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TITRE I : LES FACTEURS DU RAPPROCHEMENT INDIRECT

LE COMPORTEMENT PROHIBÉ

1. Exposer des faits matériels ne correspondant pas à la vérité

163. Une nouvelle version, de vieux problèmes. La loi « anti-corruption » du 27

mai 2015, n° 69513 a été approuvée pour mettre fin au régime d’impunité de facto qui caractérisait la péninsule depuis 2002514, suite à la réforme très controversée

510 Ce système punit le fait de présenter ou de publier des comptes infidèles, peu important (en apparence) comment l’infidélité s’est insinuée dans la comptabilité, voir supra, A.

511 Voir, par exemple, G. DELITALA, «Il dolo nel reato di falsità in bilanci», Riv. it. dir. Pen., 1934, p. 312. Cf. également G. D. PISAPIA, «False comunicazioni sociali e bancarotta fraudolenta», dans Studi di diritto penale, Cedam, 1956, spéc. p. 318.

512 Une partie de la doctrine considérait que le délit de false comunicazioni sociali était plutôt une sorte d’escroquerie in incertam personam. Ainsi C. PEDRAZZI, «La disciplina delle società commerciali», op. cit., p. 305.

513 Legge 27 maggio 2015 n. 69 recante “Disposizioni in materia di delitti contro la pubblica amministrazione, di associazioni di tipo mafioso e di falso in bilancio”.

514 A ce propos, l’enquête très intéressante de A. ALESSANDRI, «Un’indagine empirica presso il Tribunale di Milano: le false comunicazioni sociali», op. cit.

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qui a fait l’objet de l’affaire Berlusconi tranchée par la CJUE515. Le nouvel article 2622516 cod. civ. punit les dirigeants517 qui « exposent sciemment des faits matériels ne correspondant pas à la vérité ou omettent d’exposer des faits matériels significatifs dont la communication est imposée par la loi, sur la situation économique, patrimoniale ou financière de la société ou du groupe auquel elle appartient, de manière concrètement idoine à induire autrui en erreur »518. La peine est lourde, elle peut en effet aller de trois à huit ans d’emprisonnement.

La dernière réforme a maintenu le dénominateur commun à toutes les versions connues de ce délit à partir de 1882, c’est-à-dire la définition du comportement prohibé en termes d’exposition de faits faux. Pourtant, elle a retouché des éléments de spécification qui ont remis à l’ordre du jour les vieux problèmes.

164. Nous savons que la version de l’infraction qui a traversé la période

1931-2002 punissait les dirigeants qui exposaient des simples faits ne correspondant pas à la vérité519. La doctrine de l’époque s’était interrogée sur la délimitation de la notion de faits. On considérait que le législateur, en se référant aux faits, avait l’intention d’exclure de la pénalisation les postes du bilan faisant l’objet d’une évaluation ou d’une estime520. En d’autres mots, seule l’exposition d’un fait

515 Voir supra, Titre I, Chapitre 2. Cf. également G. GIUDICELLI-DELAGE, Droit pénal des affaires en Europe, op. cit., p. 202 et s. C. SOTIS, « La nouvelle politique criminelle italienne en Droit pénal des affaires et les contraintes européennes », op. cit., p. 235 et s. En langue italienne C. PEDRAZZI, «In memoria del falso in bilancio», op. cit., p. 1369 et s.

516 L’article 2621 cod. civ. punit le même comportement lorsqu’il est commis au sein d’une société de capitaux non cotée en bourse.

517 Plus précisément, les auteurs de l’infraction peuvent être les administrateurs, les directeurs généraux, le dirigeant chargé de la rédaction des documents comptables, les commissaires aux comptes et les liquidateurs judiciaires.

518 Voici la version complète de l’article 2622 cod. civ. en langue italienne: « Gli amministratori, i direttori generali, i dirigenti preposti alla redazione dei documenti contabili societari, i sindaci e i liquidatori di società emittenti strumenti finanziari ammessi alla negoziazione in un mercato regolamentato italiano o di altro Paese dell’Unione europea, i quali, al fine di conseguire per sé o per altri un ingiusto profitto, nei bilanci, nelle relazioni o nelle altre comunicazioni sociali dirette ai soci o al pubblico consapevolmente espongono fatti materiali non rispondenti al vero ovvero omettono fatti materiali rilevanti la cui comunicazione è imposta dalla legge sulla situazione economica, patrimoniale o finanziaria della società o del gruppo al quale la stessa appartiene, in modo concretamente idoneo ad indurre altri in errore, sono puniti con la pena della reclusione da tre a otto anni ».

519 Voir supra, Section 1, § 1.

520 Parmi les auteurs de l’époque qui soutenaient l’exclusion des évaluations, entre autres, cf. F. ANTOLISEI, Manuale di diritto penale, Leggi complementari, vol. I, Giuffrè, 1994, p. 125 e s. Parmi les partisans de l’inclusion, G.E. COLOMBO, Il bilancio di esercizio delle società per azioni, Cedam, 1965, spéc. p. 290.

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inexistant dans la réalité économique de la société, ou l’omission dans le document comptable d’un fait qui s’était réellement produit, auraient rempli les critères nécessaires à son reproche521. Cette interprétation se fondait également sur l’impossibilité de soumettre une évaluation comptable à un jugement strict de vérité-fausseté, car la comptabilité ne demeure pas pas une science exacte et car il existe plusieurs méthodes d’évaluations admises, de sorte qu’une évaluation peut être correcte ou erronée mais jamais fausse522. En conclusion, selon cette courante la norme pénale ne concernait pas les évaluations d’un poste du bilan lorsque celui-ci s’attachait à un fait existant, quoique l’évaluation fusse erronée, voire complètement déraisonnable.

165. Une solution nécessaire. Cette position apparaissait insoutenable. Les

comptes sont constitués dans la majorité de ses composantes par des évaluations ou des estimes. Les exclure signifierait tout simplement abroger, de facto, le délit de false comunicazioni sociali523. En outre, certains auteurs observaient que le mot faits comprendrait nécessairement les faits psychiques (!), représentés par les évaluations524. La jurisprudence consolidée sous la première définition du comportement délictueux se rallia à cette courante. Exposer des faits ne correspondant pas à la vérité dans les comptes consistait finalement en la divulgation d’informations portant sur des faits inexistants ou constitués par des

521 Par exemple, la mention d’une créance ou d’une dette inexistante, ou encore le classement de biens dont la société ne disposait plus.

522 À ce propos v. F. SUPERTI FURGA, «Il significato conoscitivo della nozione di «verità» nel linguaggio dei bilanci. Una proposta di definizione operativa», Giurisprudenza Commerciale., 1/1985, p. 1030 et s. Du même auteur «Riflessioni sulla novella legislativa concernente il falso in bilancio in una prospettiva economico-aziendalistica», Le Società, 11/2015, p. 1292 et s. Contra G. STRAMPELLI, «Le valutazioni di bilancio tra non veridicità (civile) e falsità (penale): spunti sulla punibilità dei falsi valutativi», Rivista delle Società, fasc.1, 2016, p. 118 et s. Cet auteur affirme (en langue italienne): « la soluzione prospettata consente altresì di meglio precisare la corretta affermazione secondo cui il riferimento ai fatti materiali di cui agli artt. 2621 e 2622 c.c. non permette di escludere la rilevanza penale dei dati della realtà sulla base dei quali le valutazioni « sono formulate e dai quali traggono la loro attendibilità », in quanto « a fondamento di una stima di bilancio si pone pur sempre la preventiva rilevazione di tutta una serie di dati del mondo reale che ne costituiscono l'implicita premessa ».

523 Voir L. CONTI, Diritto penale commerciale, op. cit., p. 221 et s. Le Code civil ne fait d’ailleurs aucune distinction de nature entre les postes qui composent le document comptable. La seule différenciation se rencontre dans les critères pour calculer et inscrire au bilan les différents postes.

524 I. CARACCIOLI, Reati di mendacio e valutazioni, Giuffrè, 1962, passim. Cet auteur souligne que le discrimen entre les concepts de « fait », « exposition d’un fait » et « évaluation » n’est pas si précis comme certains auteurs le voudraient mais au contraire plutôt flou. Toutes les évaluations peuvent sembler à un moment donné également une exposition d’un fait matériel et toutes les déclarations de fait peuvent cacher une évaluation.

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évaluations évidemment (et intentionnellement) déraisonnables525. Par ailleurs, ce point d’équilibre s’appuyait sur la réglementation européenne.

Or, la réforme du droit pénal des sociétés approuvée en 2002 et probablement (ou indéniablement) incompatible avec les exigences communautaires526, apporta des retouches singulières. En ce qui concerne la définition du comportement prohibé, le législateur de 2002 prévoyait la punition des dirigeants qui exposaient dans les comptes des faits matériels ne correspondant pas à la vérité, même s’ils font l’objet d’évaluations. Par conséquent, la définition du comportement prohibé était enrichie, entre autres choses, par deux nouveautés ; les faits exposés devaient être matériels, dans le sens de tangibles. Néanmoins, le législateur s’assurait de spécifier que les évaluations comptables rentraient tout de même dans le périmètre du mensonge punissable.

166. Une remise en question permanente. Pour cette raison, la réforme adoptée

en 2015 est apparue dangereuse dès son adoption. La définition du comportement prohibé en termes d’exposition de « faits matériels ne correspondant pas à la vérité » s’est distinguée pour avoir maintenu l’attribut « matériels » couplé aux « faits » et pour avoir supprimé en parallèlele syntagme « même si font l’objet d’évaluations ». Une telle modification n’est pas passée inaperçue (a). Depuis l’adoption de la réforme, une avalanche de commentaires et d’articles doctrinaux a littéralement submergé le débat des spécialistes, avant que les juges ne commencent à adopter des décisions contradictoires, ce qui a imposé l’intervention des Sezioni Unite (Assemblée plénière) de la Cour de cassation (b).

1-a. Les deux fronts doctrinaires

167. Une dépénalisation involontaire. L’harmonisation européenne en

matière d’information financière n’obligerait pas le législateur à adopter des sanctions pénales pour les infractions aux règles des directives comptables527. Cependant, chaque État doit assurer un jeu de sanctions appropriées ; si leur

525 Cass. pen. Farina, dans Cass. Pen. 1994.311.

526 Voir supra, Titre I, Chapitre 2, Section 1.

527 Voir supra, Titre I, Chapitre 2. Pour une analyse de ce problème en droit italien cf. encore C. PAONESSA, Gli obblighi di tutela penale. La discrezionalità legislativa nella cornice dei vincoli costituzionali e comunitari, op. cit., spéc. p. 193.

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nature est pénale, leur réforme devrait assurer le respect du droit de l’Union. L’on sait que le sujet des évaluations comptables représente l’un des piliers de la réglementation dessinée par la directive n° 2013/34/UE. Selon le considérant n° 22 « le recours aux estimations est une partie essentielle de l’élaboration des états financiers »528. En outre, ladite directive dédie aux évaluations plusieurs articles qui témoignent de l’importance du sujet.

Ces considérations n’ont pas empêché certains auteurs de soutenir que l’abolition de la référence aux évaluations dans le texte de l’article 2622 cod. civ. aurait eu pour effet d’exclure celles-ci du périmètre d’illicéité pénale. Selon le Professeur A. PERINI, qui a dénoncé ce piège avant l’approbation définitive de la réforme, la nouvelle définition de l’infraction n’aurait absolument pas pu inclure les évaluations529 pour les raisons que nous avons déjà exposées. La punition de l’exposition de faits matériels sans aucune mention des évaluations limiterait le comportement prohibé aux mensonges qui, en France, rentrent dans la catégorie des infidélités matérielles530. Cette thèse a été partagée par une partie importante de la doctrine531.

528 Voici le considérant n° 22 dans son intégralité : « La comptabilisation et l’évaluation de certains postes des états financiers sont fondées sur des estimations, des appréciations et des modèles plutôt que sur des descriptions précises. En raison des incertitudes inhérentes aux activités des entreprises, certains postes des états financiers ne peuvent pas être évalués avec précision et ne peuvent faire l’objet que d’une estimation. Une estimation implique des jugements fondés sur les dernières informations fiables disponibles. Le recours aux estimations est une partie essentielle de l’élaboration des états financiers. Tel est particulièrement le cas des provisions ».

529A. PERINI, «I “fatti materiali non rispondenti al vero”: harakiri del futuribile “falso in bilancio”?» dirittopenalecontemporaneo.it, revue en ligne. Du même avis, A. LANZI, Editoriale, Guida al diritto, fasc. 26/2015 p. 12. L’auteur souligne que la punition concrète de ces comportements n’intéresse personne : avec un « tour de valse », le législateur a exclu les évaluations du champ des nouvelles dispositions. Il s’agit d’une abolitio criminis pure et simple. Cf. aussi I. CARACCIOLI, «Il rischio penale per le valutazioni estimative: reati fiscali a confronto con il nuovo falso in bilancio», Fisco, 28/2015, p. 2735 (commento alla normativa).

530A. PERINI, op. ult. cit., p. 7. L’auteur concluait ses observations avec une remarque désolée. Selon lui, la protection pénale de l’information sociétale aurait été confiée presque totalement aux hypothèses d’agiotage (article 2637 du Cod. civ.) et de manipulation de marché (article 185 du T.u.f., homologue de l’article L. 465-3-2 du C.m.f., ndr). Les entités les plus importantes auraient été attirées dans le champ d’application de ces délits, tandis que la grande majorité des sociétés aurait vu, en fait, toute forme de répression des phénomènes de mala gestio perpétrés par les dirigeants renvoyée au moment de la faillite.

531 Entre autres, V. MANES, «La nuova disciplina delle false comunicazioni sociali, Commento agli artt. 2621, 2621bis, 2621ter, 2622 c.c.», dans G. PORTALE - P. ABBADESSA, Codice delle s.p.a., 2016, Giuffrè, p. 3501 et s.; R. BRICHETTI, L. PISTORELLI, Guida al diritto, fasc. 26/2015, p. 63 ; M. SCOLETTA, «Le parole sono importanti? Fatti materiali, false valutazioni di bilancio e limiti

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Le soutien envers cette opinion n’a pas empêché la plupart de ces auteurs de souligner le paradoxe d’un tel choix de politique criminelle. Si les évaluations comptables sortaient du champ d’application de l’infraction, l’intervention du législateur de 2015 aurait été in concreto beaucoup moins sévère que la réforme de 2002. Il s’agirait d’un résultat controversé pour cette initiative législative qui se présentait comme la « restauration » du délit de false comunicazioni sociali532.

168. Un texte tout simplement confus. D’autres auteurs ont en revanche

soutenu la thèse du maintien des évaluations dans le périmètre de cette infraction ; ainsi on garantirait la protection des destinataires de l’information financière533.

La suppression de la formule qui fait l’objet de ces propos n’aurait pas été déterminante. En effet, il a été acquis que les évaluations comptables rentrent dans le périmètre de ce comportement illicite étant donné qu’elles portent souvent sur des faits et se présentent dans les comptes comme l’exposition d’un fait. Seuls les prévisions et les projets resteraient exclus, comme ils l’ont toujours été534. Cette doctrine a également rappelé que les comptes sont constitués presque exclusivement d’évaluations et d’estimations : leur exclusion transformerait l’infraction en un simulacre. De plus, un tel choix serait incohérent avec les prescriptions de la législation commerciale intégrées a contrario par les interdits de caractère pénal : la prévision du délit de false comunicazioni sociali sans la pénalisation des postes évaluatives (intentionnellement) fausses ne garantirait guère une représentation fidèle de la situation économique, patrimoniale et financière de la société.

all'esegesi del giudice penale», dans dirittopenalecontemporaneo.it, en ligne, 2 marzo 2016; Ivi, P. GUALTIERI, Le nuove false comunicazioni sociali: il punto di vista dell'economista aziendale, 1 febbraio 2016.

532 R. BRICHETTI, L., PISTORELLI, op. ult. cit., p. 63 .

533 S. SEMINARA, «La riforma dei reati di false comunicazioni sociali», Dir. pen. proc., 2015, p. 813 et s.; Id., False comunicazioni sociali e false valutazioni in bilancio: il difficile esordio di una riforma, dans RIDPP, 2015, p. 1498 et s. F. MUCCIARELLI, «Le “nuove” false comunicazioni sociali: note in ordine sparso», dans dirittopenalecontemporaneo, en ligne, 28 giugno 2015; Id., «Ancorché » superfluo, ancora un commento sparso sulle nuove false comunicazioni sociali», ivi, 2 luglio 2015. F. D'ALESSANDRO, «Valutazioni mendaci e false comunicazioni sociali: la Cassazione si ricrede e fa bene!» Dir. pen. proc., 2016, p. 315 et s. A. ALESSANDRI, «Le incerte novità del falso in bilancio», op. cit., p. 11 et s. A. CRESPI, «Sentenze opache e legalità “formalistica” (I sessant'anni della Rivista delle società)», Riv. soc., 2015, p. 1033 et ss.

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1-b. La querelle jurisprudentielle

169. L’antagonisme des juges. Le débat doctrinal, qui avait ravivé ce qu’un

éminent auteur a défini comme le fétichisme de la lettre535, a trouvé un écho dans la jurisprudence de la Cour de cassation en raison de l’applicabilité du principe de la lex mitior. Le 17 juin 2015, un mois après l’entrée en vigueur de la réforme, la cinquième chambre criminelle de la Cour de cassation est intervenue sur la question536 en rendant l’arrêt Crespi.

L’affaire avait évidemment commencé sous l’ancienne réglementation et s’était conclue avec la condamnation en première instance, confirmée en appel, de tous les accusés pour avoir causé la faillite d’un groupement de sociétés au moyen de la falsification systématique des bilans. La Cour de cassation prenait une position nette en affirmant que la nouvelle réglementation excluait les évaluations comptables du périmètre de l’infraction de false comunicazioni sociali. Selon la Haute Cour, le législateur avait partiellement abrogé la loi précédente537

puisque le fait d’exposer des faits matériels faux n’aurait pu être interprété dans le sens d’inclure la punition d’évaluations erronées, à cause de leur nature intrinsèquement incertaine. Pour cette raison, l’infraction de false comunicazioni sociali ne pouvait plus attaquer les postes relatifs aux créances, aux immobilisations immatérielles, aux immobilisations matérielles ou à l’amortissement de la valeur de la clientèle.

170. L’affaire Crespi. L’arrêt Crespi a représenté un tremblement de

terre incontestable ; dans sa nouvelle version, le délit de false comunicazioni sociali en sortait annihilé. La protection pénale apparaissait paradoxalement plus faible par rapport au texte de 2002 (très critiqué et considéré comme une dépénalisation

535 Ainsi D. PULITANÒ, «Ermeneutiche alla prova. La questione del falso valutativo», op. cit., p. 8.

536 Cass. pen., Sez. V, n. 33774/2015, Crespi.

537 Ainsi Cass. pen., Sez. V, n. 33774/2015, Crespi p. 54. Voici le texte en langue italienne : « Nell’analisi ermeneutica da compiersi, si ribadisce in primo luogo che la riforma del 2015 ha ripreso la formula utilizzata dal legislatore del 2002 per circoscrivere l'oggetto della condotta attiva, privandola però del riferimento alle valutazioni e provvedendo contestualmente a replicarla anche nella definizione di quello della condotta omissiva, in relazione alla quale il testo previgente faceva invece riferimento alle «informazioni». Tutto ciò non può essere ritenuto neutro nella interpretazione delle norme in esame ».

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de facto), en mesure d’affaiblir encore plus la transparence de l’information financière diffusée par les sociétés de capitaux à travers leurs comptes.

Les commentaires sur cette décision ont été nombreux. Une minorité de commentateurs a partagé la position prise par la Cour538, fondée selon ces auteurs sur le principe de stricte légalité en matière pénale. L’arrêt en question a bien évidemment soulevé tout autant de critiques539 : l’exclusion des estimations comptables du délit de false comunicazioni sociali aurait dû supposer un entendement solide sur l’existence d’une frontière nette entre les faits matériels et les faits-évaluations. Le système italien apparaissait donc focalisé sur des aspects singuliers qui éloignaient, encore une fois, l’infraction de false comunicazioni sociali du standard de protection souhaité, quoique non imposé, par l’Union européenne.

171. L’affaire Giovagnoli. Pour toutes ces raisons, l’interprétation dégagée par

la cinquième chambre criminelle de la Cour de cassation a été désavouée quelque mois plus tard par un arrêt de la même chambre dans l’affaire Giovagnoli540 ! Dans cette affaire le prévenu avait, entre autres choses, omis de déprécier le 62 % de ses créances, même si les débiteurs ne garantissaient plus le recouvrement des dettes541.

Le raisonnement principal de la cinquième chambre criminelle se déroulait sur un plan logico-systématique : pour appréhender certains éléments structurels qui composent l’infraction de false comunicazioni sociali, il était nécessaire selon la Cour de faire référence au domaine technique de la comptabilité et au droit des

538 Cf. M. SCOLETTA, «Tutela dell’informazione societaria e vincoli di legalità nei nuovi delitti di false comunicazioni sociali», Le Società, n.11/2015, p. 1301 et s. Cf. également cf. C. SANTORIELLO, «Rilevanza penale della valutazione di bilancio. Poche parole per riportare ordine in un dibattito “isterico”», Archivio penale, 2/2015.

539 Voir S. SEMINARA, «False comunicazioni sociali e false valutazioni in bilancio : il difficile esordio di una riforma», Riv. it. dir. proc. pen., n. 3/2015, p. 1498 et s.; F. D’ALESSANDRO, «La riforma delle false comunicazioni sociali al vaglio del Giudice di legittimità : davvero penalmente irrilevanti le valutazioni mendaci?», Giurisprudenza Italiana, ott. 2015, p. 2211 et s.; A. CRESPI, «Sentenze opache e legalità “formalistica” (i sessant’anni della Rivista delle società)», Rivista delle Società, fasc.6, 2015, pag. 1033 et s.; E. MEZZETTI, «Commento alla Legge n. 69/2015», dans www.lalegislazionepenale.eu, p. 22 et s.

540 Cass. pen., Sez. V, n. 890/2016, Giovagnoli. À ce propos cf. F. D’ALESSANDRO, «Valutazioni mendaci e false comunicazioni sociali: la Cassazione si ricrede, e fa bene!», op. cit., p. 315 et s. Contra E. AMATI, «Il nuovo falso in bilancio quale “eccezionale” veicolo di Diritto penale giurisprudenziale», Giurisprudenza Commerciale, fasc.3, 2016, p. 472.

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affaires. Ainsi, les notions de matérialité et de significativité doivent être coordonnées avec les données de la matière comptable. L’infraction, dans sa totalité, doit être raccordée au principe (immanent) d’image fidèle. Le terme