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Evolution de l’effet en temp´erature ´

7.4 Analyse des r´esultats

7.4.1 Evolution de l’effet en temp´erature ´

Une des questions `a l’origine de ce travail ´etait la disparition de l’effet de la polarisation `a haute temp´erature. Nos mesures `a diff´erentes temp´eratures nous apportent des ´el´ements de r´eponse.

La figure 7.21 montre le coefficient mesur´e `a diff´erentes temp´eratures et diff´erentes pressions. Nous avons report´e sur la mˆeme figure les donn´ees de [Vermeulen88], [van Woerkens98] et [Kranenburg89]. 0 2 4 6 8 10 10 100 1000 Vermeulen et co. Kranenburg et co. van Woerkens Cellule 1 P = 27 bars P = 20 bars P = 10 bars P = 2 bars a T (mK)

FIG. 7.21 – Facteur de correction en fonction de la temp´erature : L’effet de la polarisation sur la

viscosit´e diminue avec la temp´erature. Symboles pleins : nos donn´ees. Carr´es vides : [van Woerkens98]; Triangles : [Kranenburg89]; Carr´e barr´e : [Vermeulen88].

A basse temp´erature, dans le domaine o`u la valeur du coefficient que nous mesurons tend `a saturer, nos r´esultats sont en accord avec ceux de [Kranenburg89]. Notre point `a 40 mK se trouve

entre ceux de [Vermeulen88]3 et de [van Woerkens98]. Nous n’expliquons pas le d´esaccord

entre nos donn´ees `a 40 mK et celles de [van Woerkens98].

A haute temp´erature, nos exp´eriences montrent que le coefficient diminue. Ce comportement n’est pas observ´e dans les donn´ees `a haute temp´erature de [Kranenburg89]. D’apr`es l’analyse de nos barres d’erreur (cf. 7.3.1, 7.3.2, 7.3.4), nous pensons qu’il est r´eel.

Nous observons donc que les effets de statistique quantique sur la viscosit´e tendent `a disparaˆıtre

3. Notre point se trouve `a la limite de sa barre d’erreur. De plus, [Vermeulen] obtient  2 ou 3 suivant la m´ethode utilis´ee pour traiter ses donn´ees.

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MESURE DE LA VISCOSITE´ `a haute temp´erature. La question porte alors sur le m´ecanisme sous-jacent qui gouverne cet effet, et sur l’´echelle de temp´erature qui lui est associ´ee, cette derni`ere caract´eristique ´etant une information accessible exp´erimentalement.

Bien que le comportement de l’ He `a haute temp´erature soit mal compris, nous pouvons mettre en perspective le d´ebat en invoquant deux images physiques qui ont ´et´e propos´ees [Taylor57, Andreev79] : Bien que ce soit un milieu dense (   =2), si on assimile le comportement de l’ He liquide `a celui d’un gaz de fermions, il n’est pas exclu que l’influence du principe de Pauli soit mesurable sur les propri´et´es de transport au-del`a du r´egime d´eg´en´er´e. L’autre type de comportement serait celui d’un liquide “semi-quantique”, dans lequel la statistique quantique n’aurait plus aucun effet.

Quelle ´echelle de temp´erature?

A ce stade, il est n´ecessaire de pr´eciser le terme de “d´eg´en´erescence”. Exp´erimentalement, une bonne caract´erisation de la d´eg´en´erescence de spin consiste `a mesurer la susceptibilit´e magn´etique : Dans le r´egime d´eg´en´er´e, la susceptibilit´e est ind´ependante de la temp´erature ; `a haute temp´erature, cette quantit´e suit une loi de Curie ("



 ). Des exp´eriences ont montr´e [Ramm70] que l’´echelle de temp´erature qui d´elimite le r´egime d´eg´en´er´e est 







,  ´etant le facteur de renforcement de la susceptibilit´e. L’existence de cette ´echelle de temp´erature unique se traduit par une loi d’´echelle (cf. fig.1.9).

La figure 7.22 montre nos donn´ees trac´ees selon l’´echelle de temp´erature r´eduite   (la normalisation ´etant diff´erente pour chaque pression). Les valeurs du coefficient  ont ´et´e normalis´ees par 3. La ligne continue repr´esente la quantit´e  



 , qui s’annule dans le r´egime non-d´eg´en´er´e o`u la susceptibilit´e suit la loi de Curie.

Dans cette repr´esentation, les mesures effectu´ees `a diff´erentes pressions se r´epartissent sur une seule courbe. De ce point de vue, la d´ependance en pression semble provenir du fait que l’´echelle de temp´erature est diff´erente pour chaque pression, cette ´echelle ´etant donn´ee par la temp´erature de d´eg´en´erescence 



 . Il nous paraˆıt cependant pr´ematur´e de conclure `a l’existence d’un loi d’´echelle. Il faudrait pour cela recueillir plus de donn´ees, surtout au voisinage de  =2 (c-`a-d vers 0,5 K).

Le point remarquable est que l’effet de la polarisation sur la viscosit´e persiste bien au-del`a du r´egime d´eg´en´er´e : Le renforcement de viscosit´e est encore important vers 0,3 K (   2),

7.4 Analyse des r´esultats 175 0,01 0,1 1 0 1 2 3 4 5 6 7 1-chi*T/C P = 27 bars P = 20 bars P = 10 bars P = 2 bars a/3 T/Tf** FIG. 7.22 – Symboles :  (nos donn´ees). Ligne continue :





 [Ramm70]. L’effet de la polarisation sur la viscosit´e subsiste au-del`a du r´egime d´eg´en´er´e, dans une r´egion o`u la susceptibilit´e suit d´ej`a la loi de Curie.

alors que la susceptibilit´e magn´etique suit d´ej`a la loi de Curie. Soulignons que, l`a encore, cette conclusion repose sur un nombre restreint d’exp´eriences effectu´ees `a haute temp´erature. Il serait prudent d’accumuler d’autres mesures pour confirmer cette tendance.

Quel m´ecanisme d´etruit l’effet de la polarisation?

L’ He liquide semble ainsi se comporter plutˆot comme un gaz dans lequel les effets de la polarisation sur les propri´et´es de transport subsistent au-del`a du r´egime d´eg´en´er´e, alors que les quantit´es thermodynamiques ne sont plus sensibles au caract`ere fermionique du syst`eme. Cette analogie ne doit cependant pas ˆetre pouss´ee trop loin : Nous allons voir qu’une simple image de gaz de fermions n’explique pas le d´etail de la variation en temp´erature du coefficient .

A basse temp´erature, le coefficient  sature, comme on s’y attend dans un gaz de fermions d´eg´en´er´e. Dans un syst`eme dilu´e, l’effet de la polarisation sur les propri´et´es de transport subsiste au-del`a du r´egime d´eg´en´er´e, tant que la longueur d’onde des particules est sup´erieure `a la port´ee du potentiel d’interaction (cf. 1.1.1). Dans l’ He liquide, l’image du gaz de quasiparticules en interaction faible, perd son sens d`es que l’on sort du r´egime d´eg´en´er´e (ce qui correspond exp´erimentalement `a



  0,3 K). Il semble pourtant, d’apr`es nos mesures, que la statistique quantique ait toujours une influence sur la viscosit´e au-del`a de 0,3 K. Ainsi, la “disparition” des quasiparticules (au sens o`u leur temps de vie devient tr`es court) n’implique pas la disparition de

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MESURE DE LA VISCOSITE´ l’effet de la polarisation.

D’autres probl`emes apparaissent si on assimile l’ He liquide `a haute temp´erature `a un gaz de fermions : L’ He liquide dans le r´egime non d´eg´en´er´e est un milieu dense de particules dont la longueur d’onde

  !

 est comparable `a la port´ee du potentiel d’interaction. Dans ce syst`eme, les collisions entre particules s’effectuent selon des moment angulaires ´elev´es (   



). Or, nous avons vu (cf. 1.1.1) que ces collisions de moment angulaire ´elev´e d´etruisent rapidement les effets de coh´erence quantique. Dans un “gaz” aussi dense, l’effet de la polarisation sur les propri´et´es de transport serait donc probablement tr`es faible. De plus, la longueur d’onde des atomes ´etant ind´ependante de la temp´erature dans l’ He liquide, le coefficient devrait ˆetre constant entre 0,3 K et 1 K. Ceci est en contradiction avec la diminution du facteur que nous observons sur ce domaine de temp´erature.

Le m´ecanisme qui modifie la viscosit´e de l’ He liquide lorsqu’on polarise le syst`eme au-del`a de 0,3 K est donc une question ouverte. Mˆeme si l’existence de l’effet de la polarisation au-del`a du r´egime d´eg´en´er´e donne des indications sur le comportement de l’ He `a haute temp´erature, un

prolongement logique de ce travail serait de compl´eter cette information en mesurant exp´erimentalement l’´echelle de temp´erature qui gouverne cet effet.