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Erosion de l'Himalaya et transport sédimentaire dans le système Gange-Brahmapoutre

3.5 Bilans d'érosion

3.5.1 Erosion physique

     Source (3.4)

On obtient ainsi une relation qui relie le rapport élémentaire X/Y moyen des roches érodées aux flux solides et dissous des éléments X et Y. La réalisation d'un bilan de matière est donc directement subordonnée à la connaissance (1) des flux particulaires et dissous, (2) de la composition moyenne des sédiments et de la phase dissoute et (3) de la composition moyenne des roches érodées.

3.5.1 Erosion physique

Pour des éléments (X, Y) insolubles, c'est-à-dire peu ou pas affectés par la dissolution chimique, on peut utiliser la relation (3.4) afin de réaliser un bilan d'érosion physique à l'échelle du bassin. Cette approche a été appliquée au système Gange-Brahmapoutre par Galy et France-Lanord (2001) à partir d'un échantillonnage succinct. Nous avons repris cette

dépôt dans la plaine ne sont mesurables. En regroupant ces deux flux sous le terme de "flux inconnu" (Inc) on peut cependant l'exprimer à partir de la relation (3.4) sous la forme :

Inc = D

[ ]

X D Y

[ ]

D X Y       Source  +SL  X

[ ]

SL  Y

[ ]

SL  X Y       Source  Y

[ ]

Inc X Y       Source  X

[ ]

Inc (3.5) où : X

[ ]

Inc et Y

[ ]

Inc sont les moyennes des compositions élémentaires de la charge de fond et des particules déposées dans la plaine,

et X

[ ]

SL et Y

[ ]

SL sont les compositions élémentaires moyennes des matières en suspension. Dans cette équation, la concentration en éléments dissous, le flux de la rivière et le flux de particules en suspension sont connus à priori (cf. § 1.5 et § 3.5.3.1). Connaissant la composition moyenne des matières en suspension, la moyenne des compositions élémentaires de la charge de fond et des particules déposées dans la plaine et la composition moyenne des roches érodées, on peut donc calculer le "flux inconnu". Galy et France-Lanord (2001) avaient estimé la composition moyenne des roches érodées à partir d'un set de plus de 400 analyses géochimiques de roches Himalayennes provenant des principales unités lithologiques (HHC, LH, TSS et TPB). Ils ont estimé la contribution respective des roches de ces unités en comparant la composition isotopique du Sr et du Nd des sédiments et des roches sources. La composition moyenne des roches érodées à donc été calculée en réalisant une moyenne pondérée par la contribution relative de chaque unité. La composition du "flux inconnu" (charge de fond + dépôt dans la plaine) à été estimée à partir de la composition des échantillons de sédiments de fond, considérant que les sédiments éventuellement déposés au cours du transport doivent correspondre aux phases les plus grossières des sédiments transportés, c'est à dire à la charge de fond. Cette hypothèse est renforcée par la concordance de la composition moyenne de sédiments des Siwaliks et des sédiments de fond échantillonnés. A partir d'échantillons de matières en suspension de surface, Galy et France-Lanord (2001) avaient estimé la composition des matières en suspension et ont finalement calculé le "flux inconnu", c'est à dire la somme du flux de charge de fond et de dépôt dans la plaine, en appliquant la relation (3.5) aux principaux éléments insolubles, Al et Si. En Himalaya, le silicium peut être considéré comme un élément insoluble puisque son flux dissous est deux ordres de grandeur inférieur à son flux particulaire (Galy and France-Lanord,

1999; France-Lanord et al., 2003). Les résultats, bien qu'assortis de larges incertitudes, montrent que, pour le Gange comme pour le Brahmapoutre, ce flux non mesurable est à peu près équivalent au flux mesuré de particules en suspension, soit en moyenne 500 à 600 106 tonnes/an. La prise en compte de ce flux dans le calcul du flux total d'érosion est donc capitale et a conduit les auteurs à réviser à la hausse les taux d'érosion physique dans les bassins du Gange et du Brahmapoutre.

Dans ce bilan de matière, les flux dissous et particulaires ainsi que la composition de la phase dissoute sont relativement bien contraints (cf. § 1.5 et § 3.5.2.1). En revanche, l'analyse différentielle de la relation (3.5) indique clairement que la justesse du calcul de Inc

est fortement assujettie à la validité des compositions utilisées (roche source, charge de fond et matières en suspension). Nous avons montré (cf. § 3.4.3) que la composition des matières en suspension moyennes est notablement différente de la composition des matières en suspension de surface. L'estimation de la composition des matières en suspension à partir des seules matières en suspension de surface conduit donc à un biais important. D'un point de vue qualitatif, les matières en suspension moyennes sont plus proches de la composition moyenne des roches érodées que les matières en suspension de surface. Ainsi, les flux de charge de fond et de dépôt dans la plaine calculés à partir de ces dernières doivent-ils être systématiquement surestimés.

Table 3.4 : Composition chimique et flux utilisés pour résoudre le bilan de masse (3.5), pour le Gange et le Brahmapoutre. Le "flux inconnu" (inc) représentant la somme du flux de charge de fond et du dépôt de plaine a été calculé à partir de la composition moyenne des matières en suspension (MES) échantillonnés en 2004 et 2005 (cf. § 3.4.3). Une estimation a été faite en considérant que le flux inconnu à la même composition que les sédiments de fond (BL), une autre en considérant la composition moyenne d'échantillons des Siwaliks (Siw).

A partir des compositions de matières en suspension moyennes calculées pour le Gange et le Brahmapoutre sur la base des échantillonnages de 2004 et 2005, nous proposons une nouvelle estimation des flux de charge de fond et de dépôt dans la plaine. Les paramètres utilisés dans l'équation (3.5) sont résumés dans la table 3.4. La composition moyenne des roches érodées est celle calculée par Galy et France-Lanord (2001). La composition de la charge de fond et des particules déposées dans la plaine a été estimée à partir de : (1) la composition des charges de fond échantillonnées en 2004 et 2005 et, (2) la composition moyenne d'échantillons prélevés dans les Siwaliks. Les flux de charge de fond et de dépôt dans la plaine (Inc) calculés à partir des échantillonnages 2004 et 2005 pour le Gange et le Brahmapoutre sont résumés dans la table 3.4. Comme attendu, ils sont systématiquement plus faibles que ceux calculés à partir des matières en suspension de surface. Néanmoins, ils correspondent à la limite basse proposée par Galy et France-Lanord (2001). Pour le Gange comme pour le Brahmapoutre, nos estimations montrent que la somme du flux de charge de fond et du flux de dépôt dans la plaine doit représenter de 30 à 50 % du flux de matières en suspension et contribuent donc notablement au budget total d'érosion de la chaîne Himalayenne.