• Aucun résultat trouvé

Partie I : Le transport à la demande et la recherche, état des lieux

2 Etat de l’art sur la recherche des TAD

3.1 Un contexte économique et social longtemps favorable aux modes individualisés

3.1.1 Des évolutions sociétales qui ont induit de nouveaux comportements de mobilité

3.1.1.2 Une exigence accrue de flexibilité dans le monde du travail

Le passage de l’ère industrielle à celle du tertiaire a affecté tant la sphère privée que professionnelle. Il a entraîné une densification du travail (dans son contenu). Celle-ci s’est

traduite par une pression plus importante sur les salariés, une recherche constante de rationalisation du temps et une chasse aux temps morts [Bailly et Heurgon, 2001, 18; Gwiazdzinski, 2003, 28], comme le souligne [Klein, 2005, 26] « la pression à l'intensification

de l'usage du temps est une dimension constitutive du capitalisme ». D’autre part, ce passage a

favorisé l’apparition de nouveaux horaires de travail : horaires décalés, travail de nuit, travail à temps partiel91 font que désormais les personnes travaillent à toutes les heures du jour et de

la nuit [Gwiazdzinski, 2003, 29]. Parallèlement, le développement de contrats à durée déterminée (CDD) et le travail à temps partiel ont favorisé une instabilité de l’emploi. Il est très fréquent aujourd’hui pour un actif d’avoir plusieurs employeurs durant sa vie active.

Cette situation incite les actifs à être capables de réagir face à une perte d’emploi et à s’adapter aux nouvelles contraintes imposées par le développement des horaires décalés. Dans les faits, l’ensemble de ces contraintes exige des individus une forte capacité à être mobile :

« La flexibilité est désormais une exigence du monde du travail, qui implique bien souvent la mobilité. Avec la multiplication des CDD, la flexibilité du temps de travail, les séjours à l’étranger et plus généralement les déplacements professionnels, la capacité à être mobile est indispensable » [Kaufmann, 2004a, 65]. Cela concerne aussi bien la mobilité résidentielle

(capacité à déménager pour trouver un emploi ou lors d’une mutation) que la mobilité quotidienne (déplacement pour se rendre à son travail avec enchaînements complexes pour concilier vie professionnelle et privée) ou encore la mobilité professionnelle (multiplication des déplacements liés aux voyages d’affaires ; visite des clients, fournisseurs) qui se développe elle aussi, comme le soulignent M.H. Massot et J.P. Orfeuil (2004). Ainsi au cours des 20 dernières années, les déplacements domicile/travail « ont vu leur part relative baisser,

du fait de la croissance du nombre de retraités, de la montée du chômage, de l’extension de la journée continue (qui « supprime » les déplacements de retour au domicile la mi-journée) et, fait moins connu, du développement des déplacements vers des lieux de travail variables »

[Massot et Orfeuil, 2004, 221].

3.1.1.2.1 La part croissante du temps libre a entraîné une augmentation des déplacements liés aux loisirs et au tourisme

Les déplacements liés aux loisirs recouvrent l’ensemble des déplacements liés aux pratiques culturelles ou sportives, mais également les visites (d’amis et de parents), les sorties (le dimanche par exemple), les escapades du week-end et le tourisme. Ceux-ci structurent les temps sociaux (grands week-ends, petites vacances, festivals). Par exemple, les vacances ont

91 En 2005, la proportion d'actifs occupés à temps partiel s’élevait à 17,2 % (moyenne 2005). Source : Insee

99 été pendant longtemps un grand marqueur temporel, mais celles-ci apparaissent comme de moins en moins marquées tandis que les séjours de courte durée se développent fortement. De plus, la distinction entre vacances de courte durée et loisirs est de plus en plus difficile à faire.

L’ensemble de ces déplacements est en augmentation. Cela est lié, d’une part aux RTT et aux modifications des temps de travail (35h, mi-temps, travail de nuit…) qui dégagent de nouvelles plages horaires pour les loisirs, mais aussi à l’arrivée de nouvelles populations disposant de beaucoup de temps libre et dotés d’une forte capacité à être mobile [Massot et Orfeuil, 2004] : « l’arrivée de jeunes retraités motorisés, aisés et en bonne santé, puis du fait

de la réduction du temps de travail qui a multiplié les départs de la ville le week-end des cadres aisés ». De ce fait, on assiste à une évolution des pratiques touristiques. Les courts

séjours se développent alors que les longs séjours diminuent en nombre et se raccourcissent. Ces déplacements posent de nouveaux problèmes aux transporteurs car ils ne rentrent pas dans le schéma des migrations domicile-travail. Les loisirs, visites et sorties qui représentent 52 % des déplacements sont effectués à 81 % en voiture. Les RTT ont amplifié le nombre de déplacements, mais pas ceux liés au travail [Faivre, 2005]. Les temps des loisirs et du tourisme multiplient les déplacements occasionnels favorisant une mobilité plus complexe.

3.1.1.2.2 Temporalités éclatées et désynchronisation des rythmes

Alors que le temps industriel imposait une rupture nette entre les temps de travail et les temps de la vie, la société actuelle est marquée par une dilution de la frontière qui les séparaient. Elle se traduit « par une désynchronisation temporelle, c’est-à-dire un

bouleversement profond des formes collectives du temps et ce, en raison de l’individualisation des usages temporels. [Faivre, 2005]. On parle d’éclatement des temporalités collectives.

L’organisation des journées est de moins en moins marquée par des périodes de fortes affluences corrélées aux heures d’arrivées et de départs du travail (pics de mobilité), et de plus en plus par des flux plus diffus tout au long de la journée.

Les modifications des rythmes de vie sont liées tout d’abord au mouvement global de la société déjà évoqué, mais aussi aux transformations du monde du travail : les horaires décalés, la précarisation de l’emploi, les RTT ont contribué à modifier l’organisation quotidienne du temps. Ces bouleversements des rythmes temporels ont eu pour conséquence notamment d’intensifier l’usage des temps (cf. p. 98), et d’autre part, d’influencer « nos rapports au

territoire et plus particulièrement nos pratiques de mobilité » [Faivre, 2005]. Ainsi, ces