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La responsabilité des dirigeants est constamment présente à l’esprit lorsque l’entreprise (récemment créée ou ancienne) est en difficulté.

Toutefois, il est clair que la capacité des dirigeants à surmonter le choc du constat d’échec est une donnée essentielle dans la remise en marche de l’entreprise, même si leur responsabilité est toujours engagée.

Or, certaines pathologies, caractéristiques de la réaction des managers face à la dégradation de la situation de l’entreprise, ont été constatées.

Weitzel et Jonsson (1989)22 identifient plusieurs raisons à l’inaction des dirigeants dans des situations où des signes de détérioration de la performance sont détectés : l’attractivité de la politique du « laisser faire » ; l’aspect coûteux et perturbateur du changement ; la mauvaise interprétation de l’information disponible ; la croyance que longévité et immortalité vont de pair ; la tendance des dirigeants à être engagés dans le cours présent de l’action et à justifier des politiques présentes par des succès passés et le manque de savoir-faire pour affronter des conditions nouvelles et changeantes.

De plus, certaines actions engagées pour faire face au déclin peuvent être inadéquates et précipiter l’entreprise vers sa mort.

Mais, Jean Brillman23, expert directeur international à la CEGOS, a été le premier en France à mettre en évidence deux caractéristiques du comportement des dirigeants lors de situations difficiles. Ils réagissent trop tard et trop lentement lorsque la crise les touche, ce qui diminue les chances d’un redressement et le rendent plus coûteux lorsqu’il est envisageable. 1-4-1 Les dirigeants réagissent trop tard :

Plusieurs phénomènes se conjuguent pour expliquer cet état de fait :

 L’espoir et attente d’une amélioration de la conjoncture économique ;

 La confusion entre crise structurelle et ralentissement conjoncturel (marché difficile à cerner) ;

 Les divisions bénéficiaires subventionnent celles en perte ;

 L’usage d’indicateurs en retard ;

 L’absence d’indicateurs fiables et en avance ;

 L’insuffisance du niveau d’exigence (profits…)

 La non-correction des comptes de l’inflation ;

 Le refus de la réalité donc, budgets et prévisions sont trop optimistes ;

 La diminution de la rigueur comptable et la réduction des pertes par artifices périlleux ;

 La crainte de créer un contexte négatif (vis-à-vis des clients, banquiers, fournisseurs et vis-à-vis du personnel pouvant entraîner découragement et démotivation) ;

22 C. Poroli, op-cite, p. 8.

23 J. Brilman, « Gestion de crise et redressement d’entreprise », Edition hommes et techniques, Paris, 1985, pages 16-21.

 Le recours aux solutions de facilité (baisse des prix, compression d’effectif, subventions…) ;

 Un déclin plus rapide que prévu ;

 L’incapacité de la direction pour gérer la crise ;

Tout ceci peut paraître banal et évident mais malheureusement explique le pourquoi de cette réaction si tardive des entreprises en situation délicate.

1-4-2 Les dirigeants réagissent trop lentement :

Ceci est la deuxième particularité qui paraît rendre inintelligents ou incapables de prendre des décisions vitales des dirigeants qui, dans le passé, ont fait preuve de force de caractère ou qui ont su prouver leur savoir-faire en créant leur entreprise et en la développant. Il est utile d’énumérer les principales raisons qui font perdre du temps ou les contraintes qui imposent des délais longs de mise en place des solutions :

 Les pertes de temps en innombrables études et réunions ;

 Le manque d’idées de solution ;

 Le désaccord sur les causes des difficultés et sur les remèdes à apporter, le rejet des responsabilités et l’apparition de conflits entre les principaux dirigeants et cadres ;

 Le temps et l’énergie consacrés uniquement aux solutions factices ou de simple survie provisoire ;

 Les longues hésitations à prendre des décisions difficiles mais vitales (élagage de gamme, arrêt ou revente de certaines activités, mesures de licenciement, etc.). Souvent, le coût de ces décisions pousse les dirigeants à ne pas les prendre car la trésorerie de leur entreprise est déjà exsangue.

 Le délai légal de mise en œuvre des mesures touchant le personnel ;

 Une trop grande centralisation qui engendre d’importants délais de décision et un manque de temps du principal responsable qui ne peut tout faire ;

 Les longs délais de diversification ou reconversion ;

Or, le temps est compté et chaque mois de retard signifie des pertes supplémentaires. D’où la nécessité d’être pragmatique et d’agir vite car de la rapidité de la réaction dépendent les chances de redressement et de survie de l’entreprise.

Section 2 : Le cadre juridique de l’entreprise en difficulté

2-1 Généralités

Dans l’histoire du droit de la République Algérienne, une loi du 31 décembre 1962 avait reconduit, dans tous les domaines, la législation en vigueur à l’époque, sauf dispositions contraires à la souveraineté nationale ou d’inspiration colonialiste ou discriminatoire.

Cette loi de 1962 avait donc pour effet de reconduire la législation française en vigueur au 31 décembre 1962, qui était ancienne puisqu’elle s’inspirait du code de commerce de 1807 et évitant ainsi un vide juridique.

Par conséquent, le code de commerce lors de sa promulgation en 1975, a repris abondamment les textes français sur le règlement judiciaire et la faillite, régissant l’entreprise en difficulté.

Il faut tout de même souligner que depuis, la législation française en matière de faillite et de règlement judiciaire a énormément évolué.

D’ailleurs, et depuis les années cinquantes, une nouvelle conception des procédures est née, « la faillite n’est plus une voie collective d’exécution des biens du débiteur défaillant, elle doit assurer le traitement des entreprises en difficultés »24. Le changement des mentalités à l’égard des entreprises en difficulté et l’accent mis sur la nécessité d’une prévention ont amené à la mise en place d’un droit de la prévention des difficultés des entreprises. D’ailleurs même « règlement » judiciaire a pris le nom de « redressement judiciaire, et la « faillite » celui de « liquidation judiciaire » depuis la loi n° 85-98 du 25 janvier 198525.

Hélas, ce n’est pas vraiment le cas de la législation algérienne où les maigres réformes mises en chantier et l’absence d’accompagnement de ces réformes ne plaident pas en faveur d’un changement.

Le code de commerce algérien consacre 173 articles à la faillite et au règlement judiciaire, regroupés dans le livre III. Il fixe les conditions qui permettent d’accompagner une

24 M. Jeantin, P. Le Cannu, « Droit commercial, instruments de paiement et de crédit, entreprises en difficulté », Dalloz. 6ème édition, Paris, 2003.

personne physique ou morale, commerçante ou non commerçante, dans l’une de ces deux procédures.