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Introduction :

Cet avant dernier chapitre traitera du troisième concept clé de notre thème de recherche qui est le « redressement ».

Dès l’instant où la décision de sauvetage est prise –parce que les conditions de viabilité économiques de l’exploitation sont démontrées- le véritable défi qui interpelle le dirigeant consiste à déployer un programme d’actions cohérent et à l’articuler harmonieusement dans le temps.

Ce chapitre a pour objectif de répondre aux questions suivantes :

 Sachant qu’il n’existe pas de plan de redressement unique, applicable à toutes les situations de crises, quelles sont les éléments communs aux différents plans de sauvetages ?

 Quelles sont les étapes à suivre dans le cadre du redressement afin de soustraire l’entreprise aux difficultés qui handicapent sans relâche son essor ?

Section 1 : Les orientations stratégiques et opérationnelles du redressement

1-1 Les stratégies types de redressement

Le choix d’une stratégie est important, il définit la ligne directe du redressement et la cohérence des actions à mener à bien. Sa formulation devra d’ailleurs figurer dans le plan de redressement, accompagnée d’éléments chiffrés.

Nous voulons en cela montrer combien les stratégies de redressement sont d’une nature particulière inspirée par l’urgence et par l’obligation de réussir. Car il ne s’agit pas ici, comme ce sera le cas dans l’entreprise en développement, d’orienter, de positionner, d’aller de l’avant, mais bien d’assurer le redressement et surtout la survie de l’entreprise avant d’envisager sa pérennité.

Nous proposons ci-après quelques stratégies types correspondant à la logique de base de conception d’une stratégie de redressement. Au-delà, toutes les variantes sont possibles.

1-1-1 Le repli

1-1-1-1 Caractéristiques :

La stratégie de repli est « ce que les marins appelleraient la mise à la cape de l’entreprise »170. En effet, il s’agit d’une stratégie de survie minimaliste, envisageable lorsque l’environnement connaît de fortes perturbations.

Elle positionne l’entreprise sur un secteur bien délimité pour lequel elle possède un savoir-faire distinctif. Le repli est une stratégie d’autoprotection temporaire car la notion de développement en est largement absente.

Cette logique de minimisation des risques est bien adaptée aux PME dont les ressources stratégiques sont anéanties, suite à des retournements de conjoncture (manque de ressources financières, pas de réseau commercial indépendant, surcharge du dirigeant, etc.).

1-1-1-2 Modalités de mise en oeuvre :

La stratégie de repli s’accompagne d’une politique de réduction des coûts devant permettre à l’entreprise de redresser rapidement sa rentabilité.

- allègement du bilan (réduction d’actif) ;

- réduction des effectifs et des dépenses en général ;

- concentration des efforts non pas sur la prospection commerciale mais sur la recherche des gains de productivité ;

- choix limité de segments stratégiques se traduisant par des désinvestissements des activités non rentables ;

- etc.

1-1-2 Le renflouement

1-1-2-1 Caractéristiques :

Lorsque les difficultés sont plus liées à des insuffisances de financement qu’à des désajustements de l’exploitation, le redressement est essentiellement une restructuration financière comportant des apports en capital.

Le renflouement s’adapte particulièrement aux entreprises dont les produits ont eu une phase de croissance trop longue ou aux jeunes sociétés qui ont dû faire face à des investissements en recherche trop élevés par rapport à leur capacité d’autofinancement. L’échec est ainsi dû à la conjoncture, à une mauvaise préparation du lancement d’un produit ou à une question de réglementation.

1-1-2-2 Modalités de mise en oeuvre :

C’est essentiellement la modalité financière qui est concernée dans cette stratégie de renflouement.

- élargissement de la participation au capital et restructuration du fonds de roulement ; - recours à des apports en capital risque ou à des contrats de crédit-bail pour refinancer

les immobilisations ;

- etc.

1-1-3 Le redéploiement

1-1-3-1 Caractéristiques :

Cette stratégie s’adapte au cas de l’entreprise dont les difficultés sont dues à l’obsolescence de ses activités et de sa gamme de produits ainsi qu’aux entreprises diversifiées de taille relativement importante.

Le redéploiement consistera en un repositionnement généralisé des produits et marchés.

1-1-3-2 Modalités de mise en oeuvre :

Les éléments stratégiques clés sont souvent faciles à imaginer, assez souvent difficiles à mettre en pratique.

- analyse fine du portefeuille de métiers et des facteurs-clés de succès ; - stratégie d’image et accroissement de la qualité ;

- la rentabilité plutôt que la croissance ;

- désinvestissements stratégiques et concentration des efforts sur ce que l’entreprise sait le mieux faire ;

- etc.

1-1-4 La re-segmentation

1-1-4-1 Caractéristiques :

La resegmentation rentre plus ou moins dans la catégorie des stratégies de spécialisation. Cette logique stratégique s’apparente à l’idée de « niche »171 dans laquelle l’entreprise recherche un espace protégé lui permettant de réussir sur la base de compétences très fortement concentrées.

De nombreuses entreprises ont cru bien faire en diversifiant leurs activités. Dans certains cas, la gestion d’un portefeuille d’activités trop diversifié les a conduites à la

dispersion de leurs efforts. Ce sont des entreprises qui ne savent plus où est leur vocation ni leur capacité à se rentabiliser.

La resegmentation est alors le moyen de restreindre le champ stratégique de l’entreprise pour renforcer ses compétences sur des créneaux spécifiques et pour verrouiller sa position concurrentielle sur ces créneaux. Selon Christian Marmuse, «la resegmentation est un retour aux sources pour les entreprises titulaires de fortes compétences. Elle est une réflexion stratégique approfondie sur les savoir-faire de l’entreprise désincarnée »172

1-1-4-2 Modalités de mise en oeuvre :

Cette stratégie peut concerner aussi bien les entreprises de taille importante que les PME. Elle nécessite presque toujours des désinvestissements.

- retour sur le métier de base et recherche de nouvelles bases de compétences ;

- jeu sur l’effet de l’expérience et rentabilisation prioritaire des activités « vache à lait » ;

- analyse des facteurs de compétitivité et identification d’une niche à l’intérieur d’un secteur ;

- etc.

1-1-5 Le partenariat

1-1-5-1 Caractéristiques :

Le constat de la carence de l’entreprise dans un domaine majeur, comme celui de la commercialisation ou de la production, peut conduire à la recherche volontaire d’une association avec un partenaire possédant les compétences complémentaires173.

Cette stratégie constitue la force de certaines PME, capables de mettre au point rapidement de nouveaux produits ou de nouvelles technologies. Car le partenariat est aussi financier ou technologique pour permettre une meilleure répartition des risques et l’innovation comporte des risques de défaillances importants, en particulier si les efforts de recherche ne sont pas continus ou si la croissance est mal maîtrisée.

172 C. Marmuse, op-cite, p. 141.

173 C’est ce qu’ont compris, par exemple, les nombreux fabricants de prêt-à-porter qui ont délégué à la grande distribution le soin de commercialiser leurs produits.

Redresser une entreprise à vocation innovante suppose un juste compromis entre les dépenses de recherche et les moyens financiers disponibles. Le sauvetage exigera généralement une alliance ou un accord de partenariat avec une entreprise plus grande ou encore l’intervention financière d’une société de capital-risque.

1-1-5-2 Modalités de mise en oeuvre :

Le partenariat est un contrat d’association des forces respectives de chacun. L’indépendance de chacun peut être conservée, mais l’association est susceptible de régler très vite les problèmes les plus graves d’une société en difficulté :

- recherche de complémentarités inter-sectorielles et établissement d’un contrat de partenariat ;

- analyse des synergies ; - contrôle qualité réciproque ; - analyse du risque de dépendance ; - etc.

1-1-6 La reconstruction

1-1-6-1 Caractéristiques :

Les stratégies de reconstruction impliquent une réorientation radicale de l’entreprise prisonnière d’un métier ou de technologies dépassées. Elles exigent l’existence d’une compétence latente permettant la reconversion de l’entreprise.

La reconstruction de l’entreprise est ainsi basée sur la volonté de survivre, y compris au prix d’un changement très important de la vocation ou du métier de l’entreprise.

La reconstruction peut être également la résultante du transfert d’activités existantes dans une société vers une autre société qui élargit ainsi son champ d’action ou bien de la prise en mains d’une entreprise par des salariés.

1-1-6-2 Modalités de mise en oeuvre :

- existences d’atouts mal valorisés antérieurement ; - outil de production facile à reconvertir ;

- personnel qualifié et à compétences multiples ; - action rapide et radicale;

- etc.

1-1-7 La cession

1-1-7-1 Caractéristiques :

La cession de tout ou partie de l’entreprise est l’une des modalités de redressement. Elle constitue une stratégie à part entière dans le cas où, soit l’importance du passif accumulé, soit l’impossibilité de reconstituer les capitaux propres, soit encore l’impossibilité de trouver les ressources de financement nécessaires, peuvent impliquer une disparition de l’entreprise.

1-1-7-2 Modalités de mise en oeuvre : - existence d’un repreneur potentiel ; - évaluation de l’entreprise ;

- rédaction de la proposition ; - financement de la reprise ; Maintien de l’emploi ; -etc.

Les stratégies exposées ci-dessus englobent bon nombre de cas de figure mais elles ne prétendent pas s’appliquer à leur totalité. Le redresseur peut cependant s’en inspirer pour établir le fil directeur du processus de redressement qu’il mettra en place.