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Eternité du premier moteur. - Solution du problème posé au chap. 3

Dans le document CLAN9 LA PHYSIQUE ARISTOTE (Page 126-129)

LIVRE VIII: ÉTERNITÉ DU MOUVEMENT. NATURE DU PREMIER MOTEUR ET DU PREMIER

Chapitre 6: Eternité du premier moteur. - Solution du problème posé au chap. 3

La thèse.

Puisqu’il faut que le mouvement existe toujours et ne s’interrompe jamais, il doit y avoir une chose éternelle qui meuve en premier, soit une seule, soit plusieurs, et le premier moteur doit être immobile. Que chacune des choses à la fois immobiles et motrices soit éternelle, ce n’est pas actuellement notre propos. Quant à la nécessité qu’il existe un être qui, sans être mû soi-même d’aucun changement externe, ou absolu ou accidentel, soit capable de mouvoir autre chose, elle est évidente d’après ce qui suit.

Premier argument: éternité.

Admettons, si l’on veut, l’existence de choses qui puissent tantôt être et tantôt ne pas être, et cela sans génération ni destruction. Peut-être en effet, s’il y a une chose sans parties [l'âme]

qui tantôt est, tantôt non, n’est-ce pas forcément à un changement qu’une chose de cette sorte devra son existence et sa non-existence? De plus, parmi les principes à la fois immobiles et d’autre part capables de mouvoir, admettons aussi pour quelques-uns d’entre eux que tantôt ils soient, tantôt ne soient pas. Oui, mais cela n’est certes pas possible pour tous [et il en faut d’éternels].

En effet, il est clair que, pour les choses qui se meuvent elles-mêmes, il doit y avoir une cause de ce fait que tantôt elles sont, tantôt ne sont pas. En effet ce qui se meut soi-même doit dans son tout avoir une grandeur, puisqu’aucune chose sans parties n’est mue; mais d’autre part rien de ce qu’on a dit n’impose cette nécessité au moteur. Et maintenant, la génération et la destruction, comme leur continuité, ne peuvent avoir leur cause dans les choses, même immobiles, qui ne seraient pour tant pas éternelles. Ni non plus [en entrant dans le détail] dans celles qui, agissant d’ailleurs toujours, meuvent l’une ceci, l’autre cela. Ni l’éternité, ni la continuité du mouvement ne peuvent avoir pour cause, ni chacun de ces moteurs, ni tous; car elles impliquent [dans l’hypothèse d’an moteur unique], l’éternité et la nécessité, et d’autre part la série de tous les moteurs est infinie et ne forme jamais un système. On voit donc par suite que, même si parmi les choses immobiles et motrices quelques-unes sont principes un nombre incalculable de fois même si beaucoup de choses automotrices ne sont détruites que pour faire place à d’autres; même si, telle chose immobile mouvant ceci, il y en e un autre qui meut cela, - il n’en existerait pas moins quelque chose qui les enveloppe toutes, et qui, étant à part de chacune, soit la cause de l’existence et de la non-existence et de la continuité du changement, et c’est ce qui donne le mouvement à ces chose automotrices, celles-ci le transmettant ‘s d’autres. Si donc le mouvement est éternel, il y aura aussi un moteur premier éternel, supposé qu’il n’y en ait qu’un; s’ils sont plusieurs, plusieurs moteurs [également]

éternels.

Unité.

Or il faut lui attribuer l’unité plutôt que la pluralité, la finité plutôt que l'infinité. A conséquences égaies, en effet, il faut toujours choisir plutôt le limité; car dans les choses naturelles, c’est le limité et le meilleur qui doit exister plutôt si cela est possible. Et il suffit d’un seul principe qui, étant le premier entre les moteurs immobiles et étant éternel, sera principe du mouvement pour les autres choses.

Il est clair aussi d’après ce qui suit que le premier moteur doit être une chose une et éternelle.

En effet, on l’a montré [chap. 1], nécessairement le mouvement doit être toujours. S’il est tou jours, nécessairement aussi il est continu; car ce qui est toujours est continu, tandis que le consécutif n’est pas continu. Cependant, s’il est continu, il est un. Or il sera un, si Je moteur

est un et si le mû st un; car, si le moteur et le mû sont toujours autres, le mouvement total n’est pas continu, mais consécutif.

2° argument.

C’est sur ces raisons qu’on peut s’assurer de 1'existence d un premier immobile, et aussi en considérant de nouveau les principes du mouvement dans les moteurs. Certes, l’existence de choses qui sont tantôt en mouvement et tantôt en repos est évidente; et c’est par là qu’on voit qu’il est faux, et que tout soit mû ou que tout soit en repos, et que certaines choses soient toujours en mouvement, les autres toujours en repos; en effet les choses qui participent aux deux et qui ont la faculté d’être tantôt en mouvement, tantôt en repos, montrent bien ce qui en est.

L’existence de telles choses est claire pour tous, mais nous voulons montrer aussi quelle est la nature respective de ces deux classes, savoir qu’il y a des choses toujours immobiles, d’autres toujours mues. En progressant vers ce point et en posant que tout mû est mû par quelque chose [ch. 4], laquelle est ou immobile ou mue, et, si elle est mue, l’est soit par elle-même, soit toujours par une autre, nous en sommes ainsi venus [ch. 5] à admettre que le principe des choses mues est, en tant qu’elles sont mues, ce qui se meut soi-même, et, d’autre part, pour elles toutes, l’immobile. Or l’expérience nous montre avec évidence qu’il y a certains êtres qui ont cette propriété de se mouvoir eux- mêmes, par exemple le genre des vivants et celui des animaux.

Solution d'une objection.

C’est même cela qui a suggéré l’idée d’une objection. [ch. 2 s. fin.] que le mouvement pouvait bien survenir dans un être, alors qu il n'y existait aucunement, puisque c’est ce qu’on voit se passer chez les êtres en question immobiles à un moment, les voilà, semble-t-il, qui se meuvent. Il faut donc remarquer que ces êtres se meuvent d’un seul mouvement, et en outre qu’ils ne se le donnent pas absolument; car la cause n’en provient pas de l’être lui-même, suais il y a dans les animaux d’autres mouvements physiques qu’ils ne se donnent pas eux-mêmes, comme l’accroissement, le décroissement, la respiration, dont chacun des êtres, encore qu’en repos, est mû et alors qu’il n’est pas lui- même la cause de son mouvement. La cause de ce fait est le milieu et un grand nombre des choses qui entrent en l’être: ainsi, pour certains la nourriture; car, une fois qu’ils l’ont digérée, ils s’endorment; puis, lorsqu’elle a été répartie et assimilée, ils s’éveillent et se meuvent eux-mêmes, mais le principe premier du mouvement leur est extérieur [ch. 2 s. fin.]. Aussi n’est ce pas un mouvement qu’ils se donnent eux-mêmes et de façon continue; car ils ont un autre moteur [le ciel], lui-même mû et en rapport variable avec chacun de ces automoteurs. Mais dans tous le moteur premier [l'âme]

la cause de l’automotricité, s’il est mû par soi-même, l’est cependant par accident; en effet le corps change de lieu et par suite il en est de même pour l’automoteur, logé dans son corps comme dans le levier.

D’après cela on peut se convaincre que, si l’on a affaire à des êtres immobiles, moteurs mais mus eux-mêmes par accident, il est impossible que le mouvement soit continu. Par suite, puisqu’il est nécessaire qu’il y ait du mouvement continuelle ment, il faut qu’il existe une chose qui soit le premier moteur, immobile et ne l’étant pas par accident s’il doit y avoir dans les êtres, comme nous l’avons dit [ch.1], un mouvement indéfectible et impérissable, et si l’être total doit aussi rester immuable en soi et en sa même place; en effet, l’immutabilité du

principe entraîne nécessairement aussi celle du tout, en vertu de sa continuité par rapport au principe.

Transmission du mouvement au monde.

D’autre part, il faut distinguer entre le mouvement accidentel que l’être se donne a lui-même, et celui qu il reçoit d autre chose; car celui qui vient d’une chose étrangère appartient même à certains principes des choses célestes qui subissent plusieurs transports, tandis que l’autre n’appartient qu’aux êtres périssables.

Maintenant, s’il y a toujours un tel moteur, immobile en soi et éternel, nécessairement la première chose qui est mue par lui [le ciel des fixes] est éternellement mue. Et c’est évident pour cette raison aussi que la génération la destruction, le changement ne peuvent se produire pour les autres choses, à moins que le mouvement ne soit donné par une chose mue. En effet, le moteur immobile donnera toujours le même unique mouvement et de la même manière, en tant qu’il ne change en rien relativement au mû. Au contraire, un être qui est mû, ou par l’immobile ou par ce qui est déjà mû, du moment que son rapport aux choses est variable, ne sera pas cause d’un mouvement identique, mais, se trouvant dans des lieux ou dans des formes contraires, fera que chacun des êtres a des mouvements contraires et qu’il est tantôt en repos, tantôt en mouvement.

Conclusion.

Voilà résolue, après ce qui vient d’être dit, la difficulté posée au début [du ch. 3]: pourquoi donc tout n’est-il pas ou en repos ou en mouvement, ou certaines choses toujours en mouvement, les autres toujours en repos, mais certaines tantôt ers mouvement tantôt en repos On en voit maintenant la raison c’est que les unes sont mues par un moteur immobile éternel, d’où leur changement ôter- ne! les autres, par une chose mue et changeante, d’où également leur changement nécessaire. Quant à l’immobile, on l’a dit, en tant qu’il ne cesse pas d’être simple, identique et dans le même état, il mouvra d’un mouvement unique et simple.

Chapitre 7: Quel est le mouvement donné par le premier moteur? Primauté

Dans le document CLAN9 LA PHYSIQUE ARISTOTE (Page 126-129)