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PHENOMENE ENTREPRENEURIAL

3. La création de l’opportunité

1.2. Les enjeux de l’entrepreneuriat

Les enjeux liés à l’entrepreneuriat s’expriment généralement en termes d’attentes ou d’impacts possibles de l’entrepreneuriat sur l’individu et sur la société.

1.2.1. Les enjeux pour l’individu

Le mouvement des créations d'entreprise redonne à la personne de l'entrepreneur un rôle primordial dans la vie du XXIème siècle.

Fleischmann (2006), passe en revue, à travers les âges et les continents, depuis la démocratie athénienne jusqu’à la Grameen Bank au Bangladesh, le rôle émancipateur de l’entrepreneuriat pour les femmes, les esclaves, les citoyens en général, et tente de démontrer comment l’aventure entrepreneuriale crée de la valeur, y compris sociale, pour l’individu et son environnement, libérant le potentiel créatif et jouant un rôle moteur dans l’intégration sociale et le développement personnel. L’entrepreneuriat serait ainsi une forme d’émancipation.

49 Brasseur (2010), quant à lui évoque l'entrepreneuriat, comme un processus de résilience16, une faculté de rebondir en surmontant les chocs de la vie. Un adulte résilient a besoin de retrouver la confiance en lui et dans ses ressources, et l’entrepreneuriat peut permettre de mobiliser des mécanismes tels que l’imagination, la créativité, l’investissement affectif, l’engagement, qui lui redonneront des atouts pour l’avenir.

Dans leur étude, De Clercq et Honig (2011) se sont intéressés aux personnes désavantagées, qui ont des difficultés à s’insérer dans le monde du travail en raison de caractéristiques intrinsèques ou exogènes. Ils ont montré dans quelle mesure l’entrepreneuriat est un facteur d’intégration et d’ascension sociale, dans la mesure où les multiples spécificités de ces publics sont correctement prises en compte.

1.2.2. Les enjeux pour la société

Le bien-être d'un pays dépend de l’excellence de la qualité de sa population active et du dynamisme de ses entrepreneurs (Say, 1972).

Chez Guyot et Van Rompaey (2002), on note un nombre important de travaux consacrés à l’examen du rôle de l’entrepreneur dans le développement de l’économie portant sur l’effet de la création d’entreprises et de l’entrepreneuriat sur l’emploi.

Ils citent à titre d’exemples des recherches menées par Birch (1979), Lilien (1982), Birley (1986, 1987), Kirchoff et Phillips (1988), Libert (1999), Begin (1991) et l’Agence pour la Création d’Entreprises (1998), Henley (1999). Relativement au rôle spécifique des PME, on peut évoquer notamment les recherches de Baroin (1984), Greffe (1984), etc.

Selon le Global Entrepreneurship Monitor (Volery et Servais, 2001) il existe une forte corrélation entre la croissance de l'activité économique et le taux d'activité entrepreneuriale.

Baumol (1990) cité par Bonnet (2012), montre que si le nombre total d’entrepreneurs (l’intensité entrepreneuriale) est variable en fonction des sociétés, leur contribution à la croissance l’est encore plus.

Toujours selon Bonnet (2012) le modèle économique actuel donne à l’entrepreneuriat une importance cruciale dans le développement économique. Ceci est d'autant plus vrai que « l’identification d’un profit de marché par un entrepreneur crée des opportunités pour les

16La résilience, est un concept issu des travaux de la psychologue américaine Emmy Werner dans les années 1950, sur des enfants en Haïti. Ce concept est largement développé en France par le psychiatre Boris Cyrulnik, (1993, 1997, 1999, 2006). Ce concept se retrouve de plus en plus dans les travaux de recherche en entrepreneuriat.

50 autres », selon, Holcombe (2003). C’est pour cette raison que, plus il y a d’entrepreneurs, plus la société partage de nouvelles informations qui créent de nouvelles opportunités de création d’entreprises.

Stel Van et al. (2005) montrent cependant que l’impact de l’activité entrepreneuriale sur la croissance économique est plus important dans les pays développés que dans les pays en développement.

Pour le cas spécifique de l’Afrique, le glissement de la littérature vers la restitution de l’approche de développement privilégiant l’entrepreneuriat se dessine dès les années 1961 par les écrits de Hanson17 cités par Justin (2009).

Dans les années 1998, Metais parlait déjà de « l’Afrique des entrepreneurs » alors que Péklé (2006), soutiendra que l’ère est maintenant à la perspective microéconomique du développement accordant une reconnaissance de plus en plus grande au rôle de l’initiative privée dans la dynamique économique de l’Afrique.

Pour stimuler l’esprit d’entreprise l’Organisation de Coopération et de Développement Economique (OCDE, 1999) insiste tout particulièrement sur les effets positifs des mesures de déréglementation des secteurs monopolistiques, et souligne que le secteur public doit, pour favoriser la concurrence (améliorer la qualité et baisser les prix de biens et services), faire appel à la sous-traitance et donc à la création des PME/PMI. Ceci permettrait d’effectuer un transfert d’activités du public vers le privé grâce au développement du capital- risque et à une grande flexibilité du marché du travail.

Selon cette logique, les gouvernements sont appelés à alléger les formalités de la création et reprise d’entreprise. Les mesures en faveur de la création sont désormais une composante majeure d’une politique publique qui cherche à favoriser l’emploi, à promouvoir l’innovation et à accélérer le rajeunissement des marchés (Boutillier et Uzunidis, 2002).

17 L’auteur prend comme critère l’équilibre entre le secteur public et le secteur privé d’entreprises, avance trois modèles de développement visant les économies du Sud :

- dans un premier temps, l’Etat agissant comme pionnier dans nombreux domaines, diminue de plus en plus son emprise sur l’économie directe afin que l’entreprise privée devienne capable de prendre elle-même la relève. Il se limite alors à entretenir une infrastructure adéquate et des conditions d’encouragement maximales à l’entrepreneur ;

- le deuxième modèle, à l’inverse du premier, considère l’entreprise privée sous toutes ses formes comme étant inexorablement appelée à être absorbée par le secteur public.

- Le troisième modèle correspond à un système intermédiaire dans lequel les entreprises privées et les entreprises publiques sont définies par l’autorité de la planification nationale en vue d’une coexistence plus ou moins permanente. A chacune est assigné un rôle leur permettant d’apporter une contribution précise au développement économique et au bien-être social.

51 Quant à Shane (2008), elle viendra nuancer cet optimisme autour de l’entrepreneuriat dans The illusion of entrepreneurship. Elle relève, en effet, que 70% des entreprises nouvelles disparaissent en dix ans, que le bilan global d’une création d’entreprise est négatif, le plus souvent, pour l’individu (les emplois paient moins, offrent moins d’avantages et sont plus susceptibles de disparaître que dans une firme établie) et que deux tiers des entreprises pérennes ne créent pas d’emploi les dix premières années de leur existence. Il s’y ajoute que la croissance et la création de valeur restent très concentrées au sein de quelques entreprises particulièrement florissantes. Shane (2008) note : « Nous n’avons aucune preuve que la création d’entreprise génère de la croissance économique, mais plutôt que la croissance économique encourage probablement les individus à créer des entreprises ».

De plus cette « entrepreneurisation » des politiques de développement soulève d’autres problèmes en Afrique, notamment dans le secteur de l’agrobusiness où les terres cultivables sont de plus en plus attribuées à ceux qui ont de gros capitaux qu’aux pauvres.

Suite à cette longue tentative d’élucidation de l’entrepreneuriat, nous pouvons jeter un regard sur le processus entrepreneurial, objet de notre thèse.