proposé (voir Figure 23B).
Le dimère activateur MyoD/E47 permet la formation des muscles par induction de la
myogénine. HRT1 par un mécanisme semblable à celui de HES1 séquestre un des monomères
du complexe activateur, MyoD. Cette séquestration a pour effet de diminuer l’expression du
gène myogénine entraînant ainsi le blocage de la différenciation musculaire.
Neurogenèse.
Des résultats d’hybridations in situ sur des embryons de souris au jour 10,5 après
fécondation montrent la présence des trois HRT dans le cerveau et dans des régions innervées
(Figure 21A). Des études d’hybridation in situ chez le xénope montrent que HRT1 est
exprimé très tôt lors de la neurogenèse (Pichon et al., 2002). Dès la fin de la gastrulation,
HRT1 est exprimé sous la forme de deux bandes de part et d’autre de la plaque neurale.
La surexpression de HRT2, chez la souris, inhibe la neurogenèse et conduit vers un destin
glial dans la formation de la rétine (Satow et al., 2001). De même, par surexpression en
embryons, HRT1 et HRT2 permettent le maintien des cellules précurseur neurales et induisent
la gliogenèse. Ils sont capables d’inhiber l’activité transcriptionnelle des bHLH neuronales
Mash1 et Math3 (Sakamoto et al., 2003).
Bien qu’il soit indéniable que les HRT soient impliqués dans la neurogenèse, le mécanisme
moléculaire sous-jacent n’est pas encore connu.
C’est l’un des aspects de l’étude fonctionnelle de HRT1 qui sera développé dans ce travail.
But du travail
But du travail.
Dans le cadre d’une étude effectuée dans le laboratoire d’accueil visant à rechercher de
nouvelles protéines nucléaires, plusieurs protéines potentiellement intéressantes furent
découvertes (Pichon et al., 2000). Parmi elles, le facteur de transcription HRT1 (Hairy
Related Transcription Factor) appartenant à la superfamille des facteurs de transcription
"Hairy (H) and Enhancer of split (E(Spl))" est la protéine étudiée au cours de ce travail. Ces
facteurs interviennent essentiellement en tant que répresseurs de la transcription au cours de
l'embryogenèse et plus particulièrement au cours de la neurogenèse (Fisher et Caudy, 1998a).
En collaboration avec l'équipe d'Eric Bellefroid (ULB, IBMM, Laboratoire
d'Embryologie Moléculaire), des études d'hybridation in situ réalisées chez l'embryon de
xénope ont montré que XHRT1 était exprimé dès la fin de la gastrulation au niveau de la
partie médiane de la plaque neurale (Pichon et al., 2002). Cela suggérait que XHRT1 pouvait
jouer un rôle important dans le développement de la partie ventrale du tube neural. ARNT, le
seul partenaire de HRT1 connu dès début de ce travail, n’était pas susceptible d’être impliqué
dans la neurogenèse.
Nous avons décidé d'étudier le mode d'action moléculaire de XHRT1, initialement
appelé « clone bc8 » dans le laboratoire, en recherchant par la technique du double-hybride
dans la levure (Fields et Song, 1989) les partenaires protéiques de ce facteur dans les
embryons de xénope. Deux études ont été menées en parallèle : nous avons recherché les
protéines interagissant avec les domaines bHLH-Orange d'une part, et d'autre part avec la
partie qui suit le domaine Orange (y compris le motif TEIGAF).
La première étude devait nous permettre d'identifier les facteurs bHLH capables d'interagir
avec HRT1 et de cette manière de définir avec plus de précision les cascades de détermination
et/ou de différenciation régulées par ce facteur. La technique de double-hybride utilisée dans
la levure était tout-à-fait appropriée pour la recherche d'une telle interaction. En effet, CHF1
(HRT2) et CHF2 (HRT1) venaient d’être isolées par cette technique en tant que partenaires de
la protéine bHLH ARNT (Chin et al., 2000). La deuxième étude devait nous permettre, entre
autre, d’analyser le rôle du motif carboxy-terminal TEIGAF conservé entre les membres de la
sous-famille HRT. L'interaction entre le motif "WRPW" des "Hairy and E(Spl)" et les
co-répresseurs Groucho/TLE avait été mise en évidence par la technique du double-hybride lors
de la recherche de partenaires protéiques de la protéine hairy de drosophile (Paroush et al.,
1994), nous pensons que s’il existe une (des) protéine(s) reconnaissant le motif TEIGAF,
nous pourrons la (les) identifier en utilisant cette même approche expérimentale.
Plasmide
Appât
Gal 4 DBDpr Appât
HIS3 / ADE2 / lacZ pr Gal
Plasmide
Proie
Gal 4 AD
pr Proie
Figure 24 : Principe du système double-hybride de levure.
Dans une levure hôte, deux plasmides (appât et proie) expriment deux protéines de fusion. La première contient le domaine de liaison à l’ADN de Gal4 (Gal4 DBD) et la protéine appât, tandis que la deuxième possède le domaine d’activation de Gal4 et la protéine proie.
Si l’appât et la proie interagissent, il y a reconstitution de l’activité transcriptionnelle du facteur Gal4 et expression des gènes rapporteurs. Les gènes HIS3et ADE2permettent une sélection sur milieu carencé en histidine ou en adénine. Le gène lacZrend possible une sélection par détection de l’activitéβ-galactosidase.