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INTRODUCTION

Cette deuxième partie est dédiée à la présentation des études empiriques. Nous entendons par empirique le sens défini par les allemands ; c’est à dire, destiné à produire des données interprétables. Dans ce but, nous avons construit deux études avec des pilotes professionnels confirmés qui se sont déroulées en simulateurs de vol pleine échelle. Ces deux études ont fait l’objet d’un enregistrement audio et vidéo ainsi que d’une observation en parallèle. Nous précisons que ces deux études concernent toutes deux le pilotage d’avion civil possédant des cockpits très automatisés et informatisés avec présentation des informations sur écrans cathodiques.

La première étude est une situation quasi expérimentale, dans le sens où elle se déroule sur un terrain normal d’activité pour les sujets mais dans une situation construite spécifiquement pour l’étude. Les dysfonctionnements choisis pour cette étude ne possèdent pas de procédures précises de résolution de ce type de pannes surprises mais une consigne générique d’action de « retour en manuel » qui dit en substance que lorsqu’on ne comprend plus les automatismes ou que le pilote a un doute sur leur fonctionnement correct, on doit revenir en manuel ou en «pilotage basic ». le pilotage en basic impliquant que le ou les systèmes en cause doivent être déconnectés. L’interprétation des compagnies et des personnes qui ont conçu cette consigne est que dès que la détection du dysfonctionnement est faite une action est exigée en réponse : le passage en manuel. De leur point de vue sur l’exécution de cette consigne, il ne devrait pas y avoir de problème à résoudre et donc pas y avoir d’engagement d’une activité de compréhension ou de diagnostic.

Notre questionnement générique quand à cette étude est donc de savoir si les équipages agissent avec ce minimum de compréhension qu’est l’identification d’une situation et l’application d’une décision d’action pré-construite ou si l’activité de compréhension se poursuit plus avant ?Car jusqu’à présent concernant cette question, les données récoltées dans la littérature sont soit des retours verbaux à postériori et ou des données issues d’expertises d’accident mais aucune ne montre d’analyse de l’activité.

Une autre question doit être soulevée ici : la consigne générique est elle univoque ?

Pour en savoir plus à ce sujet, nous avons, en complément de cette première étude, effectué un sondage. Il a été mené auprès d’une population de professionnels pilotes et instructeurs européens

différente de celle de la première étude, afin de connaître leur interprétation à froid de la consigne générique de retour en manuel « back to basic ».

Partant de l’hypothèse qu’il est possible qu’ils s’engagent contre toute attente dans un processus de compréhension de la situation. Notre deuxième questionnement s’articule autour de trois questions : (1) Comment s’effectue cette activité de compréhension ? (2) quel est la profondeur de ce traitement ? (3) Est ce que nous pouvons valider l’idée que la variable réglante de cet approfondissement est la complexité telle que déjà définie ? (nous décrirons précisément cette activité de compréhension durant le traitement des pannes).

Cette variable est donc au cœur de notre question sur le choix entre la compréhension et l’action telle qu’exposé par le titre de cette thèse. Nous avons vu que la complexité cognitive dépend elle même des ressources cognitives et des connaissances opérationnelles disponibles au sujet. Nous savons par ailleurs que théoriquement (Amalberti, 1996) la baisse des ressources cognitives va aider au tri des incompréhensions à traiter ; car elle va certainement avoir un effet sur la possibilité d’investissement de nouvelles ressources dans la possibilité ou non de s’élever dans les hiérarchies d’abstraction (Rasmussen, 1986) et donc directement avoir un effet sur le tri des incompréhensions à traiter ou non.

Ceci nous amène au questionnement suivant :

Peut on se servir de variables reconnues comme indicatrices des indices de la dégradation de l’activité des pilotes comme la coopération ?

Qu’en est il de l’apprentissage des connaissances opérationnelles en situation de qualification de type sachant qu’elles ont un rôle prépondérant dans la création de complexité cognitive ?

Il est important de préciser que pour gérer ce type de situations atypiques et rares, les équipages ne disposent pas de formation spécifique. Or, aux vues de l’importance que joue les connaissances des sujets dans leur compréhension de la situation il nous est paru intéressant d’aller étudier la génération de ces connaissances opérationnelles. C’est pourquoi, nous regarderons dans une deuxième étude l’activité des instructeurs dans une situation réelle de formation sur ce type d’appareil. Nous choisissons cette situation de qualification de type, afin de souligner les aides intéressantes pouvant être développées, dans le but d’aider les équipages à l’identification de l’état de fonctionnement des automatismes.

Quels outils sont développés par les instructeurs pour aider à la compréhension et l’apprentissage des systèmes automatisés ?

Notre dernier questionnement, après discussion de ces différents résultats, sera tourné vers les validations, les limites et les apports que nous pouvons faire aux différents modèles existants actuellement et touchant à la compréhension en environnement dynamique. Nous élargirons pour finir vers des recommandations que nous pouvons émettre à l’issu de ce travail et concernant plus le domaine de l’ergonomie.

CHAPITRE III ETUDE DES PROCESSUS DE COMPREHENSION ET D’ACTION LORS DE