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Etude électrophysiologique chez la souris

Les études électrophysiologiques ont pour but d’explorer l’activité électrique du cœur. Elles fournissent au clinicien ainsi qu’au chercheur des informations sur les propriétés fonctionnelles des tissus cardiaques. Elles l’éclairent sur la nature des troubles du rythme cardiaque et les possibilités de traitement.

La détermination des intervalles de conduction fait appel au recueil du potentiel du faisceau de His. Le signal enregistré permet de séparer les temps de conduction correspondant à la traversée des différentes structures spécialisées de la jonction auriculo- ventriculaire : le nœud AV et le système de His-Purkinje. Jusqu’alors on ne disposait que de l’espace PR mesure sur l’ECG de surface. Or celui-ci évalue globalement le temps mis par l’impulsion cardiaque issue du nœud SA à atteindre le myocarde ventriculaire. L’électrocardiographie intracardiaque, en fournissant cette information, a joué un rôle décisif dans la connaissance des troubles du rythme et de la conduction cardiaque.

Les modèles animaux de trouble électrophysiologiques ont contribué à la compréhension des mécanismes associés à la maladie cardiaque chez l’Homme. Plusieurs modèles murins de maladies humaines avec des conséquence électrophysiologiques cardiaques ont été développés, y compris des modèles de troubles familiaux de conduction (Kasahara et al., 2001; Schott et al., 1998), de cardiomyopathies hypertrophiques familiales (Geisterfer-Lowrance et al., 1996; Yang et al., 1999), de syndrome du QT long congénital (Drici et al., 1998), et des défauts de jonction gap (Hagendorff et al., 1999; Reaume et al., 1995). Ces modèles murins présentent notamment des anomalies électrophysiologiques qui peuvent être caractérisés par des techniques électrophysiologiques ex vivo et in vivo. La signification physiologique des modifications génétiques qui ont été précédemment caractérisées uniquement au niveau cellulaire ou moléculaire peut maintenant être étudiée dans des organes entiers, ou chez l'animal intact.

L’enregistrement sur un cœur isolé et perfusé par le système de Langendorff fournit aux physiologistes une possibilité d'étudier le cœur comme un organe isolé, sans l'influence du système nerveux autonome. Il permet également la régulation fine de son milieu immédiat en termes de changement des compositions, du pH, de la température, du contenu de l’oxygène, de la concentration des médicaments et, tout simplement en

modifiant la composition du liquide de perfusion qui est fournie par le système Langendorff. L'électrocardiogramme (ECG) est obtenu à partir des enregistrements des aiguilles électrodes placées dans le myocarde, et on peut enregistrer les électrogrammes auriculaires et ventriculaires et ainsi que des stimulations programmées en utilisant des électrodes de stimulation (Guerrero et al., 1997; Thomas et al., 1998).

La technique d’exploration endocavitaire chez la souris a été développée pour la première fois par l’équipe de Berul, Boston - USA en 1996. Notre laboratoire à Nantes en France a développé et appliqué une technique d'électrophysiologie cardiaque in vivo chez la souris afin d'évaluer directement le rôle des implications en rythmologie des produits de gènes spécifiques dans les changements de conduction cardiaque ainsi que la survenue des arythmies sévères comme la fibrillation auriculaire (Royer et al., 2004), les blocs de conduction AV (Mangoni et al., 2006; Piron et al., 2008) et les tachycardies ventriculaires (Ouvrard-Pascaud et al., 2005; Gellen et al., 2008; Aubin et al., 2010). Ces études sont basées sur les protocoles de stimulation cliniques en rythmologie humaine et permettent une évaluation des caractéristiques de la conduction du cœur de la souris par une approche endocardique, y compris l'évaluation de la réponse électrophysiologique à la stimulation programmée et des agents pharmacologiques. De ce fait, nous avons utilisé des cathéters octapolaires, de 1.2F à 2F, introduit en percutané par la veine jugulaire droite. Les électrodes sont capables de détecter et de transmettre l’activité électrique produite à l’intérieur du cœur. Les enregistrements sont effectués sur le mode bipolaire.

Figure 23 : Un cathéter 2F octapolaires pour les utilisations dans l’étude électrophysiologique chez la souris (en bas) en comparaison avec un cathéter

électrophysiologique standard 5F bipolaire (en haut) utilisées dans les études cliniques humaines (Berul, 2003).

Les signaux recueillis correspondent à une différence de potentiel entre deux électrodes. Chez l’Homme, une fois introduit, le cathéter est poussé sous contrôle radioscopique dans la veine cave inferieure puis l’oreillette droite, en revanche, chez la souris, il faut le faire « en aveugle », sans contrôle radioscopique, mais en surveillant les signaux d’ECG et d’ECG intracardiaque sur l’écran de l’ordinateur afin de déterminer la position du cathéter. Surtout, entre les deux activités auriculaire et ventriculaire, est recueilli d’abord un potentiel bref proche du ventriculogramme que l’on rapporte à la dépolarisation de la branche droite du faisceau de His (figure 24). A cet endroit, l’activité auriculaire est au moins aussi ample que celle du ventricule. Ainsi trois électrogrammes successifs sont enregistrés dans la dérivation du faisceau de His : Auriculaire (A), hisien (H) et ventriculaire (V).

Figure 24 : Les intervalles AH et HV mesurées chez les souris sauvages (à gauche,+/+) par rapport aux souris KO-Cav3.1 (à droit, -/-). Nous avons constaté un allongement de l’intervalle AH chez les souris KO-Cav3.1. Lead I : l’ECG de surface D1, intra : électrogramme

intracardiaque (Mangoni et al., 2006).

Les études électrophysiologiques chez la souris permettent, comme chez l'homme, de déterminer un certain nombre de paramètres électrophysiologiques caractérisant la fonction du nœud sinusal (le temps de récupération du sinus), les propriétés de

conduction du nœud AV (phénomène de Wenckebach) ou encore les périodes réfractaires, en complément des paramètres de l'ECG de surface. Mais elles permettent aussi, à l'aide de protocoles précis de stimulation de déclencher des arythmies (figure 25 et 26).

Figure 25 : La fibrillation auriculaire induite par une stimulation rapide (burst pacing) chez une souris sauvage. Noter l’aspect fibrillatoire caractéristique de l’activité atriale, ainsi que

l’accélération et l’irrégularité des complexes QRS (Royer et al., 2004).

Figure 26 : La tachycardie ventriculaire polymorphique induite par une stimulation programmée chez une souris transgénique surexprimée de récepteur des minéralocorticoïdes

(Ouvrard-Pascaud et al., 2005).

En général, le but ultime des travaux de recherche est l'amélioration de notre connaissance du rôle des gènes dans la pathogenèse des maladies cardiovasculaires associées avec des arythmies. L’utilisation des modèles murins transgéniques est vraiment importante dans la recherche des mécanismes de troubles du rythme cardiaque. Cependant, il faut tenir compte des différences de propriétés électrophysiologiques non

seulement entre les espèces (homme-souris, voir plus haut), mais aussi entre les différents fonds génétiques de souris qui présentent des variations importantes de leurs paramètres électrophysiologiques et de leur susceptibilité aux arythmies.