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Les entreprises les plus exposées au risque de défaillance sont les entreprises jeunes, en phase d’apprentissage. Les premières années de la vie d’une entreprise ressemblent à un parcours du combattant, ce parcours est mortel pour une PME sur deux selon l’INSEE (près de 56% des entreprises qui déposent leur bilan ont moins de 5 ans)19.

Le taux d’échec des jeunes entreprises n’est pas seulement dû à la malchance et à la conjoncture mais il est surtout dû aux erreurs commises par les dirigeants. Ceci est également vrai pour les entreprises plus anciennes.

L’incompétence des dirigeants est souvent évoquée quand il s’agit de trouver une cause à la mort organisationnelle. Les économistes classiques, tels que Cantillon (1755) et Say (1803), affirment déjà que la faillite est imputable à l’incapacité et à la négligence du dirigeant de l’entreprise20 ; explication que nous retrouvons même chez des auteurs contemporains en gestion comme Altman (1983), d’après lequel « l’incompétence des dirigeants est la cause fondamentale des défaillances d’entreprises » ou bien Argenti (1976) qui considère que les changements, auxquels l’entreprise est confrontée, ne sont pas tels qu’ils puissent mettre en danger une entreprise bien gérée21.

Nous analyserons dans un premier point l’attitude du dirigeant à la tête d’une nouvelle entreprise puis dans un second, les erreurs qu’il devrait éviter.

1-3-2-1 L’attitude du jeune dirigeant :

Le problème de la création, et surtout de la pérennisation des entreprises nouvelles est au centre des préoccupations. En effet, c'est en priorité l'accès à la création qui est facilité au détriment de l'assistance post création. Par ailleurs, les jeunes dirigeants hésitent à demander des conseils à des intervenants extérieurs lorsque des difficultés apparaissent.

Le dirigeant de la jeune entreprise se compose une attitude apparente d'autorité et de solidité qu'exige sa nouvelle fonction de "patron". Il cherche à cacher ses imperfections et ses appréhensions. Il est donc tenté d'éviter ce qui pourrait être perçu comme un indice de son

19 Source INSEE-BODAC, 1996.

20 C. Poroli, op-cite, p, 7.

incompétence et hésite donc à faire appel à des intervenants extérieurs. Ce n'est donc pas l'aspect financier qui représente le frein exclusif dans l'accès à l'aide extérieure mais c'est davantage la gêne d'être perçu comme un "mauvais gestionnaire".

En outre, il apparaît que moins le dirigeant rencontre des difficultés au cours de son processus de démarrage, plus il est enclin à accepter voire même à susciter le conseil. En revanche, pour les autres dirigeants, ceux qui sont confrontés aux pires difficultés, le recours au conseil est l'exception.

Ainsi, en essayant, par tous les moyens, de préserver son indépendance, le dirigeant en démarrage refuse l'aide extérieure parce qu'en ouvrant ses portes à des conseillers, il a la sensation de perdre son autonomie, et sa fierté s'en trouve altérée. Or, en croyant privilégier son autonomie de décision et son indépendance d'action, le dirigeant s'enferme dans un processus de dépendance envers ses fournisseurs et ses créanciers.

De même, si le dirigeant ne parvient pas à déceler la cause de ses problèmes, seul un intervenant extérieur pourra l'aider parce qu'il a le recul et/ou parce qu'il a peut être l'expérience d'une situation similaire.

Le premier objectif affirmé de ces entrepreneurs est, sans hésitation, la pérennité de l'entreprise, l'indépendance venant en second. Au total, le constat est double :

- La véritable mission du conseil n'est pas comprise par le dirigeant d'une jeune entreprise, à fortiori lorsqu'il s'agit d'une première création ;

- La demande de conseil émane prioritairement de ceux qui en ont le moins besoin. Ce comportement spécifique du jeune dirigeant lui fait commettre des erreurs qui sont souvent dommageables.

1-3-2-2 Les erreurs commises par les dirigeants

Les erreurs que nous allons évoquer, à titre d’exemple, ne sont pas commises seulement par les jeunes dirigeants, mais peuvent être commises par les plus anciens d’entre eux.

A- Les erreurs de stratégie, de gestion, et de financement :

A-1 Les erreurs de stratégie

- Mal définir sa stratégie industrielle, dans une conjoncture économique difficile, peut mettre l’entreprise dans une situation difficile (mauvaise structure du chiffre d’affaires, prix incompatible avec le marché, multiplication des produits non rentables…) ;

- Etre dépendant d’un facteur externe : lorsque l’entreprise est otage d’un client unique ou d’un fournisseur, ou lorsqu’elle dépend fortement d’un seul marché, les risques de défaillance sont élevés ;

- Se limiter à un produit unique : ça peut être intéressant au départ. Mais, à long terme, des produits de substitution peuvent apparaître et donc le remplacer. De même, il faut anticiper le vieillissement du produit.

- Faire dépendre le lancement d'une activité nouvelle d'un accord de partenariat : trouver des partenaires pour développer un concept ou pour améliorer ses résultats commerciaux est une excellente idée. Encore faut-il ne pas se tromper d'interlocuteur.

- Sous-estimer la violence de certains marchés : il ne faut pas sous-estimer la puissance d'intervention de la concurrence. La négociation est alors la meilleure solution.

Autres erreurs de stratégie: se lancer dans un secteur d'activité sans maîtriser le métier de base, mal étudier le circuit de distribution, oublier de définir une stratégie à moyen terme, attendre les aides pour démarrer son activité, se laisser absorber par sa tache quotidienne, etc…

A-2 Les erreurs de gestion et de financement

- Investir trop et trop tôt : il ne faut pas commettre l'imprudence d'investir avant d'avoir trouvé le premier client.

- Mal maîtriser le financement du cycle d’exploitation : cette cause de difficulté n’est pas négligeable, elle se traduit par l’insuffisance du fonds de roulement par rapport au besoin en fonds de roulement et par des coûts de financement du cycle d’exploitation incompatibles avec le niveau de rentabilité.

- Mal répartir la valeur ajoutée : à ce sujet, deux types de dérapages sont courants. D’une part, au profit de la rémunération du travail et au détriment de la capacité d’autofinancement (il faut donc être vigilant quant à l’évolution du poste frais de personnel dans le compte de résultats) ; d’autre part, la répartition de l’excédent brut d’exploitation glisse vers un alourdissement des frais financiers et une diminution de l’épargne brute, pour les entreprises dont la politique de financement s’avère trop coûteuse ;

- Négliger le besoin en fonds de roulement : une trésorerie insuffisante peut contrecarrer le développement d'une société.

- Financer ses investissements avec des crédits à court terme au lieu de négocier des prêts à moyen ou long terme (sous-capitalisation).

- Oublier de se renseigner sur un nouveau client : pourtant, c'est la plus élémentaire des méfiances.

- S'aventurer dans une guerre des prix : il ne faut pas oublier que le prix de vente doit permettre de couvrir les charges de production et de dégager une marge. Face à la méconnaissance du coût de revient, les jeunes entreprises s'alignent sur les prix des concurrents à défaut de la mise en place d'une comptabilité analytique.

- Négliger la formation en gestion : il est nécessaire d'améliorer ses connaissances dans ce domaine. Là, le recours à une aide externe est nécessaire.

Autres erreurs de gestion et de financement : acheter certains matériels en puisant dans la trésorerie au lieu de recourir à des prêts de court terme ou au crédit-bail, surestimer sa rentabilité dans le prévisionnel (les imprévus), se laisser emporter par la demande, ne pas se munir de bons outils de gestion (contrôle de gestion…), négliger les petites économies, vouloir autofinancer l'intégralité de son développement, etc.

B- Les erreurs commerciales, de communication, et de management B-1 Les erreurs dans le commercial et la communication :

- Négliger publicité et promotion : ces techniques permettent de développer la vente du produit ou service ;

- Rester passif face au changement des besoins de la clientèle et continuer à fabriquer ou à commercialiser un produit obsolète ou arrivé en phase de déclin ;

- Lancer un bon produit sur un mauvais marché : une étude de marché trop rapide peut induire en erreur le nouvel entrepreneur, en particulier si le produit est innovant et qu’il crée son propre marché (innovation de rupture) ;

- Mauvais choix des outils de communication : les bons outils de communication permettent de toucher la clientèle ciblée ;

- "Offrir " son produit aux concurrents : les créateurs espèrent souvent compenser leur manque de moyens par la communication. Si le réflexe est bon, il faut attendre d'avoir les moyens de faire face à la concurrence avant de se lancer ;

Autres erreurs commerciales ou de communication: négliger les études préalables, les prospections commerciales et les enquêtes auprès des consommateurs, sous-estimer les délais de commercialisation, ne pas déléguer ou sous traiter la prospection commerciale…

B-2 Les erreurs de management :

- Ne pas préparer l'intégration des nouveaux collaborateurs : passer du statut de porteur de projet isolé à celui de patron animateur d'une équipe de salariés n'est pas toujours facile. Certains créateurs d'entreprise ne parviennent jamais à effectuer cette mutation, beaucoup commettent des erreurs et s'en sortent plus ou moins bien.

- Négliger les étapes avant l'embauche définitive : autre erreur, le recrutement précipité. - Surdimensionner ou sous dimensionner son équipe : les meilleures idées, les savoir faire les plus pointus ne sont d'aucune utilité si l'entreprise n'a pas les compétences humaines pour les exploiter afin de se développer.

Autres erreurs de management : embaucher un ami ou une personne de la famille sans se préoccuper de ses compétences (source de conflits), mal choisir ses associés actifs (il faut une bonne entente dans l'équipe), laisser le flou s'installer sur les responsabilités des collaborateurs (définir les compétences respectives de chacun), ne pas consacrer de temps et un budget minimum à la redynamisation de son équipe (la motivation des salariés est essentielle)…

C- Les erreurs juridiques et administratives

- Se tromper de forme juridique : de l'association à but non lucratif à la SA, toutes les structures sont possibles pour abriter les premières années de la vie d'une entreprise. Reste à savoir anticiper ses besoins futurs pour ne pas se compliquer la vie ;

- Mal évaluer les délais de constitution : toute procédure juridique bute sur la complexité des formulaires et la lenteur des procédures. IL faut avoir recours à un expert pour effectuer ses démarches ;

- Méconnaître les règlements de son secteur : il faut connaître la réglementation qui régit le secteur. De plus, la réglementation évolue et les risques encourus peuvent entraver le développement de la société ;

- Négliger de répondre aux normes internationales : si on ne respecte pas ces normes, le fabricant risque de ne pas trouver de débouchés à l'exportation ;

- Refuser de faire appel à un juriste spécialisé pour l'élaboration d'un accord commercial : il faut que le contrat ne comporte pas de vices et qu'il prévoit des clauses permettant de faire face à la plupart des situations ;

Autres erreurs juridiques et administratives : manquer d'ordre et de rigueur dans la tenue des pièces légales (il faut faire attention aux contrôles fiscaux), vouloir jouer sur la confusion des appellations induisant le consommateur en erreur (attention à la direction des fraudes), laisser passer les délais légaux, etc.