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Canaux calciques dépendant du potentiel

1.2 Mécanismes de l'activité automatique

1.2.3 Canaux calciques dépendant du potentiel

Grâce à la technique de patch-clamp, Hagiwara et al. (1998) ont montré, dans les cellules sinusales du cœur de lapin, la présence de deux types de courant calcique : le courant calcique de type lent, ICaL, ayant un seuil d’activation de -40 mV, et un courant

calcique de type transitoire, ICaT, qui s’inactive plus rapidement et plus complètement en

fonction du temps et présente un seuil d’activation plus négatif, aux environs de -60 mV. Ces courants correspondent à deux familles distinctes de canaux : les canaux Ca2+ de type T et ceux de type L (Ono et al., 2005). Les canaux calciques lents de type L sont présents en grande quantité dans le tissu ventriculaire par rapport aux canaux T qui, eux, sont plus abondants dans l’oreillette et dans les tissus nodaux (Vassort et al., 2006).

Les canaux calciques possèdent des sous-unités canalaires comportant quatre domaines étant équivalent à une sous-unité  d’un canal potassique à 6 segments transmembranaires (figure 8). Utilisant une faible concentration d’ions nickel (40 μM), les auteurs ont bloqué ICaT sans affecter ICaL. Dans ces conditions, ils observent un

ralentissement de la pente de dépolarisation diastolique, ce qui suggère une contribution du courant calcique de type T à cette phase. Depuis, la contribution du courant calcique ICaT à la dépolarisation diastolique de cellules cardiaques a été confirmée (Zhou et al.,

1994). Ces canaux constituent la voie principale d’entrée du Ca2+ dans les cellules pacemaker. Parmi les trois gènes décrits comme codants un canal calcique de type T fonctionnel, les gènes Cav3.2 et surtout Cav3.1 sont les principaux responsables de son expression dans les cellules automatiques cardiaques alors que le gène Cav3.3 ne semble pas y être transcrit (Couette et al., 2006 ; Mangoni et al., 2006). La discrimination entre la participation de l’une ou l’autre de ces sous-unités au courant ICaT peut être faite dans

certaines conditions grâce à leur sensibilité différentielle aux ions Ni2+. Les canaux Cav3.1 sont moins sensibles au blocage par les ions Ni2+ (IC50=216 M) que les canaux Cav3.2 (IC50=13 M) (Lee et al., 1999). Enfin ces canaux sont insensibles à la stimulation -adrénergique et aux dihydropyridines (DHPs) contrairement aux canaux de type L.

Figure 8 : La composition moléculaire des canaux ioniques cardiaques : Na+, Ca2+, et les canaux K+. En haut: Les quatre domaines d'une sous-unité  Cav (ou Nav) forment un canal Ca2+ (ou Na+) monomérique, tandis que quatre sous-unités  se combinent pour former

des canaux potassiques tétramériques Kv ou Kir. En bas: Schéma illustrant la localisation des différentes sous-unités accessoires (Nerbonne et Kass, 2003).

Le courant calcique de type T joue un rôle important dans le développement et la différenciation cardiaque chez différentes espèces durant les phases embryonnaire et néonatale (Furukawa et al., 1992, Ferron et al., 2002). De façon intéressante, les études précédentes sur le remodelage ventriculaire ont montré une réexpression du courant calcique de type T dans différents modèles comme chez le chat (Nuss et al., 1993) et le rat (Martinez et al., 1999, Huang et al., 2000, Izumi et al. 2003). Les études antérieures montrent que les bloqueurs du courant calcique de type T réduisent le remodelage cardiaque post-IDM (Sandmann et al., 2001), cependant, ces bloqueurs d’ICaT présentent

des effets non-spécifiques sur d’autres courants ioniques (Fareh et al., 2001 ; De Paoli et al., 2001 ; Perchenet et al., 2000 ; Chouabe et al., 2000 ; McNulty et al., 2004).

Les canaux calciques de type L sont largement exprimés dans les tissus cardiaques. Le rôle fondamental de ces canaux réside dans l’initiation de la contraction myocardique par le mécanisme de libération du calcium du réticulum sarcoplasmique par le calcium (calcium-induced calcium release, (CICR)). Ils s’activent pour des potentiels de membrane compris entre -50 et -30 mV et possèdent une inactivation dépendante à la

fois du Ca2+ et du potentiel. Les canaux Ca2+ de type L sont sensibles aux dihydropyridines (DHPs) antagonistes comme la nifédipine, et agonistes, comme le BayK-8644 (Mangoni et al., 2006).

Ces canaux sont constitués par une sous-unité 1 centrale, formant le pore, associée à différentes sous-unités accessoires (2-,  et ). A ce jour, quatre sous-unités 1 ont été clonées, constituant la famille des Cav1.X. Seules Cav1.2 et Cav1.3 sont exprimées dans le système cardiovasculaire, la sous-unité Cav1.2 étant le déterminant moléculaire majoritaire d’ICaL. La sous-unité Cav1.3, après avoir été considérée comme

étant spécifique des neurones et des cellules neuroendocrines, a été identifiée dans l’oreillette et le nœud SA (Mangoni et al., 2006). Cette sous-unité forme des canaux qui ont un seuil d’activation plus négatif et une sensibilité aux DHPs plus faible que ceux formés à partir de la sous-unité Cav1.2. Par ailleurs, leur cinétique d’inactivation est plus lente que celle des canaux Cav1.2.

Dans le nœud SA, l’activité des canaux calciques de type L est régulée par le niveau basal de phosphorylation qui dépend à la fois de la PKA et de la protéine CaM kinase II (CaMKII) activée par le complexe calcium/calmoduline (Petit-Jaques et al., 1993 ; Vinogradova et al., 2000). Il a été montré que dans les myocytes ventriculaires, la CAMKII facilite l’ouverture des canaux en réponse à une dépolarisation membranaire ou une entrée de Ca2+ modulant ainsi l’amplitude et l’inactivation du courant ICaL (Yuan et

al., 1994 ; Xiao et al., 1994 ; Dzhura et al., 2000). Par ailleurs, un modèle de souris transgénique a récemment permis de montrer que l’inhibition de cette kinase induisait un ralentissement de la conduction AV (Khoo et al., 2005).

Il a été suggéré qu’une libération de Ca2+ du réticulum sarcoplasmique (RS) par les récepteurs à la ryanodine peut survenir lors de la dépolarisation diastolique et activer l’échangeur Na+-Ca2+ (NCX) pour produire un courant entrant qui participe à la dépolarisation des cellules sinusales (Lakatta et al., 2004). Ce même mécanisme dans les myocytes ventriculaires est responsable de la survenue de troubles du rythme sous la forme de post-dépolarisations retardées. Les protéines de l’homéostasie calcique sont plus exprimées en périphérie du nœud sinusal que dans le centre (Musa et al., 2002). Par conséquent, fonctionnellement, le déclenchement d’une activité pacemaker par les

cellules centrales du nœud dépend moins de la libération de Ca2+ par le RS (Lancaster et al., 2004).