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Chapitre II : Matériau et procédures expérimentales

II.2 Essais de caractérisation mécanique et de CSC-I

II.2.2 Essais de traction en milieu méthanol iodé

II.2.2.1Préparation des échantillons

Les éprouvettes utilisées lors des essais de CSC-I ou d’immersion en milieu méthanol iodé ont été polies avant essai. Il est très compliqué de polir du Zircaloy-4 recristallisé sur de « grandes » surfaces. Pour avoir un très bon état de surface, des attaques à l’acide fluorhydrique sont possibles, ce qui correspond à la procédure de préparation des éprouvettes notamment utilisée par A. Serres (Serres 2008). Cependant l’utilisation de l’acide fluorhydrique n’est pas anodine, en termes de manipulation comme de déstabilisation de la couche d’oxyde. Etant donné le nombre d’essais à réaliser dans cette étude, il a été décidé de se passer de ces attaques pour l’obtention d’un bon état de surface. Aucune procédure de polissage adaptée n’étant disponible dans la littérature, une procédure originale a donc été mise en place, non sans difficulté.

Ainsi, les éprouvettes sont collées côte-à-côte sur un plot de polissage à l’aide d’un ruban adhésif double face. Les plots de polissage ont un diamètre de 50 mm et permettent de polir 7 éprouvettes de traction en même temps. Le polissage commence par l’utilisation de papiers SiC (non magnétiques ni adhésifs), posés sur une table lisse, de granulométrie 600, 1200, 2400 puis 4000. Toute la procédure de polissage est réalisée à la main, sans polisseuse automatique. Pour chaque papier, des allers-retours sont effectués jusqu’à l’obtention d’une surface bien uniforme. Des suspensions diamantées sur des draps ou feutres sont ensuite utilisées. Les dénominations utilisées sont celles de la marque Escil. Les draps et feutres utilisés sont magnétiques et posés sur le plateau magnétique d’une polisseuse manuelle mais on n’utilise toujours pas la rotation du plateau. Les différentes étapes sont les suivantes :

Figure II.6 : Profil de dureté mesuré par nano-indentation. Convergence vers la valeur de dureté Vickers sous 200 g déterminée précédemment au bout de 2 µm. Les barres d’erreur verticales correspondent à l’écart moyen des mesures.

Figure II.7 : Cartographie de l’éprouvette A2T1-54 après essai de CSC-I. Illustration de l’efficacité de la protection des tranches des éprouvettes par la pâte silic onée sur la partie de la longueur utile exposée à l’iode.

• Suspension diamantée 10 µm sur drap D1. L’état de surface à atteindre est asymptotique pour cette taille de grain. Il est grisé, avec de nombreuses rayures dues à la suspension mais présente un bon effet miroir. Cette étape est très particulière car entre l’état de surface initial et l’état souhaité, on passe par un état intermédiaire qui semble à l’œil meilleur que l’état final (pas d’aspect grisé et effet miroir équivalent). Durant cette étape, on appuie assez fortement sur le plot et on effectue des mouvements circulaires. Cette étape peut durer jusqu’à 15 min.

• Suspension diamantée 3 µm sur drap D1. Elle permet d’enlever la plupart des rayures de l’étape précédente. Cependant, cette suspension est propice à la formation de cratères sur la surface. Le temps à passer sur cette étape est compris entre 30 et 45 s selon la taille de la surface à polir.

II.2 Essais de caractérisation mécanique et de CSC-I 63 • Suspension diamantée 1 µm sur feutre FD1 pendant trois minutes en appuyant modérément sur le plot. Les rayures de la première étape disparaissent totalement. Cependant, si l’on saute l’étape du 3 µm, le résultat n’est pas le même. A cette étape, les défauts issus des étapes précédentes sont visibles ; le choix de recommencer la procédure de polissage se fait éventuellement ici.

• Suspension diamantée 1/4 µm sur feutre ALD pendant 4 min.

La rugosité avant et après polissage a été caractérisée par micro-rugosimètre au Laboratoire d’Etude de la Corrosion Aqueuse du Département de Physico-Chimie du CEA Saclay. Un profil de rugosité a été réalisé sur un échantillon non poli et sur un échantillon poli, sur une longueur d’évaluation de 10 mm avec des mesures tous les microns. Les paramètres caractéristiques des états de surface obtenus sont donnés dans le Tableau II.3 ; les résultats illustrent l’efficacité de la procédure.

Tableau II.3 : Caractéristiques des profils de rugosité réalisés.

Paramètre Signification Surface

initiale

Après polissage Ra (µm) Rugosité, écart moyen arithmétique du profil 0.295 0.024

Rz (µm) Hauteur maximale du profil 2.268 0.1946

Suite au polissage, des essais de nano-indentation sur le plan TL ont été réalisés au SRMA/LC2M, pour évaluer l’écrouissage de surface résiduel avec un indenteur de type Berkovich (pyramide à base triangulaire). Les forces imposées sont comprises en 1 et 500 mN, pour des profondeurs d’indentation comprises entre 70 et 4300 nm. Le profil de dureté obtenu est donné en Figure II.6 : on observe une augmentation exponentielle de la dureté à mesure qu’on se rapproche de la surface. Cela résulte de l’écrouissage de surface mais également de l’influence de la rugosité sur la mesure de dureté. En effet, Bobji a mis au point un modèle numérique permettant d’observer l’influence de la rugosité sur les mesures de dureté à très faible profondeur (Bobji 1998). En considérant la pénétration d’un indenteur conique lisse non déformable dans un solide mou avec une rugosité de 2 nm, il a évalué que la dureté pouvait être multipliée par 5 entre une profondeur de 200 nm et 10 nm. En l’état, on considère que les éprouvettes utilisées pour la CSC-I ont un écrouissage de surface s’étendant en moyenne sur un demi-grain. Cependant, dans les calculs et les dépouillements d’essais, nous n’en tiendrons pas compte.

Les éprouvettes étant découpées par électro-érosion, leurs tranches présentent un aspect brûlé, avec une forte rugosité. Amorcer des fissures de CSC-I à ces endroits ne serait pas représentatif. De plus, les fissures de CSC-I ont tendance à s’amorcer d’abord sur les arêtes d’éprouvettes épaisses (Serres 2008). Pour éviter ces amorçages intempestifs, on utilise une pâte siliconée (Rhodorsil CAF4 de la marque Bluestar Silicon) pour protéger les tranches. En appliquant avec soin la pâte sur les tranches et arêtes, plus des trois quarts de la largeur de la zone utile restent exposés au milieu corrosif. La pâte résiste jusqu’à la striction et son efficacité est illustrée sur la Figure II.7.

La présence éventuelle de contrainte résiduelle à cause de la méthode de découpe a été recherchée notamment par la réalisation de petites empreintes de dureté Vickers (masse de 10 g) sur une section d’éprouvette. Les résultats sont présentés sur la Figure II.8. Aucune tendance n’est mise en évidence à l’approche d’un bord électro-érodé, signifiant l’absence d’écrouissage et de contrainte associée. Lors de la découpe, des parties du matériau sont fondues puis solidifiées. Des contraintes mécaniques, dues aux variations de volume et non nécessairement liées à un écrouissage, peuvent être introduites. Kruth a étudié les contraintes résiduelles induites par cette découpe par une méthode d’amincissement électrolytique : une pièce d’acier C45 est progressivement amincie vers un bord électro-érodé et sa déflection est une mesure des contraintes. (Kruth 2000). La découpe engendre des

contraintes de traction sur une faible distance, dépendant de la méthode adoptée. Après trois passes de finition, comme pour les échantillons de cette étude, aucune contrainte n’est mesurée à plus de 20 µm du bord. La zone affectée par la découpe est donc très faible et ne devrait pas influer sur les résultats de cette étude.

Figure II.8 : Profils de dureté Vickers (masse de 10 g) à partir d’un bord électro-érodé (rouge) et d’une surface du feuillard (rouge) réalisés sur une section d’éprouvette de traction (Plan LN). Mesures (gauche) et schéma explicatif (droite).

Figure II.9 : Montage c omplet de circulation du méthanol iodé sur la mac hine de traction. Un bras aspirant relié à un extracteur d’air à filtre pour c apturer les vapeurs de méthanol issues d’une éventuelle fuite sur le montage.

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II.2.2.2Circulation de méthanol iodé

Pour réaliser les essais de CSC-I, il a été choisi de réaliser une circulation de méthanol iodé dans un circuit fermé, installé sur la machine de traction.

L’éprouvette est placée à travers un premier tronçon de tuyau percé radialement (diamètre interne 5 mm) en caoutchouc nitrilé puis un colmatage est effectué avec la même pâte siliconée pour assurer l’étanchéité. L’utilisation de connecteurs rapides entre les tuyaux en caoutchouc permet de venir insérer l’éprouvette, montée sur ses mors, et placée hermétiquement dans ce premier tronçon de tuyau, sur le reste du circuit avant le lancement de l’essai. Auparavant, de part et d’autre de l’éprouvette, les connecteurs auront été fixés aux mors par un dispositif en forme de bras. Ce dispositif permet de reprendre les efforts qui pourraient apparaitre lors de la connexion de ce premier tronçon au reste du circuit, et ainsi d’éviter une perte d’étanchéité du circuit au moment du montage. En pratique, l’étanchéité du circuit est garantie jusqu’à une déformation plastique de 10%, soit un déplacement d’environ 2 mm.

En guise de réservoir, on utilise un erlenmeyer de 250 mL muni d’un col rodé 29/32 sur lequel on a placé la tête d’un flacon laveur de gaz permettant de pomper la solution au fond du réservoir et de connecter la sortie du circuit pour le fermer. Un bac de rétention servant également de plateau pour l’ensemble du circuit a été placé sur la ligne de traction.

Pour la circulation du liquide, une pompe péristaltique, de marque VERDEFLEX, est branchée à une alimentation continue 24V ISO-TECH. Cette pompe fonctionne aussi bien pour les gaz et liquides, il n’y a donc pas besoin de l’amorcer manuellement. Aucun élément métallique de la pompe n’entre en contact avec la solution de méthanol iodé.

Une fois le montage complété (Figure II.9), on peut effectuer un essai de traction classique. La très grande majorité des essais de CSC-I sur la machine de traction sont des essais interrompus à vitesse de déformations imposée comprise entre 10-5 s-1 et 10-3 s-1.

La préparation des solutions se fait sous une sorbonne aspirante installée à côté de la machine de traction, par dissolution de billes d’iode solide dans du méthanol et dilutions successives. Les billes d’iode sont pesées sur une balance de marque Sartorius, modèle LA120S, disposant d’une précision de 0,1 mg. Les mélanges et dilutions sont réalisés avec de la verrerie standard (fioles jaugées de 100 et 500 mL, pipette graduée 10 mL). Les concentrations sont exprimées en gramme de diiode solide par gramme de méthanol. Les solutions sont préparées par dissolution d’une masse plus importante que nécessaire dans 100 mL de méthanol, puis par prélèvement du volume correspondant à la masse cible pour 100 mL. On complète alors la solution jusqu’à 100 mL. L’incertitude relative de la concentration provient essentiellement de l’incertitude sur la pesée des billes. Ainsi, pour les plus faibles concentrations des essais de traction (3 10-6 g.g-1), on estime la moins bonne des précisions à 4.4%. Au-delà de 10-4 g.g-1, elle est inférieure à 1%. Quelques solutions de très faibles concentrations (10-8, 5 10-8 et 10-7 g.g-1) ont été réalisées à partir de trois dilutions successives, pour des essais d’immersions. Une dilution supplémentaire ajoute environ 1% d’imprécision avec le matériel utilisé. Au maximum, une incertitude de 6.5% est atteinte.

II.2.2.3Observations après essai

A la fin de l’essai de CSC-I, l’ensemble du circuit est rincé plusieurs fois avec du méthanol. Une fois détachée du tuyau dans lequel elle était, l’éprouvette est nettoyée aux ultra-sons dans un mélange acétone-éthanol pendant 10 min.

La présence de fissures de CSC-I après essai est déterminée par observation sur un microscope optique, de marque Reichert modèle MeF3, du SEMI/LM2E, par un balayage

minutieux au grossissement x1000 avec les oculaires. Ce microscope est équipé d’une platine motorisée 3 axes, Märzhäuser Standard Scan IM 65x65, contrôlable manuellement et par le logiciel d’acquisition d’images Analysis. Un module permet la réalisation automatique de cartographies sur une surface définie. A plusieurs reprises, des cartographies complètes des zones exposées au méthanol iodé (environ 8 mm²) ont été faites au grossissement x500 afin d’établir des statistiques sur la répartition des fissures. Ce point sera détaillé dans le chapitre traitant des essais de CSC-I.

Quand les essais conduisent à la rupture de l’éprouvette, le faciès de rupture est observé au microscope électronique à balayage (MEB) du SEMI/LM2E, modèle JEOL JSM-5400. Dans la suite du manuscrit, ce microscope sera simplement dénommé « MEB ». Il permet des observations nettes jusqu’à un grossissement x5000. A plusieurs occasions, il a été possible d’observer quelques échantillons avec un MEB-FEG (Field Emission Gun ou canon à émission de champ), GEMINI ZEISS 1525, du Service de Recherche en Métallurgie Physique SRMP du CEA Saclay, appelé « MEB-FEG » dans la suite. Il permet des observations jusqu’au grossissement x200000. Le choix du microscope optique pour la détection des fissures résulte d’un compromis entre plusieurs facteurs : le nombre très important d’essais réalisés (plus de 200), la rapidité du balayage au microscope optique via une platine motorisée, les faibles capacités du MEB à disposition dans le service (résolution, vitesse d’acquisition) et l’accès limité à un MEB plus performant. En pratique, les fissures de CSC-I sont relativement ouvertes (> 1 µm), que ce soit à cause d’une dissolution associée ou de la présence de plasticité. Des fissures de 5 µm de longueur sont détectables par la méthode choisie. On considèrera dans la suite la présence de l’endommagement par CSC-I quand de tels défauts auront été repérés. Ce choix sera discuté.

Tableau II.4 : Liste des masses utilisées pour la flexion 4 points et c ontraintes engendrées pour une éprouvette d’épaisseur 450 µm, avec ou sans rallonges.

1 2 3 4 5 6 7 8 9 Masse (g) 491.9 396.8 339.1 293.3 252.3 229.5 194.8 160.1 137.1 σn o m (M P a ) Lext = 32 mm 428.9 346.0 295.7 255.8 220.0 200.1 169.9 139.6 119.6 Lext = 16 mm 124.7 100.6 85.9 74.3 63.9 58.2 49.4 40.6 34.7

Figure II.10 : Dispositif de flexion quatre points, hors milieu sans c hargement (gauc he), dans un bocal hermétique lors d’un essai (droite).

II.3 Essais complémentaires et autres techniques expérimentales 67